Intervention de Olivier Schrameck

Réunion du 6 avril 2016 à 16h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Olivier Schrameck, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, CSA :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je suis heureux de vous retrouver pour ce rendez-vous annuel, qui n'est que l'une des nombreuses occasions qui nous sont données de nous rencontrer au cours de l'année.

Je souhaite commencer par un propos personnel, car je pense avec émotion à Sophie Dessus qui était toujours présente lorsque j'avais l'honneur d'intervenir devant vous. Ses interventions, et j'ai encore parfaitement en mémoire la dernière d'entre elles, le 16 mai dernier, étaient toujours empreintes d'une très grande attention, d'une connaissance parfaite des dossiers et d'une réelle bienveillance, qu'il s'agisse de leur ton ou des attentes exprimées.

Le rapport public établi par le CSA en vertu de l'article 18 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication constitue en quelque sorte l'épine dorsale du compte rendu que le Conseil doit en particulier à la représentation nationale, même si au cours de l'année il publie d'autres rapports – je pense par exemple à celui qui vous a été adressé sur la radio numérique terrestre (RNT).

Je me limiterai à deux observations générales sur le document que je vous présente.

À nos yeux, ce rapport confirme qu'il existe un lien indissociable entre la régulation juridique et sociale, d'une part, et la régulation économique d'autre part. Ce lien fait la singularité de notre institution. La liberté de communication, le pluralisme de son exercice, la langue même dont elle use, sa contribution à la cohésion sociale, la protection du jeune public, celle de la vie d'autrui, le dynamisme de notre création culturelle : tous ces éléments, évoqués par le rapport d'activité, n'ont jamais été absents, durant cette année 2015, des décisions d'attribution des fréquences, des contrôles, des évaluations et des rapports économiques et financiers, des initiatives prises en faveur du développement de l'accessibilité, de l'accompagnement des télévisions locales, des efforts pour renforcer la coopération européenne, ou de notre exercice de la surveillance des phénomènes de concentration.

Le sentiment de la nécessité d'une régulation n'a pu être que renforcé par cette expérience supplémentaire d'une année. Ce sentiment s'exprime souvent s'agissant de la plateforme hertzienne, ce que la position même du législateur illustre avec la loi du 14 octobre 2015 relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre, qui rénove cette plateforme en maintenant ses caractéristiques fondamentales : gratuité, anonymat et universalité.

Cette régulation conserve toutefois pleinement sa justification quels que soient les supports de diffusion, même si elle doit s'exercer sous des formes à renouveler. Nous sommes à l'heure des offres foisonnantes de services de médias audiovisuels diffusés via des fournisseurs d'accès à internet ou directement accessibles en ligne, faisant intervenir ces acteurs nouveaux et diversifiés que sont les plateformes ou les intermédiaires numériques.

Cette abondance fait paradoxalement apparaître des nouveaux enjeux de rareté ou de sélectivité qui sont d'ordre qualitatif, car l'abondance est loin de garantir à elle seule l'accès aisé et ouvert à des programmes de qualité, variés et pluralistes. Au sein d'une profusion d'offres, il est d'autant plus important de promouvoir une diversité culturelle réelle et effective des oeuvres par la mise en valeur des créations françaises et européennes. J'ai souvent fait référence au risque que les algorithmes de recommandations enferment les utilisateurs dans des choix téléguidés.

De plus, alors que la responsabilité rédactionnelle est plus encore qu'hier l'objet d'un vif débat, y compris dans vos enceintes, il importe qu'au sein d'une information diffusée à foison sur internet, l'offre éditoriale audiovisuelle soit mise en valeur par son objectivité et son pluralisme. C'est un enjeu particulièrement important, notamment pour les plus jeunes.

Pluralisme, protection et dynamisme de la création culturelle gardent pour nous tout leur sens dans l'univers d'abondance des contenus, alors même qu'ils ne sont plus nécessairement la contrepartie d'une ressource rare – même si cette ressource reste structurante comme l'ont montré les événements de ces derniers jours.

J'en viens à la présentation d'un rapport qui, s'il s'inscrit dans une continuité, n'en est pas moins marqué par une actualité forte qui va du passage généralisé à la haute définition, objet du basculement de la nuit du 4 au 5 avril, aux avatars des récents contentieux de la chaîne Numéro 23, en passant par nos réactions relatives au complément majeur que le Parlement adopte en ce moment, à votre initiative, à la législation relative à l'honnêteté, à l'indépendance et au pluralisme des médias.

L'activité du CSA durant l'année 2015 a été extrêmement dense, ce que révèlent quelques données chiffrées : le collège a tenu 68 réunions plénières, soit dix de plus qu'en 2014, 1 200 dossiers ont été examinés et 115 auditions se sont déroulées en collège plénier. J'ajoute que 39 rapports ont été publiés par le CSA.

Avant d'en venir aux thèmes d'actualité, je souhaite insister sur quelques politiques prioritaires à nos yeux.

Dans le contexte actuel, c'est évidemment le cas de la politique relative à la cohésion sociale et à la diversité. Nous avons tous pris conscience, de plus en plus fortement, qu'après l'école, les médias ont une responsabilité essentielle pour assurer, à l'échelle nationale, notre communauté de destin et, au-delà de nos frontières, le rayonnement de nos valeurs et de nos principes. Vous constaterez en lisant notre rapport que nous avons pris de multiples initiatives dans ce domaine. J'ai assuré la présidence d'une réunion rassemblant l'ensemble des éditeurs, et nous avons renouvelé, pour la troisième année consécutive, la campagne « Nous sommes la France », à l'occasion du 14 juillet. Pour la première fois, les radios se sont investies dans ces actions tout au long de l'année. Le baromètre annuel de la diversité assure une évaluation constante qui permet de continuer à faire passer des messages d'alerte sur ce sujet. Notre colloque annuel, au mois d'octobre 2015, a été consacré à la question de la représentation de la diversité de notre société. Le 16 septembre dernier nous avons pris une délibération pour entériner et prolonger l'engagement des radios, destiné à se concrétiser par voie conventionnelle.

Nous avons été extrêmement attentifs à la promotion de cet élément essentiel de la cohésion sociale que constitue une langue commune, maîtrisée et renouvelée – au début de cette année, la journée de la langue française a été un succès pour la deuxième fois. Au sein même de l'institution, nous avons rénové notre cellule diversité, et nous avons enregistré l'avis favorable au renouvellement du label Diversité obtenu dès décembre 2012.

La question de l'égalité réelle des femmes et des hommes constitue un autre de nos axes d'action prioritaires. Le législateur nous a, une nouvelle fois, montré le chemin avec l'adoption de la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes. Dans son prolongement, nous avons pris une nouvelle délibération, le 4 février 2015, qui incite à la diffusion de programmes contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes, à l'adoption, en étroite collaboration avec les éditeurs, d'indicateurs nouveaux et plus opérants relatifs à la juste représentation des femmes et des hommes, et à l'image des femmes dans les programmes. Elle encourage également les acteurs à prendre des engagements complémentaires en fonction de leur ligne éditoriale et de leur politique interne, car j'insiste sur le fait que ce travail s'entend dans le cadre d'un système d'auto-évaluation analysé et commenté avec nos partenaires de l'audiovisuel. À cet égard, il illustre bien ce que peut être, selon nous, une corégulation accompagnée, en complément des actions traditionnelles que nous menons depuis plusieurs années et que nous prolongeons dans plusieurs directions. Parmi ces dernières, je citerai l'exemple de la promotion du sport féminin. Il a aussi été décidé de mener une étude conjointe avec l'Autorité de la régulation professionnelle de la publicité (ARPP) sur l'image de la femme dans les publicités.

En 2015, les rédactions ont été confrontées aux tragédies qui ont marqué notre pays. Ce sujet majeur doit évidemment être abordé.

Le traitement de ces informations a donné lieu à beaucoup de controverses. Notre démarche a prioritairement visé à favoriser l'échange des expériences alors que les rédactions vivaient, parfois dans un certain isolement, des événements inédits. Les anomalies ont été peu nombreuses, mais répandues : beaucoup d'organes d'information ont commis des irrégularités au regard des principes que nous avons la charge de défendre. Cela explique le nombre des avertissements – ce chiffre ayant toutefois surtout un caractère « optique ». Je ne reviens pas sur le fond, car un contentieux est en cours devant le Conseil d'état, même si à cette heure plusieurs désistements ont été enregistrés. Je note cependant que, si une institution avait vocation à réagir aux anomalies du traitement de l'information en janvier 2015, ce devait bien être la nôtre : c'est son travail, sa responsabilité, c'est le risque qu'elle prend. Nous assumons cette mission.

Pour autant, nous avons toujours mis en valeur le rôle éditorial des médias audiovisuels face à l'abondance des informations sur internet. Après les attentats du 13 novembre, nous avons reconnu très rapidement, dès le 25 novembre, que les leçons avaient été tirées des difficultés qu'avaient provoquées des événements sans précédent.

Selon nous, il subsiste toutefois deux problèmes. Il est nécessaire de prévoir, pour le cas qui ne peut hélas ! jamais être exclu d'une tragique réitération, une organisation de crise associant les ministres concernés, notamment pour assurer une communication en temps réel avec les médias et, s'ils le veulent bien, le CSA qui a vocation à être informé de toutes les difficultés qui surgissent dans l'urgence, voire à contribuer à les prévenir par des messages de prudence, comme nous en avons émis à deux reprises. Il faut également renforcer les contrôles des chaînes satellitaires, ce qui nécessite des moyens complémentaires, notamment en interprétariat.

Le rapport traite également d'un sujet essentiel : la convergence et le renforcement des coopérations européennes – qui constitue précisément l'une des exigences de l'article 18 de la loi de 1986. J'ai eu l'honneur d'assurer la présidence du groupe des régulateurs européens des services de médias audiovisuels (ERGA) depuis sa constitution en mars 2014. L'ERGA, qui a beaucoup travaillé, a publié trois rapports : le premier sur le champ d'application de la nouvelle directive européenne Services de médias audiovisuels (SMA), qui insiste sur le rôle des intermédiaires numériques, le deuxième, sur la protection des mineurs, qui est essentielle dans un environnement numérique, et, le troisième, sur l'indépendance des régulateurs, sujet qui est hélas ! d'actualité dans plusieurs pays, comme la Hongrie, la Pologne ou, aujourd'hui, la Croatie. L'ERGA, en tant que groupe constitué, a pris explicitement parti s'agissant d'événements qui affectent nos valeurs européennes. Un quatrième groupe de travail achève actuellement ses travaux qui portent sur la répartition des compétences territoriales au sein de l'Union pour éviter contournements et moins-disant culturel. Ce groupe est placé sous la présidence du directeur général du CSA, alors que j'assume encore cette année la vice-présidence de l'organisation.

Le 14 avril 2015, l'ERGA a tenu une session plénière à Paris. Elle se déroulait pour la première fois en dehors de Bruxelles. Elle a donné lieu à l'adoption d'une déclaration commune des vingt-huit régulateurs dans laquelle ils réaffirment « l'importance de la liberté d'expression, et leur soutien indéfectible à la défense de ce droit fondamental ».

Pour en finir avec les points principaux dont traite le rapport, il me faut dire un mot de nos contacts et de nos échanges avec le public.

Le site internet du Conseil aura reçu, en 2015, plus de 900 000 visites, et près de 10 000 pages ont été visionnées chaque jour, en moyenne. Nous avons reçu 10 000 lettres ou courriels – nous leur avons évidemment répondu. Nous avons modernisé les applications « Ma couverture TNT », et « Ma radio FM ». Le site « Éducation et médias » a été rénové en septembre dernier : il s'appelle désormais « Clés de l'audiovisuel ». Nous avons retransmis en vidéo, sur notre site internet, les auditions publiques et les interventions des débats publics. Nous transmettons désormais entièrement en format ouvert toutes les données relatives au pluralisme. Nous avons mis notre expertise au service du plus large public sur des thèmes très concrets, comme la Coupe du monde de rugby ou la situation de Netflix – nos rapports sur ces sujets ont provoqué un vif intérêt.

De façon générale, le CSA suscite beaucoup d'intérêt puisque près de 8 000 articles de presse ont été consacrés à ses activités en 2015 – nous nous en réjouissons, quelle que soit leur tonalité.

Nous avons également opéré une réforme profonde, et inédite depuis 2005, de notre organigramme avec la création d'une direction de l'information et de la communication institutionnelle, et celle d'un secrétariat général aux territoires qui anime les réseaux, si importants, des comités territoriaux de l'audiovisuel. Nous avons aussi créé des directions spécialisées, sur le modèle de guichets uniques : une direction des médias radios et une direction des médias télévisuels. Nous avons également voulu consentir un effort particulier en faveur des télévisions locales auxquelles la haute définition a été largement ouverte par un appel à candidatures.

Nous avons bien sûr mené beaucoup d'autres actions et pris d'autres décisions concernant la radio comme la télévision. Outre la désignation de la présidente de France Télévisions, de nombreux rapports d'étapes ont été remis sur l'évolution du secteur public. Parmi les décisions prises, je mentionne, bien sûr, celle relative au passage en clair de LCI dans le cadre d'un nouvel examen après une mise en cause contentieuse de la procédure, dont M. Marcel Rogemont a pourtant dit dans son rapport d'information, au début de l'année, qu'elle avait été conforme à l'intention du législateur.

J'en viens maintenant aux questions d'actualité.

Dès notre communiqué d'hier matin, nous avons parlé du succès de la généralisation de la haute définition (HD). Ce succès technique n'était pas acquis d'avance, compte tenu de l'extrême complexité d'une opération qui comportait trois volets : le passage national à la HD par l'adoption d'une nouvelle norme de compression qui impliquait une reconfiguration complète des multiplexes et des fréquences – il fallait faire coexister cinq chaînes en HD sur six multiplexes reconfigurés ; la reconfiguration immédiate des fréquences en Île-de-France ; la fin du déploiement des nouvelles chaînes HD en Rhône Alpes. Désormais le public bénéficie de vingt-cinq chaînes gratuites en HD, et de quatre chaînes payantes.

Nous avons été très attentifs à tous les intérêts en cause. Nous avons notamment appelé votre attention sur ceux, légitimes, des diffuseurs techniques. Je veux rendre hommage à tous ceux qui ont contribué à cette opération : les diffuseurs, les éditeurs de toutes les chaînes, qui ont multiplié les messages de sensibilisation, d'information et d'alerte, les comités territoriaux de l'audiovisuel qui ont été extrêmement actifs, je pense en particulier à l'action des attachés techniques audiovisuels. De façon générale, je me permets de citer toutes les équipes du CSA qui se sont mobilisées jour et nuit.

Aujourd'hui, s'agissant du déploiement du multiplex R7 qui regroupe cinq des six nouvelles chaînes en haute définition, les résultats sont supérieurs à nos attentes. Dès hier soir, nous étions à 95,9 % de couverture et, ce matin, nous sommes parvenus à 96,9 %. Aujourd'hui, nous avons donc quasiment atteint le but que nous nous étions fixé pour le 20 avril prochain. Dans la zone Île-de-France élargie, 87 sites sur 89 sont d'ores et déjà allumés et couvrent plus de 99,9 % de la population concernée. La mobilisation se poursuit : un quartier général, installé au CSA jusqu'à la fin de la semaine, poursuivra son action au-delà de cette échéance en étroite coopération avec les équipes de l'Agence nationale des fréquences (ANFR) et son directeur général, M. Gilles Brégant, qui sont en permanence sur le pont.

La continuité aura été assurée au mieux du point de vue des téléspectateurs. Hier, nous avons enregistré 45 millions de branchements sur la télévision alors que l'on en compte habituellement 45,5 millions. Ce chiffre n'est donc en recul que de 500 000 pour cette journée pourtant particulièrement difficile. La durée de visionnage a été quasiment identique à celle des autres mardis – on a en revanche enregistré plus de passage d'une chaîne à l'autre, mais l'on comprend bien pourquoi. Aujourd'hui, on peut dire que 96 % des foyers qui sont reliés à la TNT, soit 56 % du total, ont su trouver les fréquences sans problème – le site recevoirlatnt.fr avec 1 400 personnes à l'écoute a conseillé avec précision tous ceux qui en avaient besoin lors de communications longues de cinq à sept minutes. À ce jour, cette opération s'est déroulée dans les meilleures conditions que nous pouvions espérer.

Au-delà de la CMDA, je tiens à remercier votre Commission qui a été extrêmement attentive aux préoccupations dont nous n'avons pas hésité à vous faire part tout au long de l'année 2015.

Je conclus en évoquant la décision du Conseil d'État du 30 mars dernier concernant la chaîne Numéro 23. Après plusieurs mois d'examens et d'auditions, dans les limites des pouvoirs de contrôle qui sont aujourd'hui les nôtres, nous avons considéré, par notre décision du 14 octobre 2015, qu'il y avait lieu de sanctionner la société Diversité TV France par la seule mesure prévue par la loi en la matière, c'est-à-dire l'abrogation de l'autorisation d'utiliser sa fréquence en application du premier alinéa de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986. Contrairement aux conclusions de sa rapporteure publique, le Conseil d'État vient donc de juger dans un sens inverse.

Nous n'avons en aucune façon à nous faire juges de la décision du juge, quels que soient, je dois vous le dire en toute franchise, les sentiments de stupeur et de consternation que le collège du CSA, dans son ensemble, a éprouvés lors de la réunion informelle qu'il a tenue immédiatement après qu'elle a été rendue.

Nous avions estimé, en nous fondant sur un faisceau convergeant de faits et d'omissions, que la mauvaise foi de la société requérante et sa volonté de se soustraire de façon délibérée à ses obligations était avérée. Nous avions aussi estimé que la lettre même du premier alinéa de l'article 42-3 n'avait pas été respectée, eu égard aux modifications substantielles des engagements qui avaient été souscrits en 2012 s'agissant de la nature même de la programmation de la chaîne, de la façon dont elle n'avait été prise en charge que par une équipe extrêmement réduite, et des changements dans ses modalités de financement entrant en contradiction avec la stabilité financière et actionnariale dont elle s'était prévalue. Ces derniers changements avaient conduit à un engagement de cession à un actionnaire russe, dès 2015, outre la souscription d'obligations qataries, alors que des engagements financiers avaient été pris sur de tout autres bases jusqu'en 2019.

Nous nous sommes sentis responsables de la protection de fréquences gratuites, biens publics dont l'attribution doit s'accompagner d'obligations précises et respectées.

C'est l'ensemble de ces considérations qui nous avaient conduits à retenir non seulement une méconnaissance de la loi, mais aussi une fraude à la loi, deux terrains de sanctions cumulables ou interchangeables dans le cadre d'un plein contentieux par détermination de la loi, qui conduit le juge à forger sa complète appréciation des faits, d'une part, et son appréciation des données juridiques de l'espèce, d'autre part.

L'appréciation du juge, et par suite sa décision, a été inverse de la nôtre. Bien entendu nous en prenons acte même si, en conscience, notre intime conviction demeure. C'est tout naturellement vers vous que nous nous tournons, alors que les graves préoccupations qui nous avaient inspirés ont déjà trouvé dans vos enceintes à l'occasion de cette affaire des échos précis et convergents. De manière générale nous nous en remettons toujours à vous quant aux principes dont vous nous avez confié la garde et quant aux moyens dont vous entendez nous doter à cette fin. Je reviendrai peut-être sur le sujet, mais je me garderai de faire d'emblée des suggestions trop précises sur la façon dont le contrôle que nous exerçons, qui n'a pas été jugé approprié, pourrait être mieux assuré dans des cas de cette nature.

Ces observations, comme celles qui les ont précédées, m'amènent à évoquer l'année 2016. Sur votre initiative, monsieur le président, elle voit se dérouler la discussion d'une proposition de loi extrêmement importante visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias, qui conduit à regrouper des prescriptions éparses dans la loi du 30 septembre 1986, ce qui permettra de mieux en assurer le respect – notamment grâce à la signature de conventions. Comme nous l'avions souhaité, s'agissant notamment des chaînes d'information, car nous sommes attachés à la logique de l'autorégulation, ce texte généralise les comités d'éthique. Ces derniers fonctionneront au sein des sociétés éditrices qui sont nos interlocuteurs : nous ne nous ingérons en aucun cas dans leur fonctionnement interne.

En raison des échéances à venir, cette année sera également marquée par le réexamen des conditions de garantie et de contrôle du pluralisme. Des travaux ont d'ores et déjà été entamés et le contact a été pris avec le Conseil constitutionnel. Nous nous mettons en situation d'édicter, début septembre, la recommandation relative à l'élection présidentielle. Nous nous préoccupons également de la conduite à tenir dans la perspective de la tenue de primaires. Nous devrons veiller à l'équilibre entre les grandes tendances et les personnalités concernées mais il nous faudra aussi prendre en compte le nouveau cadre législatif résultant du vote, hier, par votre assemblée, en lecture définitive, de la proposition de loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle.

Soyez en tout cas toujours assurés de notre volonté d'agir le plus efficacement possible, avec le souci constant de respecter scrupuleusement vos intentions et vos prescriptions !

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