Intervention de Sergio Coronado

Séance en hémicycle du 23 mars 2016 à 15h00
Questions au gouvernement — Accord entre l'union européenne et la turquie sur les migrants

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSergio Coronado :

Les vingt-huit pays membres de l’Union européenne ont conclu un accord avec la Turquie, le 18 mars, comme l’a rappelé ma collègue Jacqueline Fraysse, afin d’endiguer le flux des migrants qui s’échouent aujourd’hui sur les côtes grecques et dont la majorité relève de la Convention de Genève. Depuis la date du 20 mars, ces enfants, ces femmes et ces hommes qui fuient les atrocités de la guerre, dont le sort nous bouleverse, sont ainsi renvoyés en Turquie.

Cet accord a soulevé, à juste titre, les plus vives critiques. Le Haut-Commissariat aux réfugiés, dit HCR, a dénoncé la transformation des hotspots, centres d’accueil à l’origine, en centres de rétention et d’expulsion de personnes dont la plupart ont besoin de protection. D’ores et déjà, le HCR a mis un terme à une partie de ses opérations sur les îles grecques de Lesbos et Chios.

L’Union européenne va donc renvoyer des demandeurs d’asile à majorité syrienne en Turquie, un pays dont nous connaissons la situation actuelle. La guerre que mène le président Erdogan contre le terrorisme n’y épargne personne : ni l’opposition parlementaire, ni les journalistes, ni les universitaires, ni les organisations des droits humains – neuf avocats ont encore été arrêtés mercredi dernier.

Disons-le clairement : la Turquie, moyennant finances, est invitée à se transformer en camp d’hébergement pour ceux qui fuient les tortures, les viols et la mort, et dont l’Europe ne veut pas qu’ils foulent son sol.

Répondant à une de mes questions lors de son audition en commission des lois, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a appelé hier à s’interroger sérieusement sur la légalité internationale et européenne de cet accord.

Conformément à la directive de 2013, pour être considérée comme un pays sûr, la Turquie doit au moins ratifier la Convention de Genève sans aucune limitation géographique, ce qui n’est pas aujourd’hui le cas. En outre, ces réfugiés, une fois expulsés, n’ont aucune garantie de ne pas être refoulés vers un pays tiers, où leur vie pourrait être en danger.

Monsieur le secrétaire d’État, alors que la politique régionale d’Ankara reste plus que contestable, que le gouvernement turc combat avec plus de détermination les Kurdes que Daech, comment pouvez-vous, en notre nom, justifier un tel accord ? À nos yeux, l’Europe se déshonore en l’appliquant.

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