Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, chers collègues, la France a été l’un des pays fondateurs de l’Organisation de l’Atlantique nord, créée en 1949. Si les relations de la France avec l’OTAN ont parfois été mouvementées, elles n’ont jamais été rompues. Le retrait de la France de la structure de commandement intégré en 1966 n’a d’ailleurs jamais été suivi de son retrait de l’OTAN. Il s’en est suivi, en 1967, le déménagement du Grand quartier général des puissances alliées en Europe, le SHAPE – Supreme Headquarters Allied Powers Europe –, de Roquencourt à Mons, en Belgique, où il se trouve toujours. La France occupe alors une position à part. Restée membre de l’Alliance, elle ne participe pas au Groupe des plans nucléaires et ne met plus de forces à la disposition de l’OTAN. Toutefois, un lien opérationnel est maintenu, par un accord passé entre le chef de l’état-major des armées et le commandant suprême allié, pour permettre un engagement si nécessaire. Des missions militaires françaises sont en outre créées auprès des principaux commandements de l’OTAN.
À partir des années 1990, la France se rapproche progressivement du commandement intégré de l’OTAN, d’abord sous François Mitterrand, puis sous Jacques Chirac ; mais c’est sous la présidence de Nicolas Sarkozy que le retour de la France dans le commandement intégré est proclamé, en 2009. Ce retour est toutefois assorti de conditions, afin de permettre à la France de préserver sa liberté d’appréciation, pour contribuer ou non aux opérations de l’OTAN et pour qu’aucune force française ne soit placée en permanence sous un commandement de l’OTAN en temps de paix. La France maintient également son choix de ne pas participer au Groupe des plans nucléaires.
Symbole de sa place pleine et entière dans le commandement intégré, la France obtient, cette même année, l’un des deux commandements stratégiques avec le poste de Commandant suprême allié pour la transformation, ainsi que le commandement interarmées qui, basé à Lisbonne, a autorité sur la force de réaction rapide.
Par ailleurs, en novembre 2012, Hubert Védrine, ancien ministre des affaires étrangères, remettait au Président de la République, François Hollande, les conclusions de son rapport sur « les conséquences du retour de la France dans le commandement militaire intégré de l’OTAN, sur l’avenir de la relation transatlantique et les perspectives de l’Europe de la défense ». Il y recommande que la France s’affirme davantage dans l’Alliance et y exerce une influence accrue, tout en se montrant vigilante et exigeante, « faute de quoi » – je cite – « les inconvénients du retour l’emporteraient finalement ».
Le retour dans le commandement intégré de l’OTAN est par la suite confirmé par le Président Hollande et par le Livre blanc de la sécurité nationale de 2013, aux termes duquel « notre stratégie de défense et de sécurité nationale ne se conçoit pas en dehors du cadre de l’Alliance atlantique et de notre engagement dans l’Union européenne ».
L’accession de la France au protocole signé à Paris en août 1952, dit protocole de Paris, se présente comme la suite logique du retour de notre pays dans la structure du commandement intégré de l’OTAN à partir de 2009. Lorsque la France s’était retirée du commandement intégré en mars 1966, elle avait dénoncé ce protocole ratifié en janvier 1955. Celui-ci complète la convention signée en juin 1951, dite SOFA OTAN, qui détermine le statut de la force armée d’une partie au traité de l’Atlantique nord lorsqu’elle est envoyée sur le territoire d’une autre partie. La France, qui a ratifié ce dernier texte en septembre 1952, ne l’a jamais dénoncé, même lorsqu’elle quitta le commandement intégré. À ce jour, les Français en poste dans les quartiers généraux de l’OTAN bénéficient de l’application du protocole de Paris, ratifié par tous les pays membres de l’OTAN.
Or au début de 2014 fut lancée une consultation interministérielle sur l’adhésion de la France au protocole de Paris, sous l’égide du ministère des affaires étrangères et du développement international ainsi que du ministère de la défense, sans soulever aucune opposition. Les négociations commencèrent en septembre 2014, en marge du sommet de l’OTAN au Pays de Galles ; et en janvier 2015, le Conseil de l’Atlantique Nord approuva à l’unanimité la demande présentée par la France.
Le protocole de Paris, qui comporte seize articles, vise principalement à conférer aux quartiers généraux de l’OTAN et à leurs personnels, auxquels il s’applique, une grande partie des droits et obligations que le SOFA OTAN, ratifié par la France en 1952, donne aux États d’origine et à leurs forces lorsque celles-ci séjournent en France, sous réserve des adaptations nécessaires. Il facilitera ainsi la vie quotidienne des personnels militaires et civils envoyés par les autres pays de l’Alliance dans les quartiers généraux situés en France, ainsi que celle des personnes à leur charge.
En effet, l’accueil de ces personnels se fait, pour l’instant, sur la base d’arrangements techniques qui offrent moins de sécurité juridique et qui ne sont pas nécessairement harmonisés. Les personnels bénéficieront, par exemple, des privilèges de juridiction prévus dans la convention du SOFA OTAN, étant précisé que les pouvoirs de juridiction dévolus à l’État d’origine, en matière pénale et disciplinaire, sont transférés aux autorités de l’État dont la loi militaire s’applique à l’intéressé. Les obligations imposées par la même convention en matière d’arrestation, d’enquêtes, de recherche de preuves, de règlement des indemnités, de droits, taxes et amendes incombent à la fois au quartier général interallié et à l’État d’origine.
Selon les chiffres communiqués par le ministère de la défense, près de 1 500 militaires issus de pays de l’OTAN sont actuellement affectés en France. Parmi eux, 240 militaires seraient susceptibles de bénéficier des dispositions du protocole de Paris. Ces militaires se trouvent dans les états-majors, les forces ou en coopération de formation ; ils sont élèves ou auditeurs dans les écoles, ou affectés dans les missions de défense ou au sein du Corps européen – pour ne citer qu’eux.
Le travail des personnels de l’OTAN appelés à venir sur le territoire français en dehors des exercices – pendant lesquels ils sont couverts par le SOFA OTAN – s’en trouvera également simplifié, qu’il s’agisse, par exemple, d’exonérations fiscales – puisque ces personnels seront exonérés, dans l’État de séjour, de tout impôt sur les traitements et émoluments qui leur sont versés par la force armée à laquelle ils appartiennent ou par laquelle ils sont employés, mais resteront imposables dans l’État dont ils ont la nationalité – ou d’exonérations douanières, puisque le protocole prévoit la possibilité, pour les personnels des quartiers généraux interalliés autres que les nationaux de l’État de séjour, d’importer notamment leur mobilier et leurs effets personnels en franchise de droits.
Il faut en outre souligner que le protocole de Paris ne porte pas atteinte aux principes fondamentaux de la défense nationale, puisque le placement de quartiers généraux sous un commandement de l’OTAN, en temps de paix, ne pourra résulter que d’une décision politique française.
Enfin, comme le précise le rapport de la commission, ce protocole n’implique aucune inflexion ni aucun infléchissement de notre position au sein de l’OTAN : il doit au contraire la renforcer, et ce à quelques mois du prochain sommet de Varsovie.
Pour toutes ces raisons, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste soutient l’adoption du projet de loi.