Il importe de renforcer les canaux institutionnels de dialogue, aux plan national et territorial, entre ces derniers et l’ensemble des acteurs du sport. Les ligues professionnelles l’ont d’ailleurs bien compris, qui à l’unanimité – qu’il s’agisse du football ou des autres sports – ont approuvé cette proposition de loi.
C’est pourquoi, dès l’article 1er, nous précisons les conditions juridiques de refus de vente et de délivrance de titres d’accès à une manifestation sportive et celles relatives à la mise en place de traitements automatisés de données par les organisateurs de manifestations sportives. Nous créons un cadre juridique précis, qui justement n’existait pas et qui permettra de mieux assurer la sécurité dans les stades et à leurs abords en donnant aux organisateurs les moyens d’assumer leurs obligations en la matière aux fins d’assurer la sécurité des manifestations sportives.
Seront ainsi visés, comme « atteintes à la sécurité », non seulement les comportements qui portent directement atteinte à la sécurité des biens et des personnes, tels que les violences faites aux personnes ou les dégradations de biens, mais aussi les comportements qui peuvent, indirectement ou ultérieurement, porter atteinte à la sécurité, comme le démontage de siège pouvant être ensuite transformé en arme par destination, les insultes graves, susceptibles d’engendrer des réactions violentes, ou encore les comportements provocateurs et autres menaces. Il appartiendra au Gouvernement, vous l’avez dit monsieur le secrétaire d’État, de préparer sur cette base un décret en Conseil d’État, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, afin d’encadrer les traitements automatisés de données qui pourront être créés par les organisateurs de manifestations sportives. C’est donc un cadre juridique très précis qui résultera de l’article 1er.
Dans le même esprit, nous allongeons la durée maximale de l’interdiction administrative de stade, qui est naturellement un plafond et non un plancher. Elle doit évidemment être proportionnée aux circonstances.
Nous précisons, de même, à l’initiative de notre excellent collègue Philippe Goujon, qui est passionné de football et d’ordre public, les conditions dans lesquelles l’identité des personnes faisant l’objet d’une interdiction de stade peut être transmise aux organismes sportifs internationaux, comme l’Union des associations européennes de football – l’UEFA – ou, demain peut-être, le Comité international olympique – le CIO.
Nous encadrons, aussi, sur la proposition de notre collègue marseillais Patrick Mennucci, le régime des ventes de cartes d’abonnement.
Parallèlement, nous créons une instance nationale de dialogue avec les supporters – vous en avez parlé abondamment et éloquemment, monsieur le secrétaire d’État – et nous demandons à chacun des clubs professionnels de désigner, localement, après avis des associations de supporters, une ou plusieurs personnes référentes chargées des relations avec les supporters.
Cet article 5, qui est le produit d’amendements du Gouvernement, de François de Rugy, de députés appartenant à différents groupes et de votre rapporteur, sera très utile pour institutionnaliser ce dialogue au plan national et à l’échelon territorial, pour faciliter le bon déroulement des manifestations sportives et la promotion des valeurs du sport dans toutes les disciplines. Je suis certain que toutes les associations de supporters, y compris certains groupes ultras – je pense notamment à celui de l’AJA –, pourront participer pleinement à ce dialogue local. C’est déjà largement le cas, d’ailleurs.
Mes chers collègues, vous l’avez compris, je vous appelle à ne pas prolonger la navette et à adopter, sans l’amender, le texte voté par la commission des lois.
Je tiens, néanmoins, à exprimer à cette tribune une interrogation. Au Sénat, a été supprimée une disposition de bon sens, introduite à l’Assemblée nationale à l’initiative de Philippe Goujon, qui coordonnait le champ géographique des interdictions administratives et des interdictions judiciaires, en permettant à celles-ci de s’appliquer, comme celles-là, aux enceintes où sont retransmises les manifestations sportives – c’est-à-dire, en français courant, les « fans zones ». C’est un désaccord technique entre le Sénat et nous, qui ne légitime pas de poursuivre la navette, mais qui ne fait qu’amplifier nos interrogations quant à la sécurisation des « fans zones » lors de l’Euro 2016. Au nom des députés du groupe Les Républicains, je vous appelle, monsieur le secrétaire d’État, à préciser ici les conditions dans lesquelles les pouvoirs de police administrative seront utilisés pour sécuriser les « fans zones ». Je pense non seulement aux pouvoirs de police administrative de droit commun, mais aussi aux pouvoirs de police administrative renforcés, applicables en vertu du régime de l’état d’urgence, puisque aussi bien le Premier ministre nous a indiqué souhaiter la prolongation de ce régime, précisément en raison du contexte de l’Euro 2016.
Ces précisions sont nécessaires car il serait totalement illusoire de faire reposer la sécurisation des « fans zones » sur les seules interventions des polices municipales – qui sont très respectables mais qui ont des pouvoirs très limités – et des acteurs de la sécurité privée, dont les pouvoirs juridiques et les moyens budgétaires sont également restreints.
Nous sommes nombreux ici à souhaiter que certaines « fans zones » soient interdites, compte tenu de la menace terroriste extrêmement élevée qui pèse sur notre nation. Le Gouvernement va nous demander de prolonger l’état d’urgence au motif que pèse sur la nation un « péril imminent » : c’est le critère de l’état d’urgence.
Eh bien, s’il y a péril imminent, il faut tout de même s’interroger sur la nécessité d’interdire certaines « fans zones ».