Les Russes sont extrêmement prudents, comme ils l'ont été sur le Yémen, car ils n'ont aucune envie de s'engager. Ils ont essayé de garder des contacts avec les deux côtés. Ils ont soutenu du bout des lèvres les envoyés spéciaux du secrétaire général des Nations unies et, si jamais cela marche, ils se rallieront probablement à l'idée d'un gouvernement d'union nationale. Cependant, ils n'y croient guère : ils pensent que la Libye a sombré dans un chaos intégral. Ils ont très peur de mettre le doigt dans l'engrenage, de se retrouver dans une situation où, tôt ou tard, une intervention militaire serait demandée, et d'être de nouveau placés face à un choix qu'ils ne souhaitent, à mon avis, pas faire.
Les Russes sont parfaitement conscients que Daech, qui recule en Syrie et en Irak, est en train de s'implanter en Libye pour trouver des ressources financières alternatives. Mais leur grande préoccupation s'agissant de Daech, c'est l'Afghanistan, qui est la porte d'entrée vers l'Asie centrale, où les États ne seraient pas capables de résister à des mouvements djihadistes. Les Russes sont en contact avec un certain nombre de commandements en Afghanistan, notamment dans le nord du pays. Ils sont probablement en train de négocier avec eux la livraison de matériels militaires.