Intervention de Colette Capdevielle

Séance en hémicycle du 5 avril 2016 à 21h30
Réforme du conseil supérieur de la magistrature — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaColette Capdevielle :

… comme si le fait d’être syndiqués allait les empêcher de maintenir leur jugement à distance des autorités publiques – c’est-à-dire d’être indépendants –, à distance des parties au procès – c’est-à-dire d’être impartiaux – et à distance des intérêts ou des valeurs en jeu – c’est-à-dire d’être désintéressés.

Évoquons les conseillers prud’hommes, comme l’a fait tout à l’heure le garde des sceaux, les assesseurs des tribunaux pour enfants ou des tribunaux des affaires sociales, les jurés d’assises, les avocats qui remplacent les magistrats. Les magistrats du parquet sont des femmes et des hommes qui ont le droit, comme tous les autres, d’exprimer leur opinion. C’est pourquoi je ne comprends pas, chers collègues de l’opposition, votre réaction à ce sujet.

Deux candidats déjà déclarés, et non des moindres, à l’élection présidentielle sont favorables à la réforme de la nomination des membres du parquet. Je déplore donc, avec tous mes collègues du groupe socialiste, républicain et citoyen, votre incapacité à passer des discours aux actes.

Nous aurions aimé voter la version du texte adoptée en première lecture par la commission des lois, mais nous nous satisferons de la rédaction en discussion, parce qu’elle apporte un très net progrès.

Ce texte coupe définitivement tout lien entre le pouvoir politique et les magistrats du parquet en inscrivant dans la Constitution que ces magistrats sont nommés sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature.

Pour ma part, j’ai trouvé cinq bonnes raisons de voter le texte. Je vous les soumets.

Tout d’abord, nous avons déjà trop tardé.

Ensuite, on l’a dit et répété : le projet de loi répond à une exigence européenne posée par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, selon laquelle le parquet à la française n’est pas une autorité judiciaire et ne peut donc constituer une garantie suffisante à la protection des libertés.

Surtout, il s’agit d’une nécessité absolue, compte tenu de l’augmentation des pouvoirs et des compétences de notre parquet, mouvement qui s’est accéléré depuis vingt ans. Aujourd’hui, c’est le procureur de la République qui a le pouvoir sur les comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité, qui décide des ordonnances pénales, des compositions pénales, qui exerce des pouvoirs accrus en matière de délinquance financière, qui décide de l’ouverture des informations judiciaires, qui aiguille vers une comparution immédiate ou renvoie devant le juge d’instruction, et qui siège enfin dans les conseils locaux de prévention de la délinquance.

Désormais, le procureur de la République dirigera les enquêtes pénales, à charge et à décharge. Il autorisera les perquisitions de nuit, les recours à l’IMSI-catcher, à la captation des données, au contrôle des personnes retenues plus de quatre heures pour vérification. Le cas échéant, il sanctionnera aussi les forces de police.

La quatrième raison de voter le texte tient à la nécessité de l’unité du corps judiciaire pour tous les magistrats, qu’ils appartiennent au siège ou à la magistrature debout.

Enfin, le texte répond à la demande forte et légitime de nos concitoyens, qui veulent une justice indépendante, détachée du pouvoir politique, une justice qui ne soit pas sous influence. Il faut restaurer la confiance du justiciable.

Je regrette vraiment la confusion à laquelle vous procédez. Le juge doit être indépendant du pouvoir exécutif mais il doit rester soumis à la loi. C’est pour cela que le juge doit être indépendant. Cela signifie non qu’il serait libre de prendre n’importe quelle décision, mais qu’il doit respecter la loi.

Parce que ce texte représente une avancée notable, j’invite mes collègues de tous les groupes à le voter. En tout cas, monsieur le garde des sceaux, vous pouvez compter sur le soutien sans faille du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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