Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du 17 mars 2016 à 21h30
Biodiversité — Article 68

Barbara Pompili, secrétaire d’état chargée de la biodiversité :

Je redis pour mémoire que nous n’examinons pas un projet de loi sur la chasse. De plus, les modes de chasse relèvent clairement du domaine réglementaire et non du domaine législatif.

L’amendement vise à rétablir l’article voté par l’Assemblée nationale en première lecture pour interdire un mode de chasse destiné à prélever des grives et merles noirs vivants à l’aide de branches enduites de glu. Cette chasse au gluau est un mode de chasse traditionnel actuellement autorisé dans cinq départements du sud-est de la France. Ce mode de chasse est strictement encadré par des arrêtés ministériels et préfectoraux. Les oiseaux capturés doivent être immédiatement nettoyés, le chasseur devant impérativement être présent pendant la période de chasse, de l’aube à onze heures du matin.

Les oiseaux qui n’appartiennent pas aux espèces cibles de cette chasse doivent être immédiatement nettoyés puis relâchés.

Il doit être tenu un carnet de prélèvement qui doit être retourné à la fin de la saison de chasse.

Autoriser ce mode de chasse est une dérogation strictement encadrée à la directive européenne sur la protection des oiseaux sauvages. Il faut notamment que ce mode de chasse porte sur de petites quantités, soit strictement sélectif et qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante.

À ce stade, je suis loin d’être convaincue que ces conditions soient toutes remplies. Je crains que nous ouvrions la porte à un nouveau contentieux européen. Or je souhaite que la France soit exemplaire dans l’application de la directive européenne. Les prélèvements me semblent élevés : 30 000 oiseaux par an pour le seul département du Vaucluse, 78 000 au total.

N’oublions pas que ces oiseaux sont capturés à la glu pour servir d’appelants vivants à la chasse à tir, comme cela nous a été rappelé par M. Aubert en commission. Je ne suis pas certaine que les oiseaux autres que les grives et les merles, même nettoyés, soient en bon état lorsqu’ils sont relâchés. Pour moi, cela remet en cause le principe de sélectivité.

De plus, je dispose de plusieurs informations m’indiquant que les contrôles sont rares et que, souvent, les conditions posées ne sont pas respectées. Par exemple, tous les carnets de prélèvement ne sont pas retournés – je tiens les chiffres à votre disposition.

Cette autorisation justifie aussi la vente de glu. La semaine dernière, un de mes collaborateurs en a acheté sur internet et elle a été expédiée en région parisienne sans aucune question sur l’utilisation qui en serait faite.

Plusieurs cas existent également d’utilisation de la glu pour la chasse d’oiseaux protégés dans de nombreux endroits en France.

Plus grave, les grives attrapées font l’objet d’un commerce – Mme Gaillard a raison. En l’occurrence, le vendeur de cette glu, déjà condamné, a fait l’objet d’une nouvelle condamnation par le tribunal de grande instance de Draguignan au mois de mars dernier pour détention de 768 grives et d’un équipement permettant de modifier le rythme jour-nuit.

Au mois de décembre dernier, le ministère de l’intérieur a publié un communiqué relatif à l’arrestation, à Tarascon, d’un contrevenant qui détenait 80 oiseaux – chardonnerets, verdiers, pinsons du nord et serins cinis – et qui escomptait les vendre entre 5 000 et 10 000 euros. Certains oiseaux peuvent valoir jusqu’à 150 euros pièce !

L’Espagne a quant à elle fait l’objet d’une condamnation pour la chasse aux paranys, qui est très similaire.

Cependant, je dois noter qu’à ce jour, l’arrêté ministériel du 17 août 1989 n’a pas fait l’objet, à ma connaissance, d’une procédure d’infraction de la Commission européenne.

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