Intervention de Jacques Repussard

Réunion du 17 février 2016 à 17h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jacques Repussard, directeur général de l'IRSN :

Tout d'abord, je voudrais vous remercier pour les propos élogieux que vous venez de tenir à l'égard de l'institut que je dirige et de moi-même. Il est vrai que nous avons travaillé d'arrache-pied, depuis treize ans, pour constituer un outil national fondé sur la science, qui soit capable de répondre aux nombreuses questions posées par l'Autorité de sûreté nucléaire et les autres administrations concernées par les risques nucléaires et radiologiques.

L'IRSN est aussi un outil scientifique. Son statut d'établissement public autonome, placé sous la tutelle de cinq ministres, lui permet, à sa propre initiative sur un mode d'auto-saisine, à partir de ses propres études ou travaux de recherche, de formuler des suggestions, des pistes de réflexion et d'amélioration dans la gestion de ces risques. Ses suggestions sont fondées sur une approche scientifique d'évaluation de ces derniers, ce qui constitue sa marque de fabrique. Depuis environ un an, dans le cadre de cette mission, nous avons engagé, au sein de l'IRSN, avec nos experts dirigés par M. François Besnus, directeur des déchets et de la géosphère ici présent, une réflexion collective sur les évolutions possibles de la gestion des déchets de très faible activité.

Dans l'actualité, les déchets de haute activité à vie longue et le projet CIGEO, bien connus de M. Christian Bataille, sont souvent évoqués. C'est un dossier important et complexe. Mais, à l'autre extrémité de la chaîne des déchets radioactifs, se trouvent des matières très faiblement radioactives, d'une activité inférieure à cent becquerels par gramme, correspondant à la limite définie pour ceux-ci.

Ces déchets sont produits, d'une part, à l'occasion du fonctionnement normal des installations nucléaires et, d'autre part, en quantités très importantes, lors du démantèlement de ces installations. La perspective de l'accroissement de la part des déchets de démantèlement, par rapport à celle des déchets issus de la gestion ordinaire et quotidienne des installations nucléaires, nous a conduits à nous interroger sur la pérennité des solutions en place, en prenant en compte leurs avantages et leurs inconvénients. Nous avons essayé de réfléchir dans un horizon d'accroissement des programmes de démantèlement, induisant des problèmes techniques de gestion des risques associés à l'évolution de la volumétrie de ces déchets. Cette réflexion a donné lieu à l'élaboration du rapport publié aujourd'hui, dont nous avons souhaité réserver la primeur à l'Office parlementaire, mais qui a été transmis hier à l'ASN et sera mis en ligne sur Internet ce soir.

Cette réflexion nous a d'abord amenés à considérer les tenants et aboutissants du problème, c'est-à-dire les avantages et les inconvénients, les forces et les faiblesses, de la doctrine actuelle. Comme vous l'avez rappelé, celle-ci a le mérite de reposer sur des textes clairs, des dispositifs de contrôle maîtrisés par l'ASN, avec l'appui de l'IRSN, et une pratique industrielle établie au cours du temps. Elle a permis de mettre fin aux incidents évoqués précédemment. Aujourd'hui, les problématiques de déchets radioactifs « sauvages » sont rarement évoquées si ce n'est, parfois, pour des sources provenant de l'étranger. Nous devons au dispositif actuel d'avoir globalement éliminé ces problèmes du paysage médiatique français.

La première grande force de ce dispositif découle d'une réglementation qui impose aux exploitants nucléaires un zonage des déchets radioactifs, permettant de bien connaître les lieux dans lesquels ceux de type TFA peuvent être produits, globalement leur caractérisation, c'est-à-dire le genre de radionucléides et le type de procédé qui a conduit à leur production. Ce cadre réglementaire extrêmement efficace permet de connaître ces caractéristiques en amont de la production des déchets.

En aval, ces déchets faisant l'objet dans la doctrine française actuelle d'une gestion spécifique, ils sont extraits des installations nucléaires où ils sont produits pour être déplacés vers le Centre industriel de regroupement, d'entreposage et de stockage (CIRES). Ce centre spécialisé, géré par l'ANDRA, permet de stocker sur place, de manière efficace, l'ensemble de ces déchets, indépendamment de leur degré de contamination. A côtés de déchets TFA réellement radioactifs, dont il faut vraiment s'occuper, se trouvent des déchets dont la radioactivité n'est pas avérée. Ces derniers ayant été produits dans certains zonages, ils sont néanmoins transportés au CIRES pour y être stockés.

Cela m'amène à évoquer les trois inconvénients de la gestion actuelle. D'abord, le CIRES étant une installation unique en France, elle concentre l'ensemble des déchets TFA. Même si leur radioactivité est très faible, elle se trouve concentrée en ce lieu unique. Par ailleurs, ce lieu n'est pas un espace infini. Nous estimons que, dans les quatre à six années à venir, il sera saturé, alors même que plusieurs millions de mètres cubes de déchets seront produits dans les dix à vingt prochaines années. Ce centre ne pourra donc pas physiquement abriter la totalité des déchets qui seront inéluctablement produits dans notre pays au cours de cette période. Cet exutoire unique sera saturé à court terme.

Une autre faiblesse de notre approche nationale concerne le modèle économique sur lequel s'appuie le CIRES. L'ANDRA doit assumer les coûts de gestion de cette installation. L'approche réglementaire conduit à des coûts relativement faibles et attractifs pour l'industrie nucléaire, en regard de son style de vie. De ce fait, il s'avère souvent plus économique pour les exploitants nucléaires d'envoyer dans le CIRES des déchets non radioactifs, plutôt que de les trier de façon très approfondie, pour séparer les déchets un petit peu radioactif de ceux qui ne le sont pas du tout. L'approche réglementaire ne s'y oppose pas. Finalement, le coût raisonnable du stockage se retourne contre celui-ci, puisque jusqu'à 30 % à 50 % de certains lots de déchets stockés au CIRES ne sont pas du tout radioactifs. Bien que ces coûts soient raisonnables, ils ne sont pas proportionnés au véritable risque radiologique. C'est un inconvénient de fond qui doit être pris en compte sur la durée.

Par ailleurs, ces coûts ne sont pas négligeables. S'ils sont faibles du point de vue de l'industrie nucléaire, ils sont très élevés pour un particulier ou une petite entreprise qui hérite d'un site contaminé contenant des produits radioactifs.

Enfin, un dernier inconvénient résulte de la façon spécifique dont le risque nucléaire et radiologique est géré dans notre pays, indépendamment des autres risques. De ce fait, les transferts de risques ne peuvent être facilement pris en compte. Le transport de milliers de tonnes de déchets par la route, d'un point A à un point B, induit évidemment des risques d'accident et de pollution. Ces autres risques pour la société ne sont pas pris en considération. En prenant un cas extrême, si le risque radiologique est nul, en l'absence de becquerels, le risque conventionnel est, lui, bien réel. Aujourd'hui, cette problématique n'est pas abordée.

Ce constat nous a amené à considérer que le statu quo ne tiendrait, de toute façon, pas très longtemps. Aussi, avons-nous essayé de réfléchir à la façon d'aborder la problématique de l'évolution de la doctrine qui nous apparaît indispensable à terme, mais sans urgence absolue. Nos réflexions nous ont conduits à constater qu'il ne s'agit pas d'abord d'une question technique mais de gouvernance des risques au sein de notre société : risques nucléaires, radiologiques et conventionnels. Pour avancer, il s'avère indispensable de travailler sur cette gouvernance des risques, en impliquant toutes les parties prenantes, avant d'aborder les aspects techniques de la question des déchets TFA. Cette réflexion sur la gouvernance devrait, de notre point de vue, être menée suivant trois axes intégrant non seulement le risque radiologique mais également le problème incontournable de la gestion des déchets radioactifs dans notre société.

Ces trois axes sont les suivants: pérennité, équité radiologique et responsabilité. La pérennité fait référence à la prochaine saturation du CIRES. L'industrie nucléaire n'étant plus aussi riche qu'autrefois, la gestion des coûts deviendra, dans les décennies à venir, un sujet plus important qu'il n'a pu l'être dans le passé. En conséquence, le choix d'un modèle économique et physique des flux de matières a besoin d'être appréhendé dans une perspective durable et globale, au sein de l'économie française. Globale, parce que certaines matières sont potentiellement réemployables, suivant la politique de durabilité de l'économie, de réutilisation de certaines matières premières ou de rareté. Cette problématique de durabilité doit être abordée dans son ensemble.

L'équité radiologique signifie que, en déplaçant les déchets radioactifs d'un point A, correspondant à une installation nucléaire, vers un point B, le CIRES de l'ANDRA, le problème du risque radiologique n'est pas réglé, mais déplacé. Si on réfléchit au-delà d'une génération – M. Christian Bataille connaît bien cette problématique – dans quelques générations, l'existence du CIRES aura été oubliée, l'ANDRA et l'ASN n'existeront plus ou auront été remplacées, mais la radioactivité sera toujours là, concentrée sur ce site. Est-il vraiment sage, dans une perspective de long terme, de concentrer les déchets à faible radioactivité sur une portion unique de notre territoire ?

Il faut prendre en compte non seulement la radioactivité de ces matières exprimée en becquerels par gramme mais aussi la dose induite pour la population. Cette dose n'est pas différente suivant que ces matières sont situées dans une installation nucléaire, dans une ancienne installation nucléaire déclassée, dans un centre de déchets ordinaire – on a évoqué les accidents du passé – ou dans un site ad hoc. Dans tous les cas, il existera toujours des populations à proximité et des acteurs économiques désireux de récupérer, un jour ou l'autre, des matières valorisables dont ils ignorent la radioactivité. Cette question de dosimétrie pour la population doit, elle aussi, être appréhendée de façon globale, dans le cadre d'une réflexion avec les acteurs de la société.

De la même manière, comme mentionné précédemment, si le service de gestion des déchets TFA est trop compliqué et coûteux, un certain nombre d'acteurs n'y auront pas recours. Les déchets radioactifs seront alors conservés sur les sites contaminés parce que les différents modes de gestion ne seront pas accessibles. Il s'agit donc également d'une iniquité, puisque certains producteurs de déchets disposent d'une filière et d'autres pas. Cette question d'équité doit être abordée, encore une fois, non sous l'angle technique, mais en considérant les problèmes globaux.

Enfin, la question de la responsabilité est majeure. Qui dit risque dit responsabilité de transfert des risques à autrui. En définissant des modes de gestion des déchets, il faut nécessairement mener une réflexion globale sur la façon d'assurer la répartition de la responsabilité ainsi que le contrôle de l'ensemble des risques, pas seulement du risque radiologique. Ce travail a déjà été réalisé.

Comme vous l'avez souligné, l'ASN a mis en place – et M. André-Claude Lacoste en a été un acteur central –, le système actuel. Mais celui-ci doit être revisité – probablement pas remis en cause dans son entièreté mais revisité –, au regard des conséquences en termes de responsabilité des deux autres approches. Comment consolider la pérennité et comment améliorer l'équité radiologique dans un système qui a, de toute façon, besoin d'être contrôlé ?

Cette réflexion sociétale – je reviendrai, en conclusion, sur la manière dont elle pourrait être conduite – peut déboucher sur un certain nombre d'orientations techniques en aval. Je fais un raccourci puisque nous avons également réfléchi aux conséquences techniques qu'un nouveau paysage politique pourrait induire dans notre pays.

Certaines orientations concernent la valorisation des matériaux, puisque ces déchets sont aussi, pour une part, des matériaux réemployables. Les opérations de démantèlement produisent notamment des bétons en grande quantité. Ces matériaux, quasiment exempts de radioactivité, pourraient être recyclés sur le site, d'autres sites nucléaires, voire non nucléaires, sous réserve, bien entendu, d'être à même de les trier. Une réflexion doit aussi être menée sur les déchets métalliques, puisqu'un certain nombre de métaux sont par nature réutilisables. Les démantèlements nucléaires produisent beaucoup de métaux décontaminables et largement réemployables. Certains ne le sont pas. Il faut évidemment être capable d'assurer un stockage ultime à ces derniers. Mais tous les autres pourraient, de notre point de vue, entrer dans des filières de fusion. C'est un sujet qui a déjà été abordé mais uniquement dans le cadre de la réglementation existante, ce qui interdit toute évolution significative.

Sous l'emprise de la première réflexion plus politique que j'évoquais tout à l'heure, on pourrait imaginer l'élargissement des procédés de fusion et le réemploi d'un certain nombre de produits recyclés dont la radioactivité serait complètement sans effet sur la population, compte tenu de l'extrême faiblesse de sa valeur. Cela pose la question de la viabilité d'une filière de valorisation des métaux, par fusion de métaux légèrement contaminés avec d'autres qui ne le sont pas. Encore faut-il que les lingots issus de ces fusions puissent être eux-mêmes mis sur un marché avec des débouchés crédibles.

Cela suppose de définir des exigences de traçabilité proportionnées au risque. En particulier, si le risque est quasi nul, il faut que la traçabilité impose uniquement le contrôle initial pour éviter une dérive mais que, ensuite le produit se trouve en quelque sorte libéré et ne soit plus soumis à une traçabilité infinie, ingérable dans le temps. Cela suppose aussi que les débouchés ne soient pas uniquement internes à l'industrie nucléaire, incapable de recycler elle-même la totalité de ces métaux. Ces dispositions sont effectives dans d'autres pays et envisageables en France, à condition d'avoir convenablement traité les prérequis évoqués précédemment. Cette question de la valorisation des matériaux irrite évidemment un certain nombre d'acteurs. Mais les seuils de libération existent dans le droit européen. La directive 201359Euratom du conseil de l'Union européenne les prescrit. Ils ne sont pas utilisés en France, mais ils ont une existence juridique avérée dans le droit européen. Il faut apprendre à s'en servir correctement.

Une deuxième orientation porte sur la diversification des options de stockage, puisque j'ai critiqué l'idée de tout concentrer en un seul point. Bien entendu, le CIRES est un outil majeur pour la gestion des déchets radioactifs. Comme pour CIGEO, il ne faut pas gaspiller cette ressource rare. Un certain nombre de déchets TFA sont radioactifs et le resteront durablement. Ils présentent une toxicité et génèrent une dose potentielle. Ils doivent être stockés dans un lieu sûr. Le CIRES constitue une bonne réponse dans ce cas. Mais il ne faut pas gâcher sa capacité avec des déchets qui n'ont rien à y faire.

Si ces derniers ne peuvent être recyclés et que leur degré de radioactivité ou de toxicité est tel que l'usage du CIRES apparaît surdimensionné, le risque associé au transport en grandes quantités sera plus élevé que le risque radiologique. Aussi, serait-il envisageable de recourir de manière maîtrisée à des centres de stockage conventionnels qui stockent déjà des produits amiantés plus dangereux que certains produits radioactifs. On pourrait imaginer que les règles de stockage dans les centres surveillés par la direction générale de la prévention des risques (DGPR) permettent d'accueillir des déchets faiblement radioactifs, évidement dans des conditions contrôlées. Cela réduirait les risques routiers de transport, les coûts et permettrait d'avoir une gestion équitable des risques radiologiques résiduels à l'échelle du territoire.

En résumé, ces orientations conduiraient à gérer ces déchets en utilisant des seuils de libération conventionnelle et des spécifications d'acceptation dans les centres de stockage, comme cela existe pour les polluants autres que radioactif. Les centres conventionnels disposent de règles de gestion permettant un contrôle des entrées pour assurer la conformité du stockage à sa mission. On pourrait leur ajouter une règle radiologique.

Encore en amont du dispositif, une troisième orientation envisageable concerne la limitation de la production des déchets. Aujourd'hui, la façon dont la doctrine est pratiquée fait que tout le monde considère normal d'enlever tout ce qui pourrait être contaminé, de façon à avoir la quasi-certitude de l'absence de becquerels dans un bâtiment déclassé. Cela conduit à créer ce que j'appelle des déchets « administrativement radioactifs », ne présentant aucune radioactivité mais issus de zones déchets. Il est plus simple de les traiter comme des déchets radioactifs plutôt que de contrôler s'ils sont vraiment radioactifs. Cette pratique génère de très grandes quantités de matières dites radioactives alors que, en fait, elles ne contiennent que peu de becquerels et donc des coûts et des risques, autres que radiologiques, très élevés.

Il serait, bien entendu, aussi possible de réduire la radioactivité en amont, sous réserve de suivre l'approche sociétale évoquée plus tôt. Mais cela suppose de parvenir à développer des méthodes de caractérisation radiologique des sites et des bâtiments qui soient opérationnelles, valables sur le plan scientifique, pas trop coûteuses, techniquement efficaces et contrôlables. Cela suppose également de définir des scénarios d'usage qui permettraient, comme pour les polluants conventionnels, d'assurer le contrôle de la destination d'un certain nombre de sites dépollués radiologiquement mais sur lesquels on ne pourrait, par exemple, construire une école maternelle. Cette doctrine, progressivement développée sous l'égide du ministère de l'écologie pour les polluants conventionnels, y compris problématiques comme les métaux lourds, est crédible. Elle a été vérifiée et acceptée par la société. Je pense qu'elle donne satisfaction. Il n'y a aucune raison pour qu'elle ne puisse pas être appliquée à des polluants radiologiques faibles. Enfin, cela passe aussi par la notion de niveau de dose permettant réellement de justifier ces scénarios, donc de déterminer en remontant vers les becquerels des seuils opérationnels de gestion afin de maîtriser l'avenir radiologique de ces sites.

Ce sont des pistes techniques. Mais, il me semble que ce serait une impasse de s'engager dans ces dernières avant d'avoir mené la réflexion politique. C'est probablement la raison pour laquelle les débats en cours au sein de groupes de travail comme celui du PNGMDR n'avancent guère. Tous les acteurs au sein de ces groupes se sentent bridés par la doctrine actuelle et leur vision de la position des différents acteurs au sein de la société. Si le dispositif réglementaire n'est pas intangible, il constitue néanmoins pour eux une donnée. Dans ce contexte, il est évidemment impossible d'avancer. Il faut donc engager un travail sociétal de fond, ce qui suppose une réflexion au sein du HCTISN et du groupe de travail du PNGMDR.

Des outils existants et validés, comme les conférences de citoyens, permettent de préciser les problématiques et d'évaluer la possibilité d'un consensus sur un certain nombre de sujets. Ces approches devraient éviter d'aborder les questions techniques, pour se pencher sur la problématique durable de la gestion des risques : équité, responsabilité et pérennité. Par la suite, ou en parallèle mais dans un deuxième temps, il faut engager un travail technique pour définir de nouveaux outils et des règles d'encadrement. Cela suppose des études de scénarios et de définition d'outils. L'IRSN est prêt à s'y engager s'il est sollicité. Dans ce rapport, nous avons conduit un travail exploratoire. Pour aller plus loin, il faut un consensus avec l'ASN et avec les ministères de tutelle, en particulier la DGPR. Mais nous pensons vraiment que ce travail technique est possible, à condition de desserrer un peu le cadre de pensée.

Pour que ces matières ne soient plus confinées dans un site de stockage spécifique ou une installation nucléaire de base tout en évitant de retomber dans les errements du passé, il faut également engager une réflexion technico-économique avec les filières industrielles. Mais celle-ci ne pourra, elle non plus, avoir lieu sans un travail politique préalable. En effet, les industriels, soucieux de leur bilan, cherchent à minimiser les conséquences des risques radiologiques. De ce fait, ils demanderont l'abaissement de tel seuil de libération, l'allégement de telle contrainte, etc. Ces demandes ne seraient évidemment pas audibles par la société. Aussi un travail politique permettant de définir une vision partagée et raisonnée des règles du jeu à venir, un cadre fixant des limites politiques, est-il indispensable. L'industrie nucléaire a un avenir dans notre pays, mais uniquement au sein de la société. Son encadrement politique passe aussi par celui des déchets qu'elle produit. Une fois un tel cadre défini, les industriels du nucléaire, mais aussi les autres (métallurgistes, constructeurs automobiles, entreprises de génie civil, etc.) pourront légitimement travailler.

Je termine en disant que cette perspective peut apparaître ambitieuse. Mais j'attire l'attention, notamment celle des parlementaires et des administrations, sur le fait que, si rien n'est engagé pour résorber ces difficultés, la gestion actuelle va buter à très court terme sur des difficultés majeures. Leur coût sera extrêmement élevé pour notre pays. Son industrie nucléaire n'en a pas besoin aujourd'hui.

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