Intervention de Sophie Errante

Réunion du 4 avril 2016 à 15h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophie Errante :

À la lecture du projet de loi et de son exposé des motifs, j'exprime le regret que nous n'ayons pas pu créer une commission spéciale. Elle aurait été largement justifiée pour traiter un tel projet.

Ainsi que nous pouvons le constater régulièrement, il existe, dans notre pays, une grande défiance à l'égard de l'entreprise, et c'est bien dommage. Celle-ci est encore beaucoup trop souvent considérée comme un lieu d'exploitation de l'homme par l'homme, dont l'objectif serait d'amasser un maximum de profits. C'est une image archaïque, et même coûteuse, dont il est difficile de se défaire, tant elle reste chevillée au corps dans notre pays.

Curieusement, il semble compliqué aujourd'hui de faire admettre l'idée que beaucoup de chefs d'entreprise sont avant tout animés par l'esprit d'entreprendre, avec le souci d'assurer une bonne organisation et la cohésion sociale au sein de l'entreprise. Un entrepreneur n'a aucun intérêt à ce qu'il y ait des conflits en interne, car cela freine sérieusement son développement et réduit ses chances de préparer son avenir.

Beaucoup d'entrepreneurs et de salariés attendent de nous un débat serein et en phase avec le réel. Évitons un débat teinté de sectarisme, de dogmatisme ou de clanisme. C'est là une condition essentielle si nous voulons être capables de préparer une loi en phase avec les réalités économiques et sociales actuelles, ainsi que vous l'avez très bien expliqué dans vos propos liminaires, Madame la ministre.

Ainsi que nous l'entendons très régulièrement sur le terrain, il faut arrêter de regarder le monde économique essentiellement à travers le prisme des très grandes entreprises. Celles-ci ne représentent que 2 % des entreprises dans notre pays ; que faisons-nous des 98 % qui restent ? Il convient de ne pas oublier les artisans, les PME, les TPE et les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Elles connaissent leurs propres réalités, que nous devons bien comprendre. Ce sont elles qui créent le plus d'emplois, et c'est aussi en leur sein que les attentes sont les plus fortes. J'ai visité des centaines d'entreprises ; je ne parle donc pas uniquement de mon expérience personnelle de créateur d'entreprise, il y a un peu plus de quinze ans. Nous nous devons de valoriser ce qui se fait de bien, tout en sanctionnant plus durement les abus.

Il est quand même navrant que nous soyons si peu « facilitants » pour accompagner les envies d'entreprendre à quelque niveau que ce soit, pour laisser leur chance à ceux qui veulent se lancer et se révéler dans une activité. Bien évidemment, nous ne devons pas mettre de côté les abus : il y en a et il y en aura. Mais, plutôt que de faire la loi pour ceux qui trichent, faisons-la pour ceux qui respectent les règles. Soyons beaucoup plus intransigeants, peut-être, avec des contrôles sans préavis et des sanctions quand la malveillance est parfaitement identifiée et avérée – vous avez évoqué une avancée dans ce domaine.

Nous avons la possibilité de légiférer pour que notre pays puisse lutter contre le chômage et s'adapter aux changements de vie de nos concitoyens, ainsi qu'aux évolutions technologiques. Notre parcours de vie a beaucoup évolué depuis trente ans. Nous avons une responsabilité collective quant à certaines situations vécues aujourd'hui par nos jeunes et nos moins jeunes – nous l'entendons régulièrement. Nous avons poussé beaucoup de nos enfants vers des filières sans avenir malgré de bons diplômes ; nous avons méprisé les filières dites « courtes » et n'avons pas valorisé certains métiers qui se trouvent aujourd'hui, malheureusement, en situation de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. Il est urgent de réformer notre système de formation et, là encore, vous apportez de réelles réponses, très attendues.

Il existe de très nombreux exemples d'entreprises qui ont réussi à moderniser le dialogue social et qui sont prêtes à promouvoir leur action. J'ai la preuve que l'innovation sociale est réellement possible. Nous sommes nombreux à pouvoir en témoigner.

Pour redonner de l'espoir au plus grand nombre, à ceux qui souhaitent changer de voie professionnelle ou reprendre des études et se former, à ceux qui n'ont rien depuis trop longtemps, nous devons avancer, car le pire serait de ne rien faire. Vous nous présentez justement un véritable texte de progrès, dont vous avez cité plusieurs avancées. Ma question principale tient à son délai réel d'application, car il y a urgence.

Je vous remercie, Madame la ministre, de l'énergie que vous déployez pour défendre ce texte, et j'espère que nous parviendrons à trouver dans nos instances le meilleur équilibre dans l'intérêt de nos concitoyens !

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