Intervention de Éric Alauzet

Séance en hémicycle du 26 avril 2016 à 15h00
Débat sur le programme de stabilité 2016-2019

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Alauzet :

Pour 2016, les prévisions économiques relatives à la croissance et la réduction du déficit public formulées au début de l’année sont maintenues. La croissance est estimée à 1,5 % et la baisse du déficit public à 3,3 % du PIB.

Je veux tout d’abord souligner le fait que, pour la deuxième année consécutive, les perspectives de croissance à court terme sont conformes aux prévisions. Notre pays a enfin rompu avec ses mauvaises habitudes consistant à faire preuve d’un optimisme déraisonnable.

En revanche, si la croissance à court terme est correctement évaluée, ce n’est pas le cas de la croissance à moyen et long termes, pour lesquelles le risque de surestimation est important.

Ce risque est en réalité corrélé à la mauvaise pondération des déficits structurels et conjoncturels. Le président du Haut conseil des finances publiques en a convenu, une partie du déficit conjoncturel devrait être requalifiée en déficit structurel, tant, au fond, c’est l’épuisement de notre modèle de croissance qui est en cause. Nous traînons comme un boulet cette distorsion d’analyse qui nous empêche de penser la nécessaire transition.

Mais si les prévisions budgétaires ont pu être respectées, c’est bien grâce aux efforts supplémentaires de réduction de la dépense publique qu’il a fallu fournir pour compenser les effets de la faible inflation. Ce qui permet au passage de considérer que la baisse de dépenses est de plus en plus réelle et de moins en moins en tendance.

La prévision de l’inflation est donc devenue le talon d’Achille de la prévision budgétaire. Ce fut le cas pour 2015 – 0,1 % au lieu de 1 % – et ce sera encore le cas en 2016, peut-être dans les mêmes proportions, ce qui entraînera un nouveau train de réductions supplémentaires de dépenses qu’il faudra ajouter à celles nécessaires pour couvrir les nouvelles dépenses, sur lesquelles je ne reviens pas un seul instant.

Il est difficile, dans ces conditions de réduction du déficit budgétaire, de soutenir simultanément la relance de l’économie, sachant que la dépense publique ampute en partie cette relance. En effet, le budget n’est qu’un outil et la question reste bien, à quelques minutes de l’annonce des chiffres du chômage pour le mois de mars, celle de l’activité et de l’emploi. C’est la raison pour laquelle le CICE, et plus largement le pacte de responsabilité, suscitent des interrogations et font l’objet de vifs débats.

Face à l’impatience légitime de nos concitoyens, il est difficile de faire valoir la lenteur de la politique de l’offre alors qu’il faut attendre que les entreprises investissent et développent de nouveaux produits et services afin d’avoir accès à de nouveaux marchés pour peut-être, enfin, embaucher.

A contrario, la baisse de la dépense publique provoque des pertes d’emploi immédiates dans l’administration mais aussi dans les associations ou les entreprises, faute de commandes publiques, en particulier dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Pour les collectivités locales, la baisse des dotations, qui, à la différence des dépenses de l’État, ne se fait pas en tendance mais en valeur absolue, commence à peser lourdement sur certaines dépenses, notamment pour le maintien des services publics, les investissements et les aides aux associations.

Il faut néanmoins noter les efforts engagés pour atténuer ces baisses de dotation aux collectivités locales – je pense notamment à la majoration de 4 % du remboursement du FCTVA – fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée – et à son élargissement à la rénovation du patrimoine et aux routes, ou encore au fonds spécifique pour les territoires à énergie positive et au fameux milliard d’euros destiné aux investissements. Autant de cibles qui visent précisément à soutenir le secteur du BTP et la transition énergétique.

Je veux à cet instant insister sur le fait que les dépenses en faveur de la transition énergétique ont un temps de retour bien plus court que les autres investissements. La rareté financière doit avoir pour effet de nous amener à être plus sélectifs.

Par ailleurs, tous les investissements ne s’intègrent pas dans la transition écologique, certains allant même à son encontre. Cela aussi doit constituer un point d’interrogation quand les moyens sont réduits. Cependant, monsieur le ministre, pour 2017, nous n’échapperons pas à une question à 4,5 milliards d’euros. Cette question concerne la dernière phase de la suppression de la C3S – contribution sociale de solidarité des sociétés – en direction des grandes entreprises. Cette somme importante serait sans doute plus utile aux PME, ce qui suppose de reconsidérer la baisse de dotation de 3,5 milliards aux collectivités en 2017.

L’effort budgétaire est important, mais où est-il le plus productif pour l’emploi ? C’est la question que nous devons nous poser.

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