On le constate, chacun a donc pu exprimer son point de vue, et ce n'est pas parce que les opposants au mariage pour les couples de même sexe n'ont pas réussi à convaincre que le débat n'a pas eu lieu.
À ceux qui s'inquiètent des prétendus bouleversements à venir, je rappelle après Erwann Binet que la France n'est ni le seul ni le premier pays à avoir ce débat. Les pays qui l'ont fait n'ont provoqué aucun bouleversement majeur, quoi qu'on en dise : ils ont simplement permis aux familles homoparentales d'entrer dans la normalité. Nulle part le chaos tant annoncé n'est survenu, pas davantage qu'il ne s'était produit en France après l'adoption du PACS, quoi que certains aient dit à l'époque.
Contre le PACS hier et contre le mariage aujourd'hui, les mêmes arguments sont utilisés. Certains en viennent même à soutenir le PACS et à proposer l'améliorer : ils ont visiblement besoin de davantage de temps pour se faire aux évolutions de notre pays. J'ai donc bon espoir…
Permettez-moi de vous citer les propos d'Hannie Van Leeuwen, sénatrice démocrate-chrétienne des Pays-Bas. En 2000, elle s'était opposée avec virulence au mariage pour tous. Cinq ans plus tard, elle a déclaré : « Après avoir vu de nombreux couples de gays et de lesbiennes se marier, je réalise maintenant que j'avais tort. Je ne m'explique même plus ce qui m'avait poussée à traiter les gays et les lesbiennes différemment des autres citoyens. »
Et comment ne pas évoquer le discours d'investiture de Barak Obama qui, la semaine dernière, le 21 janvier, déclarait : « Notre voyage ne sera pas terminé tant que nos femmes, nos mères et nos filles ne pourront gagner leur vie comme le méritent leurs efforts. Notre voyage ne sera pas terminé tant que nos frères et soeurs homosexuels ne seront pas traités comme tout le monde par la loi. »
Ce combat pour l'égalité, d'autres pays le mènent en même temps que nous. Soyons toujours en France à la pointe de ce combat contre les discriminations et pour l'acceptation des différences.
En revanche, comme il existe encore des pays qui condamnent pénalement l'homosexualité, nous avons soumis à votre examen un amendement touchant le code du travail et visant à permettre à un salarié – ou une salariée – marié à une personne de même sexe de refuser une mutation dans ces pays. Cet amendement, comme les autres amendements de la commission des affaires sociales, a été intégré au texte de la commission des lois.
Certains craignent que la loi vienne bousculer ce qu'ils appellent l'ordre familial naturel, sacralisé et idéalisé, voire religieux. Je leur rappelle que la loi régit le seul mariage civil. La République légifère dans l'intérêt de la société et de la protection de ses citoyens, de tous ses citoyens, et non pour défendre une conception religieuse de la famille.
Les Françaises et les Français savent que les cérémonies religieuses du mariage obéissent à d'autres exigences, dans le respect des croyances de chacun.
Sur le plan juridique, le droit a su prendre en compte les faits sociaux pour les encadrer et pour fixer des repères. Le mariage a ainsi constamment évolué pour incarner, à chaque époque, l'idéal du couple tel que la société l'envisageait. C'est ainsi que le mariage n'est plus cette institution machiste, inégalitaire et hypocrite qui donnait la primauté au masculin et cantonnait la femme à une sexualité procréatrice.
Le mariage est devenu libre et consenti librement. L'égalité des droits a remplacé la hiérarchie des sexes.