L’immense majorité des justiciables espère que le jour viendra enfin où le fait de passer devant la justice ne sera plus synonyme de malheur, mais constituera une raison majeure d’espérer. Nos compatriotes aspirent à retrouver la justice, si tant est qu’ait existé un jour dans la longue histoire des hommes une justice sereine, apaisée et célère en laquelle on puisse placer toute sa confiance.
Le modèle français de gestion des juges, des procureurs, des tribunaux et, plus largement, du fonctionnement de la justice place l’exécutif en première ligne. C’est la chancellerie essentiellement qui gère les carrières des magistrats ; elle est l’autorité censée garantir l’indépendance de ces derniers. Le Conseil supérieur de la magistrature n’a plus de place réelle dans les institutions, il n’a aucune visibilité pour nos concitoyens.
Les difficultés actuelles du Conseil supérieur de la magistrature sont de différents ordres : moyens financiers et humains faibles, compétences restreintes, procédure de nomination des magistrats du parquet différente de celle des magistrats du siège, tutelle maintenue du Président de la République. Les blocages autour de ce texte sont essentiellement liés au mode de désignation des membres du CSM et, partant, de leur réelle indépendance. Certains proposent un tirage au sort ; pourquoi pas ? En tous les cas, ce texte est insuffisant pour réaliser l’ambition qu’il affiche.
Les difficultés rencontrées pour réformer le CSM démontrent clairement combien il devient urgent de faire le point sur le fonctionnement de la justice dans son ensemble et sur ses dysfonctionnements, en termes d’indépendance et d’impartialité.
Ainsi, depuis de nombreuses années déjà, la perception de nos concitoyens sur la justice de leur pays est catastrophique, ce qui me paraît particulièrement préoccupant pour notre démocratie.
Je m’interroge sur l’intérêt de ce texte, monsieur le ministre ; un projet plus global relatif à « la justice au XXIe siècle » serait en cours d’élaboration et viendrait modifier à nouveau dans les prochains mois l’ensemble de notre droit. Je crois dès lors qu’il est indispensable d’engager un débat national sur la refonte de notre justice entre tous les acteurs concernés – exécutif, législatif, professionnels du droit et société civile – afin qu’elle puisse remplir sa véritable fonction et que nos concitoyens puissent à nouveau lui faire confiance.
C’est pour ces raisons, madame la présidente, que je compte déposer dans les prochains jours sur le bureau de l’Assemblée nationale une proposition de résolution visant à créer une commission d’enquête parlementaire sur l’état de la justice en France.