Votre rapport est d'autant plus intéressant que différents projets de loi traitent déjà des sujets qu'il aborde. Je souhaite vous soumettre quelques réflexions afin de vérifier que j'en fais une lecture correcte.
D'abord, vous n'embrassez par l'ensemble de l'économie collaborative telle que vous la définissez au début du rapport. Ainsi, vous ne traitez pas – vous n'aviez pas nécessairement à le faire – de la « mouvance du libre », avec les logiciels libres – open source –, ni de l'économie du don, avec les encyclopédies contributives telles que Wikipédia. Les plateformes auxquelles vous vous intéressez ne relèvent pas de l'économie du don : leur perspective n'est pas associative, mais commerciale ; elles font du business. En revanche, elles relèvent probablement de l'économie de la fonctionnalité, dans la mesure où elles permettent le partage de l'usage d'un bien. En effet, elles mettent en relation des particuliers : d'un côté des consommateurs, de l'autre des personnes qui acceptent de mettre à disposition un bien dans le cadre soit d'une location, soit d'un partage de frais. Il peut aussi s'agir de petites prestations de services, par exemple de services de restauration dans le cas de VizEat, même si l'on met aussi l'accent sur le lien social et la rencontre. En l'espèce, il y a en effet un problème de seuil.
Ensuite, certaines situations que vous décrivez dans votre rapport, notamment celles où il y a simplement une mise en relation entre offreurs et demandeurs, relèvent déjà d'un cadre juridique bien balisé. Ainsi que vous l'indiquez à propos de la location d'appartements via Airbnb, le code du tourisme définit clairement la location de meublé de tourisme. Il existe donc déjà un dispositif juridique en la matière, qui peut être ajusté le cas échéant. Ceci de nature à rassurer ceux qui disent que rien n'est encadré et qu'aucune disposition ne permet de prévenir la concurrence déloyale.
Enfin, je ne suis pas favorable à un troisième statut, car je crains qu'il ne s'agisse d'un contrat de travail dégradé. Lorsque la dépendance est telle qu'il existe un lien de subordination, il n'y a aucune raison d'écarter le contrat de travail. Vous le dites indirectement en renonçant à demander la création de ce troisième statut.