Intervention de Christian Peugeot

Réunion du 8 mars 2016 à 16h00
Mission d'information sur l'offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale

Christian Peugeot, président du Comité des constructeurs français d'automobiles, CCFA :

S'agissant de Volkswagen, c'est peu dire que nous avons été surpris. Cette affaire nous a fait l'effet d'un tsunami. Les conséquences de ce scandale touchent tous les constructeurs, particulièrement en France, où les commentateurs ont eu tendance à transformer le « Volskwagengate » en « Dieselgate ». Volkswagen, avec ce logiciel frauduleux qui aurait aussi bien pu être appliqué à d'autres véhicules que des véhicules diesel, a créé un climat de suspicion générale. Pour autant, nous n'avons pas comme Fiat voulu profiter de ce scandale pour lancer des opérations promotionnelles. Cela ne nous a pas semblé correct, compte tenu de la gravité des enjeux.

L'affaiblissement d'un concurrent, particulièrement fort, se solde généralement par une amélioration de sa propre performance concurrentielle potentielle. Dans la réalité, cela nous a beaucoup gênés. Nous sommes obligés de fournir des explications et de répéter que nous ne sommes pas dans un schéma de tricherie.

S'agissant des normes, les industriels, de manière générale, préféreraient que le choix des règles permette une visibilité de long terme afin de mieux développer leurs technologies, au lieu d'être soumis aux fluctuations des gouvernements successifs. Le fait est que les pouvoirs publics prennent des mesures qui, pour des raisons variées, poussent les constructeurs à aller dans un sens ou dans un autre. C'est le cas de la fiscalité favorable au diesel, qui a eu des effets sur la durée. Les groupes industriels français ont ainsi développé des technologies de construction de moteurs diesel particulièrement performantes.

La neutralité de la fiscalité ne nous choque pas en elle-même. Nous voulons simplement des règles qui permettent d'anticiper et de laisser leur place aux meilleures technologies. Ce n'est pas une seule technologie qui va permettre de résoudre l'ensemble des problèmes mais probablement un panel de technologies variées, ne serait-ce que parce qu'il y a des clientèles différentes avec des besoins différents, comme vous l'avez souligné, monsieur Baupin.

Vous m'avez interrogé, madame la rapporteure, sur le délai souhaitable. Un délai de cinq ans s'approcherait davantage du temps nécessaire à la mise au point d'une nouvelle génération de voitures – sachant qu'il faut plus de temps encore pour l'élaboration de nouveaux moteurs, même si certaines adaptations de groupes motopropulseurs sont plus courtes. La construction automobile est une industrie lourde. Nous ne pouvons pas prendre de décisions du jour pour le lendemain, d'autant que l'exigence de qualité pour les clients est tellement haute que cela nécessite de valider un ensemble de processus.

Dans le principe, une certaine neutralité ne nous pas pose pas problème. Dans les faits, elle n'existe pas encore. Si la fiscalité doit évoluer dans ce sens, il faut nous donner du temps. Du reste, que les pouvoirs publics n'encouragent pas la neutralité dans tous les domaines nous paraît légitime. C'est le cas par exemple pour les véhicules électriques, dont le développement est encore marginal. Il faut essayer d'être rationnel et faire preuve de bon sens.

En dehors de la fiscalité, il faut prendre en compte le traitement du diesel par les médias qui ont beaucoup insisté sur ses méfaits. La chute des ventes de véhicules diesel n'est pas tant liée à la convergence fiscale qu'à cette perte de confiance que l'affaire Volkswagen n'a fait qu'amplifier.

Sur le nombre d'emplois liés à la filière diesel, je ne saurais vous donner une réponse précise, madame la rapporteure. Les technologies sont très imbriquées, comme vous avez pu le constater lors de votre visite de l'usine PSA à Trémery. Une chaîne de moteurs diesel est difficilement transformable en chaîne de moteurs à essence.

Vous avez évoqué, monsieur Bonnot, le marché du diesel à l'échelle mondiale. L'Europe constitue aujourd'hui le principal marché, sachant qu'il était assez stable, hors la France, malgré l'affaire Volkswagen. Aux États-Unis, le marché du diesel est minoritaire, et l'offensive des Allemands pour le développer risque sans doute de tourner court. L'engouement du Japon a pu surprendre puisqu'il n'y avait pratiquement de véhicules diesel dans ce pays. Les autorités japonaises ont considéré que, compte tenu de ses faibles émissions de CO2, le bilan global du diesel était intéressant, et ont pris des mesures fiscales pour l'encourager. Mazda a lancé un véhicule ne fonctionnant qu'au diesel sur son marché – et seulement à l'essence aux États-Unis. J'estime que le diesel est une technologie qu'il faut essayer de pousser au meilleur niveau, en étant aussi irréprochable que possible.

Sur les particules, nous avons déjà eu plusieurs débats et nous sommes prêts à participer à d'autres, comme M. Tavares a eu l'occasion de le dire. Aujourd'hui, la maîtrise des particules se fait par filtration mécanique. Vous me direz sans doute, monsieur Baupin, que cette technologie ne parvient pas à les éliminer toutes. Mais vous savez comme moi que l'endroit de Paris où il y a le plus de particules, c'est le métro : leur niveau y est vingt fois supérieur à la voie publique, du fait notamment des frottements dus au freinage.

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