La commission a auditionné M. Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif et Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du Redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique.
Monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, nous vous souhaitons la bienvenue.
Monsieur le ministre, la Commission des affaires économiques vous attendait avec une certaine impatience : vous êtes le ministre de l'urgence sociale et de la reconquête industrielle, sachant que l'emploi est au coeur des préoccupations de tous nos concitoyens.
La situation de notre industrie est extrêmement inquiétante. Doux et PSA occupent l'actualité nationale, mais les problèmes sont présents partout : ainsi, dans ma circonscription, Thales veut se séparer de sa division radiologie – en faisant quelques dégâts au passage – et Ascométal, survivant de la sidérurgie, s'achemine lentement vers la mort.
Je suis impatient de voir arriver sur le bureau de l'Assemblée nationale, un texte que j'ai défendu lorsque j'étais dans l'opposition, et dont le premier signataire était le député François Hollande : il vise à interdire aux industriels qui veulent aller gagner toujours plus d'argent ailleurs – je ne parle pas de ceux qui sont en difficulté – d'appliquer la politique de la terre brûlée en refusant toute reprise. Certes, aujourd'hui, ils versent une toute petite contribution aux territoires, mais le site industriel et l'emploi disparaissent. Avec ce texte, la collectivité dans son ensemble, en lien avec les salariés, en lien avec les tribunaux de commerce, pourrait reprendre la main pour garder l'outil industriel sur nos territoires. Monsieur le ministre, j'espère que nous pourrons débattre de ce texte dès le trimestre prochain. En tout cas, j'en formule la demande, avec l'appui, je le sais, des députés de la majorité, et, j'imagine, de ceux de l'opposition.
Nous avons reçu ce matin M. Jean-Louis Beffa et M. Louis Schweitzer. Certaines de leurs propositions, notamment celles visant à favoriser l'investissement à long terme ou à modifier la gouvernance des entreprises, sont très intéressantes. Nous avons envie d'y travailler et nous le ferons certainement en liaison avec votre ministère.
J'ai lancé ce matin l'idée d'une mission d'information sur les coûts de production – coût du travail, mais aussi ceux l'énergie, de la formation, de la recherche, ou encore coût des contraintes normatives en matière d'environnement et de sécurité. N'oublions pas qu'une entreprise doit commencer par dépenser de l'argent avant d'en gagner, et que, parfois, certains éléments pèsent un peu lourd. En matière de compétitivité, il ne faut pas penser qu'au coût social ; M. Beffa et M. Schweitzer nous ont d'ailleurs dit ce matin qu'il ne fallait surtout pas abandonner notre modèle social.
Nous devrons aussi débattre de la manière dont les territoires peuvent aider la création d'entreprise. Nous sommes aujourd'hui sur la défensive, mais il faudra passer à la reconquête. À l'heure actuelle, notre pays compte un grand nombre de projets dormants, qui n'attendent que quelques capitaux, que quelques facilités de la part des banques, pour innover et faire émerger des emplois. L'heure n'est plus à l'attente : nous devons, tous ensemble, réveiller toute cette créativité qui ne demande qu'à l'être.
Je vous remercie de cette invitation ; celles et ceux avec qui j'ai partagé ces bancs pendant quinze ans connaissent mon attachement au travail parlementaire, à l'enrichissement par la discussion, à la confrontation des idées, à la coopération, dans l'esprit de la séparation des pouvoirs.
Je remercie le président François Brottes d'avoir organisé rapidement cette rencontre, qui en appelle d'autres.
La France rencontre de grandes difficultés économiques et sociales ; il y a donc urgence. Après la perte en dix ans de 750 000 emplois industriels, après la fermeture en trois ans de 900 usines, la chaîne économique est durement affectée. Le nom du ministère dont j'ai la charge implique presque une obligation de résultats. Le titre de « redressement productif », à la fois défi et hommage rendu à nos équipes, implique surtout la mobilisation de tous autour de la question industrielle et des capacités productives. Notre balance commerciale est, je le rappelle, déficitaire de 70 milliards : nous consommons de plus en plus ce que les autres produisent, et nous produisons de moins en moins ce que les autres consomment. Ce déséquilibre doit représenter pour nous tous un sujet de préoccupation.
Le « redressement productif » constitue également un hommage non dissimulé au grand président des États-Unis Franklin Delano Roosevelt, qui avait, en 1933, après l'effondrement qu'avait représenté la Grande Dépression de 1929, prononcé un discours marquant dans lequel il parlait de « redressement industriel national ». C'est donc une référence au New Deal, et aux idées de Keynes – membre de l'équipe du président Roosevelt – qui ont révolutionné le monde et sont toujours d'actualité.
Notre ministère a des exigences, porte une vision et développe une stratégie.
Ces dernières années, l'économie s'est mondialisée, sans que les peuples aient été étroitement associés à ce processus, sans qu'on les aide à réfléchir aux conséquences de cette mise en concurrence généralisée, multilatérale et uniforme des modèles sociaux, des niveaux de salaires, de la rémunération des capitaux, des fiscalités, et même des souverainetés. Des pays qui, en fonction de leur histoire et de leur géographie, ont fait des choix différents –certains ont des dépenses militaires, d'autres encore ont des services publics de haut niveau –sont ainsi mis en concurrence, comme s'ils vivaient tous sur le même palier ! Avec le rééquilibrage de l'Asie et les dégâts industriels que ce processus a causés dans le monde occidental anciennement industrialisé, vous voyez bien les difficultés que cela provoque
Les défis, pour notre continent et donc notre pays, sont absolument considérables. Les pays qui ont le mieux résisté à la crise, et ont parfois obtenu des résultats extraordinaires, sont ceux qui ont rassemblé les grands groupes, généralement transnationaux, c'est-à-dire la puissance privée, les PME, c'est-à-dire la puissance créatrice, et les pouvoirs publics, c'est-à-dire la souveraineté : je pense à l'Allemagne, à la Corée, à la Chine, et même d'une certaine façon aux États-Unis. Les pays où ces différents acteurs n'ont pas su s'unir se sont affaiblis.
J'appelle notre modèle actuel libéral-financier : libéral, au sens du laissez-faire le plus total, et financier, au sens où, dans les préférences collectives, la question financière a peu à peu suplanté celle de l'industrie et de la production. Ce modèle ne ressemble pas à celui qui a façonné l'histoire du capitalisme français, ni au célèbre modèle rhénan ; et il a causé beaucoup de dégâts.
Nous voulons, nous, évoluer vers un modèle de nature un petit peu colbertiste. Cela dit, Colbert n'a pas fait que de bonnes choses – il est, entre autres, l'auteur du code noir – et nous ne pouvons donc pas nous inspirer de toute son oeuvre. Comme je l'ai fait devant la Conférence nationale de l'industrie, ouverte par le Premier ministre, je parle souvent de « colbertisme participatif » – même si, à l'époque de Colbert, il n'y avait pas de Parlement, pas de discussions dans la société, non plus que de société d'ailleurs ; il n'y avait que l'imperium unilatéral de l'État. Toutefois, il est juste de dire que l'idée de volonté de l'État doit être réhabilitée. L'État doit agir, la puissance publique doit se réarmer et assumer son leadership pour mobiliser les grands groupes, les PME, les territoires en vue d'une réindustrialisation.
Nous travaillons dans l'urgence, un peu comme des médecins urgentistes. Ainsi, dans le secteur des opérateurs téléphoniques, secteur dont Mme Fleur Pellerin a la charge, nous voudrions limiter, voire éviter la casse. Pour nous, tous les moyens sont bons pour faire renoncer aux décisions lorsqu'elles sont évitables – lorsqu'elles sont inéluctables, nous les assumons tous ensemble. Partout où nous pouvons faire l'économie de la destruction économique, industrielle et donc sociale, nous le faisons. Il faut pour cela user de toute la créativité possible, la nôtre, la vôtre. Les pays les plus mobilisés, les plus créatifs, s'en sont beaucoup mieux sortis que tous ceux qui ont fait preuve de conformisme : des solutions considérées il y a peu comme impensables, taboues, inimaginables, sont aujourd'hui inscrites à l'ordre du jour.
J'évoquerai maintenant plusieurs sujets.
Le premier est relatif à la compétitivité, aux conditions dans lesquelles nous nous battons pour défendre notre industrie. On nous parle beaucoup du coût du travail : c'est un facteur important, mais ce n'est pas le seul ! La compétitivité, c'est le prix des facteurs de production : le travail et la protection sociale ; le capital et sa rémunération ; l'énergie et son prix. J'ai eu l'honneur d'animer, avec M. Louis Gallois, ancien président d'EADS, ancien directeur général de l'industrie, ancien directeur de cabinet de Jean-Pierre Chevènement – qui fut lui-même un grand ministre de l'industrie au début des années 1980 –, l'un des ateliers de la grande conférence sociale imaginée par le Gouvernement. Nous nous sommes penchés sur la question de la compétitivité, en envisageant les trois facteurs de production. Pour le Gouvernement, il n'y a pas de sujet interdit ; tous doivent être examinés, quand nous les rencontrons. Le Premier ministre a confié une mission sur ce sujet à M. Louis Gallois, lequel rendra son rapport au mois d'octobre…
C'est le premier ! Je suis sûr qu'il sera lu attentivement en Haute-Savoie. Je suis sûr que M. Gallois, qui est un homme prestigieux, saura, parce qu'il est estimé de tous, rassembler à la fois les syndicats et le patronat. Sur la question de la compétitivité, monsieur Tardy, il est plus important d'être rassembleur que diviseur.
Le deuxième sujet que j'aborderai est celui du financement de l'économie et du système financier et bancaire. Je ne reviens pas sur la destruction économique des dernières années. Le Gouvernement a le projet de créer les conditions d'un financement public de l'investissement des entreprises : aujourd'hui, celles-ci n'arrivent pas à se financer en utilisant le secteur bancaire, qui préfère des activités hautement spéculatives à d'autres, moins lucratives, mais plus utiles à un pays industrialisé comme le nôtre.
Nous allons donc voir comment drainer l'épargne des Français vers le financement des entreprises, notamment en privilégiant les circuits courts. Avec le livret d'épargne industrie, nous proposerons aux Français d'aider les PME – ces PME qui embauchent leurs enfants, leurs voisins, ces PME dont ils apprécient et consomment les produits, ces PME dont ils aiment les marques. Nous ouvrirons le chantier de l'assurance-vie, qui représente 1 600 milliards d'euros – dispositif qui bénéficie d'ailleurs d'une défiscalisation. À l'heure de la mondialisation, cet atout extraordinaire n'est-il pas sous-exploité ? Toutes ces questions seront traitées lors du débat sur la Banque publique d'investissement. Ce nouvel outil, que je piloterai avec Pierre Moscovici, sera pour nous le bras armé du redressement. Les territoires et les régions – qui disposent de la compétence économique – seront associés à ce travail ; pour cela, nous nous inspirerons du modèle financier allemand, organisé autour des Länder. Il faut faire évoluer le modèle de la banque universelle, qui a connu quelques déboires au cours de la crise des subprimes.
Le troisième sujet, c'est celui de la ressource énergétique et du prix de l'énergie. Tous les États émergents – ou depuis longtemps émergés – prennent le contrôle des gisements de matières premières. Souvent, les grandes entreprises transnationales sont marginalisées dans cette lutte pour le contrôle de cette richesse. C'est pour la France, comme pour les autres pays, un enjeu de souveraineté. La question des filières industrielles liées à l'énergie doit donc faire l'objet d'une attention particulière. Sur ce point, mon ministère, qui a la charge des mines et des matières premières, travaillera en liaison avec Mme Delphine Batho, ministre de l'énergie.
Le quatrième sujet que j'évoquerai concerne l'innovation. C'est un sujet sur lequel reviendra Mme Pellerin, première ministre officiellement chargée de la question de l'innovation. Il s'agit de l'un des enjeux pour lesquels le Gouvernement entend mobiliser les fonds publics, l'investissement privé, les territoires et les collectivités locales. Si nous n'inventons pas les technologies de demain, nous ne réussirons pas à fabriquer les produits de demain. Nous disposons de véritables atouts en matière scientifique et technologique, c'est même l'une de nos forces, l'un des éléments de notre rayonnement ; mais il nous faut réussir le passage vers la production et l'entreprise industrielle, et c'est l'un de nos points faibles. L'Allemagne, elle, a su créer la Fraunhofer-Gesellschaft. Nous souhaitons donc prendre des initiatives dans de nombreux domaines : crédit impôt recherche ; usage du grand emprunt – lequel est une bonne chose pour notre pays ; investissement technologique dans les territoires, domaine où nous devons rattraper notre retard ; pôles de compétitivité – que Mme Pellerin et moi considérons comme des atouts – pour lesquels les collectivités locales et les entreprises doivent continuer de se mobiliser pour en améliorer les performances. Nous souhaitons enfin débattre de la politique industrielle, de la commande publique.
Le cinquième sujet est celui de l'arbitrage, dans nos préférences collectives, entre le producteur et le consommateur – qui pourtant ne font qu'un. Ce dernier est devenu le roi moderne, mais le roi aveugle : en cherchant sa satisfaction exclusive, le consommateur nuit au producteur qu'il est pourtant aussi. En cette matière, nous devons faire le tri en ce qui résulte de la montée du low cost et ce qui n'en résulte pas, et dresser un bilan : la production de la Logan a été délocalisée dans les pays à bas coût, alors que c'est une voiture Renault ; il y a Easy Jet, et nous voyons où en est Air France ; Free offre certes une économie importante aux consommateurs, mais n'est-ce pas à courte vue dans la mesure où les organisations syndicales du secteur, celles des grands opérateurs téléphoniques comme celles des sous-traitants, nous annoncent des plans sociaux ? Bref, nous devons chercher un meilleur équilibre entre le producteur et le consommateur, et éduquer ce dernier pour qu'il prenne conscience qu'il est aussi acteur, citoyen, et producteur. Une étude du CREDOC parue il y a quelques mois montre que 60 % de nos concitoyens sont prêts à payer un peu plus cher – environ 5 % – si les biens qu'ils achètent sont fabriqués en France : il y a un désir de réconciliation entre le producteur et le consommateur, ces deux parties du cerveau de nos concitoyens.
Enfin, le sixième sujet que j'aborderai est celui de l'Europe. La bataille engagée par le Président de la République pour faire reculer l'austérité et faire émerger la préoccupation de la croissance passe aussi par la réorientation de la politique européenne de la concurrence et de la politique commerciale extérieure. Pouvons-nous continuer à vénérer des traités qui datent de 1957, qui ont été conçus à une époque où l'Europe se construisait et cherchait à s'homogénéiser, mais qui nous empêchent aujourd'hui de nous adapter à la compétition internationale, même déloyale ? Il faut poser la question de la réciprocité. Nombre de champions nationaux n'ont pas pu se constituer parce que les règles de la concurrence européenne sont trop tatillonnes, et des entreprises sont finalement tombées dans les mains d'autres entreprises dont les centres de décision se situent à des dizaines de milliers de kilomètres. Notre choix est évidemment de faire évoluer le bloc juridico-politique du droit de la concurrence européen, de l'assouplir pour permettre aux entreprises européennes de se défendre dans une compétition mondiale déloyale.
Voilà l'esprit dans lequel nous entendons agir pour redresser l'industrie de notre pays, pour nous rassembler autour de nos savoir-faire, de nos salariés, de nos territoires. Le travail que nous engageons est difficile. Jean-Paul Fitoussi, grand économiste, a écrit dans un ouvrage intitulé La règle et le choix : « L'Union européenne, c'est la vénération de règles, pour certaines d'ailleurs obsolètes, et pendant que nous vénérons ces règles, nous ne faisons pas de choix. » Nous préférerions, nous, défendre une souveraineté européenne partagée, plutôt que d'appliquer des règles qui, à l'heure de la mondialisation, nous affaiblissent. Sous notre impulsion, le modèle libéral-financier se transformera en modèle entrepreneurial, innovant, et patriotique.
On peut partager votre constat et vos objectifs, monsieur le ministre, mais les Français attendent maintenant des actes et des résultats.
Vous appartenez au pôle de Bercy, qui compte de nombreux ministres, à tel point qu'on s'y perd parfois un peu pour savoir qui fait quoi. Pouvez-vous nous préciser les attributions des uns et des autres ?
Je ne peux que me féliciter de l'esprit d'union nationale dans lequel vous voulez travailler. En revanche, on ne peut pas dire, comme l'a fait l'un des ministres appartenant au pôle de Bercy, que la majorité précédente n'a « rien foutu ». Ainsi, vous vous appuyez sur certains outils qu'elle a mis en place, comme la Conférence nationale de l'industrie. Au reste, comment comptez-vous faire évoluer ces outils ? De même, que vont devenir les accords compétitivité-emploi et le crédit impôt recherche ?
Vous pouvez compter sur l'opposition et sur l'UMP pour faire preuve d'imagination. Mais il vous faudra surtout du courage, alors que, jusqu'à présent, la nouvelle majorité a surtout démonté ce que nous avions mis en place ! Il y a urgence, et nous attendons de votre part des propositions concrètes : par exemple, quelles mesures allez-vous prendre pour abaisser le coût du travail et quelle est la position de la France sur l'énergie nucléaire ?
Enfin, je vous rejoins sur la nécessité d'une politique industrielle européenne ; le droit de la concurrence doit être au service de cette politique.
Monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, au nom de tous nos collègues du groupe socialiste, je vous souhaite d'abord bon courage !
La situation de la France est catastrophique et on ne peut pas continuer dans le même sens. Lors de la campagne électorale, le Président de la République avait fait de la relance de la production l'une de ses priorités les plus affirmées ; et comme l'a écrit Erik Orsenna « celui qui ne produit pas vit dans la main de celui qui produit ». Par conséquent, nous ne pourrons pas sauver notre modèle social si nous ne nous remettons pas à produire, dans le secteur industriel comme dans le secteur agricole.
Monsieur le ministre, comment rééquilibrer les relations commerciales entre l'Europe et le reste du monde ? Il s'agit d'ailleurs d'un sujet que vous avez développé dans une contribution originale au programme du parti socialiste.
Comment relocaliser les activités humaines, tant pour l'industrie que pour l'agriculture ? C'est une nécessité absolue, si l'on veut que les emplois soient distribués sur toute la planète ; c'est tout aussi nécessaire pour préserver l'environnement. Exporter du bois européen en Chine pour qu'il revienne en Europe sous forme de meubles, ou faire voyager de la viande sur 10 000 kilomètres pour nourrir les habitants du Limousin, ça n'a pas de sens !
Je commence par saluer les propos de M. le ministre. Le groupe de la gauche démocrate et républicaine ne se contentera pas de dire « chiche » ; nous voulons adopter une attitude résolument constructive.
Vous avez vous-même souvent évoqué la démondialisation. Lors d'un débat que nous avons eu ensemble à la Fête de l'Humanité l'an dernier, vous disiez : « La stratégie politique, économique, sociale des entreprises visant à faire d'autres choix que de défendre nos capacités industrielles peut être renversée par des sanctions économiques, des droits de douane, une stratégie ouvertement protectionniste ; nous devons dire à nos partenaires européens que le moment est venu de relocaliser un grand nombre de productions industrielles sur notre territoire ». Ces propos sont-ils toujours d'actualité ?
Quant à la banque de développement que vous envisagez, quel sera son périmètre ? S'agit-il seulement de créer un livret d'épargne industrie, ou bien comptez-vous aller plus loin en regroupant des banques existantes, en leur confiant des missions d'intérêt général dans le cadre du développement industriel ? C'est ce que nous avons appelé le pôle public : que pensez-vous de cette proposition ?
Selon quels critères pensez-vous réorienter le crédit ?
Ne pensez-vous pas qu'un développement des ressources énergétiques conforme à l'intérêt général rend nécessaire une maîtrise publique de ces ressources ?
Les pôles de compétitivité peuvent, c'est vrai, dans certains cas, aller dans la bonne direction. Mais, la plupart du temps – des rapports l'ont montré –, ils servent à drainer l'intelligence, la production, la technique vers de grands groupes multinationaux, sans servir suffisamment les PME. Comment le dynamisme des uns peut-il servir le développement des autres ?
Il faut poser la question du pouvoir d'achat. Si l'on a joué continuellement sur la baisse des coûts, c'est parce qu'il y avait une volonté politique de ne pas augmenter le pouvoir d'achat, notamment les salaires. Que comptez-vous faire sur ce point ?
Enfin, s'agissant du « fabriqué en France » – question cruciale –, pensez-vous reprendre une mesure contenue dans un texte dont nous avions commencé à débattre lors de la législature précédente, qui portait sur l'indication géographique protégée et sur le marquage d'origine pour les produits industriels, comme cela existe pour les produits agricoles ?
Quelle place les territoires d'outre-mer, notamment la Polynésie, occupent-ils dans votre action ? La Polynésie, qui rencontre des difficultés financières, pourrait devenir un centre d'expérimentation pour les énergies renouvelables, la biodiversité… Elle dispose en effet d'une surface maritime supérieure à 5 millions de kilomètres carrés.
La désindustrialisation de la France d'aujourd'hui est certainement due à des choix passés – financiarisation de l'économie, soutien aux services et seulement à quelques secteurs industriels, tel l'armement. Notre industrie n'est pas suffisamment centrée sur l'innovation et la haute technologie.
D'autres choix sont possibles. À cet égard, comment ne pas évoquer ce qui se passe dans ma circonscription de l'Isère ? Thales entend se réorganiser, et ce projet aura un impact sur de nombreux territoires de notre pays dans la mesure où sont prévues des suppressions d'emplois, des délocalisations, des cessions de branches – et donc la fin de l'effort de recherche et développement mené au sein de celles-ci. Cette réorganisation risque d'entraîner des licenciements dans plusieurs filiales du groupe Thales, ainsi que des pertes de savoir-faire technologique. Deux de ces filiales, Thales-XRIS et Trixell, sont situées dans ma circonscription : spécialisées dans l'imagerie médicale, elles comptent 770 salariés, ce qui en fait le premier employeur privé de ma circonscription. Ces entreprises, qui développent des savoir-faire issus d'une recherche lancée par Thomson voilà plus de vingt ans, et constamment améliorée depuis, sont extrêmement rentables, puisque leurs bénéfices sont supérieurs à 10 % du chiffre d'affaires. Ainsi, la branche d'imagerie médicale est leader mondial sur son marché, et plus de 80 % des ventes sont réalisées à l'exportation. De plus, le succès commercial provient d'un partenariat exemplaire avec d'autres entreprises européennes. Or la stratégie développée par Thales va non seulement avoir des conséquences en matière d'emploi – plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d'emplois seraient menacés –, mais aussi poser des problèmes de cohérence industrielle et de choix commerciaux : délocalisation de l'activité « radar », cession de la branche d'ingénierie logicielle... Ces projets ne semblent pas avoir fait l'objet d'un véritable débat au conseil d'administration, ni d'une approbation par l'État. Ce dernier est pourtant le premier actionnaire de Thales, avec 41 % des droits de vote au conseil d'administration. Que pensez-vous pouvoir faire, monsieur le ministre, sachant qu'il y a urgence pour préserver l'emploi et les savoir-faire ?
Monsieur Fasquelle, il n'y a pas de chevauchement dans les intitulés des ministères. Je veux souligner que, pour la première fois dans l'histoire du ministère de l'industrie, nous disposons de l'autorité conjointe sur l'Agence des participations de l'État : cela nous permet d'être présents dans les conseils d'administration, sachant que nous attachons un grand prix à ce que les décisions prises soient en conformité avec les intérêts industriels de la nation. L'État devient une autorité active en matière industrielle, et nous comptons bien mettre notre nez dans les affaires des entreprises publiques comme des entreprises privées à participation publique, majoritaire ou minoritaire. Ainsi, j'ai interrogé Thales.
S'agissant du crédit impôt recherche, nous souhaitons le sanctuariser, car il est efficace, quitte à l'ajuster à la marge. Cela ne passe pas forcément par une évolution législative ou réglementaire, mais cela passe plutôt par une évolution de la pratique. Ainsi, nous voulons exclure les banques et les assurances : les contribuables n'ont pas à payer pour le laboratoire d'ingénierie financière de BNP-Paribas, ce que j'ai d'ailleurs dit aux dirigeants de ce groupe. Nous préférons utiliser cet argent pour les PME, pour l'innovation industrielle et technologique. Chacun ici, je crois, en sera d'accord.
Nous souhaitons renégocier les pôles de compétitivité. Je l'ai indiqué aux présidents de région : là où cela va bien, nous voulons nous engager plus avant ; là où cela ne va pas, il ne faut pas décourager les territoires mais les stimuler. Nous allons travailler en ce sens.
Je me suis exprimé sur la question du nucléaire devant la Conférence nationale de l'industrie : c'est une industrie importante, à laquelle la nation a renouvelé sa confiance. Elle doit donc perdurer, et elle a vocation à exporter. Nous devons faire évoluer notre mix énergétique, en investissant dans les énergies renouvelables car nous sommes en retard dans ce domaine, en trouvant de nouvelles sources d'énergie ; mais nous n'abandonnons pas notre industrie nucléaire, à laquelle nous croyons.
Beaucoup d'entre vous m'interrogent sur les outils dont nous disposons dans la mondialisation. L'Union européenne a beaucoup à faire pour apprendre ce que tous les autres continents, toutes les grandes nations industrielles pratiquent : ils utilisent tous les procédés que l'Europe nous interdit : les aides d'État, les manipulations monétaires, les concentrations excessives, les fonds souverains… La réciprocité, qui figurait il y a quelques jours pour la première fois dans le relevé de conclusions du Conseil européen, doit maintenant être transposée dans le droit. Je viens d'ailleurs d'écrire au Conseil de compétitivité, conseil des ministres de l'industrie de l'Union, pour proposer d'inscrire la réorientation de la politique de la concurrence et de la politique commerciale extérieure à l'ordre du jour de nos débats.
Nous sommes, à vingt-sept, la première puissance économique mondiale, avant les États-Unis, avant la Chine, et nous devrions nous soumettre aux règles imposées par les autres ? C'est absurde ! Défendons mieux nos intérêts. Les Chinois font pression pour que nous renoncions à la taxe carbone aéronautique ; sur ce point, nous ne devons pas faire preuve de la moindre faiblesse. Il s'agit d'une régulation environnementale, et nous posons nos propres règles face au reste du monde
Le Gouvernement prendra, de plus en plus souvent, des mesures de protection dans certains secteurs de l'industrie où nous sommes particulièrement déstabilisés par la mondialisation déloyale – je n'en dis pas plus car les arbitrages ne sont pas rendus. J'indique que M. Serge Guillon, auteur – avec M. Yvon Jacob, que j'ai renouvelé dans ses fonctions d'ambassadeur de l'industrie – d'un rapport intitulé « Pour lutter contre la mondialisation déloyale », est devenu secrétaire général des affaires européennes. Nous voulons construire une stratégie de réciprocité : ce que d'autres s'autorisent, nous voulons pouvoir le faire aussi, et nous demanderons pour cela à Bruxelles de modifier ses normes tatillonnes. C'est, si j'ose dire, la démondialisation en acte.
Monsieur Chassaigne, vous avez raison de poser la question de la maîtrise publique des ressources énergétiques. Nous en débattrons lorsque, avec Mme Batho, nous réformerons le code minier. Les États doivent bien sûr conserver la maîtrise des technologies d'extraction, ne serait-ce que pour garantir la transparence, la démocratie et le partage de la richesse.
Monsieur le président, le Gouvernement prévoit effectivement de déposer un texte qui permette de faire reprendre, par voie de justice, un site industriel rentable qu'un industriel voudrait fermer, stériliser, dès lors qu'un repreneur se manifeste. Ces situations sont très fréquentes sur notre territoire : finalement, ce sont des délocalisations déguisées ; l'industriel va produire ailleurs pendant que l'État paye la destruction de l'emploi, en finançant des plans sociaux, l'accompagnement, et que les sites industriels sont abandonnés. Nous n'acceptons pas cette logique, qui est celle d'intérêts financiers privés et non celle de l'intérêt général, et nous voulons donc un rééquilibrage. Certains industriels ont argué de la pression des agences de notation ; eh bien, maintenant, ils subiront aussi la pression des pouvoirs publics, et cela fera un équilibre ! Ils devront choisir, et ils choisiront, je crois, l'intérêt national.
Nous défendons l'esprit patriotique, et c'est comme cela que nous redresserons ce pays.
Face à une concurrence déloyale, comment concevoir une politique de redressement industriel sans envisager, dans le cadre du marché intérieur européen, des mesures concrètes du marché intérieur européen, en matière de protection des entreprises, des emplois, des savoir-faire nationaux ? Quand la France prendra-t-elle l'initiative de taxes douanières s'appliquant à des produits fabriqués à l'extérieur des frontières européennes, afin que les échanges redeviennent équitables ? Nous devons nous protéger comme les autres le font, sans nous exposer à tous les vents de la mondialisation.
D'autre part, envisagez-vous d'introduire dans le code des marchés publics une clause de préférence géographique ? L'argent public pourrait ainsi bénéficier prioritairement aux entreprises nationales et aux entreprises qui font vivre nos territoires.
Les gaz de schiste peuvent être considérés comme un atout majeur pour notre industrie, en termes de créations d'emplois, de balance commerciale, d'indépendance énergétique – nos réserves sont les secondes en Europe. La méthode de la fracturation hydraulique, qui est presque la seule utilisée aujourd'hui, pose cependant de graves problèmes environnementaux. D'autres technologies sont en sommeil. Quelle est votre position sur ce point, notamment sur la loi votée l'an dernier ? Seriez-vous prêt à encourager le développement d'autres technologies, soucieuses de protection de l'environnement ?
Félicitations, monsieur le ministre, votre discours, une fois encore, a été brillant mais votre emphase a surtout vocation à convertir votre majorité à la realpolitik. Et la question que fait naître votre propos est la suivante : êtes-vous en phase avec vos collègues du Gouvernement ?
Par ailleurs, que signifie votre expression de « prise de contrôle des sources d'énergie par l'État » ? Faut-il la comprendre comme un hommage à M. Hugo Chavez ou s'agit-il simplement de l'annonce d'une réforme du code minier ?
Monsieur le ministre, je voudrais vous remercier pour votre implication, dès la campagne électorale, dans le dossier du conflit Fralib à Gémenos. Peu de temps après votre prise de fonctions, vous avez reçu les syndicats représentatifs des salariés de cette entreprise afin de leur proposer différentes solutions. Cette attitude a tranché avec celle des mois précédents au cours desquels personne ne les avait reçus. Je voudrais donc vous demander quelle est la situation actuelle de ce conflit qui, s'il ne concerne pas 3 000 salariés comme à Aulnay, touche tout de même 180 salariés sans compter les emplois induits ?
Pour ce qui est du redressement économique de la première entreprise de France, l'artisanat, l'exigence immédiate doit consister à remettre à plat le régime fiscal qui lui est appliqué.
Il conviendrait de faire émerger une fiscalité innovante. Ainsi, à l'échelle locale, des partenariats pourraient être imaginés afin qu'une entreprise puisse en financer une autre.
Enfin, en ce qui concerne la société Doux, comment peut-on, dans la droite ligne de la proposition de M. Charles Doux, sécuriser l'investissement d'agriculteurs qui décideraient de financer l'entreprise ? Quel pourrait être le rôle de l'État dans un tel schéma ?
Depuis la réforme du crédit impôt recherche conduite il y a quelques années, le premier euro investi dans la recherche par une entreprise lui permet de bénéficier de ce crédit d'impôt. Or, nous nous demandons si les dépenses de recherche doivent s'apprécier en stock ou bien en flux : une société qui augmente ses dépenses de recherche doit-elle être davantage aidée qu'une autre qui les diminue ? Cette question est importante car elle concerne une dépense fiscale de plusieurs milliards d'euros par an, engagée sans conditionnalité ni système de contrôle développé.
L'autre sujet que je souhaiterais aborder est celui de l'État stratège. Pour ne pas parler de PSA, quelle est votre conception du rôle de l'État en tant qu'actionnaire d'une grande entreprise automobile comme Renault ?
Au-delà des mesures que vous avez évoquées pour accroître la compétitivité de notre économie – soutien à l'innovation et garanties apportées au bon fonctionnement de l'économie –, la modération fiscale et la défense d'un environnement administratif et fiscal propice au développement des entreprises sont absolument nécessaires. Or, la majorité mène une politique exactement inverse avec la suppression de l'exonération sociale sur les heures supplémentaires et la hausse du forfait social alors que, ne nous y trompons pas, ce sont les acteurs économiques qui redresseront notre pays. J'aimerais connaître votre opinion sur ce sujet.
La filière agricole et agroalimentaire ainsi que les petites et très petites entreprises industrielles jouent un rôle clé dans la dynamisation des territoires ruraux. Ces entités sont interdépendantes et doivent être soutenues. Les emplois qu'elles génèrent, rarement délocalisables, créent une demande de services publics d'autant mieux satisfaite que le bassin d'activité recèle des emplois diversifiés, pérennes et une bonne capacité d'accueil touristique.
Au reste, nous avons pris acte de l'engagement de l'État de soutenir les entreprises implantées en milieu rural dont il est actionnaire.
En revanche, dans un autre domaine, les atteintes avérées à l'environnement générées par les forages de recherche et d'exploitation de gaz de schiste doivent nous inciter à privilégier le développement des énergies renouvelables – y compris dans les domaines de la chimie verte et alternative – et d'une production économe en énergie. Allez-vous, monsieur le ministre, au prétexte de favoriser l'emploi ou de permettre à notre pays d'avoir une plus grande autonomie énergétique, rouvrir la brèche en matière de forage de recherche de gaz de schiste, et ce au détriment de la qualité de vie et de la préservation du rôle de poumon joué par les territoires ruraux dans notre pays ?
Monsieur le ministre, quelle est votre implication dans le dossier Technicolor-Thomson à Angers ? Quelles interventions avez-vous entreprises auprès de la direction du groupe afin qu'elle assume ses responsabilités envers sa filiale ? Il s'agit du seul site de production de ce groupe implanté en France et il emploie 350 salariés, hors emplois induits. Cette filiale a été placée en redressement judiciaire. J'avais avancé l'idée d'un moratoire permettant la reconversion des ateliers avec les personnels sur place. Il précéderait la vente de l'entreprise, ainsi remise en état de marche, qui pourrait éventuellement opérer sur un marché commercial différent. Avez-vous repris cette proposition ?
Monsieur le ministre, vous n'avez pas la compétence en matière de réglementation des entreprises et, avec la suppression de la TVA anti-délocalisation et des exonérations sociales sur les heures supplémentaires, ne craignez-vous pas que votre majorité parlementaire n'oriente votre action vers un redressement davantage fiscal que productif ?
Enfin, puisque « Le changement, c'est maintenant », à quel horizon situez-vous l'accomplissement du redressement ?
Je souhaiterais vous alerter, monsieur le ministre, sur l'urgence de la situation de Rio Tinto. Vous connaissez bien le dossier, et je vous remercie d'être venu en Maurienne il y a quelques semaines. Un projet de loi est en cours d'élaboration dont l'objectif est de lutter contre les délocalisations décidées par des actionnaires qui estiment que le profit réalisé en France est insuffisant. Dans le cas des dirigeants de Rio Tinto, l'adoption de la loi devrait être postérieure à leur décision définitive. Au-delà de l'urgence sociale pour les 600 salariés concernés, se pose la question du coût énergétique de la production de ces industries électro-intensives ainsi que celle, stratégique, de l'avenir de la filière de l'aluminium dans notre pays : après Saint-Jean-de-Maurienne, y aura-t-il une fermeture de site à Dunkerque ?
Monsieur Moreau, l'Union européenne s'est construite sur les principes de liberté du commerce et de l'industrie et de libre circulation des capitaux. Le traité de Lisbonne, en instaurant, au rang de ses principes, la concurrence libre et non faussée a accentué l'idée selon laquelle l'UE devait se fixer pour objectif l'accroissement de la liberté commerciale au-delà de ses frontières. Cette direction a été suivie à tel point que l'ensemble des politiques engagées ces dernières années ont été de nature libre-échangiste. Un accord de libre-échange vient ainsi d'être signé avec la Corée du Sud dont une des principales dispositions prévoit l'abaissement, chaque 1er juillet, de 2 % des droits de douane. Inverser ce mouvement requiert donc une expression politique que le Gouvernement français souhaite porter. Ainsi, le Président de la République a mis à l'ordre du jour du dernier Conseil européen des chefs d'État et de gouvernement la question de la réciprocité. Il s'agit maintenant de traduire cette volonté dans le droit de l'Union, ce qui ne pourra être accompli qu'au terme d'une longue bataille. Nous allons demander à la Commission européenne l'application des règles de protection dans les secteurs et pour les filiales qui connaissent une déstabilisation. Cette politique ne diffère en rien de celle conduite partout ailleurs dans le monde. Nous allons également défendre l'adoption de la taxe carbone qui traduit un choix de vie privilégiant des préférences environnementales que d'autres régions du monde ne partagent pas.
Au demeurant, l'Europe est l'un des plus grands marchés mondiaux. Son déficit commercial avec la Chine s'élève, certes, à 150 milliards d'euros – dont 27 milliards d'euros pour la France et 22 milliards pour l'Allemagne, pourtant présentée comme un modèle –, mais il traduit le fait que l'Union est l'un de principaux clients de ce pays, ce qui lui confère une influence auprès de ce dernier pour demander un rééquilibrage des relations commerciales.
En ce qui concerne la question du gaz de schiste, elle sera abordée lors de la conférence environnementale qui se tiendra à l'automne prochain. L'exploitation des gaz de schiste pose des problèmes environnementaux et démocratiques sérieux. Des évolutions technologiques sont possibles mais la nation doit choisir sa politique en la matière en toute transparence.
M. Herth peut être rassuré sur ma proximité de pensée avec le Président de la République. Je suis également en phase avec mes collègues du Gouvernement. M. Hugo Chavez est une référence négative dans mon esprit mais nul n'est besoin d'invoquer son exemple pour se rendre compte que la puissance publique a toute légitimité pour se pencher sur le contrôle des ressources naturelles. C'est ce que font d'ailleurs l'Allemagne, le Japon ou les États-Unis. Ma position personnelle est de défendre le contrôle par l'État – je l'ai dit aux dirigeants de l'industrie pétrolière française – des ressources naturelles du pays. Cette question sera au coeur de la réforme du code minier.
Dans le dossier Fralib, je tiens tout d'abord à rendre hommage à la lutte sociale. Des ouvriers et des cadres de cette entreprise ont été méprisés pendant 600 jours. Ils souhaitaient simplement la faire vivre et avaient élaboré un projet de société coopérative et participative, une Scop. Le Gouvernement a tout d'abord insisté pour que soient reconnues l'existence et la dignité de cette lutte sociale afin de faire comprendre à Unilever, qui possède cette unité de production d'ensachage de thé, qu'il était préférable de dialoguer. Ce groupe a accepté la discussion et a retiré les poursuites qu'il avait engagées contre certains salariés. Je remercie Unilever de ce changement d'attitude ainsi que d'avoir laissé sur le site les machines dont les salariés et les collectivités locales sont dorénavant propriétaires. Les conditions pour atteindre un bon compromis sont donc maintenant réunies. Notre objectif est que les salariés retrouvent un travail. Dans cette optique et avec l'aide de l'AFII, nous étudions l'implantation de projets extérieurs sur le site de Gémenos. Je regrette que cette démarche d'apaisement du conflit et de recherche d'une solution n'ait pas été conduite plus tôt.
Ces dernières années ont été marquées par une forte instabilité fiscale. Nous souhaitons rompre avec cette politique et stabiliser l'environnement dans lequel évoluent les entreprises. Le dispositif du crédit d'impôt recherche fonctionne bien. Des ajustements peuvent être débattus au Parlement mais nous privilégions le maintien de l'économie générale de ce crédit d'impôt.
Nous sommes très confiants dans le processus d'industrialisation du véhicule électrique que mène Renault. Il s'agit là d'un projet avant-gardiste qui va se concrétiser dans le modèle Zoé dont la sortie des usines de Flins est prévue dans les prochaines semaines. Le développement de cet avantage comparatif doit être soutenu par la puissance publique de même que notre marche vers l'hybride et l'électrique. Quant à la localisation des sites de production, elle se situe au coeur de nos préoccupations : au reste, un audit des difficultés existantes a commencé avec le directoire de Renault.
S'agissant de notre politique fiscale, vous n'ignorez pas, monsieur Taugourdeau, que le Gouvernement a hérité d'une dette publique écrasante. Puisque nous ne pouvons ni vivre ni financer notre protection sociale à crédit, nous sommes contraints de conduire une politique courageuse de redressement des comptes publics dont nous aurions aimé que nos prédécesseurs l'aient engagée.
Le groupe Rio Tinto Alcan a pu mener, grâce à une décision de la Commission européenne, une OPA hostile sur le groupe Péchiney il y a quelques années. Des regrets peuvent être exprimés sur la réalisation de ce rachat, la Commission européenne ayant refusé, dans un premier temps, que Péchiney puisse acquérir Alcan. Notre but est le maintien de cette activité industrielle rentable. La France importe la moitié de l'aluminium dont elle a besoin, situation inacceptable dans le pays qui a, le premier, en 1906, développé l'utilisation industrielle de l'aluminium. Si, dans le dialogue qui va s'ouvrir avec Rio Tinto, il apparaissait que ce groupe souhaitait ne plus posséder cette usine, nous tâcherions de trouver une solution alternative afin que le site puisse continuer de fonctionner. L'inquiétude que vous nourrissez, madame Santais, pour l'avenir de la filière aluminium et le maintien de la production sur le site de Dunkerque est légitime quand on constate le démantèlement des implantations du groupe Péchiney sur le territoire national : elles appartiennent souvent à des fonds d'investissement étrangers dont les préoccupations divergent, pour le moins, des nôtres. À nous d'imaginer la constitution d'un groupe d'aluminium français, voire européen.
Monsieur le ministre, vous avez rendu public un courrier datant du 28 juin dernier adressé au président du directoire du groupe PSA, M. Philippe Varin, dans lequel vous lui demandiez « d'engager sans délai le dialogue social et d'en faire une arme collective pour affronter vos éventuelles difficultés dans le respect de vos salariés ». Et, à l'instant, vous venez de rendre un vibrant hommage à la lutte sociale. Or, ce même 28 juin, je vous écrivais afin d'attirer votre attention sur la situation du journal L'Union de Reims qui devait être repris par le groupe La Voix du Nord. Ce projet est malheureusement abandonné car la Filpac-CGT a refusé l'accord social conditionnant la mise en oeuvre du plan de reprise. Six cent quarante emplois sont ainsi menacés. À ce jour, je n'ai même pas eu d'accusé de réception à mon courrier ; je vous pose donc la question : que comptez-vous faire dans ce dossier et quelle réponse pouvez-vous apporter aux salariés de ce journal ?
Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur les problèmes induits par la réduction des délais de paiement instaurée par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008. Cette réduction ne concerne que les délais impartis aux fournisseurs, ceux laissés aux clients étant inchangés voire ayant tendance à s'allonger. Cela fragilise la trésorerie des TPE et des PME, notamment dans le secteur du bâtiment. Ne pourrait-on pas mettre en oeuvre des mesures qui résolvent ces difficultés ?
D'autre part, la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services a renforcé les échelons national et régionaux auxquels sont rattachées les chambres de commerce et d'industrie territoriales. Cette réorganisation menace, à terme, 3 000 postes en France. En outre, cette loi fixe à 8 % le seuil nécessaire à la reconnaissance de la représentativité syndicale au plan national, ce qui ne va pas sans poser de problème. Pensez-vous, monsieur le ministre, que de réels bénéfices soient à attendre de cette régionalisation du personnel des chambres de commerce et d'industrie ?
Une politique industrielle peut-elle être élaborée à vingt-sept, monsieur le ministre, ou ne faut-il pas plutôt l'envisager qu'avec certains partenaires comme l'Allemagne ?
Par ailleurs, avez-vous prévu, au cours du quinquennat, un plan de soutien à la sous-traitance qui viserait, notamment, à améliorer les relations entre les donneurs d'ordres et les sous-traitants ?
Le 27 juillet prochain, le tribunal de commerce retiendra un nouveau projet industriel pour le groupe Doux. Un plan social important devrait être mis en oeuvre ; est ainsi évoquée la suppression de 1 550 CDI et de 120 CDD. Cela ne peut que susciter des inquiétudes pour les salariés dont beaucoup sont des ouvriers ou sont des employés payés au SMIC qui ne possèdent pas de formation. Quelle sera donc la nature, monsieur le ministre, du projet social qui sera développé tant pour les salariés qui seront conservés que pour ceux qui seront licenciés ?
Seul un millier d'entreprises de taille intermédiaires, les ETI, sont implantées dans notre pays alors qu'elles semblent bien résister à la crise, qu'elles continuent de créer des emplois, de conduire des projets innovants et d'exporter une partie de leur production. Quelles mesures le Gouvernement compte adopter pour les soutenir ?
Au cours de la campagne électorale, le sort de l'usine d'Arcelor Mittal a été souvent évoqué, notamment pour affirmer que le parti socialiste allait la sauver alors que la majorité précédente n'aurait rien fait. Ce sujet est aujourd'hui beaucoup moins abordé, d'où ma volonté de connaître, monsieur le ministre, les actions que vous comptez mener. Cette entreprise porte un projet, Ulcos, de captage de CO2 d'un enjeu considérable. Il constitue une réponse à un appel à projet lancé par la Commission européenne, qui l'a retenu en huitième position sur huit projets présélectionnés. Or, seuls deux à trois projets seront retenus. Que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour appuyer Ulcos et, plus largement, pour soutenir notre industrie sidérurgique après les nombreuses promesses que vous avez faites, notamment celle d'un projet de loi qui aurait dû être voté ce mois de juillet et qui devait contraindre M. Mittal, propriétaire de l'entreprise, à la vendre ?
De nombreux acteurs économiques se sont engagés dans le développement du véhicule électrique. Ils rencontrent des difficultés liées à l'étroitesse actuelle du marché. Il convient en effet de soutenir la recherche et le développement dans le domaine des batteries et des autres moyens de production de l'énergie électrique. Par ailleurs, cet effort doit être accompagné d'une nouvelle organisation urbaine prenant en compte l'implantation des bandes de recharge et des parkings dévolus à ces automobiles. Ne devrait-on pas, monsieur le ministre, favoriser l'émergence d'une action commune de l'ensemble des acteurs concernés afin d'assure le développement de cette filière ? L'État stratège pourrait y jouer tout son rôle : non pas agir à la place des parties prenantes mais faciliter la mise en place des coopérations indispensables.
Je retiens trois éléments qui m'agréent particulièrement dans votre propos, monsieur le ministre : une volonté d'impulser un changement de culture entrepreunariale, un refus d'envisager le protectionnisme comme un tabou et une opposition à l'idéologie néo-libérale qui a causé beaucoup de dégâts.
Dans des territoires marqués par un contexte de désert industriel, d'une dépendance vis-à-vis des importations, d'une économie de comptoir, d'un chômage de masse atteignant 22 % de la population active, auriez-vous, madame et monsieur les ministres, une approche spécifique en matière de réindustrialisation pour permettre le développement de l'innovation et de la coopération économique dans ces régions ?
Dans ma circonscription est implantée l'entreprise SAM Technologies, propriété du groupe Arche, premier fondeur national et leader européen en fonderie sous pression, spécialiste de la conception et de la fabrication de composants pour l'industrie automobile et dont les principaux clients sont PSA et Renault. Le prix moyen des pièces, une fois neutralisé l'achat des matières premières, est inférieur de 30 % à son niveau d'il y a cinq ans. Afin de maintenir son chiffre d'affaires, les chaînes de production ont été aussi automatisées qu'il était possible de le faire. Quelles mesures d'accompagnement envisagez-vous, monsieur le ministre, pour maintenir l'activité en France de ces entreprises de sous-traitance qui font vivre de nombreux territoires, notamment ruraux ?
En lien avec la situation de Forest-Liné, producteur reconnu de machines-outils, quelle politique comptez-vous, par ailleurs, mettre en oeuvre pour cette filière ?
La mise en place de la banque publique d'investissement –BPI – est très attendue par les dirigeants des PME et des PMI du fait des difficultés qu'ils rencontrent pour financer leur activité. Quel calendrier est prévu par le Gouvernement ? Cette BPI aura-t-elle une assise régionale lui permettant de s'adosser aux conseils régionaux qui participent déjà à des opérations de financement d'entreprises par le biais d'OSEO ?
Les fils du dialogue sont en passe d'être repris dans le dossier de L'Union de Reims. Le CIRI travaille activement à la résolution du blocage actuel.
Tous les pays européens qui disposent encore d'une industrie subissent actuellement des dégâts considérables. Il est temps de les fédérer, et nous devons donc être audacieux et refuser le statu quo. Toutes les unions douanières régionales ont contrebalancé la mise en place d'une libéralisation commerciale et d'une harmonisation juridique à l'intérieur par le développement de protections vis-à-vis de l'extérieur. L'Union européenne se distingue par une double ouverture, à l'intérieur comme à l'extérieur de ses frontières. Voilà pourquoi la réorientation de la construction européenne est au coeur de notre politique diplomatique et économique. C'est la cause que je plaiderai inlassablement dans les conseils des ministres de l'industrie.
Le médiateur de la relation inter-entreprises a réalisé un bon travail et je l'ai renouvelé dans ses fonctions. À mes yeux, il a créé une agence de notation informelle des donneurs d'ordres. Cela me paraît très utile qu'un peu de crainte puisse être distillée dans les directoires et les comités exécutifs par la parole publique de M. Jean-Claude Volot. Ce dernier a tout mon soutien et son pouvoir sera élargi.
Des sénateurs ont déposé une proposition de loi sur la sous-traitance automobile. Cette initiative nous paraît prématurée. Nous attendons en effet que la Conférence nationale de l'industrie, chargée d'émettre des propositions avec, fait nouveau, les régions et les partenaires sociaux, les porte à notre connaissance. Nous déciderons alors si une intervention législative ou réglementaire est nécessaire. Pour l'instant, l'État se concentre dans la correction, au cas par cas, des abus de position dominante. Des commissaires au redressement productif ont été nommés. Ils bénéficient, pour l'accomplissement de leur mission, du concours des services de l'État y compris les médiateurs du crédit et de la sous-traitance. N'hésitez pas, mesdames et messieurs les députés, à nous saisir : toute la nation doit être mobilisée pour défendre son tissu industriel.
En ce qui concerne la situation de l'entreprise Doux, M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, et M. Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l'agroalimentaire, ministres pilotes de ce dossier avec notre soutien, veillent à améliorer l'offre du consortium des coopératives qui vise à reprendre l'essentiel de l'activité de la société de M. Charles Doux. Cette procédure est délicate, d'autant plus qu'elle est gérée par un tribunal de commerce, ce qui induit de nombreuses difficultés.
Au sujet d'Arcelor Mittal, j'ai nommé un expert qui m'accompagne notamment au cours des visites que j'effectue en Belgique et au Luxembourg. Le Gouvernement luxembourgeois considère également qu'Arcelor Mittal ne respecte pas les accords qu'il a contractés. J'ai donc indiqué au directoire de ce groupe que les États européens sur les territoires desquels des sites de production étaient fermés souhaitaient s'organiser pour résister à la mise en oeuvre de mesures négatives. M. Faure, vice-président du conseil général des mines, rendra un rapport le 27 juillet prochain, qui contiendra des propositions de solution. Sur la base de ces pistes de réflexion, viendra ensuite le temps de la discussion avec les organisations syndicales et la direction d'Arcelor Mittal. Nous souhaitons évidemment le maintien de l'activité chaude et froide à Florange.
La Commission européenne a certes sélectionné le projet Ulcos mais ne l'a pas placé au sommet de ses préférences. À nous de défendre ce projet auprès d'elle.
Les réponses aux questions posées sur l'avenir du véhicule électrique et du secteur de la sous-traitance seront apportées par le plan automobile que je présenterai au conseil des ministres du 25 juillet prochain.
Pour ce qui est de la question de l'industrialisation des territoires comme celui de la Martinique, tous les biens de consommation ne peuvent pas être produits sur place mais le développement de coopérations avec les régions limitrophes pourrait être encouragé. La limitation de la dépendance et le rapprochement des lieux de production avec ceux de consommation font partie des chantiers que je serai heureux de mener avec M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer, et l'ensemble des élus concernés.
La mission de préfiguration de la BPI devrait s'achever avant le mois d'août et le projet de loi devrait être rédigé avant le mois de septembre afin que la BPI puisse fonctionner avant la fin de l'année. Nous voulons aller vite car la création de cet outil de financement de l'économie est attendue par tous les acteurs et notamment par les PME. Notre souhait est d'associer les régions, si ce n'est au capital de la BPI, tout au moins à la prise de décision à l'échelon national comme local. Cette question sera débattue au Parlement.
Comment comptez-vous agir, monsieur le ministre, pour convaincre les consommateurs et les entreprises d'acheter français ?
Je voudrais attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la situation de l'usine Ford en Gironde. Le plan destiné à épargner les 1 000 emplois de cette usine n'a toujours pas été communiqué. En revanche, les machines sont retirées du site et les projets sont régulièrement retardés. Je me permets de vous inviter, vous et le Gouvernement, à reprendre rapidement le contrôle de la situation afin que Ford, largement subventionné par les collectivités locales, respecte les engagements pris. Madame Lagarde s'était engagée sur ce dossier dont le traitement ne peut être laissé à des comités de pilotage locaux et au médiateur.
Je commencerai mon propos par un hommage, monsieur le ministre. J'ai assisté cette semaine à une réunion de la convention de conversion de l'usine de Celanese, fermée il y a quelques années. Au cours de cette réunion, les dirigeants de Celanese se sont félicités d'avoir mis un terme à l'activité de cette usine en 2009 car, avec votre présence au Gouvernement, ils ont affirmé qu'ils ne pourraient y procéder aujourd'hui.
Au sujet de l'acceptabilité industrielle, si le bassin de Lacq, dont je suis l'élu, était découvert aujourd'hui, il me paraît certain qu'il ne pourrait pas être exploité pour des raisons environnementales et réglementaires. Travailler dans les cinq ans qui viennent à l'amélioration de l'acceptabilité industrielle par les populations est une nécessité. Cela passe notamment, dans le domaine de la fiscalité, par le rétablissement d'un lien plus étroit entre les collectivités locales et les entreprises.
Concernant la BPI, je souhaiterais connaître la perception qu'ont les présidents des conseils régionaux des investissements à venir dans leur région.
Par ailleurs, quel est le rôle précis des commissaires au redressement productif et comment les élus peuvent-ils les interpeller ?
Monsieur le ministre, je m'interroge également sur le niveau des marges des entreprises et le montant des dividendes versés aux actionnaires.
Enfin, quels instruments comptez-vous mettre en oeuvre pour favoriser le développement des circuits courts ?
Quelles sont les conditions précises de la fermeture de l'usine de crème glacée Pilpa dans le département de l'Aude ? Cette entreprise a été achetée il y a dix mois par un groupe germano-britannique et s'apprête à licencier 187 salariés au motif de concentrer la production sur un nombre plus restreint de sites. Ce groupe procède ainsi à la suppression d'un concurrent en rachetant le brevet que détenait Pilpa.
Je souhaiterais également vous alerter, monsieur le ministre, sur le dumping social exercé par des entreprises du bâtiment ressortissantes de l'Union européenne qui obtiennent des marchés, hors de tout cadre réglementaire, aux dépens des entreprises françaises, lesquelles ne peuvent s'aligner sur les prix pratiqués.
En décrivant le régime de l'assurance-vie, vous avez souligné, monsieur le ministre, qu'il s'agissait d'un placement défiscalisé. Votre propos signifie-t-il qu'un projet de fiscalisation de l'assurance-vie soit envisagé ? Par ailleurs, comment comptez-vous inciter les Français à placer leur épargne dans les entreprises par le biais de cette très bonne idée qu'est le livret d'épargne entreprise ?
La première action à mener pour inciter à acheter français est de vanter la qualité des produits hexagonaux. Nombre d'organisations syndicales défendent l'idée d'une traçabilité des produits, traçabilité passant notamment par l'indication, sur les étiquettes, des atteintes aux droits sociaux et environnementaux commises dans le pays de fabrication. Les grands pays protectionnistes n'édictent d'ailleurs jamais de lois, ils favorisent le développement du réflexe patriotique.
Nous allons, en effet, madame Got, nous investir dans le dossier de l'usine Ford à Blanquefort afin que le préfet et les acteurs locaux ne soient pas isolés.
Monsieur Habib, je vous remercie pour votre hommage. S'agissant de l'acceptabilité industrielle, nous devons promouvoir les métiers de l'industrie. Les usines ont eu, pendant des années, mauvaise presse ; à tel point que la classe dirigeante vantait l'émergence d'une économie de services et l'existence d'une France sans usines. Le résultat de ce dédain est que l'industrie ne produit plus que 13 % de la richesse nationale et que nous sommes dépendants du monde entier. Dans le chantier de la reconstruction de notre industrie, l'acceptabilité par les populations est un élément important, et je suis preneur d'un travail parlementaire sur ce sujet.
Une circulaire définissant le périmètre des prérogatives des commissaires au redressement productif a été publiée. Leur action peut se comparer à celle du CIRI pour les 3 500 entreprises de plus de 400 salariés même si, en l'espèce, 3,5 millions de PME sont concernées. Vous pouvez échanger des informations avec les commissaires même si une exigence de confidentialité peut être avancée pour certains dossiers. Ils sont au service de la défense des outils industriels au plan local en liaison avec les créanciers, les actionnaires, les partenaires sociaux et les élus.
Je répondrai ultérieurement à la question de Mme Fabre.
L'avantage fiscal accordé aux épargnants qui souscrivent une assurance-vie ne va pas être remis en cause, mais il doit être accompagné de contreparties de la part des compagnies d'assurance en matière d'investissement.
M. Jean-Charles Taugourdeau m'a interrogée sur la situation de Technicolor, ce qui renvoie au problème plus général des sous-traitants et des donneurs d'ordres. Thomson- Technicolor a une longue histoire industrielle. Son site d'Angers, avec 350 emplois, est menacé depuis plusieurs années, étant confronté à la concurrence internationale, spécialement asiatique. Cette menace s'est récemment aggravée à la suite de la décision de la Commission européenne d'abaisser les droits de douane sur les décodeurs télévisuels et du fait de l'annulation soudaine d'une importante commande pour non respect des délais de développement d'un produit. Le Gouvernement est intervenu dès la mise en redressement de l'entreprise. Les relations étaient bloquées entre l'intersyndicale et la direction de Technicolor ; nous avons donc immédiatement mis en place un groupe de travail permettant de renouer le dialogue. Nous cherchons en priorité une solution de reprise pérenne afin de préserver l'emploi dans le cadre d'une reconversion, et plusieurs réunions de travail se sont tenues à cet effet – la prochaine aura lieu vendredi prochain à Bercy. En liaison avec la région, l'État continue de se mobiliser sur ce dossier. Connaissant bien le tissu économique local et les possibles repreneurs, le commissaire au redressement productif exerce sur place un rôle très important, assistant les porteurs de projets éventuels.
M. Yannick Moreau m'a interrogée sur l'accès aux marchés publics et sur la préférence nationale. Notre réflexion en ce domaine s'oriente vers les moyens d'assurer un meilleur accès des PME aux commandes publiques, de l'État comme des collectivités locales, car leur place ne correspond pas à leur poids dans l'économie. Les PME constituent un facteur important d'innovation et nous souhaitons donc rééquilibrer les choses en leur faveur. Nous envisageons dans ce but des formules telles que la fixation d'un seuil d'achat innovant pour l'ensemble des marchés publics ou la création de concours à l'image de ce qui se pratique aux États-Unis : l'État soumet un problème à des entreprises, qui proposent une solution, et il achète celle qui est retenue.
Mme Marie-Noëlle Battistel et M. Damien Abad ont évoqué les relations entre donneurs d'ordres et sous-traitants. Depuis plusieurs mois, une dynamique de collaboration semble s'être instaurée entre les grandes entreprises et les PME. Je souligne ici la réussite de la médiation conduite par M. Jean-Claude Volot : plus de 537 dossiers ont ainsi été reçus, représentant plus de 1,6 million d'emplois, avec un taux de succès de l'ordre de 80 %. Nous soutenons également, et financièrement, des initiatives privées comme celle de l'association Pacte PME. Les choses évoluent : plusieurs grands groupes ont, au cours des derniers mois, remis à plat leur politique d'achats dans le cadre d'un « co-développement » avec leurs fournisseurs. Pour autant, les relations interentreprises restent une préoccupation majeure : les entreprises au comportement vertueux restent encore minoritaires. L'essentiel du chantier est encore devant nous.
La question des délais de paiement a été soulevée par plusieurs commissaires. Après s'être améliorée au cours des deux dernières années, la situation se dégrade de nouveau. Il nous revient donc de veiller à ce que la loi soit respectée. Une plus grande présence des PME dans les commandes publiques pourrait également améliorer les choses.
Le secteur des télécommunications traverse en ce moment une phase critique, avec un intérêt du consommateur différent à court terme et à long terme et pouvant diverger avec celui de l'emploi à moyen terme. La régulation asymétrique du marché tend à privilégier les nouveaux entrants et à organiser la concurrence par le biais des infrastructures, ce qui aboutit parfois à la multiplication d'équipements en parallèle, notamment pour la fibre optique, générant quelques gaspillages. Quelle est aujourd'hui la part revenant aux autorités politiques dans cet univers ? Loi après loi et directive après directive, on a laissé au seul régulateur le soin de fixer les règles comme de veiller à leur application, ce qui ne fut pas toujours le cas. Ici même, il y a quelques jours, le président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a dû répondre à de nombreuses questions à ce sujet.
Le déploiement du très haut débit constitue un enjeu important pour l'emploi, pour le développement économique et pour la vie de nos territoires. Lors de la campagne présidentielle, M. François Hollande avait défendu l'idée de disposer d'un seul opérateur national en dehors des zones très denses afin d'apporter le très haut débit à 100 % de la population dans les dix prochaines années, soit pour 2022. Confirmez-vous ce projet ? Dans l'affirmative, comment respecterez-vous la réglementation européenne sur la concurrence par les infrastructures ?
Comment alimenterez-vous le fonds d'aménagement numérique des territoires (FANT) en complément des deux milliards d'euros prévus alloués au titre du fonds de solidarité numérique (FSN) ?
L'emploi dans le secteur des télécommunications suscite une certaine polémique autour des bénéfices attendus, ou non, de la quatrième licence que le gouvernement précédent avait décidé d'autoriser en 2009. Les opérateurs ont donc eu trois ans pour se préparer à son ouverture.
Nous constatons depuis 15 ans des réductions d'effectifs, notamment chez les équipementiers des télécommunications. L'avènement de la concurrence, décidée en 1998, avait déjà provoqué un choc monumental avec l'arrivée de Télé 2 Mobile le 1er avril 2000. Mais nous n'entendons plus aujourd'hui, dans le discours du gouvernement, parler de l'économie numérique qui recrute, c'est-à-dire de l'économie numérique de service, là où la croissance devrait être la plus forte. L'économie numérique a créé 700 000 emplois en quinze ans : qu'allez-vous faire pour la soutenir ? Ne faut-il pas l'aborder globalement et favoriser les segments en croissance plutôt que de se contenter d'accompagner les opérateurs dans le déploiement du très haut débit et des réseaux 4G, même si celui-ci est évidemment indispensable ?
Comment pouvez-vous exclure du crédit impôt recherche les banques qui, en matière d'ingénierie financière, font de la recherche-développement (R-D) et des mathématiques appliquées, sans exclure aussi les entreprises de l'économie numérique, lesquelles sont souvent des PME en croissance développant des moteurs de recherche intelligents ? Je pense notamment à la société Criteo, dont vous avez récemment inauguré le siège.
Dans cette affaire, l'État est parfois coupable. À l'époque de la formation de la bulle spéculative autour des télécommunications, il vendait aux enchères des droits d'usage des ondes hertziennes, bien qu'il s'agît là d'une partie du domaine public, et parfois au-delà de ce que les abonnements pouvaient rapporter à terme à l'opérateur acquéreur – ce qui, au demeurant, arrangeait bien les finances publiques, y compris dans une période récente. Les dysfonctionnements de la régulation des télécommunications doivent donc être assumées à plusieurs niveaux.
Vous avez rappelé hier, madame la ministre, que la filière numérique était facteur de croissance, d'innovation et d'emploi. Vous avez aussi indiqué que le Gouvernement présenterait un train de mesures propres à éviter la casse sociale, à relancer les investissements et à réconcilier l'intérêt des consommateurs avec celui des salariés du secteur, enjeu crucial dans le contexte économique actuel. Pouvez-vous nous en fournir les grandes lignes et nous apporter des précisions complémentaires ?
Les équipementiers des télécommunications, français et européens, sont soumis à une concurrence internationale très rude. Quelles sont vos perspectives de réflexion et d'action en faveur des principes de juste échange et de réciprocité, notamment au plan européen ?
Il faut certes accompagner les développements du numérique, lesquels sont créateurs d'emplois, mais il convient de ne pas oublier les salariés des opérateurs et des équipementiers, parfois victimes de plans sociaux. On ne saurait minimiser ce problème en affirmant, comme l'a fait le régulateur, que ces pertes d'emplois seront compensées par des créations dans les services. Or, quand un territoire subit des plans sociaux, il est extrêmement difficile de recréer de l'activité au même endroit afin que chacun retrouve sa place et confiance dans l'avenir. Il me paraît donc préférable d'aborder ces questions par anticipation, d'autant plus qu'il s'agit de secteurs stratégiques. Les équipementiers assurent ensemble plus de 10 000 emplois. Je ne voudrais pas qu'on les considère comme appartenant à une industrie en retard, alors que ces entreprises innovent beaucoup et contribuent à structurer nos territoires. Cette réflexion doit être menée en France comme au plan européen.
Nous sommes attendus sur l'aménagement numérique du territoire, qui constitue un enjeu à la fois sociétal, économique et industriel. Quelle est votre feuille de route à ce sujet ?
Le ministre du redressement productif a reçu en début de semaine les opérateurs de téléphonie mobile. La presse a évoqué un accord entre le Gouvernement et les opérateurs afin que ceux-ci puissent restaurer leurs marges, restreignant pour cela les droits des consommateurs. On reviendrait ainsi sur les avancées de la loi Châtel du 3 janvier 2008 en autorisant de nouveau les hotlines payantes ou en rendant plus onéreuses les sorties anticipées de contrats. Pouvez-vous nous apporter des précisions à ce sujet ?
Le Gouvernement a lancé, le 12 juillet dernier, une mission d'expertise sur la fiscalité de l'économie numérique, qui constitue un thème récurrent. On nous annonce déjà de nouvelles taxes proposées par certains sénateurs dès l'examen du collectif budgétaire. Je présenterai moi-même quelques amendements à ce sujet. Quelle est votre vision ? Comment faire contribuer le numérique ? Sans attendre les conclusions de la mission d'expertise, vers quelles mesures vous orientez-vous ?
Êtes-vous satisfaite par le déploiement actuel du très haut débit et par son cadre législatif ? Une opération vérité ne devrait-elle pas être menée sans délai par rapport aux annonces faites, en particulier par les opérateurs privés, afin de tenir les objectifs du programme national très haut débit. Prévoyez-vous de nouvelles mesures législatives ?
Existe-t-il un plan pour assurer, en matière d'adressage internet, la transition vers la norme IPV 6 afin d'éviter la pénurie d'adresses IPV 4 ?
Quel est l'avenir de la loi Hadopi ?
Vous avez récemment nommé un de vos proches conseiller au poste de secrétaire général du conseil national du numérique (CNN), ce qui a provoqué la démission de presque tous les membres de cette instance. Pourquoi ce choix et cette méthode peu transparente ? Nous n'avons aucune information sur la mission du nouveau secrétaire général. Quelle est sa feuille de route ? Selon quel calendrier ?
Le plan France numérique 2012-2020, ayant donné lieu à une consultation publique du 21 juillet au 30 septembre 2011, avait reçu 38 contributions de l'ensemble du secteur et fixé 57 objectifs prioritaires pour le développement de l'économie numérique. Comptez-vous le mettre en application ?
Nous avons reçu le régulateur des télécommunications il y a une dizaine de jours, principalement pour évoquer la panne qui a affecté le réseau d'Orange. Il semblerait que les opérateurs et l'ARCEP se parlent peu. Le Gouvernement envisage-t-il de refondre cette autorité ou de redéfinir son périmètre de compétences ? Quels rôles respectifs incomberaient au Gouvernement et au régulateur selon la nouvelle politique des télécommunications ?
Plusieurs associations de collectivités locales proposent la création d'une agence nationale de péréquation des réseaux électroniques afin que, sur l'ensemble du territoire, rural comme urbain, on puisse financer des investissements en faisant également appel à la part publique et à la part privée. Aujourd'hui, en zone rurale, l'accès au haut débit est financé par les seules collectivités locales, ce qui créé des inégalités entre nos concitoyens.
Je ne crois pas que le Président de la République ait préconisé, durant sa campagne électorale, l'existence d'un seul opérateur national pour déployer la fibre optique en dehors des zones très denses. Il n'en reste pas moins que le cadre actuel n'est pas satisfaisant, notamment pour les collectivités territoriales.
Dans les zones très denses, les opérateurs ont déjà quasiment déployé les nouveaux réseaux, même s'ils se heurtent parfois à quelques difficultés de raccordement final. Dans les zones « appel à manifestation d'intention d'investir » (AMII), une répartition géographique s'est opérée entre opérateurs, principalement entre France Télécom et SFR, Bouygues restant à la marge. Dans les zones non denses, il revient aux collectivités de s'organiser pour déployer des réseaux d'initiative publique.
Il manque à ce schéma un dispositif de péréquation : le FANT n'a jamais été abondé. La contribution de l'État à l'ancien fonds s'élève aujourd'hui à deux milliards d'euros, dont 900 millions en subventions et 1,1 milliard en prêts aux opérateurs, qui n'ont d'ailleurs pas été consommés. Nous souhaitons donc alimenter le FANT au profit des zones non denses, dans lesquelles les collectivités locales ne sauraient financer les réseaux sans prendre de risque économique et commercial élevé.
Dans les zones dites AMII, nous souhaitons également répondre à l'inquiétude légitime des collectivités qui redoutent, compte tenu du caractère non opposable des conventions passées avec les opérateurs, que les engagements d'investissement de ces derniers ne soient pas respectés ou soient décalés dans le temps. Nous entendons donc ouvrir une discussion avec eux afin que leurs engagements les lient davantage. Nous voulons aussi que les collectivités locales puissent se substituer à un opérateur défaillant pour déployer un réseau.
Cette politique exige un pilotage national, comportant un cahier des charges qui garantisse notamment l'interopérabilité des réseaux et une certaine harmonie entre eux. Les collectivités qui n'ont encore rien engagé doivent pouvoir bénéficier de l'expérience de celles qui les ont précédées avec succès : par exemple, l'Auvergne, la Bretagne et la Manche. L'instance nationale de pilotage devra gérer le FANT et proposer aux collectivités une assistance à maîtrise d'ouvrage.
L'emploi dans le secteur des télécommunications donne actuellement lieu à de nombreuses discussions entre les opérateurs, certains attribuant à l'arrivée du quatrième opérateur mobile toutes leurs difficultés financières. Nous souhaitons procéder à une analyse économique plus fine. C'est pourquoi nous avons demandé aux quatre opérateurs de nous fournir des chiffres très précis sur la situation de l'emploi, sur leurs marges et sur leurs investissements au cours des cinq derniers exercices. La tendance à la réduction de l'emploi dans le secteur semble s'inscrire dans une longue durée et n'est pas propre à la France, puisque l'on constate le même phénomène aux États-Unis. Toutefois, depuis l'attribution de la quatrième licence, l'emploi a eu tendance à croître. La réalité s'avère donc plutôt nuancée, et c'est en fonction de celle-ci que nous formulerons des propositions.
Aujourd'hui, les opérateurs de télécommunications sont surtout mobilisés par le déploiement du très haut débit, ce qui nous conduit à adopter une vision macroéconomique de l'emploi dans les télécommunications car d'importants investissements à long terme sont prévus à ce titre, en support de l'État et des collectivités locales.
Il n'existe pas, à ce jour, d'accord entre le Gouvernement et les opérateurs du genre de celui mentionné par M. Lionel Tardy et comportant une sorte d'échange entre maintien de l'emploi et assouplissement d'une certain nombre de règles. Nous n'avons, pour le moment, fait que tracer des pistes. On ne peut nier l'impact de l'arrivée du quatrième opérateur : le revenu par abonné a considérablement baissé, ce qui modifie sensiblement la situation économique des opérateurs, même si l'offre de Free a aussi permis d'élargir le marché. Mais le rétablissement du paiement du service client n'est pas à l'ordre du jour. Certains opérateurs ont en revanche proposé que certains services premium, qui restent à définir, puissent être proposés à titre payant.
Je souhaite surtout que l'on trouve des relais de croissance pour les opérateurs afin qu'ils puissent faire face à leurs obligations et honorer leurs engagements. Un des ces relais pourrait résider dans le très haut débit mobile. Savoir si les opérateurs allaient pouvoir utiliser les fréquences de 800 mégahertz pour commencer à expérimenter la 4G constituait un point de blocage depuis plusieurs mois pour des raisons techniques, les fréquences de Bouygues Telecom voisinant celles de la TNT, ce qui aurait pu entraîner des brouillages. Ce point de blocage a été levé hier : nous avons obtenu un accord des opérateurs entre eux pour une expérimentation qui va débuter très rapidement et devrait permettre d'accélérer la venue de la 4G.
Il faut assurer une certaine stabilité du cadre législatif, réglementaire et fiscal afin d'établir un climat de confiance favorable aux entreprises et aux investisseurs. C'est pourquoi le crédit impôt recherche sera maintenu. Les modifications envisageables porteraient sur un recentrage en faveur des PME, afin de leur en faciliter l'accès, sans remettre en cause le dispositif pour les grandes entreprises. Ce système est en effet un élément attrayant pour investir en France.
Dans le domaine des banques et des assurances, nous souhaitons cibler certaines activités bancaires, telles que le fast trading. En tout état de cause, exclure des secteurs entiers du crédit impôt recherche ne serait pas eurocompatible.
Pour éviter toute casse sociale dans les télécommunications, nous travaillons avec les opérateurs et les syndicats sur la manière de restaurer les marges afin que les entreprises puissent investir davantage. Les équipementiers connaissent une situation parfois difficile qui, elle non plus, n'est pas propre à la France. Mêmes des entreprises chinoises, comme ZTE, sont touchées. Nous souhaitons mener une réflexion sur l'ensemble de la filière car il existe d'importantes possibilités de reconversion au sein d'une économie aussi dynamique et porteuse de croissance que le numérique. C'est pourquoi nous réfléchissons avec les syndicats à des dispositifs de formation, que l'on pourrait élargir à d'autres secteurs économiques, dont le BTP.
La fiscalité du numérique est effectivement un sujet récurrent car il est difficile à traiter. Certains opérateurs sont malaisés à appréhender d'un point de vue fiscal, leurs activités ne pouvant se rattacher à un territoire national. Le sénateur Philippe Marini a présenté un certain nombre de propositions à ce sujet, et en son temps, le CNN en avait également formulées. Nous avons décidé de missionner un inspecteur des finances et un membre du Conseil d'État spécialisé en fiscalité pour valider certaines pistes de travail déjà explorées durant la campagne présidentielle, telles que les accords de peering payant – mais, ils ne permettent d'appréhender que les revenus d'opérateurs utilisant des flux importants d'octets. La mission rendra ses conclusions à l'automne. Il est indispensable d'assurer une concurrence loyale entre les opérateurs européens et ceux qui s'affranchissent de toute règle fiscale, prenant ainsi parfois des positions quasiment monopolistiques sur des marchés adjacents.
L'avenir de la loi Hadopi fera, lui aussi, l'objet d'une mission, qui devrait être confiée à M. Pierre Lescure. Le ministère du redressement productif est évidemment attaché à la propriété intellectuelle, mais le cadre législatif ne nous paraît plus adapté aux nouveaux usages et aux nouveaux comportements des consommateurs. Les moyens de défendre la propriété intellectuelle et de lutter contre le piratage devront donc être revus.
Le CNN est une institution indispensable à l'heure où les enjeux du numérique sont considérables et où l'information des pouvoirs publics peut être utilement complétée par la vision de certains acteurs de l'écosystème : entrepreneurs, chercheurs ou journalistes … Cela dit, j'estime que la composition du conseil n'était pas assez ouverte, ni paritaire, ne comptant que deux femmes sur 18 membres. Il faut ouvrir l'institution au monde de la recherche …
Je regrette aussi que le Parlement ne soit pas représenté.
M. Jean-Baptiste Soufron a donc été nommé secrétaire général du conseil après une vacance du poste de plusieurs mois, l'ancien titulaire ayant rejoint l'entreprise Google, à laquelle il s'était attaqué dans ses précédentes fonctions, ce qui n'est guère satisfaisant du point de vue déontologique. Le nouveau secrétaire général a donc pour tâche de réfléchir à la gouvernance et aux missions du CNN, qui ne sont pas parfaitement bien définies, ainsi qu'à une composition plus ouverte et plus paritaire. L'institution pourra ainsi mieux nous aider à réfléchir aux grands enjeux prospectifs du numérique.
France numérique 2020 représente en effet un important travail, fruit de nombreuses contributions. Je n'exclus pas de les utiliser.
La question posée sur l'IPV 6 fera l'objet d'une réponse écrite, le sujet étant très technique.
Le ministre du redressement productif a une vision plutôt volontariste de la manière dont l'État doit à nouveau s'impliquer dans le secteur des télécommunications. Ce secteur a été un peu laissé en friche, ce qui explique peut-être que l'autorité de régulation s'est sentie investie d'une mission quasi gouvernementale. Le gouvernement précédent n'a pas joué un rôle suffisant et nous entendons corriger les choses. C'est ainsi que nous allons faire procéder à un audit de sécurité et de résilience à la suite de la panne d'Orange, audit que nous déléguerons à l'ARCEP ou à l'Agence nationale des fréquences (ANFr) – un décret en Conseil d'État est en cours de préparation.
Il est indispensable que les collectivités locales disposent d'une visibilité sur l'utilisation de leurs réseaux et sur leur financement. C'est pourquoi le FANT assurera la péréquation dans les zones non rentables. Plusieurs pistes d'alimentation du fonds sont actuellement en discussion. À la fin de ce mois, une réunion de réflexion à ce sujet aura lieu avec l'ensemble des opérateurs, les représentants des collectivités locales, les industriels et des parlementaires.
Lors de la dernière législature, nous eûmes un débat assez vif à propos de la nomination éventuelle d'un commissaire du gouvernement auprès de l'ARCEP, poste qui existe déjà auprès du régulateur de l'énergie. Les nombreuses réticences, de la majorité de l'époque comme de l'opposition, empêchèrent le projet de voir le jour. Pourrait-il être repris aujourd'hui ? Ou bien considérez-vous qu'il faut conserver la séparation entre le gouvernement et le régulateur ?
Je crois que la réflexion que nous devons avoir sur les autorités de régulation doit être plus globale. La convergence, l'arrivée de la télévision connectée, le deuxième dividende numérique : un certain nombre de sujets nous poussent à conduire une réflexion d'ensemble. Je ne suis pas en train de parler de fusion des autorités de régulation…
… non. J'ai un peu anticipé. Je crois qu'il faut que nous ayons aujourd'hui une réflexion d'ensemble. La question du commissaire du Gouvernement était devenue un point de fixation quasi personnel entre le ministre chargé de l'économie numérique et l'actuel titulaire du poste. Nous ne devons pas aborder la question de cette manière-là. Nous allons essayer de réfléchir de manière plus générale à ce que doit être la régulation du secteur des communications électroniques et des médias, en prenant un peu de hauteur par rapport à cette question. Celle-ci ne sera pas immédiatement à l'ordre du jour.
Les réponses au problème de la cohabitation entre la 4G et la TNT semblent traîner en longueur. Des expériences ont été menées à Laval. Parmi les solutions les plus radicales, l'ANFr avait suggéré le passage à un autre mode de réception. Mais l'usage de la bande des 800 mégahertz soulève, on l'a vu, des difficultés avec la TNT. Celle des 2,6 gigahertz pose d'autres problèmes, cette fois avec les radars de l'aviation civile. L'affaire a du mal à se décanter, alors qu'il devient urgent d'agir. Vous évoquez de nouvelles expérimentations …
Oui, parce que le blocage provenait du désaccord entre les opérateurs sur la question des expérimentations. Puis ils ont compris que la 4G leur fournissait l'occasion d'un nouveau souffle. Les obstacles sont donc en train de se lever et nous pourrons avancer à partir de l'utilisation de la bande des 800 mégahertz, une fois qu'elle aura été nettoyée.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 18 juillet 2012 à 16 h 15
Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Bruno Nestor Azerot, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. André Chassaigne, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Franck Gilard, M. Daniel Goldberg, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. David Habib, M. Antoine Herth, M. Henri Jibrayel, M. Armand Jung, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Serge Letchimy, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Michel Piron, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. Frédéric Roig, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Clotilde Valter, Mme Catherine Vautrin, M. Fabrice Verdier
Excusé. - M. Jean-Michel Couve
Assistait également à la réunion. - Mme Isabelle Le Callennec