La désindustrialisation de la France d'aujourd'hui est certainement due à des choix passés – financiarisation de l'économie, soutien aux services et seulement à quelques secteurs industriels, tel l'armement. Notre industrie n'est pas suffisamment centrée sur l'innovation et la haute technologie.
D'autres choix sont possibles. À cet égard, comment ne pas évoquer ce qui se passe dans ma circonscription de l'Isère ? Thales entend se réorganiser, et ce projet aura un impact sur de nombreux territoires de notre pays dans la mesure où sont prévues des suppressions d'emplois, des délocalisations, des cessions de branches – et donc la fin de l'effort de recherche et développement mené au sein de celles-ci. Cette réorganisation risque d'entraîner des licenciements dans plusieurs filiales du groupe Thales, ainsi que des pertes de savoir-faire technologique. Deux de ces filiales, Thales-XRIS et Trixell, sont situées dans ma circonscription : spécialisées dans l'imagerie médicale, elles comptent 770 salariés, ce qui en fait le premier employeur privé de ma circonscription. Ces entreprises, qui développent des savoir-faire issus d'une recherche lancée par Thomson voilà plus de vingt ans, et constamment améliorée depuis, sont extrêmement rentables, puisque leurs bénéfices sont supérieurs à 10 % du chiffre d'affaires. Ainsi, la branche d'imagerie médicale est leader mondial sur son marché, et plus de 80 % des ventes sont réalisées à l'exportation. De plus, le succès commercial provient d'un partenariat exemplaire avec d'autres entreprises européennes. Or la stratégie développée par Thales va non seulement avoir des conséquences en matière d'emploi – plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d'emplois seraient menacés –, mais aussi poser des problèmes de cohérence industrielle et de choix commerciaux : délocalisation de l'activité « radar », cession de la branche d'ingénierie logicielle... Ces projets ne semblent pas avoir fait l'objet d'un véritable débat au conseil d'administration, ni d'une approbation par l'État. Ce dernier est pourtant le premier actionnaire de Thales, avec 41 % des droits de vote au conseil d'administration. Que pensez-vous pouvoir faire, monsieur le ministre, sachant qu'il y a urgence pour préserver l'emploi et les savoir-faire ?