Je ne partage évidemment pas le point de vue polémique de Pierre Lellouche, qui s'inscrit dans le droit fil de ce que défendent la droite et l'extrême droite depuis plusieurs années en intentant des procès en idéologie à M. Le Bras et à l'INED. La réalité, c'est qu'ils n'acceptent pas la couleur de l'immigration.
Notre pays, comme l'Europe, est en réalité parfaitement capable d'intégrer cette vague de migrants, qui n'est pas uniquement la conséquence de la guerre en Syrie. En revanche, sans doute nos États ne sont-ils pas préparés à accueillir le flux beaucoup plus important de réfugiés climatiques que commence à provoquer le réchauffement de notre planète.
J'entends parler de catastrophe face à ces vagues d'immigration qui risquent de nous submerger : dois-je rappeler que les déplacements de population ne s'opèrent pas de l'Afrique à l'Europe mais à l'intérieur de l'Afrique ?
Je suis d'accord avec Hervé Le Bras lorsqu'il démonte cette fausse idée selon laquelle le Niger va voir sa population exploser dans les années qui viennent et insiste sur le fait que c'est grâce à l'éducation, et non grâce à la « grève du troisième ventre » que défendent certains écologistes sectaires, que l'on pourra réguler l'augmentation de la population, de même que c'est grâce à l'éducation que ceux qui fuient aujourd'hui leur pays pourront y rester pour contribuer à son développement.
Cela devrait nous inciter à nous interroger sur notre rôle en la matière à l'époque de la colonisation mais aussi sur notre actuelle politique d'aide au développement : comment aider structurellement ces pays, c'est-à-dire en ne prenant pas seulement en compte les facteurs économiques mais également les facteurs politiques, puisque l'on sait que certains dirigeants profitent de l'argent qu'ils reçoivent sans en faire bénéficier leurs populations ? C'est une question de politique étrangère, qui dépasse le champ d'intervention de l'AFD. Que faisons-nous vis-à-vis de certains régimes autoritaires, voire de dictatures, qui contribuent à affamer leur pays ? Doit-on laisser la société Bolloré contribuer à l'accaparement des terres dans des pays ainsi privés de leur souveraineté alimentaire ? On parle de l'Afrique, mais c'est également le cas en Ukraine, où des milliers d'hectares sont à vendre.
Je ne peux accepter que l'Europe demande aujourd'hui à la Turquie d'être son sous-traitant, la parant du jour au lendemain de toutes les vertus alors même qu'un sultan y conforte son pouvoir en enfermant des journalistes Qu'on accepta de la payer pour éviter d'assumer notre rôle de terre d'accueil est accablant.