Intervention de Dominique Plihon

Réunion du 22 mars 2016 à 17h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Dominique Plihon, professeur d'économie à l'université Paris-Nord, porte-parole d'Attac :

Je comprends les raisons de l'utilisation de l'instrument du QE, mais nous sommes allés trop loin dans cette voie. Les banques centrales ont injecté trop de liquidités, si bien qu'une trappe à liquidité s'est formée, empêchant l'argent de financer l'économie réelle et alimentant des bulles spéculatives sur les marchés financiers. Les liquidités des banques centrales contribuent à nourrir la bulle obligataire, qui pourrait éclater si elles décidaient d'augmenter les taux d'intérêt.

La monnaie hélicoptère consiste à jeter de la monnaie dans l'économie de manière aveugle et ne constitue pas l'instrument le plus efficace pour stimuler l'activité économique, puisque des agents ne manquant pas d'argent et n'ayant donc pas une forte propension à consommer du revenu supplémentaire bénéficieraient comme les autres d'une telle mesure. Il serait plus opportun que la BCE accepte de financer davantage la dette publique sur le marché primaire et que l'État s'engage à utiliser cette marge de manoeuvre pour financer des projets prioritaires, comme des actions sociales pour les populations les plus défavorisées et des investissements de long terme pour financer la transition écologique.

La Grèce ne remboursera pas sa dette car elle est insoutenable. La plupart des pays européens seront amenés à restructurer leur dette. Nous sommes plusieurs économistes à souhaiter l'organisation d'une conférence européenne sur les dettes publiques pour discuter de l'état, contrasté, de l'endettement des pays de la zone euro. L'objectif est d'alléger le fardeau de la dette pour permettre à certaines économies de redémarrer grâce, notamment, à des investissements publics de long terme. Il faut envisager une restructuration des dettes, celle-ci pouvant prendre un contour différent selon les pays. Les mesures de restructuration vont de l'annulation – qui concernera la Grèce, une partie de sa dette ayant d'ailleurs déjà été annulée –, au rééchelonnement pour allonger les échéances et à la négociation des taux d'intérêt. Les pays de la zone euro pourraient obtenir une restructuration, mais nous n'en sommes pas là aujourd'hui.

Tous les emprunts publics européens relèvent d'une clause d'action collective ; si un pays se trouve en difficulté et souhaite restructurer sa dette, et que la majorité de ses créanciers acceptent la négociation, alors la minorité ne peut pas la bloquer. Des fonds vautours, ne détenant que 1 % de la dette argentine, ont obligé ce pays à passer sous leurs fourches caudines à cause de l'absence de clause d'action collective pour la dette passée, alors que la majorité des créanciers aimeraient renégocier la dette.

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