Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, je ne reviendrai pas ici sur l’histoire des relations entre la France et l’OTAN. Chacun la connaît, en a sa propre opinion, et le récent rapport d’information de nos collègues Gilbert Le Bris et Philippe Vitel sur l’évolution du rôle de l’OTAN revient longuement sur la question.
Permettez-moi simplement de rappeler qu’en tant que membre fondateur actif, la France a accueilli sur son territoire de multiples infrastructures et de très nombreux personnels, dont la présence a profondément marqué des villes comme Châteauroux, Évreux, Laon, La Rochelle, Orléans, Verdun et tant d’autres, durant une quinzaine d’années. La France accueillait notamment les instances décisionnelles de l’Alliance : le siège de l’OTAN a ainsi occupé le palais de Chaillot, au Trocadéro, à partir de 1952, puis le Palais de l’OTAN, actuelle université Paris Dauphine, à compter de 1959 ; de même, le Grand quartier général des puissances alliées en Europe –Supreme Headquarters Allied Powers Europe ou SHAPE – a été établi à Rocquencourt, dans les Yvelines.
Ainsi, lorsque le Général de Gaulle a pris la décision du retrait, annoncée en conférence de presse le 21 février 1966 et confirmée par courrier au président Johnson le 7 mars, les deux centres décisionnels et les 30 bases militaires ont dû fermer leurs portes. Au total, 27 000 soldats et 37 000 employés civils, soit près de 100 000 personnes en ajoutant leurs familles, ont été priés de quitter le territoire avant le 1er avril 1967.
N’accueillant plus de personnels de l’OTAN sur son territoire, la France a logiquement dénoncé le Protocole de Paris qu’elle avait signé en 1952 et dont les dispositions fixaient le régime juridique des quartiers généraux créés en vertu du traité de l’Atlantique Nord, et de leurs personnels.
Or, depuis la réintégration de notre pays dans les structures militaires intégrées de l’OTAN, en 2009, nous accueillons de nouveau des personnels étrangers de l’OTAN sur notre territoire. L’accession au protocole de Paris, ou devrai-je plutôt dire la ré-accession de notre pays à cet accord, n’est ainsi que la suite logique de la réintégration de la France au sein du commandement militaire intégré de l’OTAN.
Cet accord international ne comporte que des dispositions d’essence avant tout technique, visant à garantir aux personnels militaires et civils de l’OTAN, déployés sur notre territoire, un statut dont bénéficie l’ensemble des personnels affectés dans les structures de l’OTAN sur le territoire des membres de l’Alliance, au premier rang desquels nos compatriotes en poste à Mons en Belgique, à Norfolk aux États-Unis ou ailleurs.
En somme, par l’accession au protocole de Paris, nous ne faisons qu’opérer une simple action de coordination et de bonne administration. Je rappelle d’ailleurs que cette accession ne se traduira pas automatiquement par l’application de ses dispositions sur le territoire national. En effet, le protocole s’applique aux quartiers généraux suprêmes de l’OTAN, ainsi qu’à tout quartier général militaire international créé en vertu du traité de l’Atlantique Nord et directement subordonné à un quartier général suprême. La France n’accueille aucun quartier général de ce type sur son territoire et il n’existe pas de projet en ce sens.
Toutefois, en vertu de l’article 14 du protocole, tout ou partie de ses stipulations peut s’appliquer à tout quartier général militaire international ou à toute organisation militaire internationale, sous réserve d’une décision dite d’activation du Conseil de l’Atlantique Nord. Si la France le demande, plusieurs sites pourraient ainsi être concernés : en premier lieu, et principalement, le Quartier général du corps de réaction rapide de Lille ; en deuxième lieu, le Quartier général de l’état-major de force aéromaritime française de réaction rapide, situé à Toulon et le Centre d’excellence français d’analyse et de simulation pour la préparation aux opérations aériennes, localisé à Lyon ; enfin, le Quartier général du corps de réaction rapide européen de Strasbourg, dont le statut est actuellement fixé par un traité spécifique.
Selon les données du ministère de la défense, une soixantaine de militaires sont concernés à Lille, une dizaine à Lyon et Toulon, et près de 160 à Strasbourg.
Je ne détaillerai pas ici les dispositions du protocole de Paris. Il s’agit essentiellement de mesures précisant les droits et obligations des quartiers généraux et de leurs personnels – exonérations fiscales et douanières, personnalité juridique, droit d’ester en justice, liquidation des avoirs, inviolabilité des archives, privilèges de juridiction, par exemple. Il vient d’en être question.
Contrairement à ce qui a été dit ici ou là, le protocole de Paris ne porte nullement atteinte à l’autonomie et à l’indépendance de notre politique de défense ou à la souveraineté nationale, ni ne remet aucunement en cause notre position vis-à-vis de l’Alliance atlantique. Y accéder permettra de simplifier la vie quotidienne des personnels implantés sur notre territoire, de renforcer l’attractivité de la France et ainsi de conforter notre influence au sein de l’Alliance, tout en témoignant à nos alliés de notre plein engagement.
Nos alliés savent que la France est volontaire, et prête à faire face aux menaces multiples qui pèsent sur l’Europe et le monde. Le niveau d’engagement de nos forces en opérations extérieures comme sur le territoire national en atteste quotidiennement. Il serait hautement regrettable de ternir cette image par la permanence de tracasseries administratives et techniques, alors même que nos propres hommes et femmes déployés dans les structures de l’OTAN bénéficient des dispositions du protocole de Paris.
C’est pourquoi je vous invite à adopter le présent projet de loi.