Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure – chère Élisabeth Pochon –, mesdames et messieurs les députés, après les deux derniers scrutins présidentiels de 2007 et de 2012, différents organismes de contrôle ont formulé des recommandations d’ordre technique, qui ont inspiré la rédaction de la proposition de loi organique.
Les nombreuses dispositions proposées par le Conseil constitutionnel, par la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale présidentielle, par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et par la Commission des sondages constituent un ensemble cohérent de mesures destinées à moderniser les modalités d’organisation du scrutin.
Elles permettront ainsi d’éviter à l’avenir les contestations récurrentes qui, à chaque élection, nourrissent des controverses qui ne débouchent jamais sur aucune réforme, qu’il s’agisse du système des parrainages, du temps de parole accordé à chaque candidat dans les médias audiovisuels ou encore des règles encadrant la publication des sondages et la divulgation des résultats.
Pour remédier à cette situation, le Gouvernement soutient l’adoption de la proposition de loi organique de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle. L’adoption de ce texte contribuera à renforcer le cadre juridique dans lequel se tiendront les prochaines échéances électorales et celles qui suivront, en rendant leur organisation incontestable, permettant d’éviter tout débat à l’avenir.
Avant d’en venir au détail de ces propositions, je veux saluer l’engagement de Jean-Jacques Urvoas, qui est à l’origine de ce texte, et le travail considérable d’Élisabeth Pochon pour traduire dans la loi les avancées nécessaires qui sont réclamées depuis longtemps.
La proposition de loi organique prévoit en premier lieu de réformer les règles encadrant le système de parrainage des candidats. Elle inclut trois mesures principales : tout d’abord, une modification des modalités de transmission des présentations au Conseil constitutionnel. Le parrainage devra être adressé par l’auteur de la présentation lui-même – et non plus par le candidat ou par l’équipe de campagne –, par voie postale ou bien directement auprès du Conseil constitutionnel et non en préfecture.
Un amendement du groupe SRC, adopté en première lecture, fixe également la perspective d’une remise des parrainages par voie électronique après 2017 et au plus tard au 1er janvier 2020. Le Gouvernement y est favorable.
Ensuite, le texte prévoit la publicité intégrale de la liste des élus ayant parrainé un candidat, et non plus seulement de 500 d’entre eux tirés au sort : la procédure actuelle repose en effet sur une inégalité flagrante entre les parrains dont le nom est rendu public par le Conseil constitutionnel et ceux pour qui ce n’est pas le cas. Nous souhaitons mettre un terme à ce traitement différencié dans la mesure où le principe de responsabilité et l’exigence de transparence doivent permettre à chacun d’assumer ses choix devant nos citoyens.
Enfin, la proposition de loi organique impose au Conseil constitutionnel de rendre public le nom des parrains au moins deux fois par semaine, afin non seulement d’en garantir la communication de façon plus efficace, mais aussi d’atténuer la pression qui pèse parfois sur les élus et d’éviter ainsi une dramatisation excessive de la décision qu’ils prennent.
En deuxième lieu, s’agissant de l’accès des candidats aux médias audiovisuels, la proposition de loi prévoit de substituer un strict principe d’équité à l’actuelle règle d’égalité des temps de parole réservés aux candidats pendant la période dite « intermédiaire », qui s’étend de la publication de la liste des candidats à la veille de la campagne officielle.
Une telle substitution permettra de simplifier, et par là même de clarifier une réglementation devenue au fil du temps particulièrement complexe. Faire coexister les principes d’égalité des temps de parole et d’équité des temps d’antenne représente une source de complications aussi bien pour les candidats que pour les chaînes de radio et de télévision, dont certaines en viennent même à préférer tout simplement ne pas organiser le moindre débat entre candidats.
En troisième lieu, le texte soumis à votre examen prévoit une réforme des horaires encadrant les opérations de vote. Le Sénat a souhaité harmoniser à dix-neuf heures les horaires de fermeture des bureaux de vote sur l’ensemble du territoire afin d’éviter la diffusion prématurée de résultats partiels ou de sondages susceptibles d’altérer la sincérité du scrutin.
Je constate que le texte adopté par votre commission rétablit la dérogation permettant aux agglomérations qui le souhaitent de maintenir l’horaire de fermeture à vingt heures. Il s’agit là d’un point essentiel pour le Gouvernement afin de ne pas réduire l’accès au suffrage des électeurs qui pouvaient jusqu’alors se rendre aux urnes de dix-neuf heures à vingt heures.
S’agissant de l’horaire de dix-huit heures, je comprends les arguments des membres de la commission des lois qui ne veulent pas que le dépouillement des bureaux de vote fermés à dix-huit heures vienne perturber le vote de ceux qui se rendent aux urnes jusqu’à vingt heures. Cet argument, qui a sa cohérence, repose sur l’idée que l’électeur serait un électeur captif qui arbitrerait son choix non pas en fonction de ses convictions les plus profondes, mais en vertu de l’information qu’il aurait du vote des autres. Je crois que nous pouvons toutes et tous reconnaître le caractère théorique de la menace qui pèse sur la sincérité du suffrage.
Parallèlement, une telle mesure est de nature à générer des contraintes lourdes, extrêmement lourdes, voire trop lourdes pour les communes rurales, encore nombreuses dans notre pays, pour lesquelles l’organisation des bureaux de vote relève à chaque fois d’un défi qui n’est absolument pas théorique ; on connaît les difficultés qu’elles ont à organiser les bureaux de vote pour ces journées électorales en respectant les règles en vigueur.
La modification apportée par votre commission serait illisible pour les électeurs qui seront appelés aux urnes un mois plus tard pour l’élection de l’Assemblée nationale. En effet, à peine un mois après le scrutin présidentiel, les électeurs retrouveraient le système de fermeture habituel – dix-huit heures avec dérogation possible par arrêté jusqu’à vingt heures. Certains pourraient donc se présenter, de bonne foi, après la fermeture des bureaux fixée à dix-huit heures, n’ayant pas compris que seule différait l’élection du Président de la République et qu’ils étaient revenus au régime normal.