Mes chers collègues, j’ai moi aussi du mal à trouver des raisons à cette motion de rejet préalable. Selon vous, madame Genevard, la culture, le patrimoine, l’acte même de créer ne seraient pas en danger. Or ils le sont, et partout, pas seulement là où les extrémistes et les obscurantistes se battent. Comment nous serions-nous rassemblés aussi fortement autour de la liberté d’expression et de création aux lendemains des attentats de Charlie si c’était pour trouver aujourd’hui anecdotiques les attaques répétées que les artistes et leurs oeuvres ont dû subir ces derniers mois, chez nous comme dans l’ensemble de l’Europe ? Le danger pour la création existe. Il vient entre autres du fait que de plus en plus nombreux sont ceux qui, dans nos territoires, pour faire face aux difficultés, font de la culture un simple facteur d’ajustement budgétaire. C’est une question de choix. Nous en faisons tous en politique. Réduire le budget de la culture quand les choses vont mal, c’est un choix politique fort qui a une portée citoyenne. Plus que jamais, il est de notre devoir de réaffirmer en ce domaine notre vision, pas une vision qui date de cette législature, mais une vision historique, nationale, et qui a conduit de nombreuses nations à reconsidérer, à notre exemple, l’apport de l’art, de la connaissance et de la culture à leur propre identité.
Oui, je pense que ce projet de loi est fondamental et qu’il arrive au bon moment, quand nous en avons le plus besoin collectivement. Ceux qui s’opposent partout dans le monde à la création, à la diversité, à la préservation de nos patrimoines l’ont bien compris : notre diversité culturelle, notre modèle artistique, est une arme, et il faut réaffirmer dans cet hémicycle que nous ne désarmerons pas mais que nous allons au contraire le renforcer.
Nous reviendrons dans nos débats sur ce que vous avez dit sur l’archéologie préventive, mais je vous rappelle qu’il s’agit de mettre en place des outils équilibrés.
De même, nous allons mettre en oeuvre un vrai projet pour l’architecture, un vrai projet pour la musique, un vrai projet pour l’ensemble des artistes qui oeuvrent dans ce secteur important, non seulement culturellement mais aussi, comme nous le disons depuis plusieurs années, économiquement.
Ce texte de loi est la conclusion de plusieurs travaux que nous avons menés au sein de la commission, qu’il s’agisse de l’intermittence, du droit à la copie privée, des négociations sur les accords Schwartz ; il en est le point d’aboutissement, plus que jamais fondamental. C’est pourquoi notre groupe ne votera bien entendu pas cette motion de rejet préalable.