La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, mesdames, messieurs les députés, à l’évidence, cette proposition de loi renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme offre une meilleure reconnaissance des supporters, acteurs souvent oubliés et pourtant essentiels, sans qui les compétitions sportives ne seraient pas ce qu’elles sont.
Après un travail constructif entre le Gouvernement, le rapporteur et les différents groupes parlementaires, ce texte a connu des mutations profondes au cours de son examen. Je ne peux que me réjouir, à titre personnel, de cette réorientation.
En effet, sans tomber dans le laxisme, le Gouvernement a souhaité que l’on ne restreigne pas l’approche du supportérisme au seul aspect répressif. Il est clair que l’on ne peut lutter contre la violence dans les stades sans considérer ce qui fonde l’identité du supporter et en refusant le dialogue avec lui.
Depuis trente ans, des mesures ont été prises, mais elles se concentraient essentiellement sur l’aspect répressif : interdictions de stade, interdictions de déplacement, obligation de pointage, etc.
Cela étant, depuis 2010, une évolution s’est opérée, plusieurs actions ayant été menées afin de donner de plus en plus de place aux supporters. Mais nous n’en étions qu’au stade de la réflexion ; grâce à ce texte, nous allons passer à l’action et au concret.
Il y a eu le Livre vert du supportérisme, rédigé sur proposition de Mme Rama Yade. J’ai ensuite eu le plaisir de commettre, avec Guenhaël Huet, Pascal Deguilhem et Marie-George Buffet, un rapport qui proposait déjà de mieux associer les supporters à la vie des clubs. Jean Glavany a lui aussi souligné dans un rapport l’importance de développer un dialogue durable avec les supporters.
Plus récemment, une proposition de loi concernant la représentation des supporters a été déposée, en juin 2015, à l’Assemblée nationale et au Sénat ; François de Rugy était venu me la présenter.
Enfin, on peut évoquer plusieurs colloques organisés sur ce sujet, comme celui sur les « Ambassades des supporters à l’Euro 2016 », auquel j’ai eu le plaisir de participer en mars dernier.
Le rapide historique auquel je viens de me livrer montre l’empressement, ces dernières années, à reconsidérer le rôle des supporters et à dissocier ceux-ci de la violence. On constate la même volonté au sein de nombreuses associations de supporters que j’ai eu, pour certaines, l’occasion de rencontrer.
Avant de rentrer dans le détail de ce texte, je tiens à remercier les rapporteurs de l’Assemblée nationale et du Sénat, les députés et les sénateurs qui se sont investis dans la réflexion, contribuant à faire évoluer le regard sur les supporters.
Après ces remerciements, permettez-moi de vous dire que vous avez permis, avec les sénateurs, de rappeler que les valeurs du sport sont celles de tous, au-delà même des étiquettes politiques, puisque cette proposition de loi a été votée à une large majorité à chaque lecture et même à l’unanimité, ce mardi, en commission.
Plus que cela, elle a rassemblé – c’est le propre du sport. Elle a également permis de rappeler que les hooligans n’auront jamais rien à voir avec les autres supporters, en pointant la nécessité d’éviter les amalgames. Oui, il y a parfois des violences inacceptables dans le milieu du football, et elles sont incompatibles avec les valeurs du sport. Le Gouvernement comme le mouvement sportif en sont pleinement conscients et les condamnent fermement.
Au-delà de ces impératifs de sécurité, la loi que vous vous apprêtez à voter envisage le supporter sous un nouveau jour, comme une personne responsable et crédible. Je rappelle que ce texte de loi est l’aboutissement d’une réflexion qui aura permis de passer de la seule répression à une ouverture au dialogue avec le supporter. Du reste, son nom a évolué, la preuve s’il en fallait que l’Assemblée a fait le choix de lutter contre les amalgames ; et c’est précieux, par les temps qui courent.
Je suis convaincu du rôle que les supporters ont à jouer, tant dans le développement du sport et l’animation des stades que dans leur soutien aux politiques de sécurité conduites pour en renforcer l’efficacité.
C’est cet équilibre entre répression, prévention et dialogue que j’ai souhaité encourager et accompagner. C’est en associant ces divers aspects et la vigilance de tous que nous gagnerons en efficacité.
Cet équilibre se mesure en particulier à travers les articles 1er et 2, d’une part, et l’article 5, d’autre part, de ce texte de loi, qui vont d’ailleurs dans le sens de l’alignement de la France sur les politiques européennes.
Dans ses articles 1er et 2, la proposition de loi vise les impératifs en matière de sécurité. Les mesures concernent à la fois la vente de billets et les interdictions administratives de stade. Il apparaît inenvisageable de laisser pénétrer dans les lieux des rencontres sportives des personnes qui entendent semer le trouble ou qui viennent assister à une rencontre sportive avec un autre dessein.
N’oublions pas que le sport transmet des valeurs, notamment à une jeunesse qui ne doit pas se retrouver face à des comportements violents, irresponsables et inacceptables.
Ces deux mesures doivent s’accompagner, et j’y tiens beaucoup, d’un encadrement très strict afin d’éviter l’arbitraire. Le Sénat y a été sensible, en particulier en limitant aux seuls impératifs de sécurité les nouveaux pouvoirs conférés aux clubs en matière d’accès au stade.
Au-delà, ce sera au décret pris en Conseil d’État, après avis de la CNIL – Commission nationale de l’informatique et des libertés –, d’encadrer strictement la mise en oeuvre de cette mesure.
Ce texte devra mentionner un certain nombre d’éléments précis, notamment sur les données exactes présentes sur les fichiers et la durée de leur conservation, ainsi que sur l’usage qui peut en être fait par le club concerné. Le ministère de l’intérieur, en lien avec mes services, travaille actuellement à sa rédaction en ce sens.
L’article 5, quant à lui, s’affiche comme celui qui apporte l’équilibre. C’est, à mon sens, la pièce centrale de cette proposition de loi. Il inclut le supporter dans les échanges avec les instances sportives et les instances institutionnelles. Cet article fonde, en quelque sorte, le supportérisme à la française.
Il s’agit de donner au supporter la reconnaissance qu’il mérite. Personne ne peut contester le fait que le supporter est le poumon des événements sportifs, quels qu’ils soient. À ce titre, il doit bénéficier d’une considération plus importante, dès lors qu’il est responsable. Il ne peut être stigmatisé, ni comme un consommateur de sport ni comme un fauteur de trouble.
La proposition de loi entend son rôle à deux niveaux. Tout d’abord, au niveau local, chaque club professionnel devra désigner un ou plusieurs référents chargés de dialoguer avec les supporters et leurs associations reconnues.
Ces nouveaux référents, véritables médiateurs, seront nommés et formés par les clubs. Ils pourront être des salariés, voire des bénévoles dans les disciplines les moins structurées, mais ils ne pourront pas être les « responsables sécurité » de ces clubs.
S’agissant de cette désignation, le club devra recueillir l’avis des associations de supporters qui auront préalablement été agréées par le ministère des sports. Avec cet agrément, dont les conditions seront très vite précisées par arrêté, dans un souci de simplification, c’est un véritable gage de reconnaissance et de responsabilisation qui est apporté à ces associations de supporters comme aux clubs.
Par ailleurs, au niveau national, l’Instance nationale du supportérisme s’affirmera comme force de réflexion, de dialogue et de proposition. Elle sera composée de façon paritaire et inclura une part importante de représentants des associations de supporters de niveau local et national – c’est important. Seront également présents des représentants des ministères concernés par le sujet, des fédérations et des ligues professionnelles, des clubs, des collectivités territoriales ou encore des personnalités qualifiées.
Plusieurs missions seront confiées à cette instance nationale. Elle pourra en particulier rendre des avis sur des textes législatifs ou réglementaires ; elle pourra elle-même faire des propositions ; elle pourra en outre conduire des missions sur tout sujet relevant du supportérisme. Des décrets, rédigés dans le même esprit de concertation, viendront préciser et renforcer la loi à ce niveau.
Si l’on aboutit aujourd’hui à un vote positif et définitif, ce que le Gouvernement souhaite vivement, je m’engage à ce que ces textes d’application, déjà en cours d’élaboration, entrent en vigueur rapidement.
Alors que nous arrivons probablement au terme de la navette parlementaire sur ce texte, je crois que l’on peut se satisfaire de l’évolution de celui-ci et de la version à laquelle nous sommes aujourd’hui parvenus.
Pour conclure, et en guise de prospective, ce n’est, je l’espère, qu’une première étape dans la construction d’une relation de confiance entre les supporters et les autres acteurs du sport professionnel. Un temps de maturation sera certainement nécessaire pour aboutir à d’autres avancées en ce domaine, avancées auxquelles je serai toujours particulièrement attentif.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, j’irai droit au but. Au nom de la commission des lois, qui s’est exprimée à l’unanimité, je vous propose d’adopter conforme cette proposition de loi, que j’ai déposée avec mes collègues Républicains en septembre dernier, qui a été adoptée à la quasi-unanimité de notre assemblée en février et qui nous revient, en deuxième lecture, après un détour par le Palais du Luxembourg.
Je tiens à saluer l’esprit dans lequel nous avons travaillé. Ce texte, M. le secrétaire d’État l’a dit, est le produit d’un travail collectif, en bonne intelligence, qui a été conduit à l’Assemblée nationale, puisqu’à l’initiative du groupe Les Républicains, ce texte a été approuvé et enrichi par les apports du groupe UDI, du groupe écologiste et du groupe socialiste, avec votre concours très actif, monsieur le secrétaire d’État, et celui des services du ministère de l’intérieur.
Ce texte n’est donc ni de droite, ni de gauche, ni du centre ou d’ailleurs, c’est un texte pragmatique, qui répond à des besoins opérationnels et qui aura une utilité pratique immédiate.
Je ne reviendrai pas, à cette tribune, sur les quelques modifications rédactionnelles qui ont été votées au Sénat ; je les ai exposées en détail devant la commission des lois ; à dire vrai, elles sont rarement nécessaires, elles ne sont pas utiles et elles ne méritent, en tout état de cause, ni que l’on s’y attarde ni surtout que l’on prolonge la navette.
Je voudrais, plutôt, à l’attention des citoyens qui nous écoutent et notamment de ceux qui s’expriment – parfois avec vigueur, même s’ils sont peu nombreux – sur les réseaux sociaux, expliquer ce que nous voulons faire.
Nous n’avons pas voulu reprendre de A à Z le droit existant. Cette proposition de loi, à cet égard, s’inscrit dans la continuité des dispositions législatives adoptées ces dix dernières années.
Je pense, en particulier, à la loi du 5 juillet 2006 relative à la prévention des violences lors des manifestations sportives, qui avait été adoptée lorsque Nicolas Sarkozy était ministre de l’intérieur.
Je pense, tout autant, à la loi du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure – la LOPPSI 2 –, dont les dispositions relatives à la lutte contre les violences dans les stades et aux abords des stades ont été adoptées sous l’impulsion de Brice Hortefeux.
Ces textes ont été appliqués avec constance par les ministres de l’intérieur et des sports qui se sont succédé et c’est, je crois, conscients de cette continuité que le Premier ministre, Manuel Valls, et le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, ont approuvé la proposition de loi dont nous achevons aujourd’hui la discussion.
Ce texte dépasse le clivage artificiel entre la répression et la prévention. La répression, c’est le domaine de la sanction judiciaire : ce n’est donc en rien celui de cette proposition de loi. La prévention, c’est le domaine de la police administrative qui prévient les troubles à l’ordre public et aussi celui de la concertation.
Pro-supporter mais anti-hooligan, cette proposition de loi est d’abord préventive, puisqu’elle poursuit deux objectifs. D’abord, mieux assurer la sécurité au sein et aux abords des stades, en donnant aux organisateurs de manifestations sportives les moyens de mieux assumer leurs obligations en matière de sécurité : c’est le premier objectif, le coeur du texte. Mais celui-ci tend aussi à affirmer la responsabilité des supporters, y compris naturellement des groupes ultras, qu’il ne faut pas confondre avec les hooligans : ce sont des supporters un peu plus pimentés que les autres, qui doivent être inclus dans ce dialogue.
Il importe de renforcer les canaux institutionnels de dialogue, aux plan national et territorial, entre ces derniers et l’ensemble des acteurs du sport. Les ligues professionnelles l’ont d’ailleurs bien compris, qui à l’unanimité – qu’il s’agisse du football ou des autres sports – ont approuvé cette proposition de loi.
C’est pourquoi, dès l’article 1er, nous précisons les conditions juridiques de refus de vente et de délivrance de titres d’accès à une manifestation sportive et celles relatives à la mise en place de traitements automatisés de données par les organisateurs de manifestations sportives. Nous créons un cadre juridique précis, qui justement n’existait pas et qui permettra de mieux assurer la sécurité dans les stades et à leurs abords en donnant aux organisateurs les moyens d’assumer leurs obligations en la matière aux fins d’assurer la sécurité des manifestations sportives.
Seront ainsi visés, comme « atteintes à la sécurité », non seulement les comportements qui portent directement atteinte à la sécurité des biens et des personnes, tels que les violences faites aux personnes ou les dégradations de biens, mais aussi les comportements qui peuvent, indirectement ou ultérieurement, porter atteinte à la sécurité, comme le démontage de siège pouvant être ensuite transformé en arme par destination, les insultes graves, susceptibles d’engendrer des réactions violentes, ou encore les comportements provocateurs et autres menaces. Il appartiendra au Gouvernement, vous l’avez dit monsieur le secrétaire d’État, de préparer sur cette base un décret en Conseil d’État, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, afin d’encadrer les traitements automatisés de données qui pourront être créés par les organisateurs de manifestations sportives. C’est donc un cadre juridique très précis qui résultera de l’article 1er.
Dans le même esprit, nous allongeons la durée maximale de l’interdiction administrative de stade, qui est naturellement un plafond et non un plancher. Elle doit évidemment être proportionnée aux circonstances.
Nous précisons, de même, à l’initiative de notre excellent collègue Philippe Goujon, qui est passionné de football et d’ordre public, les conditions dans lesquelles l’identité des personnes faisant l’objet d’une interdiction de stade peut être transmise aux organismes sportifs internationaux, comme l’Union des associations européennes de football – l’UEFA – ou, demain peut-être, le Comité international olympique – le CIO.
Nous encadrons, aussi, sur la proposition de notre collègue marseillais Patrick Mennucci, le régime des ventes de cartes d’abonnement.
Parallèlement, nous créons une instance nationale de dialogue avec les supporters – vous en avez parlé abondamment et éloquemment, monsieur le secrétaire d’État – et nous demandons à chacun des clubs professionnels de désigner, localement, après avis des associations de supporters, une ou plusieurs personnes référentes chargées des relations avec les supporters.
Cet article 5, qui est le produit d’amendements du Gouvernement, de François de Rugy, de députés appartenant à différents groupes et de votre rapporteur, sera très utile pour institutionnaliser ce dialogue au plan national et à l’échelon territorial, pour faciliter le bon déroulement des manifestations sportives et la promotion des valeurs du sport dans toutes les disciplines. Je suis certain que toutes les associations de supporters, y compris certains groupes ultras – je pense notamment à celui de l’AJA –, pourront participer pleinement à ce dialogue local. C’est déjà largement le cas, d’ailleurs.
Mes chers collègues, vous l’avez compris, je vous appelle à ne pas prolonger la navette et à adopter, sans l’amender, le texte voté par la commission des lois.
Je tiens, néanmoins, à exprimer à cette tribune une interrogation. Au Sénat, a été supprimée une disposition de bon sens, introduite à l’Assemblée nationale à l’initiative de Philippe Goujon, qui coordonnait le champ géographique des interdictions administratives et des interdictions judiciaires, en permettant à celles-ci de s’appliquer, comme celles-là, aux enceintes où sont retransmises les manifestations sportives – c’est-à-dire, en français courant, les « fans zones ». C’est un désaccord technique entre le Sénat et nous, qui ne légitime pas de poursuivre la navette, mais qui ne fait qu’amplifier nos interrogations quant à la sécurisation des « fans zones » lors de l’Euro 2016. Au nom des députés du groupe Les Républicains, je vous appelle, monsieur le secrétaire d’État, à préciser ici les conditions dans lesquelles les pouvoirs de police administrative seront utilisés pour sécuriser les « fans zones ». Je pense non seulement aux pouvoirs de police administrative de droit commun, mais aussi aux pouvoirs de police administrative renforcés, applicables en vertu du régime de l’état d’urgence, puisque aussi bien le Premier ministre nous a indiqué souhaiter la prolongation de ce régime, précisément en raison du contexte de l’Euro 2016.
Ces précisions sont nécessaires car il serait totalement illusoire de faire reposer la sécurisation des « fans zones » sur les seules interventions des polices municipales – qui sont très respectables mais qui ont des pouvoirs très limités – et des acteurs de la sécurité privée, dont les pouvoirs juridiques et les moyens budgétaires sont également restreints.
Nous sommes nombreux ici à souhaiter que certaines « fans zones » soient interdites, compte tenu de la menace terroriste extrêmement élevée qui pèse sur notre nation. Le Gouvernement va nous demander de prolonger l’état d’urgence au motif que pèse sur la nation un « péril imminent » : c’est le critère de l’état d’urgence.
Eh bien, s’il y a péril imminent, il faut tout de même s’interroger sur la nécessité d’interdire certaines « fans zones ».
Pas toutes, tout le temps, partout, mais certaines d’entre elles : celles qui paraissent les plus exposées.
Je ne doute pas, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, que cette séance publique permettra non seulement d’adopter cette proposition de loi, mais aussi de préciser publiquement les intentions du Gouvernement à l’approche de l’Euro 2016.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, tant sur le sport que sur la sécurité, nous savons toujours trouver concorde et consensus, sur tous les bancs de cet hémicycle. Cette proposition de loi en est un bel exemple et une preuve manifeste.
Le sport doit être une fête. Il faut pouvoir aller au stade en famille, avec ses enfants, en toute tranquillité et en toute quiétude.
La fête ne doit pas être gâchée. Ces moments de partage et de convivialité ne doivent pas être anéantis par une poignée de personnes violentes cherchant à commettre des incivilités, voire des exactions : des casseurs, des hooligans, qui ne sont pas des supporters. Un supporter, on le sait, est un spectateur du sport, fidèle, loyal, qui soutient et encourage son équipe dans les bons et les mauvais moments.
À la veille de l’Euro, des grands événements sportifs qui vont se dérouler en France et alors que la France est candidate pour accueillir les Jeux olympiques et paralympiques de 2024, il est de notre devoir et de notre responsabilité d’assurer l’ordre public et la sécurité aux abords et à l’intérieur des stades.
Comme vous le savez, à l’initiative de Nicolas Sarkozy, d’importantes mesures avaient déjà été mises en oeuvre, en particulier lors des rencontres de football, avec la mise en place d’une unité de police spécifique, la division nationale de lutte contre le hooliganisme, et des interdictions administratives de stade.
Alors que la menace terroriste est malheureusement de plus en plus prégnante, nous devons renforcer ces mesures. Tel est l’objet de la proposition de loi de mon collègue rapporteur – et membre du groupe Les Républicains – Guillaume Larrivé, qui a accompli un travail remarquable qu’il convient de saluer.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Cette proposition de loi vise à renforcer la répression du hooliganisme par les mesures suivantes : autoriser les clubs à refuser toute vente de billets à certains spectateurs ; rendre les cartes annuelles d’abonnement nominatives ; permettre aux clubs de mettre en place et de gérer un fichier de supporters indésirables car ne respectant pas les valeurs citoyennes ; augmenter les durées d’interdiction administrative de stade en les portant à 24 mois au lieu de 12 pour les interdictions et à 36 mois au lieu de 24 en cas de récidive ; autoriser l’administration française à communiquer l’identité des personnes faisant l’objet d’une interdiction judiciaire ou administrative à des institutions telles que le Comité international olympique.
Le temps sportif, doublé du temps législatif, impose aujourd’hui d’adopter ce texte rapidement. C’est pourquoi le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi conforme à la version issue du Sénat.
Pour autant, permettez-moi trois remarques.
La première pour vous faire part d’une déception : vous avez parlé des supporters, monsieur le secrétaire d’État, et vous avez prévu d’indiquer dans un article du code du sport que « les supporters et les associations de supporters, par leur comportement et leur activité, participent au bon déroulement des manifestations sportives et des compétitions et pour la promotion des valeurs du sport ».
Les supporters, on le sait, sont des acteurs incontournables du sport. Ils doivent être associés aux décisions des clubs et des pouvoirs publics, et participent, eux aussi, à la prévention de la violence dans les stades. Il est donc positif d’avoir prévu à l’article 5 la désignation d’un ou plusieurs représentants officiels des supporters.
Mais, vous l’avez dit, et je sais que nous partageons tous ici cette préoccupation, sur tous les bancs de cette assemblée, il faut réfléchir plus avant à la mise en place d’un véritable statut du supporter. Chacun comprendra que ce texte ne peut pas être le bon véhicule législatif pour cela.
C’est dommage, mais le temps du sport, encore une fois, nous impose d’avancer.
Deuxième remarque, sous forme d’interrogation : vous mettez en place une Instance nationale du supportérisme placée auprès du ministre des sports. Elle sera pluridisciplinaire et composée de l’ensemble des acteurs concernés. La loi renvoie au décret pour préciser les modalités de cette instance.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez tenté de nous indiquer quelles étaient vos intentions quant à sa composition et ses missions. Vous avez dit que vos services travaillaient déjà sur ce dossier. Nous attendons effectivement de savoir ce qui sortira de la réflexion ministérielle sur ce sujet.
Il subsiste enfin, au moment d’adopter ce texte, un regret important : ce sera ma troisième et dernière remarque.
Le Sénat a supprimé le dispositif visant à étendre le périmètre de l’interdiction judiciaire de stade aux « fans zones »,…
…dispositif adopté en première lecture à l’Assemblée nationale à l’initiative de notre collègue ici présent, Philippe Goujon.
Cette mesure avait pourtant toute sa place dans cette proposition de loi. Je le redis : on ne peut pas aujourd’hui ignorer les très fortes inquiétudes des élus et de nos concitoyens quant à la sécurité de ces « fans zones ».
Cette mesure aurait contribué au renforcement du dispositif dans les enceintes concernées, alors que les matchs vont être retransmis et qu’il y aura beaucoup de supporters, beaucoup d’amoureux du foot.
Nous attendons des réponses sur cette question. Nous aurions pu proposer de réintroduire cette mesure en deuxième lecture, mais nous vous l’avons tous dit : il faut que cette proposition de loi soit adoptée. Les députés du groupe Les Républicains, à l’initiative de celle-ci, voteront le texte tel qu’il vous est présenté aujourd’hui : il allie la prévention à la sanction, dans l’intérêt du sport et pour la sécurité de nos concitoyens qui, je l’espère, sera sauvegardée.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les événements sportifs sont des moments de convivialité, de loisir et de partage où les débordements violents et racistes n’ont pas leur place.
Pourtant, en dépit de la législation existante, la violence de certaines personnes qui se disent supporters est encore présente dans les enceintes sportives et à leurs abords. Ces derniers mois, au moins trois matchs ont été ternis par de violents affrontements entre supporters, ce qui est profondément regrettable. Contraires à l’éthique même du sport, ces débordements doivent être sanctionnés avec la plus grande fermeté.
Aussi, comme mon collègue et ami Michel Zumkeller – orateur sur ce texte en première lecture – je salue le dépôt de cette proposition de loi à quelques semaines maintenant de l’Euro 2016, événement qui – nous le savons tous – constitue un enjeu majeur en termes de sécurité.
Au-delà de la perspective de l’Euro 2016, l’examen de ce texte est motivé par la volonté de renforcer un arsenal législatif que la France a mis tardivement en place par rapport à d’autres pays européens. M. le rapporteur l’a dit tout à l’heure, il a fallu attendre les années 2000 pour que s’esquissent des mesures probantes en matière de lutte contre le hooliganisme.
L’interdiction administrative de stade, décidée par le préfet, a été instaurée en 2006 de même que la procédure de dissolution administrative des groupements de supporters racistes ou violents.
La lutte contre le hooliganisme a commencé à se structurer à partir de 2009 avec la mise en place d’une Division nationale de lutte contre le hooliganisme – la DNLH – chargée de gérer les débordements, de coordonner les renseignements et d’appuyer le maintien de l’ordre des événements sportifs.
Puis, une accélération s’est produite à partir de 2010. La procédure de dissolution administrative des groupements de supporters racistes ou violents a été complétée par une procédure de suspension d’activité de ces groupements pour une durée maximale de douze mois.
Ensuite, le cadre juridique relatif aux interdictions de stade a été renforcé. La loi du 14 mars 2011 oblige notamment les préfets à communiquer aux fédérations et groupements sportifs l’identité des interdits de stade et leur en a ouvert la faculté s’agissant des associations de supporters.
La durée maximale de l’interdiction administrative de stade a par ailleurs été portée à six mois en 2010, puis à douze mois en 2011 – on a ainsi observé entre 2011 et 2014 une pacification des stades et de leurs abords.
Néanmoins, les violences persistent et la saison footballistique 2014-2015 a été marquée par une hausse de près de 20 % des interpellations au cours des championnats de Ligue 1 et de Ligue 2 – n’est-ce pas, monsieur le secrétaire d’État ?
Cette proposition de loi est donc nécessaire si nous voulons disposer d’un arsenal législatif qui favorise le dialogue avec les supporters et nous permette de mieux lutter contre le hooliganisme.
Le premier apport de ce texte est de clarifier les conditions de refus d’accès et de délivrance par les organisateurs de titres d’accès à une manifestation sportive. Le texte autorise en outre ces derniers à mettre en oeuvre des traitements automatisés de données à caractère personnel.
L’utilisation des fichiers a suscité des interrogations ces dernières années. En juin 2015, la CNIL avait mis en demeure le PSG de respecter le cadre des autorisations relatives aux interdictions et exclusions de stade qu’elle a délivrées.
En septembre dernier, c’est un arrêté signé par le ministre de l’intérieur permettant la création d’un fichier « Stade » qui avait été annulé par le Conseil d’État. Ce dernier avait ainsi estimé que le fichier ne respectait pas les exigences de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique et aux libertés, notamment en collectant des données qui n’étaient pas « adéquates et pertinentes » avec le but recherché.
L’article 1er, coeur du dispositif de ce texte, permet de préciser ce point. Nous sommes favorables à sa rédaction telle que modifiée par l’Assemblée nationale et le Sénat, laquelle permet de mieux encadrer cette disposition. Cette dernière version retient comme motif de refus d’accès et de délivrance des titres d’accès le non-respect des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatif à la sécurité.
En conséquence, les traitements automatisés que les organisateurs sont autorisés à mettre en place devront porter sur ces manquements. L’article 1er prévoit en outre de placer la CNIL et le Conseil d’État au coeur de ce dispositif, ce dont nous nous félicitons.
L’utilisation de ces fichiers doit également reposer sur la coopération entre les clubs, les associations de supporters, la justice, les fédérations et, évidemment, la Division nationale de lutte contre le hooliganisme.
Tel est d’ailleurs l’objectif de l’article 3, qui prévoit la possibilité de communiquer l’identité des personnes faisant l’objet d’une interdiction judiciaire ou administrative de stade aux organismes sportifs internationaux. Il s’agit d’une disposition importante dans la perspective de l’Euro 2016.
Par ailleurs, nous sommes favorables à l’allongement de la durée d’interdiction des stades. Nos voisins d’outre-Manche ont mené cette politique pour combattre les années noires de l’hooliganisme dans le foot anglais au cours des années 1970-1980. Le durcissement des peines d’interdiction de stade a un effet dissuasif très important, notamment lorsqu’il s’accompagne – comme dans les stades anglais – d’une sanction bien souvent plus lourde de la part des clubs. Repousser l’interdiction de stade d’une à deux années, voire à trois ans en cas de récidive, est une mesure qui saura dissuader certains perturbateurs ne respectant pas l’éthique sportive.
Assurer la sécurité dans les stades impose également d’être vigilant lors de la vente des titres d’accès aux événements. Pour lutter contre les perturbateurs qui tenteraient d’accéder au stade, il est évidemment nécessaire d’encadrer la vente des abonnements annuels, comme le prévoit l’article 4 introduit par notre assemblée.
Toutefois, la répression ne peut être l’unique chemin pour lutter contre le hooliganisme. La prévention, le travail de terrain et la pédagogie doivent être également au coeur de notre stratégie.
Les clubs de supporters, les centres de formation des jeunes, les associations antiracistes, les clubs de foot, la Division nationale de lutte contre le hooliganisme, la Ligue de football professionnel et la Fédération française de football doivent poursuivre, ensemble, cet objectif.
Nous saluons donc l’adoption de deux amendements – que j’avais cosignés – visant à créer un organisme national représentatif des supporters et à instaurer au sein de chaque club professionnel un ou plusieurs référents chargés d’assurer des échanges réguliers avec les supporters du club.
Face aux comportements déviants dans les stades, nous devons tendre la main aux interlocuteurs que sont les groupes de supporters afin d’instaurer un dialogue et de mettre en place des solutions concrètes pour lutter contre la violence dans les stades. Les clubs de supporters ont un rôle incontournable dans la régulation des comportements à risque.
Pour l’ensemble de ces raisons, vous l’aurez compris, le groupe UDI votera ce texte – comme cela fut le cas en première lecture – et nous ne pouvons que nous féliciter.
Je terminerai en rappelant que l’on demande aux clubs d’agir de plus en plus en matière de sécurité – ce n’est pas M. le secrétaire d’État, qui connaît parfaitement la situation, qui me dira le contraire. C’est très bien de demander que la sécurité soit toujours plus grande dans les stades et que les stadiers soient de plus en plus nombreux, mais qui paie ? Les clubs ! Aujourd’hui, ils sont confrontés à des dépenses supplémentaires et cela soulève un réel problème dont il faut tenir compte.
Cela étant dit, encore une fois, je ne peux que me réjouir de cette proposition de loi qui, j’en suis persuadé, sera adoptée à l’unanimité. Je le dis souvent : la politique divise et le sport rassemble ! Aujourd’hui, nous nous rassemblons même autour de trois textes, en l’occurrence proposés par le groupe Les Républicains, ce dont je me réjouis. Malheureusement, je ne pourrai pas participer au vote car, à cause de la grève à la SNCF, je dois regagner ma circonscription.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, j’espérais que mon collègue Rochebloine manifesterait en fait son regret de ne pas pouvpor m’entendre, mais ce n’est hélas pas le cas
Sourires
! Je m’exprimerai néanmoins, malgré son absence.
À l’image de ce que fut l’origine de la compétition sportive – les Jeux olympiques – le sport devrait être un moment de trêve, de paix, une manifestation de ce qu’en des temps plus modernes les Britanniques ont appelé le fair-play. Malheureusement, la perversion de l’esprit sportif que constitue le hooliganisme a jeté le trouble dans nombre de manifestations sportives.
On a le droit à la passion ! Lorsque j’observe mon épouse et mes enfants regarder un match de football, je mesure ce que la passion peut entraîner. Même si elle se manifeste le plus souvent sur le plan verbal, il arrive toutefois que des atteintes au mobilier se produisent !
Sourires
Pour donner un exemple étranger, lorsque je vois mon beau-père de 90 ans regarder à la télévision un test-match de cricket, je m’étonne de la violence de ses propos et de ses commentaires malgré son âge !Quoi qu’il en soit, cela reste néanmoins dans les limites de la bienséance… et c’est d’ailleurs toute la difficulté de la question : il faut admettre et apprécier la passion, mais celle-ci doit être contenue dans les limites du respect, de la bienséance, et exclure bien entendu toute forme de violence.
Si la violence au sein des enceintes sportives et à proximité est le fait de petites minorités – il faut tout de même le rappeler –, elle n’en représente pas moins un dévoiement de la compétition sportive, un danger pour l’immense majorité des spectateurs et des agents publics ou privés de la sécurité et elle induit un coût considérable, il faut le dire aussi, pour les organisateurs et les autorités chargées de l’ordre.
De nombreuses initiatives ont été prises. Dans mon île, que M. le secrétaire d’État et Mme la présidente connaissent bien, nous avons été et nous sommes encore confrontés à la violence en général, mais nous le sommes aussi à la violence sportive. Des initiatives ont donc été prises à titre privé et, quelques-unes, à titre public. Je citerai simplement l’un de mes amis, Jean-Baptiste Raffalli, qui en son temps organisa à Bastia un processus de prise en charge et de canalisation de l’énergie des supporters.
Ce texte se fonde sur le postulat – vérifié – selon lequel les supporters sont les piliers du bon ordre des manifestations sportives. Cela seul constitue déjà un progrès considérable. Il tend à organiser à tous les niveaux – du local au national – la contribution décisive des supporters au bon ordre et au bon esprit des manifestations sportives. Par conséquent, on ne peut que l’approuver.
Reste, si vous me le permettez, quelques petites difficultés sémantiques : en français, « supporter » signifie « subir » – on supporte, par exemple, une charge – même si, par extension, cela peut aussi signifier « soutenir » ; quoi qu’il en soit, ce terme implique une pénibilité. En anglais, le terme « support » est très largement positif et très peu négatif puisqu’il peut parfois être synonyme de « endure », endurer. Cela étant, cet anglicisme est assez ancien dans notre langue – il date quasiment du début du XX ème siècle – pour être définitivement admis.
Le mot anglais « hooligan », quant à lui – puisque nous introduisons deux mots un peu curieux dans notre vocabulaire juridique – est d’origine incertaine : les uns y trouvent une étymologie anglo-irlandaise, les autres une étymologie russe. Ces réserves, bien entendu, sont sans importance et témoigneraient d’un esprit systématiquement négatif. Aujourd’hui, ces mots sont passés dans notre langue et il n’y à rien à faire là-contre.
Il reste que notre groupe soutiendra évidemment ce texte, comme l’ont fait, avec beaucoup de fair-play, le ministre Thierry Braillard et l’initiateur de cette proposition de loi. Notons que, dans cette enceinte habituellement compétitive, la compétition d’aujourd’hui n’a pas attiré beaucoup de supporters ! Sans doute est-ce dû au faible enjeu de la compétition, puisque tout le monde est d’accord. Imaginons un match, dont on saurait à l’avance qu’il se finira par un match nul – 0-0, ou plutôt 1-1 –, par une égalité parfaite décidée à l’avance : il va de soi qu’il n’attirerait pas beaucoup de supporters !
Sourires.
Dans cette enceinte compétitive, disais-je, qui est parfois très agitée, qui a connu de véritables violences, y compris le terrorisme – je pense à la bombe de l’anarchiste Auguste Vaillant – et qui pourrait encore en être la cible, nous assistons aujourd’hui à une manifestation assez remarquable de l’esprit sportif ! En effet, la majorité et l’opposition s’accordent à l’unanimité sur un bon texte, initié par l’opposition, en particulier par M. le rapporteur, soutenu et porté par le Gouvernement, en particulier par M. le secrétaire d’État chargé des sports, et qui sera sans doute approuvé à l’unanimité par notre assemblée. C’est assez rare pour être souligné !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous examinons cet après-midi une proposition de loi de Guillaume Larrivé qui, dans sa version initiale, visait seulement à « renforcer la lutte contre le hooliganisme ». Son titre a été un peu rééquilibré par notre assemblée en première lecture, puis Sénat.
Cette proposition de loi, monsieur Larrivé, me semble mal-née – si vous me permettez l’expression. Elle a souffert d’un déficit de travail préparatoire et sa version initiale, monocolore, n’allait que dans un sens. J’ignore qui l’a inspirée, si ce sont des instances en charge de la sécurité ou des clubs de football – puisque ceux-ci sont directement concernés et se voient accorder des pouvoirs supplémentaires. En tout cas, les associations de supporters, elles, n’ont pas été associées à l’élaboration de ce texte. Cela n’invalide certes pas l’ensemble de votre démarche, mais il est tout de même regrettable que vous n’ayez pas auditionné, ni avant la première lecture, ni avant la seconde lecture, les associations de supporters.
Dans notre grand et beau pays, il existe plusieurs familles de supporters,…
…plusieurs associations de supporters et plusieurs regroupements d’associations. Certaines associations, d’abord créées sur une base territoriale, autour d’un club – c’est leur objet même – parviennent parfois, malgré les affrontements qui peuvent les opposer dans les stades, à travailler ensemble au niveau national autour de questions qui les concernent toutes : celle de la sécurité dans les stades, évidemment, mais aussi celles de la fréquentation ou du tarif des abonnements et des billets.
Je crains par ailleurs que l’adoption assez rapide – pour ne pas dire « à la hussarde » – de cette proposition de loi laisse un arrière-goût d’inachevé et donne l’impression d’un travail et d’un résultat bancals.
Cela étant, et pour répondre au collègue qui m’a interpellé avant même que je prenne la parole, je voterai en effet ce texte, parce que je veux avancer, chaque fois que c’est possible, même à petits pas. Je suis à l’origine, avec certains de mes collègues, comme Régis Juanico et François Rochebloine qui avait soutenu ma proposition de loi relative à la représentation des supporters, d’une partie des amendements qui ont été adoptés en première lecture.
Je voterai donc cette proposition de loi, mais j’aimerais que l’on ne se contente pas de l’adopter à la va-vite, sans pointer les problèmes qui restent en suspens. Et j’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous indiquiez quelles pourraient être les prochaines étapes, ou les prochains rendez-vous, y compris législatifs, s’il le faut, en la matière. En effet, il serait vraiment dommage que nous nous en tenions à cette seule proposition de loi.
Deux problèmes continuent de se poser, auxquels nous devons absolument trouver des solutions.
Le premier est celui des violences, dans les stades et aux abords de ceux-ci. Je l’ai dit aux associations de supporters et je le répète à cette tribune : il faut, sans démagogie, reconnaître que c’est une réalité – c’est malheureusement le cas dans la ville de Nantes, dont je suis l’élu. On constate le même type de violences dans les manifestations. Même si cela ne concerne que quelques dizaines ou quelques centaines de personnes sur des dizaines de milliers de manifestants, c’est inacceptable.
Les violences, dans les stades et aux abords des stades doivent être combattues, dénoncées et condamnées par l’ensemble des acteurs.
Je pense d’abord aux clubs de football, qui doivent garantir à celles et ceux qui se rendent au stade, parfois en famille, avec des enfants, qu’ils pourront assister au match en toute sécurité. François Rochebloine a également évoqué les problèmes de racisme, qui sont loin d’avoir disparu.
Les pouvoirs publics ont également une grande part de responsabilité. Dès qu’un problème de sécurité se pose, même si c’est une société privée qui organise le match, c’est vers les pouvoirs publics que nos concitoyens se tournent – a fortiori lorsqu’il s’agit d’une manifestation d’ampleur, comme l’Euro.
Je considère, enfin, que les supporters eux-mêmes ont une responsabilité, à titre individuel et collectif.
À chaque fois que j’ai rencontré les associations de supporters, je leur ai tenu un discours de responsabilité. Elles ne peuvent évidemment pas organiser elles-mêmes la sécurité, mais elles peuvent y contribuer. On parle souvent de coproduction de sécurité entre différents acteurs – vous le savez, monsieur Larrivé, pour avoir beaucoup travaillé sur ces questions. Nous en avons là un exemple concret.
J’en arrive au second problème. Lorsqu’on fait le bilan des mesures qui ont été prises au fil des ans pour renforcer la sécurité, on constate que certaines d’entre elles, et c’est tant mieux, ont pu avoir des effets et faire reculer la violence et l’insécurité. D’autres mesures, en revanche, paraissent inadaptées, et je crains que ce ne soit malheureusement le cas de certaines de celles qui sont contenues dans cette proposition de loi. Et j’essaierai de vous le montrer à partir de quelques exemples très concrets.
Les autorités publiques ont souvent tendance, et c’est normal, à prendre des mesures préventives pour empêcher l’éclatement de la violence. Je ne pense pas tant à vous, monsieur le secrétaire d’État, qu’à votre collègue de l’intérieur. Il a certes d’autres sujets très lourds à traiter en ce moment, mais la sécurité dans les stades relève aussi de ses prérogatives… Or qu’a-t-il fait ? Il a pris des arrêtés interdisant purement et simplement le déplacement de supporters.
Si bien que, l’année dernière, des supporters du Football Club de Nantes qui se rendaient à Amiens pour disputer un match contre le Racing Club de Lens, dont le stade était alors en travaux, ont été arrêtés, les uns parce qu’ils portaient une écharpe jaune et verte, aux couleurs du club, les autres parce que la plaque d’immatriculation de leur voiture portait le chiffre 44. Certains d’entre eux ont été placés en garde à vue pendant quatorze heures, alors même qu’ils n’avaient commis aucune violence ni aucun acte répréhensible, simplement parce qu’on considérait qu’ils avaient bravé l’interdiction de déplacement. Ces mesures sont totalement disproportionnées, totalement inadaptées.
Lorsque des individus veulent vraiment – et c’est déjà arrivé dans le stade de la Beaujoire, où joue le FC Nantes – semer le trouble et commettre des violences, ils n’arborent pas des écharpes ou des tee-shirts aux couleurs de leur club et ils ne se rendent pas au stade dans des voitures dont la plaque d’immatriculation indique leur département d’origine – par exemple 75 ou 92. Ils s’introduisent dans le stade avec un billet qu’ils ont acheté sur internet en toute liberté et se disséminent dans les travées occupées majoritairement par les supporters de l’équipe résidente, avec qui ils peuvent potentiellement entrer en conflit. Face à ce genre de situations, les forces de l’ordre sont totalement démunies.
L’interdiction de stade, qui figure dans la proposition de loi, peut paraître légitime pour des gens qui ont commis des actes répréhensibles. Mais on constate aujourd’hui qu’une proportion très élevée des décisions d’interdiction de stade a été cassée, à la suite de recours. Il est arrivé à certaines personnes d’être interdites de stade pendant un an – car le délai de recours est très long – alors même que cette interdiction était injustifiée.
J’ai déjà évoqué les excès liés à l’interdiction de déplacement. On peut comprendre qu’une telle mesure d’urgence ait été prise après les attentats, mais cela n’a aucun sens de la prolonger, car elle n’a aucun rapport avec la lutte contre le terrorisme. Et j’ajoute, en réponse à ce que j’ai pu entendre tout à l’heure, que cette proposition de loi n’aura aucune utilité pour assurer la sécurité pendant l’Euro. Le championnat de Ligue 1 sera bientôt fini et l’Euro n’a rien à voir avec lui. Du reste, si l’on devait interdire les déplacements de supporters des équipes « adverses » pour l’Euro, il n’y aurait plus d’Euro, puisque le but d’une manifestation comme celle-ci est précisément d’accueillir les supporters des autres équipes.
On pourrait évoquer encore l’interdiction des fumigènes, dont on constate qu’elle est inégalement respectée, ou l’interdiction des banderoles, que réclament certains clubs – mais est-ce vraiment un enjeu de sécurité ?
Il paraît même que le règlement intérieur du club qui occupe actuellement la première place de la Ligue 1 interdit aux supporters de se lever dans le stade ! Puisque la loi appelle au respect du règlement intérieur des clubs, des supporters pourraient être interdits de stade pour ce motif-là ! Ce n’est absolument pas cohérent.
J’ai bien compris que vous souhaitiez une adoption conforme du texte. Je défendrai néanmoins quelques amendements et je souhaiterais, monsieur le secrétaire d’État, que vous vous exprimiez à l’occasion de leur examen. Il ne s’agit pas pour moi de faire de l’obstruction ou de prolonger artificiellement les débats. Il y a là un enjeu de transparence : la Division nationale de lutte contre le hooliganisme ne fournit pas de rapport annuel, comme celui dont disposent les Britanniques, confrontés au hooliganisme à un autre niveau qu’en France. C’est incompréhensible : pourquoi maintenir cette opacité autour d’un sujet qui nous concerne toutes et tous, à des degrés divers ?
Avec beaucoup de réserves, mais par solidarité avec vous, monsieur le secrétaire d’État, qui avez pris l’engagement de poursuivre le travail, je voterai cette proposition de loi.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, et je suis sûre qu’elle ne jouera pas les prolongations, contrairement à M. de Rugy !
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous débattons aujourd’hui en deuxième lecture d’une proposition de loi du groupe Les Républicains relative au renforcement du dialogue avec les supporters et à la lutte contre le hooliganisme. Les députés du Front de gauche avaient, en première lecture, émis des réserves sur son contenu et soulevé plusieurs questions : premièrement, celle de son utilité par rapport aux dispositions existantes et ayant fait leurs preuves dans la lutte, si nécessaire, contre le hooliganisme ; deuxièmement, la question des risques de dérives liées aux nouveaux droits ouverts, à l’article L.332-l du code du sport, aux organisateurs de manifestations sportives à but lucratif ; troisièmement, l’absence de reconnaissance véritable de l’apport des supporters à la vie des clubs et fédérations.
Les modifications apportées par nos collègues du Sénat et adoptées à l’unanimité par notre commission des lois améliorent cette proposition de loi, mais ne répondent pas entièrement à nos interrogations. Au motif juste de lutter contre les violences dans les stades, les dispositions contenues dans le texte issu de la première lecture à l’Assemblée nationale donnaient aux organisateurs des pouvoirs assurés aujourd’hui par les pouvoirs publics et les juridictions. Les organisateurs se voyaient autorisés à refuser l’accès au stade de certains individus et surtout à établir un fichier de données à caractère personnel en raison de leur comportement portant atteinte aux dispositions prises par les organisateurs pour assurer le bon déroulement ou la sécurité de ces manifestations. Le Sénat a introduit une disposition retenant comme seul motif de refus le non-respect des dispositions des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatif à la sécurité. C’est une avancée.
Cela dit, la proposition de loi qui nous est présentée, en permettant à un organisateur d’établir des listes et de refuser l’accès au stade à des individus ne faisant pas l’objet d’une interdiction administrative de stade en raison de leur comportement, peut donner à cet organisateur un pouvoir disproportionné et non fondé sur des compétences avérées. Quelles seront les données personnelles collectées ? Où seront-elles conservées ? Par qui seront-elles traitées ? Monsieur le secrétaire d’État, nous avons hâte de prendre connaissance du contenu du décret en Conseil d’État que vous avez évoqué. La CNIL, dans sa délibération du 30 janvier 2014, avait d’ailleurs rappelé que la sanction et le maintien de l’ordre public sont des attributions régaliennes, qui relèvent de la compétence des pouvoirs publies et des juridictions.
Chers collègues, on peut comprendre que la tenue prochaine de l’Euro de football nous incite à revisiter la législation actuelle, pour que ce beau moment sportif se déroule en toute tranquillité, dans les stades et autour d’eux. Mais la présente proposition de loi ne s’appliquera qu’après la finale de l’Euro, où nous espérons tous voir participer et gagner l’équipe de France. Ce seront alors principalement les clubs professionnels qui utiliseront les mesures prévues par ce texte. Au-delà des dispositifs de sécurité supplémentaires mis en place autour des stades ou des salles de spectacle en raison du contexte dramatique, il faut prendre en compte le travail remarquable effectué par le comité d’organisation de l’Euro et le ministère de l’intérieur pour accueillir les supporters de tous les pays, éviter tout débordements et assurer la sécurité de tous.
Enfin, la législation actuelle comporte déjà de nombreuses dispositions pour prévenir et sanctionner les violences dans les enceintes sportives, sous l’autorité de l’État, et les clubs sont largement associés à la lutte contre les violences menée par les pouvoirs publics. Le code du sport comprend actuellement un large éventail de sanctions. En vertu de ce code, le juge judiciaire peut prononcer une interdiction de stade pouvant aller jusqu’à cinq années contre une personne commettant l’un des délits propres aux manifestations sportives. Quant aux autorités administratives, elles ont, par l’intermédiaire du préfet, la faculté d’interdire de stade un supporter à titre préventif pour une durée de douze mois. Des déplacements peuvent être interdits. Ces dispositions ont porté et portent toujours, pour certaines, leurs fruits dans la lutte contre les violences. Je doute que l’article 1er de la présente proposition de loi permette une efficacité supplémentaire. C’est pourquoi nous en proposerons la suppression par voie d’amendement.
Le titre de cette proposition de loi commence par évoquer le renforcement du dialogue avec les supporters. Je m’en félicite, et cela pour deux raisons. D’abord parce que les supporters doivent être reconnus comme acteurs et actrices à part entière de leur sport, mais aussi parce que ce dialogue peut être utile dans la lutte contre les violences. À la démarche de sanction doit être associée une logique préventive qui intègre les premiers acteurs concernés, à savoir les représentants des supporters. J’ai noté avec satisfaction que le Sénat avait amélioré l’article visant à créer une instance nationale du supportérisme.
Toutefois, nous ne sommes pas au bout de ce qu’il est souhaitable de mettre en place pour intégrer les supporters dans la vie des instances sportives en leur reconnaissant ainsi leur apport à cette grande famille du sport. Des associations nationales de supporters se sont créées ; leur représentativité peut grandir si le mouvement sportif leur fait confiance. Les associations des clubs sont nombreuses à souhaiter être mieux associées à la vie de leur club. C’est ce qui avait fondé ma participation au dépôt d’une proposition de loi avec soixante autres collègues de tous les groupes pour répondre à l’absence de représentation organisée des supporters dans les instances nationales du sport et poser les jalons d’une meilleure implication des associations de supporters dans la gouvernance du sport, que ce soit dans les clubs et les ligues professionnels ou dans les fédérations. Je reste persuadée qu’en ouvrant les portes du mouvement sportif à ces acteurs, et en ne se contentant pas de les associer de l’extérieur au mouvement sportif, on contribuerait à résoudre les problèmes rencontrés, qui nuisent à l’image du sport professionnel et amateur. Plus largement, cette représentation est aussi le gage d’une plus grande transparence et d’une plus grande durabilité du sport, vecteur de cohésion sociale et de responsabilité sociétale.
Les amendements que je vous présenterai sur le sujet s’inscrivent donc dans cette démarche. L’un d’entre eux vise à élargir la composition des instances fédérales et des clubs aux représentants des supporters. Un autre, qui nous a été inspiré par vos travaux, monsieur le secrétaire d’État, tend à étendre les principes posés par l’ordonnance no 2014-559 du 30 mai 2014 relative au financement participatif et intégrés dans le code monétaire et financier aux sociétés commerciales exploitant des clubs de sport, en proposant donc de créer une possibilité, et non une obligation, de recourir au financement participatif dans la constitution du capital des clubs sportifs.
Voilà, mes chers collègues, ce que les députés du Front de gauche proposent pour que cette proposition de loi soit un peu plus équilibrée. L’adoption de ces dispositions donnerait pleinement son sens au titre de la loi.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi présentée par notre collègue Guillaume Larrivé avec plusieurs autres députés du groupe Les Républicains vise à renforcer le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme. Le groupe SRC, partageant la conviction qu’il est nécessaire d’agir dans ce domaine, a accompagné ce texte depuis le début de son parcours parlementaire, puisque nous l’avions amendé et voté en première lecture. C’est notre collègue Patrick Mennucci qui avait suivi ces travaux pour notre groupe, mais il ne pouvait malheureusement pas être des nôtres aujourd’hui.
La proposition de loi nous paraît nécessaire pour deux raisons. Il y a d’abord un aspect éminemment conjoncturel, alors que la France s’apprête à accueillir, d’ici à un peu plus d’un mois, l’Euro 2016. La proposition de loi comprend d’ailleurs une disposition adéquate à l’article 3, qui vise à étendre la possibilité de communiquer l’identité des personnes faisant l’objet d’une interdiction judiciaire ou administrative de stade aux organisations de manifestations sportives internationales comme l’UEFA. Cette initiative s’ajoute à toutes celles qui visent à assurer des conditions de sécurité maximale pour cet événement d’ampleur, qui va braquer les projecteurs mondiaux sur notre pays pendant quelques semaines. Le Gouvernement propose également la prolongation de l’état d’urgence, en s’appuyant en partie sur cet événement pour légitimer cette demande. Nous aurons l’occasion d’en débattre dans cet hémicycle prochainement.
Au-delà des aspects conjoncturels, il y a bien sûr des raisons de fond qui amènent notre groupe à soutenir cette initiative parlementaire. La première est la nécessité de responsabiliser les clubs dans la lutte contre le hooliganisme et les comportements violents, troublant l’ordre public, autour des manifestations sportives, alors que celles-ci devraient être, et sont pour l’énorme majorité d’entre elles, des moments de fraternité, de cohésion et de partage autour des valeurs du sport. Pour responsabiliser les clubs, il faut leur donner les moyens juridiques de le faire. En dépit des réformes qui ont eu lieu dans ce domaine sous la précédente législature, des manques apparaissent. Il faut donc les corriger pour s’assurer de la solidité du cadre d’ensemble.
Ainsi, la proposition de loi élargit les pouvoirs de contrôle et de sanction confiés aux clubs : il sera possible de créer des fichiers des personnes qui se sont déjà fait défavorablement connaître et de leur refuser la vente de billets. Bien sûr, un tel pouvoir nécessite un encadrement. Aussi notre groupe avait-il amendé le texte, afin qu’un décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL détermine les conditions de cette nouvelle possibilité laissée aux organisateurs de manifestations sportives. La sécurisation de la vente des abonnements, en s’assurant de l’identité des acheteurs par le biais d’une vente nominative directe par le club et la personnalisation de chaque carte, également proposée par notre groupe et figurant désormais à l’article 4 de la proposition de loi, relève de la même logique. Cette disposition permettra d’éviter les ventes par blocs, qui ne permettent pas de connaître l’identité des acheteurs. Le renforcement des pouvoirs est également prévu du côté des autorités publiques, avec la possibilité pour le préfet d’interdire de stade, et ce pour une durée pouvant aller jusqu’à vingt-quatre, voire trente-six mois, les personnes ayant déjà fait l’objet d’une mesure d’interdiction pendant les trois années précédentes.
Notre groupe se réjouit enfin de la volonté de renforcer le dialogue entre supporters et clubs. Cette orientation participe de la responsabilisation des acteurs du monde sportif, les clubs mais aussi les associations de supporters. Elle était d’ailleurs préconisée dès 2010 par le Livre vert du supportérisme et, plus récemment, notre collègue Jean Glavany, dans son rapport intitulé « Pour un modèle durable du football français » de janvier 2014, s’inscrivait aussi dans cette perspective. Cette dynamique, M. le secrétaire d’État l’a rappelé, est confortée par le propre mouvement du secteur associatif. Ainsi, les Assises du supportérisme de 2014 et 2015, la constitution de fédérations de supporters comme le Conseil national des supporters de football ou l’Association nationale des supporters permettent à la perspective d’un dialogue structuré d’être crédible. Aussi le texte a-t-il été fortement rééquilibré par la prise en compte de cette dimension essentielle du dialogue, qui participe de la prévention et de la dissuasion.
Au-delà de la seule dimension « sanction », grâce à la création d’une instance nationale du supportérisme et à la désignation de « référents supporters », nous plaçons les supporters en position d’être les interlocuteurs légitimes des clubs. Ce texte contribue donc à valoriser cette forme d’engagement qui, par son adhésion aux valeurs du sport, participe de la citoyenneté et de la cohésion sociale : elle est à encourager. Plusieurs de ces dispositions auraient sans doute pu, d’ailleurs, se retrouver dans le projet de loi Égalité et citoyenneté, que nous serons prochainement amenés à examiner. Nous pourrions en imaginer d’autres : la France est notoirement en retard sur ces sujets. Vous le savez bien, monsieur le secrétaire d’État, pour avoir écrit en 2013, avec Marie-George Buffet, Pascal Deguilhem et Guénhaël Huet, un rapport sur le fair-play financier européen et son application au modèle économique des clubs de football professionnel français. À l’instar de M. de Rugy, je vous invite donc à aller plus loin en l’espèce. Les différentes dispositions de la proposition de loi, qui viennent compléter un arsenal législatif déjà conséquent, doivent permettre de conforter le mouvement, qui est timidement amorcé depuis plusieurs années déjà, et qui voit nos stades redevenir les lieux de convivialité qu’ils ont toujours eu vocation à être.
Le Gouvernement, à travers votre voix, monsieur le secrétaire d’État, l’avait rappelé lors de la première lecture du texte : « un match ne doit pas être une guerre, mais avant tout une fête. » À l’heure où, dans certains territoires en France, des élus font des clubs sportifs locaux les cibles privilégiées de coupes sombres réalisées sous prétexte d’économies, quand en réalité c’est bien une certaine idéologie qui est à l’oeuvre, il est essentiel de réaffirmer la contribution positive que le sport apporte dans notre pays en termes de cohésion sociale, de mieux vivre ensemble et de fraternité. Vous avez pu le constater lors d’un déplacement dans mon territoire, monsieur le secrétaire d’État.
L’Euro 2016 devrait être l’occasion, nous l’espérons tous, d’alimenter ces valeurs, qui sont si chères à la République. Le texte que nous examinons aujourd’hui représentera l’un des jalons posés ces dernières années, souvent par voie parlementaire, pour accompagner le sport français. Je pense particulièrement à la loi du 27 novembre 2015 visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale. Le groupe SRC en était à l’initiative.
J’ajoute que ces différents éléments sont aussi des pierres posées pour la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2024, puisque leur portée est générale et ne se limite pas à tel ou tel sport. Sur ce texte, comme sur d’autres, la majorité accompagne les initiatives qui vont dans le bon sens. Je tiens à le souligner, car ces initiatives ne reçoivent pas toujours le même accueil de la part de l’opposition.
Il y a ceux qui appellent au dépassement des intérêts partisans au nom de l’intérêt général et ceux qui le pratiquent, comme c’est le cas des membres de notre groupe. Les députés du groupe SRC voteront donc cette proposition de loi.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici à nouveau appelés à étudier cette proposition de loi déposée par des députés du groupe Les Républicains. Elle vise à donner aux clubs la capacité effective d’exercer les responsabilités qui sont les leurs en matière de sécurité dans les stades, afin d’éradiquer les comportements intolérables d’une minorité d’individus, qui ne sont évidemment pas représentatifs de la communauté des supporters. Dans sa version initiale, ce texte limitait la question du supportérisme à son aspect répressif. Désormais, il montre un véritable ancrage dans une volonté d’équilibre.
Aujourd’hui, c’est donc un texte enrichi qui est soumis à notre examen. J’insiste sur le fait qu’il concerne tous les supporters des sports professionnels et ne se restreint pas au football.
La notion fondamentale de cette proposition de loi est le dialogue, car la question de la violence dans le sport a déjà fait l’objet de nombreux travaux législatifs. En 2010, un livre vert du supportérisme avait souligné ce besoin de reconnaissance des supporters par les instances sportives et institutionnelles. En 2013, un rapport parlementaire sur le fair-play financier européen et son application au modèle économique des clubs de football professionnel français allait aussi dans ce sens. Le rapport parlementaire de 2014, déjà évoqué et intitulé « Pour un modèle durable du football français », soutenait lui aussi la nécessité d’associer les supporters et leurs associations à la prévention de la violence et celle de développer un dialogue solide aux niveaux tant local que national.
Instaurer le dialogue avec les supporters dans un climat de confiance revient à mener une politique préventive pour désamorcer les problèmes en amont et trouver des solutions. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de garantir les conditions d’une reconnaissance du supportérisme par les institutions et les acteurs du sport professionnel. Cette reconnaissance doit être duale. D’une part, il est essentiel de reconnaître la contribution et l’apport des supporters au développement du sport et à l’animation des stades. D’autre part, il est fondamental de mieux associer les supporters aux politiques de sécurité au sein des stades pour renforcer l’efficacité de celles-ci.
La nécessité de garantir la sécurité dans les stades est une préoccupation partagée par tous, d’autant plus dans un contexte de menace terroriste. Je veux croire que chacun a également conscience que nos actions répressives doivent s’accompagner de mesures de prévention dans lesquelles les supporters eux-mêmes peuvent et doivent jouer un rôle majeur.
De plus, n’enfermons pas le supporter dans la stigmatisation. Évitons d’assimiler l’ensemble des supporters qui font vivre le sport français et qui le célèbrent aux quelques hooligans pour lesquels le sport n’est qu’un prétexte à la violence. Il est important de ne pas opérer de confusion dans la définition des supporters. Les hooligans qui cristallisent la violence et nuisent au bon déroulement des compétitions sportives ne peuvent être considérés comme des supporters. Par définition, en effet, les supporters portent au plus haut le sport qu’ils soutiennent : ils ne le rabaissent pas. Ils défendent leur engagement pour un sport dans le respect des valeurs citoyennes. Loin d’être des fauteurs de troubles, ils participent à l’élan positif et enthousiaste suscité par la compétition. Ils font vivre une équipe en l’animant.
Je suis donc convaincue que penser la sécurité, c’est avant tout penser la nécessité d’intégrer les supporters à la politique engagée afin d’atteindre un équilibre. Le sport doit demeurer une fête. La violence dans les stades est d’autant plus inacceptable que le sport, notamment le football, suscite l’intérêt de centaines de milliers de jeunes qui, bien souvent, se projettent dans les exploits de leurs équipes favorites. Qu’un enfant souhaitant regarder un match de football au stade ou devant son poste de télévision se trouve confronté à l’expression de haines et au spectacle de violences justifie totalement notre action la plus résolue.
Des mesures de répression et de prévention des violences doivent donc être prises. Or, vous le savez, chers collègues, le calendrier sportif est toujours riche. Il dépasse l’Euro de football désormais tout proche. Envisager le supporter autrement en l’incluant dans l’organisation des événements peut être porteur. Je suis convaincue de la nécessité de lier dialogue et sécurité. Cette proposition de loi peut donner un nouveau souffle en instaurant un climat de confiance dans les événements à venir. Elle répond au double impératif d’extrême fermeté envers le hooliganisme et de dialogue avec les associations de supporters.
Je me réjouis que tous les orateurs qui m’ont précédée aient annoncé qu’ils voteront ce texte, qui est nécessaire et équilibré.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Pierre de Coubertin disait : « Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre. » C’est donc un formidable atout pour chaque homme, pour chaque femme et pour chacune des sociétés humaines, oserais-je dire pour l’humanité tout entière ? Il s’inscrit dans une logique d’effort et de dépassement de soi, de bonheur collectif aussi, qui provoque des émotions formidables et rassembleuses.
Ces émotions, malheureusement, provoquent aussi des violences. Si ce phénomène au cours des manifestations sportives est ancien, s’il a même toujours existé, il tend à croître au fil des années en dépit des mesures prises par les gouvernements successifs, ce qui oblige les pouvoirs publics à se saisir de la question, qui n’est pas, à l’heure actuelle, sans poser des difficultés juridiques. Il est en effet difficile d’appliquer des interdictions individuelles à des comportements collectifs, comme le rappellent régulièrement les juridictions. Or chacun sait que ces violences ont de graves conséquences, individuelles et collectives, au plan sociologique comme au plan économique, le sport étant devenu un vecteur économique puissant dans notre société.
Je tiens à souligner les valeurs universelles de fraternité et de solidarité que véhiculent le sport en général et le football en particulier. Les sports collectifs jouent en effet un rôle important au sein de nos sociétés : vecteurs de réussite et de dépassement de soi, ils provoquent également un sentiment d’appartenance qui permet de transcender les classes sociales et les différences individuelles. Nous pouvons tous nous retrouver autour du sport, même si nous ne sommes pas très doués, ce qui est mon cas. Le sport est donc de ce point de vue essentiel.
C’est la raison pour laquelle je me réjouis des trois avancées que contient le texte. Celui-ci donne tout d’abord la possibilité aux clubs sportifs de ficher les supporters indésirables sous le contrôle de la CNIL. Cette mesure est essentielle car elle permettra aux clubs sportifs d’affirmer leur présence sociale en leur conférant une responsabilité concrète, à la fois matérielle et morale.
Le texte autorise ensuite la transmission de l’identité des personnes interdites de stade aux organismes sportifs internationaux qui organisent une manifestation sportive à laquelle participera une équipe française. L’extension du périmètre de l’interdiction judiciaire de stade aux lieux où des manifestations sportives sont retransmises en public, non seulement aux « fans zones » mais également aux places des villes où sont projetées sur grand écran des manifestations sportives, est une autre avancée dont l’ambition est d’éviter des débordements dans des moments de partage.
Enfin, le texte ajoute dans le code du sport un nouveau chapitre, relatif aux supporters, qui prévoit la désignation, au sein de chaque club professionnel, d’un ou plusieurs référents chargés d’organiser et d’assurer des échanges réguliers avec les supporters du club, ce qui permettra de responsabiliser les sportifs eux-mêmes dans leurs relations avec leurs supporters. La loi créera ainsi de manière simple, claire et pertinente un lien juridique obligeant les uns et les autres.
Je tiens en outre à saluer l’institution d’une instance nationale du supportérisme – j’approuve les propos de Marie-George Buffet sur le sujet.
Si le droit pénal s’emploie à combattre les débordements sur les terrains de jeux, il a dû toutefois composer avec les violences dont on peut se demander si elles sont consubstantielles au sport, ce que je ne crois pas. Le sont-elles à une certaine forme de virilité mal comprise ? Je tiens à noter que les débordements touchent également des équipes féminines. Donc, relever le seuil de la faute qui, aujourd’hui, reste empirique, me paraît nécessaire. Par ailleurs, les exigences du principe de légalité nous contraignent à concevoir une législation répressive spécifique pour lutter contre les fauteurs de troubles dans les stades.
Assurément, ces violences ne concernent pas uniquement le football, même si ce sport est de fait le plus touché, en raison de sa très forte médiatisation locale, nationale et mondiale. Force toutefois est de constater qu’en France ces violences ont touché à titre principal le club de football du Paris-Saint-Germain avant d’affecter progressivement d’autres clubs de football et d’autres sports. Face à la propagation de ce phénomène, la coopération internationale existe. Ainsi, le 19 août 1995, le Conseil de l’Europe a adopté la convention européenne sur la violence et les débordements des spectateurs lors des manifestations sportives et notamment des matchs de football, que la France a ratifiée. Et c’est dans le cadre de la coopération policière que le Conseil de l’Union européenne du 25 avril 2002 a décidé d’imposer aux Etats la création de points nationaux d’information football, chargés de recenser les incidents. De plus, la résolution du 29 avril 2004 prévoit un programme de lutte contre le hooliganisme.
Si la violence doit être proscrite et les comportements dangereux jugulés, il ne faut pas pour autant jeter l’opprobre sur l’ensemble des supporters ou des clubs. C’est donc en respectant la balance entre des intérêts contradictoires que doit être écrit le droit pénal, afin que les stades demeurent ou redeviennent des lieux de convivialité familiale. Ce texte va dans ce sens.
En cette période d’état d’urgence, il me paraît impératif de protéger les clubs, les stades et la dizaines de « fans zones » où seront installés, en France, des écrans géants permettant à nos concitoyens de vivre de grands moments populaires, comme ceux de l’Euro 2016 qui doit se dérouler en toute sécurité. Il nous faut donc valoriser l’engagement des supporters qui assurent l’animation durant les rencontres sportives et les responsabiliser sous l’autorité du ministre des sports, afin que leur rôle au sein de la société soit reconnu. Cette proposition de loi le permet puisqu’elle donne aux supporters, comme aux clubs, une forme de responsabilité.
Le droit pénal du sport est pleinement dans son rôle lorsqu’il réprime les actes de violence commis sur les terrains de sport et dans les tribunes. Pour finir, je tiens à saluer un texte qui concilie le dialogue, la sécurité et le dépassement de soi dans la liberté.
Je tiens à remercier les différents orateurs du groupe Les Républicains, du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe écologiste et même du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, même s’il ne votera pas ce texte. Le groupe de l’Union des démocrates et indépendants a, quant à lui, annoncé qu’il le voterait. En effet, en donnant des éclairages différents et sous des angles complémentaires, ces orateurs ont apporté leur soutien à cette proposition de loi à la fois pro-supporters et anti-hooligans.
Des questions techniques ont été évoquées. Elles trouveront leurs réponses non seulement dans le texte, mais surtout dans deux décrets d’application : le décret en Conseil d’État encadrant le fichier, qui sera pris après avis motivé et publié de la CNIL ; et le décret organisant l’Instance nationale du supportérisme. Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de conclure par ces mots : la balle est désormais dans votre camp.
Je répondrai plus précisément à Mme Buffet lors de l’examen des amendements qu’elle défendra.
Monsieur de Rugy, s’il y a eu de nombreuses interdictions de déplacement, notamment à compter du 13 novembre 2015, c’est parce que les forces de l’ordre ont été réaffectées en fonction des besoins, ce que vous pouvez aisément comprendre, et qu’elles ne pouvaient dès lors plus couvrir l’ensemble des déplacements des supporters. L’état d’urgence – ai-je besoin de le rappeler ? – place le pays dans une situation très particulière. Je pense que les choses rentreront dans l’ordre la saison prochaine et que le nombre d’interdictions de déplacements sera redevenu le plus faible possible. On ne saurait en effet à la fois affirmer du haut de la tribune que les supporters sont l’âme de la compétition sportive et empêcher leurs déplacements.
Je comprends par ailleurs votre demande d’information sur l’action de la Division nationale de lutte contre le hooliganisme. Il se trouve que le commissaire de police chef de la DNLH tient, chaque semestre, une conférence de presse qui donne des éléments d’information sur l’action de cette division. Je viens de lui soumettre l’idée de transmettre aux parlementaires la prochaine présentation des résultats du travail de la DNLH. Je prends ainsi, devant vous, l’engagement qu’il sera répondu à votre souci de transparence que j’approuve.
Madame Dion, votre remarque concernant les « fans zones » m’a particulièrement interpellé. Si je voulais être taquin – et vous savez qu’il m’arrive parfois de l’être –, je vous répondrai que vous souhaitez la présence de « fans zones » dans certaines villes et pas dans d’autres.
Nous sommes donc tous d’accord s’agissant des « fans zones » !C’est en tout cas ce que j’ai cru comprendre hier, lors d’une réunion avec le président du club des villes hôtes de l’Euro 2016, M. Alain Juppé, qui a dit tout le bien qu’il pensait du travail réalisé avec le Gouvernement pour que la sécurisation de ces « fans zones » soit optimale. Vous pensez donc de même, madame la députée, et je prie de m’excuser d’avoir, dans un moment d’égarement, compris le contraire.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées n’ont pu parvenir à un texte identique.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement de suppression no 1 rectifié.
Voici un extrait de la délibération de la CNIL du 30 janvier 2014 : « À titre général, la Commission rappelle que la sanction des comportements pénalement répréhensibles et le maintien de l’ordre public sont des attributions régaliennes qui relèvent de la compétence exclusive des pouvoirs publics et des juridictions. En résulte que le Paris-Saint-Germain football club, en l’absence d’une disposition législative spécifique, ne peut être autorisé à mettre en oeuvre un traitement de données à caractère personnel. »
En fait, nous sommes en train de débattre en vue de répondre à cette délibération de la CNIL, des clubs professionnels de football ayant déjà constitué de tels fichiers. Je trouve, pour ma part, que c’est donner un pouvoir disproportionné à ces clubs.
Même si le décret, que nous attendons, permettra d’encadrer la création de ces fichiers, le fait qu’une société commerciale puisse constituer de tels fichiers fera jurisprudence et cela me paraît particulièrement risqué. C’est pourquoi mon amendement vise à supprimer l’article 1er .
Vous le comprendrez, mes chers collègues, la commission des lois a unanimement émis un avis défavorable concernant cet amendement de suppression. À l’entendre, Mme Buffet faisait d’ailleurs presque un plaidoyer pour l’article.
En effet, chère collègue, comme vous l’avez dit, l’état actuel du droit ne permet pas ces traitements de données : c’est bien précisément pour créer le cadre juridique adapté que nous apprêtons à adopter l’article 1er qui, de manière très carrée et précise, définit bien les conditions dans lesquelles les organisateurs de manifestations sportives pourront refuser l’accès aux manifestations ou annuler la vente d’un billet sur la base d’un traitement de données qui fera l’objet d’un décret en Conseil d’État pris après avis motivé et publié de la CNIL.
Dans l’exposé sommaire de l’amendement, vous expliquez, madame la députée, que la législation autorise déjà le refus de délivrer un billet pour « motif légitime ».
Donc nous n’inventons pas une disposition qui n’existerait pas dans la législation.
Ensuite, nous avons tous pris soin – et cela a été pour moi la chose la plus importante – de définir enfin ce qu’était un supporter et ce qu’était un hooligan. Nous avons en effet tous pris conscience que l’on pouvait être supporter, voire ultra, sans pour autant être un hooligan. Il existe bien une différence importante entre les deux, et ce débat aura permis de la déterminer.
Cela dit, à partir du moment où les pouvoirs publics ont besoin, pour sécuriser les stades, d’encadrer la délivrance de billets, il fallait s’assurer que des billets ne puissent être vendus à des personnes ne pouvant en bénéficier.
Au Sénat, à mon initiative, il a été jugé utile de préciser les définitions figurant à l’article 1er afin de leur ôter toute subjectivité. En effet, ce qui gênait les associations de supporters, ce n’était pas les dispositions figurant à l’article 1er. Il leur semblait en effet normal, comme à nous tous, qu’une personne souhaitant assister à un match de football pour une raison autre que sportive soit sanctionnée ou interdite de stade. Ce que les associations ne voulaient pas c’est que les clubs utilisent un terme qui aurait pu être subjectif pour pouvoir les intégrer dans une liste ou leur interdire la délivrance de billets. Or cette subjectivité on la trouvait, me semble-t-il, dans l’expression relative à la mise en cause du « bon déroulement d’un match ou d’une compétition. » En effet, cela pouvait vouloir tout dire et légitimer toute disposition. En se limitant à la mise en cause de la sécurité de la manifestation, nous sommes passés de la subjectivité à l’objectivité. Voilà pourquoi l’article 1er me paraît désormais équilibré.
Madame la députée, à coeur vaillant, rien d’impossible : je vous demande de retirer votre amendement. Dans le cas contraire, le Gouvernement y serait défavorable.
L’amendement no 1 rectifié n’est pas adopté.
Cet amendement vise à ce que le refus de délivrance par un organisateur, c’est-à-dire un club de football, d’un titre d’accès au stade ne puisse « excéder une durée de deux mois suite à la constatation des faits. » Autrement dit, il ne pourra plus s’écouler plus de deux mois entre les faits justifiant la décision et la décision elle-même.
Un club ne pourra donc pas exhumer des faits anciens reprochés à une personne pour justifier une interdiction. En effet, encore une fois, la proposition de loi fixe un champ assez large s’agissant des motifs pouvant amener un club à refuser un titre d’accès – et donc de fait l’accès au stade – c’est-à-dire à prononcer, d’une certaine façon, une interdiction de stade, même si c’est un club, et non une une autorité administrative ou judiciaire, qui le fait.
La commission a émis un avis défavorable à cet amendement : non seulement sur la forme, puisque nous espérons nous acheminer vers un vote conforme, mais également sur le fond.
Il me semble en effet imprudent de fixer une limite temporelle absolue. Pour le dire de manière plus claire, il faudrait que chaque décision soit, en réalité, proportionnée aux faits. On peut en effet très bien envisager que le refus d’accès soit limité à un seul match, ou qu’au contraire il porte sur plusieurs matchs, à raison du comportement de la personne concernée.
Il est vaut mieux rechercher la proportionnalité de la mesure plutôt qu’instaurer une durée couperet comme vous le suggérez, monsieur de Rugy. Cela dit, la sagesse venant au fur et à mesure des débats, vous serez sans doute amené à retirer votre amendement puisque vous avez annoncé tout à l’heure depuis la tribune que vous alliez voter conforme cette proposition de loi.
Dans la mesure où l’objectif recherché est un vote conforme, l’avis du Gouvernement est défavorable, mais cet amendement sera pris en compte au moment de la rédaction du décret.
Il est en effet clair que ce décret devra être extrêmement précis. Quant à l’intervention du rapporteur, elle mérite réflexion : on pourrait envisager une certaine proportionnalité, tout en limitant, dans la durée, le refus de délivrance. On ne peut en effet souhaiter qu’une sanction de refus de délivrance soit prise plusieurs mois après la survenance du fait générateur. Il en sera donc tenu compte dans la rédaction du décret, je peux vous le préciser.
L’intervention du rapporteur ne m’a qu’à moitié rassuré. Cela ne m’étonne pas outre mesure, car sa logique et la mienne différent quelque peu : il souhaite – ce que j’entends tout à fait – plutôt laisser à ceux qui prononceront les interdictions une grande marge d’appréciation, afin que celles-ci soient proportionnées.
La réponse de M. le secrétaire d’État est un peu plus rassurante, mais il faudra qu’en la matière le décret soit précis car, comme vous le savez, toute mesure contraignante ou coercitive comme une interdiction de stade peut toujours faire l’objet d’une dérive arbitraire. Je ne fais pas de procès d’intention, mais c’est une réalité, surtout lorsqu’il s’agit de sociétés commerciales – on n’est plus dans le champ de la justice, même s’il peut toujours y avoir des recours.
J’appelle l’attention de M. le secrétaire d’État sur cette question : je pense d’ailleurs qu’il est conscient de son importance. Nous essayons d’être constructifs, car ce dialogue est important. Au-delà du débat que nous avons aujourd’hui, beaucoup de gens sont en effet concernés : ils ont pu, ces dernières années, constater que les dispositifs existants n’avaient pu empêcher certaines dérives.
Cela dit, je retire cet amendement.
L’amendement no 7 est retiré.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 2 .
L’amendement no 2 est retiré.
L’article 1er est adopté.
L’article 1er bis est adopté.
Il s’agit exactement du même principe que celui dont venons de discuter, par conséquent je retire l’amendement.
L’amendement no 9 est retiré.
Il s’agit d’une question différente, que j’ai déjà introduite tout à l’heure à la tribune au moment de la discussion générale et sur laquelle je souhaite que M. le secrétaire d’État puisse s’exprimer.
Lorsque des interdictions administratives de stade sont prononcées, elles peuvent naturellement être contestées. Je ne rouvre pas ici le débat sur la nature administrative ou judiciaire de leur contentieux. Des voies de recours existent, mais les procédures peuvent durer un certain temps et les recours ne sont pas suspensifs, ce qui d’ailleurs se comprend car il serait par trop facile aux personnes faisant l’objet de telles décisions d’en obtenir la suspension en les contestant.
Pour autant, on pourrait fixer un délai, même si cela n’est pas très fréquent dans notre droit, comme l’a d’ailleurs fait notre assemblée s’agissant des mesures d’interdiction de sortie du territoire. À l’époque, le ministre de l’intérieur lui-même avait fait le parallèle avec les mesures d’interdiction de stade, même si les deux mesures n’ont bien évidemment pas la même portée. L’article L. 224-1 du code de la sécurité intérieure prévoit en effet que, en ce qui concerne les interdiction de territoire, « Le tribunal administratif statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. » Nous proposons que le juge administratif se prononce dans le même délai lorsqu’il est saisir d’un recours pour excès de pouvoir portant sur une interdiction de stade.
Défavorable. Sur le fond, je suis très hostile à ce qu’on multiplie, dans le code de justice administrative, les exceptions et les dérogations car j’y vois un facteur de complication d’autant plus inutile que la voie du référé-suspension, qui est depuis une quinzaine d’années bien établie et bien assise dans les juridictions administratives, permet véritablement au justiciable, s’il y est fondé – c’est-à-dire si sont réunis les deux critères de l’urgence et de doute sérieux sur la légalité de la mesure contestée – d’obtenir satisfaction dans des délais extrêmement courts.
Cela suppose évidemment que la requête du justiciable soit fondée, ce qui est bien le moins. J’ajoute que les procédures dont nous parlons concernent chaque année 170 personnes : les juridictions administratives ne croulent donc pas sous l’effet d’un contentieux de masse. Elles savent parfaitement, lorsque c’est utile, juger avec diligence et célérité.
Il est également défavorable : il existe aujourd’hui, monsieur de Rugy, dans les modalités de fonctionnement de la justice administrative, des moyens de saisir le juge en urgence afin que celui-ci tranche dans les quarante-huit heures.
Compte tenu du fait que ces outils existent, il ne me parait pas possible, sur un contentieux très précis, de fixer un délai. Cela reviendrait à alourdir une loi et des textes et à souligner la spécificité d’un sujet parmi tant d’autres. En outre, la justice administrative est aujourd’hui la plus à même de respecter les délais qui lui sont fixés pour rendre ses jugements.
J’avoue ne pas avoir été très convaincu par les réponses du rapporteur et du secrétaire d’État. Je sais que M. Larrivé défend souvent la justice administrative, en arguant qu’il est nécessaire de n’y rien changer.
Je n’y vois nulle histoire personnelle, mais c’est une constante de ses interventions à l’Assemblée nationale depuis qu’il est député.
Pour autant, je voudrais souligner que cet argument conservateur par essence selon lequel tout existe déjà et qu’il n’y a nul besoin de changer quoi que ce soit est quelque peu contradictoire avec sa proposition de loi. Certes, de nombreuses mesures existent déjà pour interdire l’accès aux stades, etc. Mais on ne pouvait pas créer de fichiers ni déléguer cela à des structures privées, d’où cette proposition de loi.
Considérer que le référé suspensif – sans entrer dans un débat de pointillisme juridique – suffirait à tout régler n’est pas une réponse adaptée. Vous avez du reste vous-même reconnu que des motifs sont nécessaires et que ce n’est pas par cette voie-là que les recours sont traités.
Étant donné l’état d’esprit constructif qui est le mien et dont j’entends malgré tout faire preuve jusqu’au bout, je retire mon amendement. Je précise cependant que l’amendement no 7 que j’ai défendu à l’article 1er relatif au délai de deux mois a failli être adopté au Sénat. Il a en effet fallu procéder par assis et levé, mais comme les sénateurs étaient à égalité, il n’a pas été adopté.
Il me semble d’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, que vous aviez donné un avis favorable et même très favorable à cet amendement…
… si j’ai bien lu le compte rendu des débats du Sénat. En tout état de cause, l’adoption à marche forcée de cette proposition de loi, dont j’ai déjà dit qu’elle me paraissait mal née, n’est pas la meilleure garantie pour faire du bon travail législatif. En voilà un exemple concret.
J’apprécie trop le député de Rugy pour ne pas lui répondre précisément sur ce qui s’est passé au Sénat et cette procédure de vote par assis et levé à laquelle on a eu recours non pas au sujet du refus de délivrance d’un billet, mais de la décision administrative d’interdiction de stade. On souhaitait que la sanction soit prononcée dans les deux mois suivant les faits constatés, ce qui me paraissait logique. D’où l’avis très favorable du Gouvernement à cette proposition. Alors qu’il y avait égalité – 18 voix de part et d’autre –, un sénateur arrivant dans l’hémicycle sans savoir ce dont il était question a fait la différence et fait basculer le vote à 19-18.
L’amendement no 8 est retiré.
L’article 2 est adopté.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 3 .
Dans mon intervention lors de la discussion générale, j’ai souligné les avancées réelles de cette proposition de loi s’agissant de la reconnaissance du rôle des supporters. On ne peut que se féliciter de la création d’une instance nationale du supportérisme. Mon amendement vise à faire réfléchir car l’on peut craindre qu’il s’agisse d’une instance extérieure où, d’après ce que nous a dit M. le secrétaire d’État, les fédérations pourront dialoguer avec les supporters.
N’aurait-il pas été plus simple, comme je le propose, que les supporters soient associés à la gestion des fédérations – et nous avons apporté des précisions par la loi au statut-type des fédérations –, à leur juste place comme le sont d’autres familles du sport – les arbitres par exemple ?
On aurait pu simplifier les choses et faire en sorte que les supporters entrent vraiment dans le mouvement sportif.
L’avis est défavorable pour les raisons de forme évoquées précédemment. Sur le fond, je voudrais rappeler, Mme Buffet le sait, que les fédérations sportives peuvent aujourd’hui regrouper en qualité de membres, dans des conditions précisées par leurs statuts, les personnes physiques auxquelles elles délivrent directement des licences et, parmi ces personnes physiques, il y a forcément des supporters ; deuxièmement, des organismes à but lucratif dont l’objet est la pratique d’une ou plusieurs de leurs disciplines et qu’elles autorisent à délivrer des licences ; troisièmement, des organismes qui, sas avoir pour objet la pratique d’une ou plusieurs de leurs disciplines, contribuent à leur développement ; quatrièmement, les sociétés sportives.
Faut-il y ajouter expressis verbis des représentants des supporters ou peut-être même un jour des représentants des arbitres, que sais-je ? C’est un débat qui peut prospérer, mais certainement pas dans le cadre de la présente proposition de loi que nous devons adopter conforme. Mais il est vrai que sur le fond, je ne suis pas hostile par principe à une telle évolution.
Madame la ministre – c’est ainsi que j’aurais dû m’adresser à vous tout à l’heure, madame Buffet –, précisément parce que vous avez été ministre chargée des sports, vous savez que cet amendement est de nature politique. Avant de l’adopter, il faudrait sans doute solliciter l’avis du Comité national olympique et sportif français.
Le rapporteur a rappelé quels étaient les membres des fédérations sportives et la lecture de l’article L. 131-3 du code du sport montre que n’y figure aucun acteur de terrain : ni les arbitres, ni les entraîneurs, ni les joueurs, ni les supporters.
Décider d’ouvrir les fédérations à ces différents acteurs, ce qui, de mon point de vue, ne serait pas une mauvaise chose, supposerait de passer par un autre texte de loi. C’est la raison pour laquelle, j’émets, à cet instant précis, un avis défavorable à l’amendement.
Je vais retirer mon amendement, mais je voudrais dire ici combien les associations de supporters, notamment les fédérations nationales, ont rencontré de difficultés à entrer en contact avec les directions fédérales.
Comme si les directions fédérales avaient une crainte à l’égard des associations nationales qui se sont créées et dont elles mettent en doute la représentativité. Plus on associera les associations de supporters, plus elles gagneront en représentativité. Il faut instaurer un climat de confiance entre le mouvement sportif et les grandes associations de supporters.
Je retire, je le répète, cet amendement, mais dans le cadre de la discussion avec le Comité national olympique et sportif français et les principales fédérations concernées, il faudra faire en sorte qu’elles s’ouvrent à ces questions et associent davantage ces acteurs.
L’amendement no 3 est retiré.
Lorsque nous avons travaillé sur le fair-play financier avec le député qui est aujourd’hui le secrétaire d’État chargé des sports, ainsi que d’autres députés – M. Huet notamment –, nous avons insisté sur le fait qu’il fallait, à l’instar de ce qui se passe dans d’autres pays, que les clubs professionnels français s’ouvrent à une participation des supporters afin de pouvoir être, demain, des acteurs et actrices du sport.
Vous allez sans doute me répondre que la présente proposition de loi devant être voté conforme, mon amendement n’y a pas sa place. Cependant, je tenais à poser le problème car il serait temps que notre pays avance sur cette pratique.
L’implication des supporters dans la vie des clubs était un élément important de la proposition de loi que j’avais rédigée et que de nombreux parlementaires issus de tous les groupes avaient cosignée, parmi lesquels Marie-George Buffet, François Rochebloine, Régis Juanico, Guénhaël Huet et d’autres.
Une des modalités de cette implication est la participation à l’actionnariat – certains parlent même d’actionnariat populaire. Je ne me lancerai pas dans une tirade sur la participation, concept cher à Charles de Gaulle lorsqu’il était Président de la République. En fait, il s’agit du même principe, appliqué aux clubs sportifs. Je sais, monsieur le secrétaire d’État, que vous y êtes favorable.
Si je défends cet amendement aujourd’hui, c’est pour que l’idée ne se perde pas en chemin même si la proposition de loi de notre collègue Larrivé ne s’inscrit pas du tout dans cette optique, nous l’avons bien compris.
Nous avons réussi à introduire des éléments concernant la représentation des supporters, et c’est un pas en avant.
Pour compléter le propos de Marie-George Buffet, j’indique qu’il ne s’agit pas d’une idée en l’air, d’une idée théorique, voire utopique. L’utopie n’est d’ailleurs pas condamnable en soi, elle est parfois le début d’un projet politique. Concrètement, cela existe dans d’autres pays européens : les grands clubs espagnols, qui trustent les premières places en Europe, sont majoritairement possédés par leurs supporters, parfois à 100 %.
En France, en cas de vente d’un club ou de changement d’actionnaire principal, la question est remise sur le tapis – si je puis dire sans mauvais jeu de mot, puisque le dernier cas en date est celui de la vente de l’Olympique de Marseille. À cette occasion, la question de la participation s’est posée. Il ne s’agit pas pour les supporters d’être propriétaires du club et évidemment pas à 100 %, ni même majoritairement, mais d’avoir une part afin de pouvoir être présents à la table du conseil d’administration. À Nantes, l’idée est portée par l’association À la Nantaise depuis plus de cinq ans, d’autant qu’il y a eu des rumeurs de vente ou de retrait de l’actionnaire. Mais si le cas se présentait, nous ne disposerions pas des outils juridiques nécessaires.
Pourtant, cela existe dans d’autres domaines et nous nous sommes inspirés d’une disposition de la loi Hamon qui visait le secteur coopératif, l’économie sociale et solidaire. J’aimerais vous entendre, même brièvement, monsieur le secrétaire d’État, sur le sujet.
Sur le fond, je serais tout à fait défavorable à cet amendement s’il créait une obligation pour ces sociétés de distribuer des actions à des supporters. En revanche, je suis à titre personnel assez ouvert à l’idée que la faculté leur soit ouverte de distribuer ainsi des parts afin d’encourager la participation.
Sur la forme, l’avis est évidemment défavorable car nous souhaitons un vote conforme.
Je me permets enfin d’inviter François de Rugy à montrer un peu plus d’enthousiasme à l’égard de cette proposition de loi. Il n’est peut-être pas besoin de s’excuser toutes les trois phrases de devoir la voter. Arrêtez, mon cher collègue, de faire votre mauvaise tête ! Montrez que vous êtes heureux de voter ce texte de progrès pour les supporters et contre les hooligans !
Ce texte qui comporte de véritables avancées, et il faut être bien conscient d’où nous venons. Je partage les propos de Mme Buffet. J’ai, comme elle, regretté que les associations de supporters se soient vues opposer un refus du moindre début de dialogue de la part des instances nationales du football. Car c’est pourtant dans le dialogue que l’on fait avancer les choses.
Grâce à la prise de conscience du Parlement, grâce au vote de ce texte, les choses ne seront plus comme avant. C’est une première avancée.
Sur le fond, je continue de partager le point de vue de M. de Rugy. Après avoir travaillé avec lui à l’élaboration d’un rapport et été d’accord sur ses conclusions, je ne peux pas dire aujourd’hui le contraire. Rien ne sera comme avant, disais-je. Il faudra une prise de conscience. Sachez qu’après la grande conférence sur le sport professionnel dont les préconisations ont été remises, certaines d’entre elles feront l’objet d’une initiative parlementaire au Sénat à l’automne. Si ce texte revient à l’Assemblée, ce sera l’occasion pour vous de travailler sur ce sujet.
Par ailleurs, nous allons mettre en place une instance nationale du supportérisme et je me suis engagé à ce que les décrets d’application soient rapidement publiés. Cette discussion pourra faire l’objet d’une réflexion au sein de cette instance nationale. C’est une évolution positive – mais il faut bien l’expliquer – pour le monde sportif, professionnel principalement. Je demande donc le retrait des deux amendements identiques.
L’amendement no 4 est retiré.
Sourires.
Ce qui m’aurait rendu enthousiaste, c’est que nous ayons un dispositif législatif complet et équilibré, non pas quelque chose fait à la va-vite et sans le travail préparatoire indispensable.
Voilà pourquoi, je le redis, c’est sans grand enthousiasme, en effet, que je voterai cette proposition de loi. Je le ferai néanmoins par esprit de responsabilité. N’étant jamais sectaire – on peut me reconnaître cette qualité – ce n’est pas l’auteur de la proposition de loi et encore moins son groupe qui me feraient m’y opposer. Par ailleurs, cela n’enlève rien aux critiques ni aux manques que nous avons pointés, et qui nécessiteront un nouveau travail législatif.
Je remercie le secrétaire d’État de ses propos, qui ouvrent la perspective d’une proposition de loi dont le Sénat pourrait prendre l’initiative. D’autres collègues, socialistes semble-t-il, ont également évoqué le projet de loi Égalité et citoyenneté, à propos de laquelle nous reviendrons à la charge pour certaines dispositions. Dans cette attente, je retire l’amendement.
L’amendement no 5 est retiré.
L’article 5 est adopté.
La commission a maintenu la suppression par le Sénat de l’article 6. Je suis saisie d’un amendement no 6 , tendant à le rétablir cet article.
La parole est à M. Philippe Goujon, pour le soutenir.
Monsieur le rapporteur, j’aurais voté avec enthousiasme l’article 6, mais il a malheureusement été supprimé par le Sénat !
Sourires.
Du moins puis-je faire une tentative, peut-être vaine, pour le réintroduire.
Il s’agit en effet, comme l’ont rappelé M. Fillon et le rapporteur, de la seule disposition du texte relative aux « fans zones », qui visait à en exclure les supporters interdits judiciaires de stade comme le sont déjà – et il est bizarre qu’ils soient seuls concernés – les interdits administratifs : cet article se contentait d’harmoniser les deux périmètres. Paradoxalement, en effet, les interdits administratifs n’ont pas accès à ces zones, mais les interdits judiciaires, si. Comprenne qui pourra !
Afin d’éviter les ambiguïtés que me reprochait le Gouvernement, j’en ai modifié la rédaction pour préciser que la disposition s’appliquait bien aux lieux publics de retransmission en public des matchs, ce qui permet d’exclure les lieux privés ouverts au public, comme les bars.
Au-delà cependant de cette question, je souhaite ajouter ma pierre au débat sur les « fans zones ». Monsieur le secrétaire d’État, le maintien de ces zones représente véritablement, et nous sommes plusieurs à le penser, un risque inconsidéré alors que l’état d’urgence va précisément être prorogé pour couvrir cet événement, que – si l’on en croit le Premier ministre et le Président de la République – nous sommes en état de guerre, que les commandos terroristes de Paris et de Bruxelles ont révélé qu’ils voulaient passer à l’action durant cette manifestation sportive et que le Conseil national des activités privées de sécurité – CNAPS – en a recommandé à l’unanimité la suppression car aucune des grandes entreprises de sécurité n’a accepté de prendre le risque de sécuriser ces « fans zones » Il aurait du reste fallu recruter beaucoup plus d’agents de surveillance qualifiés et les effectifs prévus sont très insuffisants – on prévoit ainsi à Paris 400 agents pour 100 000 supporters, alors qu’il en faudrait 1 000. Le fiasco des Jeux olympiques de Londres hante encore les esprits : comme vous le savez, les Anglais ont dû faire appel en urgence, au dernier moment et en catastrophe, à 3 500 militaires, faute d’avoir pu recruter assez d’agents de sécurité formés.
Le doublement du coût du dispositif de sécurité – vous l’avez porté de 12 à 24 millions d’euros, avec une petite rallonge budgétaire de l’État –, ne réglera pas le problème, un mois et demi seulement avant l’Euro.
Les « fans zones » ne me semblent pas indispensables au succès de l’Euro et, de toute façon, elles n’empêcheront pas les retransmissions aux terrasses des cafés, qui seront bondées. Pour Paris, on a également proposé d’implanter la « fan zone » dans un stade sécurisé, comme le stade Charléty, plutôt qu’au pied de la Tour Eiffel, dans un espace de quinze hectares, accessible sans billet, et qui accueillera tous les jours pendant un mois, jusqu’à une heure fort tardive, 100 000 personnes – voire le double pour le concert d’inauguration donné par David Guetta. C’est un risque inconsidéré, car cette « fan zone» mobilisera d’importantes forces de police, rendues ainsi indisponibles pour assurer la sécurité de lieux sensibles comme les gares et les aéroports. Monsieur le secrétaire d’État, ne tentez pas les terroristes avec ces fans zones.
Monsieur Goujon, vous êtes hors-jeu depuis une minute et quinze secondes !
Sourires.
Vous aurez compris que, compte tenu du cadre dans lequel se déroulent nos débats, je suis contraint de demander à notre excellent collègue Philippe Goujon de retirer son amendement. Sur le fond, je tiens à redire combien je partage sa préoccupation.
J’entends bien, monsieur le secrétaire d’État, que vous avez engagé des discussions et un travail avec des élus locaux, comme le maire de Bordeaux et d’autres autorités municipales, mais les députés que nous sommes sont encore très vivement préoccupés par l’articulation entre l’état d’urgence et le maintien des « fans zones ». Ce débat est légitime : nous l’avons ce soir et l’aurons à nouveau dans quelques jours lorsque, comme vient de le confirmer le président Dominique Raimbourg, le ministre de l’intérieur viendra expliquer devant la commission des lois les conditions dans lesquelles le Gouvernement sollicite la prolongation de l’application de l’état d’urgence.
Monsieur Goujon, il faut, dans votre interpellation, aller au bout de votre logique, sans la limiter au Champ-de-Mars. Si vous pensez que tout rassemblement important et imposant à Paris doit faire l’objet d’une interdiction – que ce soit au Champ-de-Mars ou sur les Champs-Élysées –, il faut demander aux organisateurs du Tour de France d’en modifier le parcours afin qu’il ne se termine pas aux Champs-Élysées où, le 25 juillet, 350 000 personnes viendront accueillir les coureurs ! Si vous pensez qu’il ne faut pas de rassemblements publics dans Paris, avertissez vite la Fédération française de tennis pour lui demander d’interdire le tournoi de Roland-Garros car, début juin, plus de 25 000 spectateurs seront concentrés en un même lieu ! Si vous pensez véritablement qu’il ne faut pas de rassemblements publics de grande ampleur, interdisons aussi tout spectacle culturel susceptible de rassembler 50 000 ou 60 000 personnes, au Champ-de-Mars ou ailleurs, car ce serait un risque pour la sécurité et cela pourrait susciter une action de la part des djihadistes ! Est-ce cela que vous voulez ? Si c’est le cas, il faut le dire et il faut que les organisateurs du Tour de France en tiennent compte. Voilà pour la première partie de ma réponse.
J’en viens à la deuxième partie : tous les responsables de la sécurité qui, dans ces affaires, s’expriment avec impartialité – c’est-à-dire sans avoir d’autres idées en tête lorsqu’ils prennent position à propos de la « fan zone » de Paris ou de Bordeaux – vous diront qu’il vaut mieux un endroit encadré et sécurisé…
Je vais vous répondre, Monsieur Geoffroy !
Mieux vaut, disais-je, un endroit sécurisé et encadré que de multiples endroits qui se constitueraient, sachant que sept à huit millions de personnes viendront sur notre territoire entre le 10 juin et le 10 juillet. Comment ferons-nous, sans « fan zone », lorsque 100 000 spectateurs voudront se retrouver à l’occasion d’un match à Paris ? Comment le ministère de l’intérieur et le préfet de police organiseraient-ils la sécurité de tous ces rassemblements ? Ce serait impossible – et c’est là que réside le second intérêt de la « fan zone ».
Vient un moment où il faut être responsable ! Vous déclariez tout à l’heure que le sport n’était ni de gauche, ni de droite. De fait, c’est sous le mandat du président Nicolas Sarkozy que nous avons obtenu l’Euro de football – Mme Dion, qui a en été l’un des artisans, s’en souvient. On ne peut donc dire que cet Euro serait celui de la gauche ou de la droite : ce doit être l’Euro de la fête. À force d’évoquer, pour des raisons parfois assez politiciennes, la sécurisation des « fans zones », on en vient à tenir un discours anxiogène. Si vous voulez que tout le monde se terre chez soi et ne s’extériorise pas pendant l’Euro, continuez donc sur ce terrain !
Je répondrai, pour finir, à l’interpellation de M. Geoffroy, qui demande ce qu’on fait pour ces « fans zones » : il y aura de la vidéoprotection, financée à 80 % par l’État, des palpations à l’entrée et de la sécurité à l’extérieur, fournie bien sûr par l’État – le ministre de la défense a décidé de mettre à disposition plus de 10 000 militaires, en plus des forces de police, pour assurer la sécurisation de l’Euro. À l’intérieur, des entreprises de sécurité officieront sous le contrôle des villes : ce sont en effet, je le rappelle, les maires qui sont responsables de la sécurité à l’intérieur des « fans zones ». Contrairement à ce que j’ai entendu, tous les appels d’offres ont été fructueux et la demande d’agents de sécurité a été satisfaite.
Quels que puissent être les signes, les effets de manche et les mouvements de tête, la seule chose qui m’intéresse est le concret. J’assiste à tous les comités de pilotage et le dernier auquel j’ai participé – j’ignorais alors que je serais interpellé par le groupe Les Républicains – concernait Marseille et Nice, deux villes importantes dont les maires sont membres de votre famille politique.
C’est bien pour cela que je vous réponds !
M. Gaudin et M. Estrosi sont tous deux très heureux d’accueillir l’Euro et ont fait ce qu’il fallait pour que les « fans zones » soient sécurisées : ils nous ont dit qu’ils étaient prêts à accueillir le monde. Je ne pense donc pas que M. Gaudin apprécierait que vous continuiez trop longtemps à dire qu’il faut fermer la « fan zone » de Marseille. En effet, si les djihadistes veulent frapper pendant l’Euro, Paris n’est pas la seule ville de France et ils pourraient s’en prendre à tout grand rassemblement. Il faut donc en finir avec les théories anxiogènes et ne plus penser maintenant qu’à une chose : l’Euro doit être une fête.
Il faut éviter les caricatures – mais peut-être le ministre n’a-t-il pas écouté mon intervention, pourtant assez argumentée. Nous nous réjouissons, bien sûr, de la tenue de l’Euro dans des stades sécurisés. On a bien vu, du reste, que, le 13 novembre, les terroristes n’ont pas pu accéder au Stade de France – lequel sera en outre équipé d’une barrière supplémentaire, haute de deux mètres quarante.
Monsieur le secrétaire d’État, la différence avec les événements sportifs que vous avez cités, comme l’arrivée du Tour de France, est que la « fan zone » accueillera 100 000 personnes pendant un mois, tous les jours, de 10 heures du matin à minuit, ce qui est très différent d’un événement unique, plus facile à maîtriser et à surveiller. Il s’agit, de surcroît, d’une enceinte que je ne considère pas comme assez sécurisée – beaucoup moins, en tout cas, que les stades. Avec Mme Rachida Dati, maire de l’arrondissement dans lequel se trouvera la « fan zone », j’ai proposé de l’installer plutôt au stade Charléty, qui ne sera pas utilisé pour l’Euro 2016.
En outre, les commandos terroristes interpellés menaçaient, à ma connaissance, l’Euro 2016, et non pas d’autres événements. Cela ne signifie certes pas qu’il n’y aura pas d’autres attentats ailleurs, mais c’est un élément dont il faut tenir compte.
Je m’étonne, enfin, que vous jugiez que le CNAPS n’est pas impartial. Si je comprends bien, les gens impartiaux sont ceux qui sont d’accord avec vous, mais pas les autres !
Avec ou sans « fans zones », de multiples rassemblements auront lieu. Il est en effet question de sept à huit millions de supporters qui, par définition, ne seront pas tous dans ces zones, et qui seront donc ailleurs : aux terrasses des cafés et partout où il y aura des écrans.
Quant au fait que l’Euro 2016 ait été obtenu sous le mandat de Nicolas Sarkozy, je tiens à souligner une légère différence chronologique : il n’y avait pas, à l’époque, d’attentats terroristes, alors que nous connaissons aujourd’hui une menace permanente, un péril imminent d’attaques terroristes. Je souhaite comme vous, monsieur le secrétaire d’État, que l’Euro soit une fête, mais cette fête ne doit pas se transformer en cauchemar.
Je retire mon amendement.
L’amendement no 6 est retiré. En conséquence, l’article 6 demeure supprimé.
L’article 7 est adopté.
La proposition de loi est adoptée à l’unanimité.
Sourires.
En tout cas, avec des « fans zones » et du « supportérisme », ce n’est pas une victoire pour la qualité de la langue française !
La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.
La parole est à Mme Sophie Rohfritsch, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, la proposition de loi que je vous présente, adoptée à l’unanimité par la commission des lois, vise à permettre aux collectivités territoriales de recourir à la procédure de déclassement anticipé déjà mise en oeuvre par l’État et les établissements publics de santé.
Lors de l’examen de cette proposition de loi, les membres de la commission des lois – quels que soient les bancs sur lesquels ils siègent – ont souligné que les collectivités territoriales et leurs groupements disposent de moyens limités pour gérer leur patrimoine. Or celui-ci n’a cessé de croître au cours des dernières années, notamment du fait du transfert de certaines compétences auparavant exercées par l’État. Elles se retrouvent ainsi souvent propriétaires de biens immobiliers qui ne répondent plus tout à fait aux besoins des services publics situés sur leurs territoires, et qui peuvent représenter des charges importantes.
La logique voudrait qu’en bonnes gestionnaires, les collectivités puissent alors céder ces biens pour financer des rénovations, des acquisitions ou la construction de nouveaux équipements. Or la cession de biens relevant du domaine public obéit à des règles très strictes : ces biens ne sont ni aliénables, ni prescriptibles. Par conséquent, pour permettre leur cession, il faut, dans un premier temps, les déclasser, c’est-à-dire les transférer du domaine public au domaine privé.
Il faut pour cela satisfaire une condition préalable : le bien cédé ne doit plus être matériellement affecté à un service public, dans le cas d’un bâtiment, ou à un usage public, dans le cas – par exemple – d’une place de parking, ou d’un parking entier. Dans le cas contraire, la vente est annulée.
Cette procédure protège le domaine public, mais elle peut conduire à des contentieux et empêcher des cessions justifiées et utiles à la mise en oeuvre d’une bonne stratégie de valorisation patrimoniale. Par conséquent, une dérogation à cette procédure a été introduite sous la forme d’un déclassement anticipé, prévu par l’article L. 2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques. Concrètement, cet article prévoit que pour répondre à des nécessités de service public, il est possible de déclasser et de céder un bien tout en y maintenant des services pour une durée limitée à trois années après la cession.
Ce délai présente plusieurs avantages. En premier lieu, les personnes publiques concernées peuvent utiliser le produit de la vente pour financer l’acquisition de nouveaux immeubles destinés à accueillir les services sans avoir à déménager ces derniers au préalable ; cela représente donc pour elles une économie. En second lieu, ce type de cession peut être intéressant pour certains promoteurs ou bailleurs qui disposent ainsi du temps nécessaire pour instruire les démarches relatives à la transformation des biens cédés.
Compte tenu de ces avantages indéniables, il est dommage que le champ des personnes publiques concernées par cette procédure soit restreint à l’État et ses établissements publics – auxquels s’ajoutent, depuis 2009, les établissements publics de santé. C’est pourquoi je propose par ce texte, avec l’appui de la commission des lois, de l’étendre aux collectivités territoriales.
Cette proposition n’est pas nouvelle : plusieurs parlementaires ont, au cours des dernières années, interrogé les gouvernements successifs quant à l’opportunité d’étendre cette procédure aux collectivités territoriales, et déposé des amendements en ce sens.
Lors des travaux de préparation de ce texte, plusieurs acteurs locaux se sont également prononcés en sa faveur : l’Association des maires de France, l’Association des départements de France et, tout récemment, l’Association des régions de France. Par ailleurs, le Congrès des notaires en avait également fait la recommandation en 2013 dans son rapport sur les propriétés publiques.
Je me réjouis donc, avec tous les membres de la commission des lois, que la position du Gouvernement ait évolué sur ce sujet. Alors qu’il avait opposé aux parlementaires l’absence de bilan de la procédure de déclassement anticipé et le risque financier encouru par les collectivités territoriales, il semble désormais favorable à cette mesure, sous deux conditions qui me semblent tout à fait bienvenues : la première est que le recours à cette procédure par les collectivités territoriales reste exceptionnel et évidemment justifié par une nécessité de service public, comme cela est actuellement le cas pour l’État et les établissements publics de santé ; la seconde est que les risques financiers liés à l’éventuelle annulation de la vente dans le cas où les biens cédés n’auraient pas été désaffectés dans les délais impartis soient couverts par un provisionnement initial suffisant. Je souligne que les dispositions que nous avions adoptées en ce sens en commission seront utilement précisées par deux amendements de notre collègue Hugues Fourage, qui visent respectivement, à ce que les modalités de ce provisionnement soient prévues au code général des collectivités territoriales et à ce que la délibération motivée sur la mise en oeuvre de cette procédure par l’organe délibérant de la collectivité concernée s’accompagne d’une étude d’impact pluriannuelle intégrant le risque financier en cas de résolution de la vente.
Sur le fondement de cette présentation, je vous invite, mes chers collègues, à adopter ces deux amendements de précision ainsi bien évidemment que cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des collectivités territoriales.
Madame la présidente, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission des lois, mesdames, messieurs les députés, nous examinons aujourd’hui en première lecture la proposition de loi présentée à l’instant par vous-même, madame Rohfritsch, que je salue comme auteure et rapporteure du présent texte, qui vise à étendre aux collectivités territoriales le mécanisme de déclassement anticipé prévu à l’article L. 2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques, le fameux CG3P. Le fait que cette question soit notoire et revête une importance non négligeable est un constat certainement largement partagé sur tous les bancs de votre hémicycle. Elle a d’ailleurs fait l’objet de plusieurs questions de parlementaires à l’Assemblée nationale comme au Sénat, vous l’avez rappelé, madame la rapporteure. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité travailler étroitement avec les parlementaires afin d’apporter la réponse la plus appropriée à cette problématique, au-delà des clivages partisans.
Il s’agit en effet de travailler collectivement dans le sens de l’intérêt général en permettant d’accorder plus de souplesse dans la gestion des collectivités territoriales quand c’est nécessaire tout en veillant à préserver leurs marges de manoeuvre budgétaires. Tel est le sens du message que je vous adresse aujourd’hui : celui d’un gouvernement à la fois ouvert aux améliorations nécessaires de la gestion publique locale et, car ce n’est pas incompatible, protecteur des intérêts de nos collectivités.
Les personnes publiques locales ont progressivement pris conscience de la valeur économique de leurs biens. Elles se sont tout d’abord appliquées à mieux connaître la consistance de leur patrimoine. Cette démarche, qui relève du bon sens mais longtemps négligée, est maintenant bien engagée. La nécessité de valoriser les propriétés de toutes les personnes publiques s’impose en effet parce que les biens concernés ont des besoins propres en termes de rénovation, de reconstruction ou de financement, ou encore parce qu’ils peuvent servir de support à des activités économiques. La recherche de la rentabilité est devenue pour les collectivités publiques un besoin autant qu’une contrainte, mais elle suscite plusieurs interrogations : quels biens valoriser, comment et jusqu’à quel point ? En effet, valoriser économiquement les biens publics ne doit pas conduire à sacrifier d’autres exigences d’intérêt général telles que la préservation de leur intégrité ou de leur valeur patrimoniale.
C’est donc dans ce contexte que cette proposition de loi soulève la question de la vente des biens du domaine public des collectivités publiques territoriales sans attendre que leur affectation à l’utilité publique ait pris fin. Comme vous le savez, l’État bénéficie déjà aujourd’hui d’une telle faculté. En effet, ainsi que je l’ai rappelé dans l’introduction de mon intervention, il existe dans le CG3P un dispositif dérogatoire permettant à l’État et à ses établissements publics, ainsi que, depuis 2009, aux établissements publics de santé, de déclasser des immeubles appartenant au domaine public et affectés à un service public avant même qu’ils ne soient matériellement désaffectés. Ce déclassement par anticipation permet aux personnes publiques concernées de financer, par la vente d’immeubles encore occupés, par exemple la construction des immeubles dans lesquels les services concernés pourraient être transférés. Les collectivités territoriales en revanche ne bénéficient pas d’une telle dérogation.
Vous le savez, mesdames, messieurs les députés : la procédure normale de sortie d’un bien du domaine public nécessite actuellement un acte formel de déclassement postérieur ou simultané à la désaffectation de fait du bien concerné. Les dispositions dérogatoires actuelles s’appliquent donc dans des conditions restrictives car on ne saurait de manière générale permettre la vente d’un bien appartenant au domaine public sans aucune perspective de désaffectation, au risque de remettre en cause les principes fondamentaux protecteurs du domaine public. La désaffectation est en effet, tout comme le déclassement, un attribut du droit de propriété des personnes publiques. Voilà sans doute pourquoi l’État a très peu utilisé ce dispositif dérogatoire.
Cela étant, les règles de droit commun en matière de domanialité publique n’interdisent pas une succession rapide dans le temps, voire une concomitance, entre la désaffectation d’un bien et son déclassement. Il est déjà possible pour l’organe délibérant d’une collectivité territoriale à la fois de constater la désaffectation d’un bien et de le déclasser, et ce dans une même délibération. Mais cet argument peut ne pas paraître suffisant car, il faut le reconnaître, et je le fais bien volontiers avec mon expérience d’élue locale, certains exemples illustrent la nécessité d’harmoniser les règles en vigueur entre l’État, ses établissements publics et les établissements publics de santé d’une part, et les collectivités locales d’autre part.
Comme l’avait noté le sénateur Henri Tandonnet dans l’une de ses questions adressées au Gouvernement, un terrain sportif, bien qu’appartenant à une collectivité territoriale, est affecté à une utilité publique puisque sportive, et si ladite collectivité veut le céder à un club, elle n’en a pas la possibilité, à moins de démontrer que le bien ne sera plus affecté à des activités sportives, ce qui supposera alors de les arrêter pour une période significative, c’est-à-dire assez longue. Il apparaît donc nécessaire d’appréhender la notion de désaffectation comme pour l’État en supprimant la période pendant laquelle le bien sera rendu inutilisable, bien souvent artificiellement de surcroît. Il y a actuellement beaucoup de difficulté à transférer des biens du domaine public au domaine privé pour poursuivre des activités qui pourraient être gérées par des acteurs privés, notamment associatifs.
Pour ces différentes raisons, il nous semble aujourd’hui que la solution proposée par Mme Rohfritsch est intéressante pour fluidifier la gestion patrimoniale des collectivités locales. Comme l’a souligné le député Dominique Bussereau en commission, il s’agit d’un texte de simplification et de cohérence.
Pour autant, on ne peut ignorer que l’extension du dispositif dérogatoire actuel pourrait mettre certaines collectivités territoriales en situation contractuellement difficile, notamment sur le plan financier, si, par la suite, elles ne parvenaient pas à libérer le bien qu’elles auraient vendu d’avance. En effet, elles pourraient être soumises, lors de certaines périodes particulières du mandat de leur organe délibérant, à la tentation d’encaisser immédiatement le produit de la vente d’un bien à céder plus tard – même si je partage entièrement l’avis exprimé en commission par le député Olivier Dussopt, à savoir qu’elles sont des personnes publiques majeures.
Un équilibre doit donc être trouvé. La solution proposée initialement va dans le bon sens, mais il est nécessaire de l’encadrer pour protéger les collectivités qui pourraient se mettre en difficulté budgétaire. Votre commission, à l’initiative de sa rapporteure, a travaillé en ce sens puisqu’un amendement, adopté à l’unanimité, vise à préciser que l’acte de vente devra prévoir les conditions de sa résolution afin d’écarter tout risque financier ; il prévoit en outre que les groupements de collectivités territoriales seront, eux aussi, éligibles à cette procédure dérogatoire et, enfin, que la délibération devra être prise en amont, de façon à détailler l’opération et à la rendre pleinement publique afin d’éviter que des collectivités ne se livrent à des opérations malvenues. C’est une avancée que le Gouvernement salue. Cependant, comme l’a souligné votre collègue Alain Tourret en commission, cela ne règle pas tous les problèmes, notamment en ce qui concerne les indemnisations susceptibles d’être réclamées du fait de l’annulation de la vente. À cet égard, un amendement déposé par votre collègue Hugues Fourage prévoit que soit présentée en même temps que la délibération une étude d’impact pluriannuelle tenant compte de l’aléa. Est également prévu le principe d’une provision obligatoire pour les collectivités concernées, mais uniquement pour le montant des pénalités fixées dans l’acte de vente en cas de résolution de cette dernière. Ces deux amendements répondent à nos préoccupations en sécurisant juridiquement la démarche de déclassement. Ils permettront de trouver un point d’équilibre. Par conséquent, et sous réserve de leur adoption, le Gouvernement sera favorable au vote de cette proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État – dont je salue les collaborateurs que je connais pour certains –, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, si l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité des biens publics sont des principes fondamentaux bien connus de notre droit public, les appliquer trop rigoureusement peut paradoxalement menacer la continuité du service public.
En tant qu’élu local, j’en fais souvent l’expérience. Ainsi, prenons un bien immobilier : même s’il ne répond plus aux besoins du service public, il faudra attendre, en vertu du principe d’inaliénabilité, qu’il soit matériellement désaffecté avant que ne puisse intervenir la décision de déclassement du domaine public vers le domaine privé, puis sa cession. Cette situation est problématique à la fois pour les usagers, qui voient un service public interrompu, mais également pour les collectivités qui se trouvent bloquées dans l’acquisition d’un nouveau bien tant que le précédent n’a pas été cédé.
C’est pour contourner ce double inconvénient que le législateur a créé un mécanisme de déclassement anticipé, prévu à l’article L. 2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques, qui permet de céder un bien public non encore désaffecté. Rétablissant un équilibre entre, d’un côté, la nécessité de protéger les biens appartenant au domaine public, et, de l’autre, la souplesse nécessaire à la cession d’un bien, ce mécanisme permet de valoriser au mieux le patrimoine public.
Il présente cependant une faille majeure : celle de n’être applicable qu’au patrimoine de l’État et de ses établissements publics ainsi que, depuis 2009, aux établissements publics de santé. Si le fait d’exclure les collectivités territoriales de ce mécanisme pouvait se comprendre dans un système étatique centralisé, cela n’a en revanche aucun sens dans le système de plus en plus décentralisé que nous connaissons aujourd’hui. En effet, depuis la première réforme de décentralisation amorcée au début des années 1980, nous n’avons cessé de légiférer dans le sens d’un renforcement des pouvoirs des collectivités territoriales, lesquelles bénéficient du transfert de prérogatives toujours plus nombreuses. Encore récemment, la loi NOTRe du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, même si elle est très floue et très compliquée, a fortement renforcé les prérogatives des régions, des communes et des communautés d’agglomération, ainsi que, dans une moindre mesure, celles des départements. Les collectivités territoriales étant des personnes publiques majeures au même titre que l’État, il n’y a aucune raison de les traiter comme des mineures d’un point de vue juridique et de ne pas leur accorder le même régime quant à l’administration de leurs biens. Au regard des prérogatives mais également des responsabilités qui sont les leurs, elles doivent pouvoir bénéficier d’une certaine latitude dans leurs décisions.
Certains ont pu craindre que les collectivités territoriales ne profitent de l’extension de ce mécanisme pour vendre des éléments de leur patrimoine dans l’unique but de repousser certaines échéances financières, ce qui pourrait d’ailleurs se comprendre dans la situation actuelle avec les baisses drastiques des dotations de l’État. Il est vrai que c’est un risque à ne pas négliger, et je salue l’amendement adopté en commission des lois qui évite cet écueil en prévoyant dans l’acte de vente les conditions de sa résolution.
Par ailleurs, je tiens à souligner le pragmatisme de la commission des lois qui a ouvert le dispositif aux groupements de collectivités territoriales.
En résumé, ce texte est utile, pragmatique, et surtout nécessaire puisqu’il répond à une demande formulée de longue date par les acteurs de terrain, reprise par l’AMF et l’ADF, ou encore plus récemment par le Congrès des notaires. Au-delà de l’avancée pratique qu’il représente pour les collectivités territoriales, ce texte affirme par ailleurs une égalité théorique entre l’État et lesdites collectivités sur le plan juridique. Je me réjouis du consensus transpartisan qui s’est exprimé en commission des lois et de la position défendue aujourd’hui par Mme la secrétaire d’État.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, ainsi que tous les collaborateurs, chers collègues, dans la période budgétaire contrainte que nous connaissons, la gestion patrimoniale des collectivités territoriales constitue un enjeu primordial de bonne gouvernance. Opéré depuis les lois de décentralisation, le transfert de compétences de l’État vers les collectivités a encouragé ces dernières à faire des investissements supplémentaires pour répondre aux besoins de leurs territoires.
En trente ans, le patrimoine global des collectivités a ainsi triplé, pour atteindre 242 milliards d’euros en 2008. Inévitablement, cette extension du patrimoine a entraîné une hausse des charges d’entretien et de rénovation des propriétés existantes.
Les collectivités territoriales, qui ont une connaissance concrète des besoins de leur territoire, sont donc confrontées au même défi patrimonial que l’État. Elles sont, par ailleurs, fortement mises à contribution pour réduire le niveau des dépenses publiques.
Dans la législation française, comme l’ont expliqué tous les intervenants, les conditions de sortie du domaine public et de cession des biens concernés sont extrêmement encadrées. Pour être cédés, les biens publics doivent en effet faire l’objet d’une décision de désaffectation préalable ou concomitante à l’acte de déclassement du domaine public vers le domaine privé. Tant que l’affectation demeure, il est considéré que le bien appartient au domaine public et le déclassement est illégal. Cela s’explique par la volonté de prévoir un régime protecteur des propriétés matériellement affectées à une utilité publique, régi par deux principes fondamentaux, que Pierre Morel-A-L’Huissier vient de rappeler, l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité.
Si la préservation d’un tel régime est nécessaire, il comporte tout de même quelques inconvénients. En premier lieu, il peut représenter une entrave à la continuité du service public puisque, dans certains cas, seule son interruption temporaire permet de respecter les termes de la loi. Ensuite, les biens désaffectés sont de fait inutilisés pendant des délais difficilement compressibles. Enfin, le financement des nouvelles installations doit intervenir en amont de la vente, pour en limiter l’interruption, et ne peut ainsi être minoré du prix de la cession des biens existants.
Par ailleurs, si une collectivité veut céder un terrain sportif, elle ne peut le faire sans démontrer que le bien n’est plus affecté au service sportif. Cela nécessitera d’arrêter les activités sur une période significativement longue.
Autre exemple : la cession d’un terrain servant de parking et sur lequel des logements seront construits à terme. Le terrain restera désaffecté pendant des mois, avant que l’acte authentique de vente ne soit signé. Toutes ces difficultés justifient la nécessité d’assouplir la procédure de droit commun, qui conduit aujourd’hui à immobiliser certains biens sur de longues périodes, parfois au détriment du bon fonctionnement des services publics locaux.
Il y a dix ans, le législateur avait mis en place une procédure de régime dérogatoire permettant à l’État et à ses établissements publics de déclasser et de céder un bien sans que celui-ci ne soit matériellement désaffecté, à la condition que sa désaffectation intervienne dans un délai maximal de trois ans après la cession.
Ce déclassement par anticipation permet aux personnes publiques concernées par la vente d’immeubles encore occupés, de financer par exemple la construction des immeubles dans lesquels les services intéressés pourront être transférés. Il convenait d’étendre aux collectivités territoriales cette procédure, réservée jusqu’à présent à l’État et à ses établissements publics. Nous considérons donc que ce texte présente une évolution législative utile et nécessaire. C’est pourquoi nous le soutiendrons.
Contrairement aux idées reçues, à notre sens, ce dispositif permet surtout aux collectivités de dégager des économies importantes. En 2013, un rapport de la Cour des comptes indiquait ainsi qu’« une meilleure gestion du patrimoine immobilier peut donner aux collectivités des marges de manoeuvre budgétaires non négligeables, dans un cadre financier durablement contraint ». De nombreux exemples ont été cités, qui démontrent la nécessité d’appliquer ce dispositif à nos territoires.
Ce sujet a fait l’objet de plusieurs questions orales et écrites des parlementaires. De plus, plusieurs acteurs tels que l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France ou le Congrès des notaires se sont prononcés en faveur de l’extension de ce dispositif aux collectivités territoriales.
Alors que le Gouvernement avait plusieurs fois repoussé cette évolution, arguant notamment de la nécessité de dresser un premier bilan de cette procédure dérogatoire, nous sommes heureux du consensus auquel nous sommes finalement parvenus. Les amendements adoptés permettent au groupe de l’Union des démocrates et indépendants de voter ce texte qui permettra une gestion plus dynamique et efficace du patrimoine des collectivités territoriales.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, notre groupe, dont le président est professeur de droit, et qui compte plusieurs avocats et un ou deux anciens élèves de l’École nationale d’administration, toutes personnes qui, en dépit de leur formation et de leur pratique professionnelle, ne manquent pas de bon sens et connaissent encore le français, a approuvé, après étude, cette proposition de loi.
Celle-ci présente en effet quelques caractéristiques, extrêmement rares de nos jours, qui méritent d’être énumérées. Premièrement, elle est écrite en langue française : c’est une nouveauté pour nous, qui venons d’adopter une proposition de loi dans laquelle il était question de « supportérisme ». Malgré l’enthousiasme avec lequel j’ai voté ce texte, j’estime que nous aurions pu éviter cet enrichissement de la langue et ce néologisme pour le moins inélégant.
Deuxièmement, la présente proposition de loi a une portée juridique, ce qui est de plus en plus rare, puisque nous votons plus souvent des lois d’intention, de supposition, de supputation.
Troisièmement, elle est raisonnable et ne fait courir aucun risque inconsidéré.
Quatrièmement, elle assouplit intelligemment des principes, sans pour autant mettre en oeuvre l’adage de M. de Talleyrand : « Reposez-vous sur les principes, ils finiront bien par céder »
Sourires..
Surtout, au-delà de ces qualités, relativement formelles, cette proposition est utile. En effet, les principes selon lesquels le domaine public est imprescriptible et inaliénable sont posés pour l’éternité, ce qui, chacun le sait, est terriblement long et probablement assez ennuyeux. C’est la raison pour laquelle je n’y crois pas.
Les choses évoluent : ce qui était une route devient un délaissé ; ce qui était un équipement public peut devenir obsolète. S’il n’a plus de raison d’être entretenu, parce qu’il ne présente d’intérêt ni historique ni esthétique, il devient une ruine. Il n’en demeure pas moins un élément du domaine public, inaliénable et imprescriptible, pan de mur écroulé, envahi par les arbres, qui gêne tout le monde, trou à rat que l’on ne peut pas céder pour qu’il soit enfin nettoyé, embelli et qu’il trouve un quelconque usage.
Chacun sait que le patrimoine, défini par la triade abusus, fructus, usus, doit être géré, c’est-à-dire qu’il doit pouvoir être cédé. Mais ces biens publics n’ont plus aucune utilité tant qu’ils restent classés dans le domaine public. Nul n’en retire aucun fruit… hormis les rats qui, eux, profitent de la situation.
La proposition présentée, pragmatique et raisonnable, facilite la gestion du patrimoine d’une collectivité territoriale, sans compromettre l’intérêt public. Cette facilité « d’abuser » plus facilement du domaine public n’était jusqu’à présent ouverte qu’à l’État. Or les collectivités territoriales ont aujourd’hui un patrimoine croissant, qu’elles ont d’ailleurs souvent reçu de l’État, à l’occasion de transferts consécutifs à l’application d’une série de lois, regroupées sous le terme de décentralisation.
Il n’était que temps, si longtemps après le début de la décentralisation, d’admettre que les collectivités territoriales sont de ce point de vue des personnes publiques majeures, non d’éternelles mineures, comme l’était la femme selon le code civil napoléonien, soumise à l’autorité de leur mari, en l’espèce, pour les collectivités, le préfet.
Aussi, madame la secrétaire d’État, notre groupe votera cette proposition – à l’unanimité puisque je suis seul.
Sourires.
Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues – nombreux sur ce sujet d’importance –, la proposition de loi visant à étendre aux collectivités territoriales le mécanisme de déclassement anticipé est intéressante, en ce qu’elle s’inscrit dans une volonté de gestion active du patrimoine de ces collectivités.
En effet, elle entend donner aux collectivités la possibilité d’user de la disposition dérogatoire permettant qu’un bien, sous réserve des nécessités de service public, puisse être déclassé et cédé, sans qu’il ne soit matériellement désaffecté, à la condition que sa désaffectation intervienne dans un délai maximal de trois ans au plus après la cession.
Cette procédure de déclassement anticipé permet de céder des immeubles dans lesquels les services publics sont maintenus pour une durée limitée, et d’utiliser le produit de la vente pour financer, par exemple, la construction de nouveaux bâtiments ayant vocation à les accueillir. La continuité du service public est ainsi préservée.
Il s’agit alors de simplifier et de favoriser la capacité des collectivités locales à gérer leur domaine public, et, comme cela a été rappelé, de rendre toujours plus effective la libre administration des collectivités locales. Celles-ci pourront ainsi dégager des moyens budgétaires importants. Selon le rapport annuel de la Cour des comptes de 2013, « il ressort des constats effectués qu’une meilleure gestion du patrimoine immobilier peut donner aux collectivités des marges de manoeuvre budgétaires non négligeables dans un cadre financier durablement contraint. »
Il est vrai que les règles du domaine public sont particulières, notamment en matière d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité, deux principes qui visaient, à l’origine, à protéger le domaine royal. Cette proposition de loi permet de faciliter les opérations en la matière : il en va de la bonne gestion du patrimoine des collectivités territoriales.
En effet, le droit actuel prévoit que les biens, pour être déclassés puis cédés, ne puissent plus être affectés à un service public. Cela peut se traduire par le maintien de biens inutilisés dans le patrimoine des collectivités pendant des périodes parfois longues. Le produit de la vente de ces biens n’est alors pas disponible pour financer la construction de nouveaux bâtiments destinés au transfert des services, puisque ces bâtiments doivent être disponibles avant la désaffectation afin d’assurer la continuité du service public.
Par ailleurs, nous avons souhaité encadrer ce dispositif dérogatoire pour éviter certaines difficultés, notamment en motivant la décision de déclassement, et ainsi protéger les collectivités car le risque financier est grand. Je sais, madame la secrétaire d’État, que vous y êtes sensible.
Une opération de déclassement ou de désaffectation est en effet susceptible de faire l’objet de recours et de difficultés, qui peuvent conduire à son abandon. Aussi, les conditions de résolution de la vente devraient obligatoirement être connues lors de la signature du contrat. Il est donc nécessaire de garantir la commune qui lance une telle opération immobilière.
En ce sens, l’amendement déposé par Mme la rapporteure en commission des lois a beaucoup compté dans notre décision de soutenir cette proposition de loi. Il précisait que l’acte de vente d’un immeuble cédé dans le cadre d’une procédure de déclassement anticipé doit comporter une clause obligatoire indiquant les conséquences de la résolution de la vente en cas d’absence de désaffectation effective du bien dans les délais impartis.
Il prévoyait également que le recours à cette procédure par les collectivités locales, leurs groupements ou leurs établissements publics locaux serait conditionné à une décision motivée de leur assemblée délibérante.
C’est avec le même objectif que nous proposons deux amendements. Le premier tend à ouvrir aux collectivités territoriales un nouveau cas de provisionnement pour risque, qui couvrirait uniquement le montant des pénalités inscrites dans la clause résolutoire de l’acte de vente. Le deuxième, toujours pour tenir compte du risque financier pris par la collectivité locale, vise à permettre à l’organe délibérant de se prononcer sur le projet de cession en tenant compte de l’éventuel aléa. Une étude d’impact pluriannuelle permettra de mettre en perspective, à court et moyen terme, l’ensemble des avantages et éventuels inconvénients liés à l’opération envisagée. Cela garantirait la faisabilité du projet, tout en permettant à l’organe délibérant de se prononcer au vu de l’impact attendu sur les finances locales de la collectivité. Je remercie la rapporteure d’avoir donné un avis favorable sur ces deux amendements.
Pour conclure, nous serons favorables à la proposition de loi. La disposition qu’elle contient figure d’ailleurs à l’article 15 du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dit « Sapin II », via un projet d’ordonnance qui va dans le même sens ; mais, dans un souci de cohérence, nous souhaitons utiliser plutôt le véhicule législatif, plus respectueux du Parlement et plus rapide. C’est pourquoi nous voterons ce texte.
La parole est à Mme Françoise Descamps-Crosnier, dernière oratrice inscrite.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, chers collègues, la proposition de loi présentée par notre collègue Sophie Rohfritsch qui est soumise aujourd’hui à notre examen vise à étendre aux collectivités territoriales le mécanisme de déclassement anticipé dont bénéficient aujourd’hui l’État, ses établissements publics et les établissements publics de santé. Il me semble, en tant que membre de la commission des lois et du groupe d’études de l’Assemblée nationale sur le foncier, que ce texte répond à un critère d’utilité et va dans le bon sens, et cela pour trois raisons.
D’abord, parce que, sur le principe même, il ne paraît pas juste que les collectivités territoriales soient les seuls acteurs publics exclus du mécanisme de déclassement prévu à l’article L. 2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques. Elles ne sont pas moins responsables que l’État dans leur manière de gérer leur patrimoine, et il me paraît pour le moins inutile d’entretenir une méfiance a priori. Comme le soulignait notre collègue Giacobbi, elles sont majeures !
Ensuite, en raison du poids pris, ces dernières décennies et à chaque vague décentralisatrice, par le patrimoine des collectivités territoriales – plus de 1 300 milliards d’euros d’après une étude de la Banque postale parue en 2015 –, il est d’intérêt général que ce patrimoine public soit lui aussi soumis à un système de gestion plus dynamique qu’il ne l’est actuellement. Cette nécessité est encore plus prégnante avec la réforme territoriale engagée ces dernières années au travers de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », et la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », qui entraînent les collectivités vers d’importantes évolutions institutionnelles, des métropoles aux régions fusionnées en passant par les grandes intercommunalités de la grande couronne francilienne ou encore par les communes nouvelles.
Les réorganisations territoriales induites nécessitent une action publique à la fois réactive et efficace : le patrimoine ne doit pas être un facteur de blocage ou de ralentissement susceptible de pénaliser le bon déploiement et l’adaptation des services publics et des services au public. Les élus locaux connaissent actuellement des difficultés de cet ordre et il n’est pas surprenant que leurs associations représentatives soutiennent la démarche engagée par la proposition de loi.
Comment comprendre, en effet, que nos collectivités ne soient pas autorisées à céder des immeubles avant que les services publics présents n’en soient partis et ne puissent utiliser le produit de la vente pour financer la construction de nouveaux bâtiments ayant vocation à les accueillir ?
En outre, la rapporteure l’a souligné dans son rapport, la Cour des comptes appelait également de ses voeux une telle évolution dans son rapport annuel de 2013.
Je vois enfin une dernière raison pour appuyer cette proposition de loi : il s’agit de la méthode.
Notre collègue Hugues Fourage l’avait déjà souligné lors de l’examen du texte en commission, et il vient de le répéter : ce texte va dans le même sens que ce qui est proposé à l’article 15 du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, que nous aurons bientôt à examiner. Seule difficulté : cet article prévoit de mettre en oeuvre la mesure par l’intermédiaire d’une ordonnance ; or il paraît toujours préférable, quand c’est possible, de nous laisser assumer pleinement notre rôle de législateur.
Le projet de loi veut lancer une véritable modernisation du droit domanial ; il conviendra d’accompagner cette initiative bienvenue : je rappelle que notre code général de la propriété des personnes publiques a dix ans cette année.
J’en reviens à la proposition de loi. Si la mesure proposée va globalement dans le bon sens, il serait toutefois utile de l’encadrer de garanties, puisqu’il s’agit, rappelons-le, d’un mécanisme dérogatoire. S’agissant de patrimoine public, il convient qu’en matière de garanties, le cadre soit à la fois simple et exigeant : des exemples par le passé nous ont appris à ne pas légiférer trop légèrement sur ce type de sujets – l’évocation de la loi dite « littoral » devrait suffire à illustrer mon propos.
Aussi l’amendement proposé en commission des lois par la rapporteure allait-il, de ce point de vue, dans le bon sens. Je pense tout particulièrement à l’obligation d’une délibération motivée de l’assemblée territoriale.
Deux nouveaux amendements déposés par notre groupe, à l’initiative de notre collègue Hugues Fourage, se proposent de rehausser utilement le niveau de garanties. Ils permettront à la fois d’améliorer le niveau d’information des élus qui auront à se prononcer sur une délibération organisant un déclassement anticipé et de diminuer le risque induit par celui-ci en mettant en place un provisionnement pour risque.
En adoptant cette proposition de loi, et sous réserve de la suite de son cheminement parlementaire, nous enverrons un message de confiance aux collectivités territoriales : elles sont capables de gérer leur patrimoine immobilier.
Il existe bien sûr toujours le risque que cette procédure soit utilisée au profit de fins moins honorables que l’intérêt public. Les garde-fous existants – contrôle de légalité, contrôle citoyen, recours contentieux le cas échéant – auront à jouer pleinement leur rôle. Je ne suis pas partisane de l’alignement de la règle sur le plus petit dénominateur commun ; cette approche pénalise les bons élèves, qui trouveront dans ce que nous mettons en place un outil de gestion dans l’intérêt du public.
Vous l’aurez compris, je voterai, comme mes collègues, cette proposition de loi dans un esprit d’ouverture aux bonnes idées qui viennent de l’opposition.
Les travaux d’aujourd’hui démontrent que notre majorité continue à placer l’intérêt général au-dessus de toute autre considération. Je souhaiterais que l’opposition puisse en faire autant sur certains autres textes qui sont soumis à notre assemblée et qui mériteraient mieux que des postures !
Rires sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Sourires.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, l’article unique de la proposition de loi.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, j’aimerais ajouter aux arguments déjà évoqués le fait que Mme Rohfritsch, notre rapporteure, est aussi députée-maire : députée-maire de Lampertheim, dans le Bas-Rhin. Si elle n’avait pas disposé de cette expérience d’élue locale conjointement à celle de législatrice, je ne suis pas sûr qu’une telle idée, qui peut paraître technique, eût pu être émise dans cet hémicycle.
C’est l’exercice du mandat local qui permet au législateur d’adapter la loi sur certains sujets qui relèvent de l’exercice quotidien des élus locaux. D’où l’importance qu’il y ait aussi des députés-maires dans l’hémicycle.
Malheureusement, il s’agit d’une espèce en voie de disparition : dans quelques mois, il n’y en aura plus aucun.
Je ne suis pas sûr que ce genre de proposition de loi ressurgira lorsqu’il n’y aura plus que des députés n’ayant, pour beaucoup d’entre eux, aucune expérience de l’exercice d’un mandat local.
La diversité, c’est bien – y compris dans l’hémicycle, avec des députés qui ne sont que députés et des députés qui sont aussi maires ! Merci donc à la députée-maire de Lampertheim de nous proposer cette disposition technique qui facilitera la vie à beaucoup de collègues élus locaux.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains et sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Nous en venons aux amendements.
La parole est à M. Hugues Fourage, pour soutenir l’amendement no 1 .
Je veux signaler à mon collègue Chrétien qu’un député va sur le terrain et y rencontre les maires et les responsables des collectivités locales. C’est dans le dialogue au quotidien qu’il gagne cette capacité à comprendre les enjeux des collectivités locales, notamment ceux relatifs aux finances locales et aux garanties.
L’amendement no 1 vise à mettre en place un dispositif de provisionnement pour risque qui couvrirait le montant des pénalités inscrites dans la clause résolutoire de l’acte de vente.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, je suis tout à fait favorable à cet amendement qui précise utilement la façon dont les collectivités pourraient concrètement prévoir la provision qu’elles auraient à verser en cas de résolution de la vente. Qui plus est, il fait suite aux discussions que nous avons eues ensemble.
L’amendement précise le dispositif, mais il ne le rend pas pour autant plus complexe : c’est encore mieux.
Comme je l’ai moi aussi déjà indiqué, le Gouvernement est favorable à l’amendement présenté par le député Fourage, notamment parce qu’il permettra d’encadrer le dispositif et parce que cet encadrement sera raisonnable, puisque le provisionnement ne couvrira que le montant des pénalités prévues en cas d’annulation de la vente dans un délai maximal de trois ans, et non le montant du bien, accru des pénalités. Le Gouvernement souscrit totalement à cet amendement.
L’amendement no 1 est adopté.
Cet amendement tend à prévoir une étude d’impact pluriannuelle tenant compte de l’aléa. Il s’agit en effet d’un dispositif dérogatoire ; or plusieurs collègues ont noté que l’on pourrait vendre le bien quelques mois avant une élection. Il importe donc que tout le monde dispose de l’ensemble des informations, de façon à bien comprendre les enjeux financiers de l’opération pour la collectivité. Une étude d’impact pluriannuelle permettrait de mettre celle-ci en perspective et d’en expliciter les attendus.
Tout à fait favorable. La pluriannualité attachée à la décision qui sera désormais motivée de l’organe délibérant de la collectivité est bienvenue et n’apportera aucune complexité supplémentaire, bien au contraire : les délibérations étant transparentes et publiques, cela renforcera la lisibilité du dispositif.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui vise à éclairer, aussi complètement que possible, l’organe délibérant sur un dispositif qui est loin d’être anecdotique et peut présenter des enjeux financiers importants. Nous y sommes tous attachés en tant qu’élus locaux, monsieur Chrétien, et le Gouvernement est très favorable à la transparence des informations transmises sur le dispositif qui sera mis en oeuvre.
Il est vrai que vous êtes aussi une élue locale, madame la secrétaire d’État : vous cumulez une fonction et un mandat, ce qui montre qu’il est important d’avoir les deux visions.
Je mettrai pour ma part un bémol sur cet amendement. Les études d’impact pluriannuelles me laissent toujours perplexe : cela marche bien quand les collectivités sont importantes et qu’il existe des services fonciers, des services des finances ou des services de la compatibilité susceptibles de les rédiger facilement ; en revanche, s’il s’agit d’une petite commune qui veut vendre un bien très mineur, que feront le maire et le secrétaire de mairie si on leur demande une étude d’impact pluriannuelle ? Eh bien, ils appelleront la préfecture pour demander à quoi cela ressemble et ce qu’ils doivent y mettre !
J’aurais tendance à penser que si l’on avait fixé un seuil de valeur ou de population pour la collectivité, cela aurait permis de mieux coller au contexte et de distinguer les petites collectivités et les petites transactions des grandes collectivités et des grosses transactions.
Ce n’est là qu’une simple remarque, qui me permet de promouvoir l’idée si souvent exprimée par Pierre Morel-A-L’Huisser d’adaptabilité de la norme au contexte local.
L’amendement no 2 est adopté.
L’article unique modifié est adopté, ainsi que l’ensemble de la proposition de loi.
L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi organique, adoptée par le Sénat, relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes (nos 3477, 3689) et de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes (nos 3476, 3693).
La Conférence des présidents a décidé que ces textes donneraient lieu à une discussion générale commune.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et de la simplification.
Madame la présidente, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des lois, mesdames et messieurs les députés, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi organique et la proposition de loi qui, déposées par les sénateurs Marie-Hélène des Esgaulx, Jean-Léonce Dupont et Jacques Mézard, visent à instaurer un statut unique pour les autorités administratives indépendantes – AAI – et les autorités publiques indépendantes – API.
Nous le savons tous, ces textes sont très attendus, et nous savons aussi qu’ils ne sont pas moins complexes. Ils font suite à plusieurs rapports parlementaires qui s’interrogeaient sur ces autorités. Une commission d’enquête a été créée au Sénat, à laquelle j’ai moi-même eu l’honneur de participer. Ces travaux, précieux, soulevaient des questions importantes, notamment sur les garanties offertes en matière de déontologie, d’indépendance ou de rationalisation des modes de fonctionnement de ces autorités : autant de questions sur lesquelles le Gouvernement avait d’ores et déjà engagé un travail depuis plusieurs années : je pense, par exemple, au processus de mise en commun de certaines fonctions- support des services du Premier ministre et des AAI, afin de réduire les coûts et de développer un mode de fonctionnement collaboratif entre les services.
En matière de transparence, la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique dispose que « les membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes » adressent une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d’intérêts.
En matière de parité, l’ordonnance du 31 juillet 2015 consacre l’égal accès des femmes et des hommes au sein des AAI et des API.
Enfin, plus récemment, la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires vient préciser de nombreux éléments s’appliquant aux personnels des AAI.
Ce sont ainsi de nombreuses dispositions qui sont venues s’appliquer aux AAI et API, instituant des règles qui, pour la plupart d’entre elles, sont communes. Le Sénat a souhaité aller au-delà et s’emparer pleinement de la création d’un statut commun, faisant valoir le nombre et la diversité des AAI et appelant à une clarification.
En effet, depuis la Commission nationale de l’informatique et des libertés – CNIL –, première AAI créée en 1978, bien d’autres l’ont été, dans des domaines divers et avec des finalités tout aussi diverses. Cependant, je veux immédiatement couper court à certains discours très à charge contre les AAI : celles-ci ont toujours été créées dans le but de répondre au mieux à des problématiques d’intérêt général et à de nécessaires régulations ; il est important de ne pas l’oublier.
Nous cherchons beaucoup à simplifier, et c’est mon rôle, au sein de ce gouvernement, d’oeuvrer en ce sens. Cependant, le Président de la République lui-même le répète souvent, cette simplification ne doit jamais se faire au détriment ni de la santé, ni de l’environnement, ni du débat public. Nombre des autorités dont nous parlons aujourd’hui sont précisément les garantes de ces grands principes fondateurs, et il est de notre rôle de les conforter dans leurs missions.
Créer un statut commun pour l’ensemble des AAI est donc un débat ancien, dont les sénateurs ont voulu se saisir. Je veux d’ailleurs souligner, au-delà de nos divergences de vue, la qualité du travail réalisé tant par les sénateurs que par les députés, notamment par les rapporteurs des deux textes : merci, monsieur Warsmann, d’autant que la tâche n’était pas simple.
Le texte présenté au Sénat a largement évolué. Les amendements sénatoriaux, puis le travail des députés, ont contribué à modifier, préciser, voire réévaluer certaines dispositions, ce dont je vous remercie sincèrement.
Dans sa version initiale, le texte n’avait pu recevoir l’assentiment du Gouvernement : il n’allait pas dans le sens du travail gouvernemental très important engagé sur les AAI, et pouvait même présenter des dispositions allant à l’encontre de décisions récentes prises par le législateur ou le Gouvernement, ou soulever de réelles questions de constitutionnalité.
Je ne puis que constater avec la plus grande satisfaction que le texte que nous examinons aujourd’hui a pris en compte nombre de remarques formulées par le Gouvernement lors de l’examen au Sénat, certaines dispositions qui apparaissaient problématiques ayant été révisées.
Ainsi, le Gouvernement a pu revoir sa position envers le texte et, même si nous proposerons encore des dispositions susceptibles de l’améliorer à nos yeux, nous n’y sommes plus défavorables. Les évolutions sont nombreuses et importantes, sur les règles d’organisation, le statut des membres, les règles d’incompatibilité, de conflits d’intérêts, les règles de transparence, la durée des mandats ou encore le nombre d’autorités dont la nomination du président incombe au Président de la République.
Certaines évolutions nous semblent encore indispensables, et justifient les amendements que je présenterai au nom du Gouvernement. L’équilibre est parfois complexe à trouver, comme nous l’avions souligné au Sénat, et nécessite une souplesse que nous proposerons d’introduire. Ce sera le cas, par exemple, d’un amendement qui vise à maintenir un régime strict de non-renouvellement du mandat des membres pour quelques autorités, telles que le Conseil supérieur de l’audiovisuel – CSA – ou la Commission nationale du secret de la défense nationale.
Le débat portera également sur l’opportunité d’inscrire ou non des autorités en qualité d’AAI. Si la liste des AAI recueille globalement l’accord du législateur et du Gouvernement, le statut de plusieurs d’entre elles reste à débattre. Tel sera le sens de plusieurs amendements que je présenterai.
Enfin, certains articles ou amendements nous semblent ajouter une complexité inutile, qui par conséquent nuirait au texte et au fonctionnement des AAI et API.
Je ne serai pas plus long : les explications plus précises viendront avec les amendements. Avant de conclure, je vous remercie sincèrement de votre disponibilité à cette heure tardive,…
Sourires.
…que vous veniez de Corse, de Vesoul, de Sedan ou du Lot.
En effet, je n’aurais jamais dû commencer cette énumération : bien fait pour moi !
Sourires.
Merci sincèrement de votre présence, d’intérêt général et amicale.
L’heure n’est pas tardive, monsieur le secrétaire d’État : pour notre assemblée, c’est presque le matin…
Sourires.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Merci pour votre intervention et pour vos mots sympathiques, monsieur le secrétaire d’État.
Nous sommes saisis de deux propositions de loi du Sénat sur les autorités administratives et publiques indépendantes. Je veux d’abord saluer le travail du Sénat et de la commission d’enquête, comme le vote à l’unanimité du 4 février et le texte qui nous est soumis.
La première volonté du Sénat était de donner une compétence unique au législateur dans la création de toute autorité administrative indépendante : c’est une bonne idée. Dans le passé, ces autorités étaient de fait créées par le législateur ou reconnues a posteriori, parfois par la jurisprudence ou la doctrine administrative. Conférer le monopole au Parlement me semblerait donc de bien meilleure gestion.
D’autre part, le Sénat a souhaité créer un statut général des AAI et API. En commission, je me suis toutefois opposé à la mention selon laquelle les dispositions de ce statut s’appliqueraient « sauf dispositions contraires ». Cette expression ne ferait en effet qu’introduire de la complexité, sans rien simplifier.
Un citoyen qui, demain, consulterait les textes y verrait défini le statut général ; mais rien ne serait acquis pour autant, puisqu’il lui faudrait encore vérifier que la loi spéciale ne comporte pas de « dispositions contraires ». Nous serons d’accord sur beaucoup de vos amendements, monsieur le secrétaire d’État, mais pas sur les deux qui tendent à rétablir la mention « sauf dispositions contraires ». Quitte à élaguer le statut général, autant qu’il s’applique à tous : c’est précisément pour éviter la mention « sauf dispositions contraires » que j’ai fait mienne l’idée, défendue à votre initiative, de rejeter le mandat unique de six ans au profit d’une fourchette comprise entre trois et six ans.
Troisième point : les incompatibilités. Nous avons, mes chers collègues, un équilibre à trouver entre, d’une part, l’indépendance des membres et des autorités elles-mêmes, et, de l’autre, leurs compétences. Nous avons d’ailleurs avancé en ce domaine. Je suis personnellement favorable au déport et, bien évidemment, à la lutte contre les conflits d’intérêts ; mais nous ne pouvons voter des dispositions qui écarteraient toutes les personnes compétentes. Si nous acceptions en l’état le texte du Sénat, toute personne ayant des compétences et des engagements professionnels dans un secteur donné ne pourrait plus être membre de l’autorité qui s’y rapporte.
L’exemple le plus typique est celui de l’Autorité de la concurrence, dont la compétence peut à coup sûr être saluée puisque, si elle coûte environ 20 millions d’euros par an, elle en rapporte 1 milliard à notre pays. L’adoption du texte du Sénat conduirait à écarter immédiatement les cinq membres issus du secteur privé – au sein de Veolia ou Essilor, par exemple –, ainsi que le président de cette autorité. Aussi je vous proposerai des dispositions visant à faciliter le recrutement, tout en évitant l’absurdité qui le limiterait aux retraités ou aux fonctionnaires – le texte du Sénat empêcherait même le recrutement de membres issus du Conseil d’État, de la Cour des comptes ou de juridictions.
Telles sont les dispositions que je vous proposerai. Nous pouvons mettre en place, par notre vote, un statut des autorités administratives indépendantes tout en ménageant les caractéristiques très différentes des unes et des autres. Je vous remercie donc par avance du soutien que vous apporterez à plusieurs des amendements qui vous seront soumis.
Dans la discussion générale, la parole est à M. Pierre Morel-A-L’Huissier.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les autorités administratives indépendantes font partie de notre paysage institutionnel depuis la création de la CNIL en 1978, et leur importance, tant du point de vue de leur quantité que de leurs prérogatives, n’a cessé de croître.
Il existe aujourd’hui plus de quarante AAI, qui forment une mosaïque aux contours flous et régissent des pans entiers des politiques publiques, dans des secteurs aussi divers que les marchés financiers, le numérique, les données personnelles, la bioéthique ou l’audiovisuel.
Il est assez étonnant, au regard du rôle prépondérant joué par ces autorités dans l’administration publique, que depuis trente ans, aucun corpus juridique et déontologique commun ne soit venu clarifier le cadre de leur existence, d’autant plus que, dès 2001, le Conseil d’État avait alerté, dans son rapport public, sur les motifs parfois confus de la création de certaines d’entre elles.
Ce glissement a été favorisé par plusieurs lacunes, à commencer par l’absence d’un statut général qui s’appliquerait à toutes les autorités administratives indépendantes et fixerait des règles précises pour leur création. Actuellement, si les AAI sont souvent créées ex nihilo par la loi, elles sont parfois reconnues comme telles a posteriori par le juge administratif, le juge constitutionnel ou même de la doctrine. Ce n’est pas pensable dans un État de droit comme le nôtre.
Autre lacune : l’absence de règles de déontologie communes à toutes les AAI. Il n’y a aucune définition claire des incompatibilités qu’implique l’appartenance à ces entités, alors que la raison d’être de plusieurs d’entre elles consiste dans la régulation d’un secteur donné de la société, sur lequel leur autorité est non négligeable.
Dernière lacune : l’absence de règles de fonctionnement des AAI. Cette carence avait notamment été pointée du doigt par la commission d’enquête sur les autorités administratives indépendantes, dont le rapport s’intitule : « Un État dans l’État : canaliser la prolifération des autorités administratives indépendantes pour mieux les contrôler ». Ce sont les conclusions de cette commission d’enquête qui ont conduit au dépôt des deux propositions de loi au Sénat. Une clarification des règles de gestion des finances et du personnel ne serait en effet pas inutile.
Les deux textes qui nous sont soumis visent justement à combler ces lacunes. Tels qu’ils sont issus du Sénat, ils visent en effet à déterminer un statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, statut qui, sauf volonté contraire expresse du législateur – c’est tout le problème : Jean-Luc Warsmann vient de le dire –, s’appliquerait à l’ensemble d’entre elles, et à en dresser une liste limitative.
Saluant cette démarche de rationalisation, le groupe Les Républicains de l’Assemblée nationale a souhaité inscrire ces propositions de loi dans sa niche du 28 avril, sans pour autant s’interdire de formuler un certain nombre de propositions ou de suggérer des modifications.
La proposition de loi organique, en premier lieu, entend réserver le régime de création des autorités administratives et publiques indépendantes au législateur, renforcer le contrôle des assemblées sur ces autorités et établir des incompatibilités entre le fait d’en être membre et l’exercice de certaines fonctions.
Le principe de création des AAI exclusivement par la voie législative se justifie amplement par la nature administrative de ces autorités : dès lors, leur indépendance ne peut être garantie si elles sont créées par le pouvoir réglementaire. Afin de respecter le principe démocratique de séparation des pouvoirs, il est indispensable que le pouvoir réglementaire ne soit pas seul décisionnaire et que le consentement du Parlement soit exigé.
Par ailleurs, il est essentiel que toute autorité administrative indépendante soit soumise à un contrôle rapproché du Parlement : dans la mesure où ces autorités ne procèdent pas du suffrage universel, ce contrôle par la représentation nationale est la condition sine qua non de leur légitimité démocratique. Ce contrôle est d’autant plus important que certaines autorités disposent d’un pouvoir normatif considérable, en tant que régulateurs sectoriels, et d’un pouvoir parajuridictionnel à travers la possibilité d’adresser des sanctions. Leur indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif doit donc être étroitement surveillée.
Quant à la proposition de loi ordinaire, elle participe du même souci de mise en oeuvre d’un statut général et d’un véritable contrôle par la représentation nationale. Il s’agit plus précisément de clarifier les conditions d’exercice du mandat par les membres de ces autorités et de définir un cadre déontologique impliquant notamment un régime contraignant d’incompatibilités. De plus, ce texte entend clarifier les règles de fonctionnement de ces entités, notamment en matière de finances et de gestion du personnel. Il s’agit donc aussi bien de contrôler plus fermement les structures existantes que de valoriser davantage leurs actions respectives, en leur donnant plus de visibilité et de lisibilité auprès de nos concitoyens.
À l’issue de la première lecture au Sénat et de l’examen de ces textes par la commission des lois de l’Assemblée nationale, je me félicite de l’équilibre trouvé.
S’agissant du statut commun, je me réjouis de la suppression opportune du fameux « sauf dispositions contraires ».
Je veux saluer une nouvelle fois cette initiative de Jean-Luc Warsmann et, plus globalement, l’action qu’il a menée depuis des années, notamment à la commission des lois. Ces trois mots, « sauf dispositions contraires », avaient pour conséquence de nous faire passer à côté de l’objectif principal affiché par la proposition de loi qu’est l’harmonisation du statut des AAI.
Je me félicite également de l’adoption des dispositions relatives aux incompatibilités des membres des AAI avec d’autres fonctions, à leurs nouvelles obligations déclaratives auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique – il est normal que les élus soient contrôlés, mais il faudrait aussi que certains hauts fonctionnaires le soient, nous pourrions avoir quelques surprises ! –, ou encore au visa obligatoire des déclarations d’intérêts par les autres membres, car nous tenons à ce que tout le monde soit impliqué.
Lors de la séance publique, et sans doute au cours de la navette parlementaire, nous avons encore des marges de progression, que ce soit sur les critères stricts qui doivent conduire au classement ou non d’une institution en AAI, ou sur la reconnaissance législative plus expresse de la catégorie des « institutions ou organismes indépendants ». Qu’ils sortent de la catégorie des AAI ou qu’ils n’y rentrent pas, ces derniers doivent recevoir des garanties suffisantes quant à leur statut.
Pour conclure, je tiens à saluer le travail accompli par le rapporteur Warsmann – j’y tiens ! –, par le président de la commission des lois et par les services de cette commission. Pour une fois, je saluerai également l’activité du groupe socialiste !
Sourires.
Nous avançons aujourd’hui en bonne intelligence sur ce sujet trop souvent laissé de côté.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons, à l’initiative du Sénat, ces deux propositions de loi, précédées du rapport de la commission d’enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l’organisation, de l’activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes.
Avec un rythme moyen de création de plus d’une AAI par an, ce rapport faisait état de leur prolifération croissante et de l’incertitude de leur périmètre. En effet, plus de trois décennies après l’apparition de cette nouvelle catégorie juridique, le mouvement de création et de renforcement des compétences des AAI semble incontrôlé. Nous comptons désormais quarante-deux autorités, aux caractéristiques très éloignées les unes des autres. Ces autorités fonctionnent sans corpus juridique ni déontologique commun, et parfois même sans avoir été qualifiées comme telles par un texte législatif. Il n’existe aucune liste officielle de ces autorités. Ainsi, plusieurs AAI sont actuellement reconnues du seul fait d’une mention au rapport public du Conseil d’État de 2001, et consacrées par la liste tenue sur le site Légifrance.
Pourtant, ces « objets juridiques non identifiés », qualifiés ainsi par le doyen Patrice Gélard, cité dans le rapport de la commission d’enquête, ont pris une place considérable dans le fonctionnement des institutions de la République, en marge d’un véritable contrôle démocratique. L’intervention du législateur était donc nécessaire, en poursuivant l’objectif d’une meilleure lisibilité des institutions.
Il était également primordial de rationaliser et de coordonner ces autorités, dont les compétences peuvent parfois être extrêmement similaires. Par exemple, quatre autorités interviennent pour la seule élection du président de la République ! La situation actuelle peut donc conduire à des conflits de compétences qui ne sont pas souhaitables, d’où la nécessité d’améliorer le pilotage entre les autorités.
Par ailleurs, les autorités administratives indépendantes ont parfois longtemps échappé au contrôle parlementaire.
Bref, ces deux propositions de loi soumises à notre examen prévoient de répondre à un certain nombre de ces problématiques. Parmi leurs principales dispositions, on peut citer l’attribution d’une compétence exclusive au législateur pour instituer des AAI et API, ainsi que l’inscription en annexe d’une liste officielle de vingt-six autorités. La proposition de loi fixe également le statut général des autorités administratives indépendantes en consacrant les garanties d’indépendance de ces autorités et de leurs membres.
En contrepartie des responsabilités exercées par ces autorités, un corpus déontologique exigeant mais nécessaire est institué, avec un régime d’incompatibilités comparable à celui des parlementaires, ce qui nous paraît être un gage de saine administration. Par exemple, un membre d’une API ou d’une AAI ne pourra plus exercer de mandat électif local durant son mandat. Notre commission a limité cette incompatibilité à la seule présidence de l’organe délibérant concerné : l’expérience d’élu local peut en effet être précieuse au sein d’une autorité administrative indépendante.
Les fonctions exercées à temps plein au sein d’une AAI ou d’une API seraient également incompatibles avec l’exercice d’une activité professionnelle ou d’un autre emploi public. De telles mesures garantissent l’indépendance des organismes et de leurs membres.
Les propositions de loi renforcent également le contrôle parlementaire de ces autorités, en soumettant la nomination de leur président à l’avis des commissions parlementaires selon la procédure prévue par la Constitution. Nous ne pouvons que soutenir ces dispositions !
Ces mesures sont, de fait, étendues à l’ensemble des autorités exerçant en outre-mer. Vous le savez, les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie sont compétentes pour créer leurs propres autorités, qui sont elles-mêmes organisées par des lois locales – c’est en tout cas ce qui se passe en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. Ces lois locales prévoient des régimes d’incompatibilités bien plus stricts que ceux que nous nous apprêtons à adopter. Je peux vous annoncer que la Polynésie proposera, dans le cadre d’une prochaine révision statutaire, un élargissement des champs d’intervention de ces autorités indépendantes locales, tout en s’inspirant des dernières évolutions contenues dans les présentes propositions de loi.
Nous saluons l’adoption de ces deux textes, qui apportent une réponse à la confusion existante autour de la notion d’AAI. Ils permettent en outre une rationalisation de l’action publique, primordiale compte tenu des objectifs de baisse des dépenses publiques et de modernisation de l’administration.
Par ailleurs, ces propositions de loi augmenteront la lisibilité pour le citoyen, grâce, notamment, à la fameuse liste qui sera annexée et qui répond à la nécessité de bâtir un statut général des autorités administratives indépendantes.
Par son travail, le Sénat a bien entendu amélioré ces textes. Quant à notre rapporteur à l’Assemblée nationale, il les a finalisés, ce qui n’était pas chose aisée. Nous tenons à nous associer aux félicitations déjà adressées au rapporteur et à tous ceux qui ont contribué à la finalisation de ces textes.
Oui, la commission des lois a notamment permis de simplifier et de compléter le dispositif de suspension des fonctions de membre du collège d’une AAI ou d’une API. Elle a précisé les conditions dans lesquelles le mandat d’un membre du collège peut être définitivement interrompu. Elle a également introduit davantage de souplesse, en autorisant par exemple un renouvellement du mandat des membres, alors que le texte initial et celui adopté par le Sénat prévoyaient qu’il ne soit pas renouvelable.
En outre, l’examen de ces textes en commission a permis de répondre à deux de nos préoccupations, s’agissant du médiateur national de l’énergie et de la Commission nationale du débat public. Je tenais à vous en remercier.
Si la loi ne mentionne pas explicitement ce statut, le médiateur national de l’énergie est doté de tous les attributs de l’autorité administrative indépendante, par son autonomie financière, par son indépendance et par sa nature administrative. On aurait pu craindre que la proposition de loi ne rapproche cette autorité de la Commission de régulation de l’énergie, la CRE ; or le maintien du statut du médiateur est essentiel, au regard de ses missions dans un secteur économique fortement concurrentiel, celui de l’énergie, qui reste un service de première nécessité pour les consommateurs. Nous nous réjouissons donc que le médiateur national de l’énergie figure en annexe de cette proposition de loi.
Nous saluons également la réintégration de la Commission nationale du débat public – CNDP – dans la liste des AAI. À nos yeux, son retrait constituait une importante régression, alors que le statut d’AAI avait été accordé à cette autorité par le Parlement même, en février 2002, et inscrit dans le code de l’environnement. La loi Grenelle avait, par ailleurs, renforcé les missions de la CNDP et étendu sa composition, de même que le projet d’ordonnance établi dans le cadre du chantier ouvert par le Président de la République sur le dialogue environnemental. Au fil des années, la CNDP a acquis un statut d’indépendance nécessaire au vu de l’importance prise par ses décisions sur l’organisation de débats publics sur des projets d’aménagement aujourd’hui très contestés. Au regard des règles qui garantissent son indépendance, de son statut administratif et de son pouvoir d’influence, cette autorité répond aux critères déterminés par le Conseil d’État pour la qualification d’autorité administrative indépendante.
Je terminerai par un point qui touche plus particulièrement la Polynésie française. L’inscription du Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires – CIVEN – dans cette annexe, à l’initiative de notre rapporteur, constitue également une avancée.
Les décisions du comité ont, en effet, un impact important sur les droits des requérants susceptibles de recours. Cependant, je ne vous cache pas les vives inquiétudes des Polynésiens au sujet des résultats obtenus actuellement en matière d’indemnisation des victimes.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues : ces deux propositions de loi, améliorées en commission, sont nécessaires à l’édification d’un statut général des AAI. Le groupe UDI votera donc bien entendu en faveur de ces deux textes.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, je veux d’abord rappeler la genèse de ces propositions de loi, que notre rapporteur a rapidement évoquée. Deux textes ont été votés au Sénat, à l’initiative du sénateur Jacques Mézard qui est, comme chacun sait, le président du groupe RDSE – ce groupe est, en mieux évidemment, l’alter ego du groupe RRDP de notre assemblée, auquel j’ai l’honneur d’appartenir. Ces textes, adoptés par le Sénat, avaient d’ailleurs été déposés en termes identiques sur le bureau de l’Assemblée nationale par mon excellent collègue et ami Joël Giraud. J’ai donc rendu à Mézard ce qui lui appartient !
Sourires.
Le Sénat, et en particulier le sénateur Mézard, auraient préféré voir adopter ces textes dans une version plus radicale, si je puis m’exprimer ainsi,
Sourires
que celle qui nous est présentée ici. Il ne s’agissait évidemment pas de fonder de telles lois sur un principe, d’ailleurs remarquable pour son époque, mais sans doute un peu excessif, énoncé, dit-on, par l’ecclésiastique qui accompagnait Simon de Montfort au dernier épisode d’une terrible guerre de religion et qui aurait dit : « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens ! »
Sourires.
Le rapporteur a d’ailleurs critiqué, sans aller jusqu’à cette citation historique, la radicalité des textes issus du Sénat. M. le secrétaire d’État étant lui-même un ancien sénateur, il sait ce qu’il en est. Ce principe aurait probablement été excessif – en tout cas, on nous a donné quelques exemples assez probants de défauts qui ont été précisés par le rapporteur.
D’où nous vient ce prurit récent, mais assez violent, de création dans notre beau pays d’entités administratives sui generis, d’autorités publiques indépendantes de toute sorte et de tout poil, qui concernent à peu près tous les sujets, à l’exception sans doute – mais je n’en suis pas sûr – de l’élevage bovin et de l’envoi d’objets interstellaires ?
Sourires.
Pour une fois, cette pathologie administrative, cette épidémie de la prolifération administrative est d’origine non pas française mais plutôt anglo-saxonne.
Sourires.
Les États-Unis d’Amérique, par exemple, ont compté jusqu’à une dizaine d’agences de renseignement, qui étaient tellement occupées à s’épier les unes les autres et à préserver leur pré carré qu’elles ont négligé de recouper certaines informations, qu’elles avaient par exemple en 2001. L’auraient-elles fait, chacun sait que l’on aurait probablement évité le 11 septembre de sinistre mémoire.
Aux États-Unis, ces autorités sont devenues parfois des États dans l’État, avec une légitimité très faible mais néanmoins une toxicité potentielle redoutable qui a fait parfois trembler les présidents des États-Unis, comme le FBI du temps du regretté Edgar Hoover.
Nous avons été touchés assez tard par l’épidémie mais, puisque nous n’étions pas immunisés, la maladie chez nous a progressé de manière relativement préoccupante d’année en année et, curieusement, ce pays qui a l’habitude de tout réglementer, qui a la manie du statut, qui donne un statut au nouveau-né avant même sa naissance, un statut à tout et même à ce qui n’existe pas encore ou n’existera peut-être jamais, n’a pas pensé donner un statut général à ces entités qui en avaient tout de même bien besoin.
Il ne s’agit pas bien entendu de méconnaître l’utilité d’un grand nombre de ces autorités, pour ne pas dire de leur quasi-totalité. Il importe, comme l’a dit fort bien notre rapporteur, de créer un équilibre général, de faire en sorte qu’on y reconnaisse quelque chose, qu’il n’y ait pas d’inégalités choquantes. Après tout, il n’y a pas de raison que les membres d’une autorité, même indépendante, ne soient pas soumis aux règles que nous nous sommes fixées pour notre patrimoine, notre action, nos incompatibilités, j’en passe et des meilleures.
Dans ces conditions, notre groupe ne saurait qu’être favorable à ce texte, même s’il est peut-être insuffisamment radical – mais nul ne saurait être parfait. Je le voterai naturellement. Il sera donc voté à l’unanimité de mon groupe, puisque je suis seul ici présent. Et peut-être même mon vote restera-t-il une simple intention, puisque je dois prendre l’avion bientôt pour rallier ma belle région – je n’ai pas dit mon pays ami. En tout cas, soyez assurés de notre soutien.
Réformer en profondeur les autorités administratives indépendantes et poser les bases d’un statut juridique commun sont des objectifs louables. Le travail du Sénat, par sa commission d’enquête parlementaire puis par la rédaction de ces deux propositions de loi, de manière consensuelle, est à saluer. Je tiens également à remercier M. le rapporteur Jean-Luc Warsmann pour la qualité du travail effectué et son écoute.
Les autorités indépendantes sont un vrai sujet politique, compte tenu du nombre des structures, de leur mode de mise en place, des 600 millions d’euros qu’elles coûtent par an, des problèmes de déontologie, des conflits d’intérêts. Les autorités administratives sont effectivement trop nombreuses. Elles accentuent un entre-soi sociologique qui freine tout changement – mêmes élus, mêmes grands corps, mêmes grandes écoles – en comptant trop peu de citoyennes et de citoyens venant d’horizons divers.
Dans les textes examinés aujourd’hui, le souci d’apporter une stabilité juridique, de renforcer la transparence, la déontologie et la lutte contre les conflits d’intérêts va dans le bon sens.
Le groupe écologiste dans son entier se réjouit que le médiateur national de l’énergie, le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires et la Commission nationale du débat public aient retrouvé leur statut mardi dernier en commission. L’indépendance et la liberté de parole du médiateur, qui oeuvre efficacement à la protection des consommateurs d’énergie, sont importantes, d’autant que nous venons d’étendre ses compétences dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Nous nous réjouissons aussi de la prise en compte de la très faible féminisation de la direction de toutes ces autorités administratives, aux trois quarts masculine. La parité votée en commission mettra enfin un terme à cet archaïsme inacceptable. J’ai noté que le Gouvernement proposait une nouvelle ordonnance pour les AAI oubliées. Cela nous semble bienvenu et va dans la logique de l’amendement que nous avons fait adopter en commission.
Nous devons aussi nous interroger sur la cohérence de notre analyse de l’administration avec le regard que nous portons sur la vie publique. Nous voulons limiter la durée des mandats exercés dans les autorités administratives et nous proposons que ces dernières connaissent un certain nombre d’évolutions. C’est bien, mais à quand l’application à la vie publique et politique de ce que nous préconisons pour l’administration, à quand la limitation à deux du nombre de mandats successifs dans le temps, que nous avons d’ores et déjà adoptée pour le Président de la République ? Il nous semble qu’il y a là une incohérence, qu’il reviendra au législateur de corriger en limitant le cumul des mandats électifs dans le temps.
Je me réjouis que ce soient les groupes Les Républicains, UDI-UC et RDSE du Sénat qui se soient préoccupés de cette limitation du cumul et de la transparence. J’espère que, lorsque ces sujets reviendront en débat sur le statut des parlementaires, ces sénateurs auront réalisé que ce qui est intolérable pour les membres des AAI l’est tout autant pour les parlementaires. Notre démocratie souffre gravement du manque de renouvellement, que ce soit dans les autorités indépendantes ou dans nos chambres parlementaires.
Au reste, nous nous étonnons de la position extrêmement rigide du Gouvernement qui par ailleurs veut simplifier le millefeuille des collectivités territoriales, supprimer des régions, réformer… Nous aimerions que ce zèle réformiste s’appliquât également aux autorités indépendantes. Je pense particulièrement à la HADOPI – Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet. Le candidat François Hollande avait promis de remplacer la loi Hadopi. C’est d’ailleurs l’une des promesses sur lesquelles je me suis engagée lors de mon élection en 2012. C’est pourquoi l’amendement no 8 prévoit une vraie réflexion sur le maintien ou non de cette haute autorité en 2022.
Nous porterons d’autres amendements en séance, principalement autour de trois sujets : la transparence, les liens entre les AAI et le Parlement, et la déontologie.
Sur la transparence, nous souhaitons garantir la publicité des avis des autorités administratives indépendantes sur les projets de loi. Au moment où la France vient de prendre la présidence du Partenariat pour un gouvernement ouvert, où le Gouvernement défend le projet de loi pour une République numérique au Sénat et où il vient de déposer un projet de loi sur la transparence qui vise à permettre une meilleure connaissance de l’empreinte législative, maintenir secret l’avis d’autorités indépendantes sur des textes législatifs n’est pas acceptable.
Sur les liens entre Parlement et AAI, il nous semble important que les Assemblées puissent faire appel aux autorités pour renforcer le contenu des propositions de loi.
Sur la déontologie, il nous semble important que chaque AAI ait ses règles propres, inscrites dans son règlement intérieur, et que tout manquement grave puisse être sanctionné. Nous souhaitons également modifier la loi sur la transparence de 2013 pour mettre fin à une difficulté sur le suivi du pantouflage par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.
En conclusion, nous reconnaissons l’avancée que permettront les textes dont nous débattons, nous saluons les questions légitimes qui sont soulevées, nous partageons un certain nombre de réponses qui y sont apportées. C’est la raison pour laquelle nous voterons probablement en faveur de ces textes – tout dépendra de la façon dont ils évolueront lors des débats.
Les deux propositions de loi relatives aux autorités administratives indépendantes et aux autorités publiques indépendantes qui sont soumises à notre examen sont deux textes importants, et ce à plusieurs titres.
Il est d’abord assez rare que nous soyons amenés à examiner des propositions de loi comportant un aussi grand nombre d’articles. Il nous faut saluer la qualité du travail mené par nos collègues sénateurs, et saluer aussi l’écoute, que nous avons appréciée, du rapporteur, Jean-Luc Warsmann.
Après la remise, le 28 octobre 2015, du rapport de la commission d’enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l’organisation, de l’activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes, les sénateurs Des Esgaulx, Dupont et Mézard ont fourni un travail de qualité avec ces deux propositions de loi, comportant six articles pour la proposition de loi organique et pas moins de cinquante pour la proposition de loi ordinaire.
On peut toutefois ne pas partager le jugement sans appel porté par le Sénat dans son rapport. Que ces entités poussent à s’interroger sur la manière dont nous concevons l’action publique, oui bien sûr. Qu’il faille remettre de l’ordre et de la clarté, bien évidemment. Considérer qu’elles formeraient un État dans l’État et entameraient de ce fait la crédibilité de l’action publique, il s’agit là d’un jugement que j’éviterai personnellement de porter.
Je crois, au contraire, que les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes ont pu, ces dernières années, apporter une crédibilité nouvelle à l’action publique en raison de leur indépendance vis-à-vis du pouvoir politique.
Ma propre expérience d’élue locale m’a conduite à apprécier la plus-value apportée par des organismes comme la Commission nationale du débat public par exemple. En associant les citoyens, en fondant leurs avis, leurs décisions, sur une approche qui se veut objective, voire technique et détachée de considérations d’ordre politique, ils ont pu faire évoluer nos concitoyens, ce qui n’aurait peut-être pas été possible si nous nous étions situés dans un rapport plus classique d’administration centrale à citoyens.
Les deux propositions de loi sont également importantes par leur ambition. Elles visent à mettre de l’ordre et à clarifier l’ovni juridique que représentent à bien des égards les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes. Cette catégorie juridique, qui a fait florès depuis plus de trente ans et l’invention de la première d’entre elles, la future CNIL, en 1978, est aujourd’hui source de confusion et de manque de lisibilité du droit. Le rapport du Sénat l’a amplement démontré. Aussi, je ne reviendrai pas sur les éléments qui fondent ce constat.
Les deux propositions de loi visent à instaurer un socle statutaire commun à l’ensemble de ces entités, dont la liste serait singulièrement réduite puisque la proposition de loi ordinaire en propose une liste limitative.
En conséquence, plusieurs entités aujourd’hui classées dans la catégorie des autorités administratives indépendantes ou autorités publiques indépendantes seraient amenées à perdre cette appellation, qui n’est pas neutre juridiquement puisqu’elle emporte certaines obligations. Je pense notamment à la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, qui oblige les membres de ces autorités à faire des déclarations d’intérêts et de situation patrimoniale.
La perte de la qualité d’autorité administrative indépendante ou d’autorité publique indépendante entraînerait de facto l’interruption de ces obligations qui vont dans le sens d’une plus grande transparence de la vie publique, une attente forte de nos concitoyens que notre majorité met en application depuis 2012. Il faut donc légiférer très prudemment en la matière. Je reste d’ailleurs perplexe en voyant certaines AAI perdre leur statut, l’Autorité de régulation des jeux en ligne par exemple.
Nous pouvons aussi nous appuyer sur les travaux de notre propre assemblée. Je pense particulièrement au travail mené par René Dosière et Christian Vanneste, qui a abouti au rapport d’information du 28 octobre 2010 sur les autorités administratives indépendantes.
Les textes de départ étaient déjà, il faut le dire, d’une grande qualité. Par leur architecture et leur clarté, ils répondaient à l’intention initiale de leurs auteurs, que nous sommes plusieurs ici à partager. Je pense notamment aux éléments suivants : la compétence unique de la loi pour créer une autorité administrative indépendante ou une autorité publique indépendante, le régime des incompatibilités, le renforcement du contrôle parlementaire, les règles encadrant le fonctionnement des autorités, notamment du point de vue budgétaire, les règles de déport en cas de conflit d’intérêts sur une affaire soumise à l’autorité, et les règles encadrant le personnel des autorités, particulièrement l’introduction de l’enjeu déontologique au-delà des seuls membres des autorités.
Les travaux que nous avons menés en commission mardi dernier ont permis, je le crois, d’enrichir encore le texte.
Je souhaite profiter de l’occasion qui m’est donnée pour saluer la qualité du dialogue qui a eu lieu pour ce travail. Nous avons eu des échanges intéressants et exigeants. Notre groupe a souhaité accompagner ce texte pour les raisons que j’ai déjà indiquées, et nous avons été à l’initiative de plusieurs amendements que la commission a adoptés. Je salue aussi le travail de notre responsable pour le texte, Anne-Yvonne Le Dain.
Nous avons ainsi complété la liste des organismes conservant la qualité d’autorité. Je pense notamment à la Commission nationale du débat public, dont j’ai parlé, et au médiateur national de l’énergie.
La Commission nationale du débat public, rendant de véritables décisions, ne nous paraissait pas devoir être exclue, comme le Sénat le proposait, du champ des autorités administratives indépendantes. Je l’avais indiqué en commission : tant du point de vue des règles qui garantissent son indépendance qu’au regard de son statut administratif, elle répond aux critères déterminés par le Conseil d’État pour la qualification d’autorité administrative indépendante. Aussi je me réjouis que notre commission, à notre initiative et à celle de nos collègues écologistes, entre autres, ait souhaité l’inclure à nouveau dans la liste figurant en annexe de la proposition de loi ordinaire.
Notre groupe a également souhaité relever le niveau d’exigence du texte en matière de transparence et de déontologie, en cohérence avec plusieurs textes adoptés ces dernières années, qu’il s’agisse de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique ou, plus récemment, de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
Cette orientation, portée par le groupe SRC, a conduit la commission à adopter plusieurs amendements que je tiens à souligner ici. À l’initiative de René Dosière, qui ne pouvait pas être présent aujourd’hui, les rémunérations et avantages du président et des membres de l’autorité seront inclus dans les informations présentées dans le rapport sur la gestion des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes remis chaque année en annexe du projet de loi de finances.
Les principes de dignité, de probité et d’intégrité applicables aux membres des autorités, ainsi que l’obligation de prévenir tout conflit d’intérêt, seront clairement affirmés. J’aurais souhaité, comme je l’ai précisé en commission des lois, que l’impartialité soit au nombre de ces principes, mais cela n’a pas été retenu. La possibilité de ne pas siéger, au-delà de la seule possibilité de ne pas délibérer, sera prise en compte dans les règles de déport. Les membres des autorités intervenant dans le domaine économique justifieront auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique des mesures prises en matière de gestion de leurs instruments financiers.
La séance d’aujourd’hui devrait permettre de mener notre travail à terme, en sécurisant ce qui a besoin de l’être et en posant de nouvelles garanties. Le texte doit clarifier le droit et non amener à déstabiliser des institutions dont notre démocratie a besoin pour bien fonctionner. C’est dans cet esprit que je défendrai un amendement cosigné avec Romain Colas visant à assurer la continuité des missions de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. J’ai vu, monsieur le rapporteur, que vous aviez proposé un sous-amendement pour en sécuriser la rédaction. Je suis confiante dans notre capacité collective à faire aboutir ces deux propositions de loi.
Vous l’aurez compris, étant donné l’accompagnement dont ces textes ont bénéficié de la part des membres de notre groupe, je voterai ces deux propositions. Notre travail n’en sera pas pour autant achevé, puisque le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique que notre assemblée aura prochainement à examiner porte en son article 14 la même ambition de clarification des notions d’autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.
Il en propose une liste limitative, mais ne mène pas le travail global qui a été le nôtre dans les présentes propositions de loi. Étant donné les règles du calendrier parlementaire, il nous faudra probablement recommencer une partie du travail mené aujourd’hui à l’occasion de l’examen de ce texte. Nous ferons ainsi oeuvre utile pour améliorer le fonctionnement de l’action publique.
Les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes sont de véritables innovations, qui ont apporté, je le pense, une réelle valeur ajoutée. Elles ont en contrepartie été victimes de leur succès, si l’on peut dire, et leur prolifération ces dernières années n’a pas plaidé en leur faveur. Confusion et manque de lisibilité ont été au rendez-vous.
Aussi, en remettant de l’ordre dans cette catégorie particulière d’acteurs publics que sont les autorités, nous les confortons et les consolidons pour les années à venir. « Plus l’homme a d’habitudes, moins il est libre et indépendant », estimait Emmanuel Kant. Par notre réforme même des autorités administratives indépendantes, nous fortifions ce qui fait leur particularité et leur force : leur indépendance.
C’est un texte peu courant qu’il nous est donné d’étudier aujourd’hui. Il pose la question de la place de tout un chacun dans nos sociétés démocratiques. Le terme même d’indépendance est sujet à plusieurs interprétations. Dans le dictionnaire, il renvoie à des concepts aussi importants que l’autonomie ou l’affranchissement. Or, entre ces trois termes, des océans s’ouvrent. Selon une autre définition, est indépendant celui qui refuse toute sujétion. N’est-ce pas considérable, surtout pour des autorités administratives ou publiques indépendantes ?
Ce concept n’est pas nouveau puisque, comme certains l’ont rappelé, cela fait une quarantaine d’années que l’on crée peu ou prou une autorité indépendante par an – il en existe quarante-deux actuellement. Il paraît donc tout à fait pertinent d’y mettre un peu d’ordre. Le sénateur Jacques Mézard, avec ses collègues qui ont défendu au Sénat ce projet aujourd’hui repris par Jean-Luc Warsmann ici, a montré combien il était temps que le politique se saisisse de cette question et redise que la création des autorités indépendantes relève fondamentalement de la loi.
C’est la loi qui construit la société, qui la solidifie, la rend visible et lisible et, partant, attaquable, réfutable et contestable, si certains s’en saisissent. Au contraire, des dispositifs créés de manière parallèle, périphérique ou intérieure à des administrations, sont par nature délicats à modifier. S’intéresser à cette question est de facto éminemment politique. C’est d’ailleurs bien ce que M. le secrétaire d’État a laissé entendre dans son discours.
Ce sujet n’est donc pas anodin. Si ce n’est pas un gros texte, c’est un grand texte, car il pose des fondamentaux, notamment en définissant des interdits. Par exemple, des présidents de grandes collectivités ou d’établissements publics ne pourront pas être membres d’autorités administratives indépendantes. Ce n’était pas le cas jusqu’à présent. Autre exemple : il ne sera possible d’être membre que de deux autorités différentes. Cela n’était ni écrit ni dit nulle part.
Nous posons des fondamentaux qui vont dans le sens d’un approfondissement de la démocratie, en définissant que c’est le peuple souverain, représenté ici et au Sénat par ses élus réunis, qui se permet de créer ces autorités et leur confie leur indépendance, et non pas tel ou tel corps administratif par une proclamation individuelle.
Je voudrais, à cet égard, citer un homme qui l’est peu dans notre pays : Gustave Le Bon, un intellectuel français qui a écrit beaucoup de livres, et parmi eux, en 1912, La Révolution française et la psychologie des révolutions. Il y écrit ces lignes très fortes, et un peu étonnantes, sur lesquelles je vous invite à réfléchir.
« Les vraies forces directrices d’un pays, ce sont les administrations composées d’éléments impersonnels que les changements de régime n’atteignent jamais. Conservatrices des traditions, elles ont pour elles l’anonymat et la durée, et constituent un pouvoir occulte devant lequel tous les autres finissent par plier. Son action est même devenue telle qu’il menace de former un État anonyme plus fort que l’État officiel. La France en est ainsi arrivée à être progressivement gouvernée par des chefs de bureau et des commis. »
Gustave Le Bon écrivait cela en 1912. L’approfondissement de la démocratie qu’a connue le XXe siècle, notamment sous la forte impulsion des guerres mondiales, qui nous auront marqués, et des guerres coloniales, qui nous auront meurtris parce que nous avons meurtri d’autres personnes, nous a permis d’échapper à cette situation. Mais réfléchissons tout de même au fond de ces propos. C’est là un risque à ne pas prendre.
Des autorités autonomes et indépendantes, créées ex abrupto et placées au-dessus de la loi et des élus du peuple, seraient par nature et par fonction celles qui diraient la vérité, une vérité qui serait le gage de l’état de santé de la société à un instant donné, alors même que leur indépendance ne serait que la marque de leur anonymat, parce qu’elles n’auraient pas été soumises au verdict suprême qu’est le suffrage universel. N’oublions pas qu’il s’agit d’un débat entre le politique et l’administratif, entre l’élu et le nommé. Ce n’est pas un détail.
Il me semble important d’aborder un autre point, dans ce texte qui définit, en quelque sorte, la place de l’élu, du peuple souverain et de son administration : celui de l’expertise. Il est évident que les élus ne peuvent pas être experts en tout. C’est pourquoi il est important, dans nos sociétés démocratiques où les compétences s’affinent et où les connaissances s’approfondissent et s’élargissent, que des fonctionnaires de haut niveau apportent leur concours à l’approfondissement démocratique. Plus que nécessaire, cela est indispensable. Toutefois, apporter un concours ou un éclairage ne signifie pas dominer, imposer, voire soumettre.
Le texte permet de recadrer la place des uns et des autres, en posant le principe que les choses sont révisables et, partant, réfutables – le monde peut donc changer. Il n’est pas inscrit dans un marbre quelconque qu’il y aurait d’un côté une autorité indépendante, par nature experte et compétente, et donc incontestable, et de l’autre une assemblée élue, gentiment conviviale, comme la nôtre ou le Sénat, voire comme les assemblées délibérantes des collectivités territoriales. Ces sujets ne sont pas abstraits, mais très concrets au contraire : ils posent la question de la place de l’élu, du fonctionnaire et de l’intellectuel.
Ce texte pose ces fondamentaux. Nous aurons sans doute, chers collègues, quelques divergences, comme lors du débat sur les amendements, mais je crois que nous nous retrouvons sur le fond.
Pour conclure, je tenais à vous faire remarquer qu’à l’article 4 de la proposition de loi organique, le tableau annexé fait apparaître face à plusieurs autorités indépendantes le terme de « Président ». Or, quand la loi organique sur l’Agence pour la biodiversité reviendra du Sénat, ce tableau se trouvera modifié, si bien qu’il ne sera plus écrit « Président » mais « Présidence ». Au bout du compte, autrement dit de la navette, nous disposerons d’un tableau annexe sur la constitution des autorités qui sera paritaire et qui, d’une certaine manière, reconnaîtra la diversité de la société française – hommes et femmes. Et je note que dans le texte que nous votons aujourd’hui, le principe de parité a été appliqué de façon simple et claire, car une société se vit tout entière et une démocratie, c’est d’abord des électeurs, puis des élections et enfin des élus.
La discussion générale est close. Avant de donner la parole à M. le secrétaire d’État, je souhaite, en mon nom, mais aussi au nom de beaucoup de personnes dans cet hémicycle, au plateau comme dans les services de la séance, au groupe socialiste comme dans d’autres groupes, rendre hommage à Mme Marianne Van Weel, conseillère parlementaire du groupe socialiste. Elle a formé des générations de collaborateurs et d’assistants parlementaires mais également de députés, avec passion et avec patience. Elle a rendu énormément de services à cette maison. Elle prend sa retraite – mais ne part pas je pense : nous aurons donc l’occasion de la revoir. Je voulais lui rendre hommage, la saluer et, à titre personnel, l’embrasser, pour que son nom figure au compte rendu de cette séance.
Applaudissements.
Je remercie l’ensemble des orateurs pour la qualité de leurs interventions et salue en particulier votre rapporteur, Jean-Luc Warsmann, pour sa capacité à rassembler. En ces périodes où il est parfois difficile de trouver des majorités, nous pourrions utilement avoir recours à ses compétences !
Sourires.
Bravo donc à lui.
Je trouve ici une atmosphère que je connais bien : au Sénat, nous essayons souvent de trouver des majorités d’idées, sans en rester systématiquement au clivage droite-gauche, en particulier sur des sujets comme celui-là.
Les différentes interventions ont soulevé beaucoup d’éléments partagés sur le cadrage général de la loi, la nécessité de réguler les autorités administratives ou le fait de poser leur légitimité. Ce débat est extrêmement intéressant et il n’y a pas de raison de s’en éloigner. Nous examinerons de très près les différents amendements présentés notamment par le rapporteur ou par Mme Le Dain au nom du groupe SRC. Le Gouvernement en présentera aussi. En tant qu’ancien sénateur, je suis très attaché à la question de la légitimité et du partage des rôles entre le pouvoir politique et les autorités administratives, fussent-elles indépendantes. La discussion sera donc passionnante.
Pour ce qui est du fameux « sauf dispositions contraires », nous aurons une discussion amicale et franche avec Jean-Luc Warsmann et Pierre Morel-A-L’Huissier ; vu la tendance de l’hémicycle, leur position risque d’être majoritaire… Madame Sage, je partage les préoccupations du groupe UDI, et votre réflexion sur les circonstances territoriales. En effet, la Polynésie est importante, particulièrement pour l’écologiste que je suis. Vous avez évoqué la CNDP, le médiateur de l’énergie et le CIVEN, un organisme extrêmement important. Mme Attard, que je salue très amicalement, a également mentionné ces acteurs. Le groupe écologiste du Sénat, que j’ai eu l’honneur de présider, partageait nombre de positions et de remarques qu’elle a pu faire.
Je souhaite aussi bonne route à Paul Giacobbi, républicain et radical, qui a retracé l’histoire des autorités administratives indépendantes anglo-saxonnes, nous donnant du grain à moudre. Je connaissais évidemment Emmanuel Kant que Françoise Descamps-Crosnier a cité dans une intervention centrée sur l’éthique, la déontologie et la transparence, qui représentent un des axes extrêmement importants de ce texte. Mais je ne connaissais pas Gustave Le Bon, ni cette citation de 1912 ; je veillerai, dès la fin de cette séance, à me renseigner sur cet auteur, manifestement un homme de bon sens. Vous me semblez d’ailleurs tous animés par un esprit de bon sens, ce qui ne peut pas faire de mal dans la vie politique. Je suis donc très content de participer à cette discussion.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi organique.
L’article 1er est adopté.
L’article 2 est adopté.
L’article 3 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 2 .
L’amendement no 2 est adopté.
L’article 4, amendé, est adopté.
L’article 5 est adopté.
L’article 6 est adopté.
Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi organique.
La proposition de loi organique est adoptée.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi ordinaire.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 14 rectifié .
Il s’agit de réintroduire dans l’annexe de l’article 1er, en position 22, le Comité consultatif national d’éthique. En effet, cette instance est désormais installée dans le paysage institutionnel français et ses avis sont perçus par la population comme étant de référence. Il est important que cette institution, qui a actuellement le statut d’autorité indépendante, ne le perde pas, et plus encore soit reconnue au même titre que tous les organismes qui figurent dans le tableau annexé. Le Comité me semble avoir acquis au moins la même stature que la CNDP, dont le statut d’autorité administrative indépendante a été confirmé par la commission ; il serait donc raisonnable de lui réserver le même sort.
La commission n’est pas favorable à cette proposition car elle soutient sur ce sujet un amendement du Gouvernement à l’article 25. Cet organisme, que j’ai auditionné, n’est pas une autorité administrative indépendante et ne demande pas à le devenir. Il est une « autorité indépendante » et souhaite le rester. La commission a proposé la dénomination d’institution indépendante ; le Gouvernement a rejeté cette idée, préférant en rester au terme actuel. Je suis prêt à soutenir l’amendement du Gouvernement. Pour que nous puissions tous nous y rallier, je me permets, chère collègue, de vous suggérer de retirer cet amendement.
Monsieur le rapporteur, il semble y avoir un malentendu, dans la mesure où le Gouvernement n’a pas déposé d’amendement à ce sujet.
La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à dix-neuf heures trente.
La séance est reprise.
Avant la suspension de séance, nous avons entendu l’avis de la commission sur l’amendement no 14 rectifié . Quel est l’avis du Gouvernement ?
Je vous remercie, madame la présidente, de nous avoir accordé cette suspension de séance, qui nous a permis de nous entretenir et de réfléchir ensemble.
Incontestablement, l’amendement no 62 est conforme à l’exposé qu’en a fait votre rapporteur. Néanmoins, j’ai été sensible aux arguments de Mme Le Dain : il est incontestable que le statut du Comité consultatif national d’éthique et de la Commission nationale du débat public peut poser question. Courageusement, et parce que je suis un ancien sénateur et un ancien radical, je vais m’en remettre à la sagesse de votre assemblée.
Je le maintiens, car il importe que la question du Comité consultatif national d’éthique soit posée au cours de la navette parlementaire.
L’amendement no 14 rectifié n’est pas adopté.
L’article 1er est adopté, ainsi que l’annexe.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 12 .
L’amendement no 12 est retiré.
L’article 2 est adopté.
L’article 3 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 103 .
L’amendement no 103 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 4, amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 33 .
L’amendement no 33 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 5, amendé, est adopté.
Cet amendement vise à maintenir la possibilité de révocation en cas de manquement grave aux règles déontologiques. Nous avons déjà débattu de cette question en commission.
Il importe de s’assurer que le non-respect des obligations prévues par l’article 10 de la proposition de loi ou des règles déontologiques qui pourraient être prévues par le règlement intérieur sera bien sanctionné. La seule mention des obligations légales peut être insuffisante dans certains cas. En cas d’atteinte grave aux règles déontologiques, c’est l’ensemble des AAI et API dont la réputation peut être atteinte.
Le fait que le manquement doit être grave et que la délibération sera prise à la majorité des trois quarts des autres membres du collège offre deux garanties suffisantes pour s’assurer de l’importance du motif de révocation.
La proposition de loi qui vous est présentée instaure une possibilité de révocation : ce n’est pas rien ! Désormais, dans une autorité administrative indépendante, lorsque le collège considérera, à la majorité des trois quarts, que l’un de ses membres ne respecte pas les conditions légales d’exercice du mandat, il pourra le révoquer et mettre fin à son mandat. C’est une décision lourde !
Le texte initial du Sénat prévoyait la possibilité de révoquer un membre pour manquement soit aux obligations législatives, soit aux obligations fixées par le règlement intérieur. Nous n’avons pas souhaité maintenir la mention du règlement intérieur, en considérant qu’il ne fallait retenir que les manquements aux obligations les plus graves, à savoir les obligations législatives. C’est la raison pour laquelle la commission a donné un avis défavorable à cet amendement.
Le présent amendement a pour objet de préciser les règles selon lesquelles un manquement peut conduire à la révocation du membre d’une autorité. Je comprends les préoccupations qui sont les vôtres, madame Attard. Le Gouvernement estime pour sa part que la rédaction actuelle de l’article 7 couvre nécessairement le manquement aux règles déontologiques. Néanmoins, comme j’ai été sensible à votre intervention, qui complète l’exposé sommaire de votre amendement, je m’en remets à la sagesse des parlementaires.
L’amendement no 2 n’est pas adopté.
L’article 7, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 56 .
Le présent amendement a pour objet de maintenir le régime strict de non-renouvellement du mandat de membre de certaines autorités administratives indépendantes ainsi que de certaines autorités publiques indépendantes. Ces régimes sont par exemple prévus pour le Conseil supérieur de l’audiovisuel, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – ARCEP – et la Commission consultative du secret de la défense nationale, ce qui n’est pas rien.
Cet amendement propose donc d’insérer, au début de l’alinéa 1, les mots : « Sous réserve des cas où la loi prévoit qu’il n’est pas renouvelable, ».
Il est peu de sujets sur lesquels nous ne serons pas d’accord avec M. le secrétaire d’État ce soir. Celui-ci en est un, et il est substantiel.
Nous sommes en train de voter un statut général qui, par définition, doit s’appliquer à tout le monde. J’ai rappelé tout à l’heure, lors de mon intervention liminaire, que la version initiale du texte voté au Sénat indiquait : « sauf dispositions contraires ». Si nous votons un statut général « sauf dispositions contraires », la consultation du statut ne sera d’aucune utilité, puisqu’il faudra aller vérifier à chaque fois s’il n’existe pas une disposition contraire !
S’agissant de la question du mandat, après en avoir débattu avec le Gouvernement, nous sommes tombés d’accord pour inscrire dans le statut général le principe d’un mandat une fois renouvelable. On a tendance à penser qu’un mandat non-renouvelable rendra la personne qui l’assume plus indépendante. Mais soyons clairs : si vous nommez un militant du parti socialiste ou du parti Les Républicains dans une autorité administrative indépendante, même si son mandat n’est pas renouvelable, il restera un militant politique !
Si nous avons opté pour le renouvellement des membres des autorités administratives, c’est aussi parce qu’on nous a répété, tout au long des auditions, que nombre d’autorités administratives sont très techniques et que leurs membres ne sont pas opérationnels dès leur nomination. Il est dans l’intérêt général que le mandat des membres du collège puisse être renouvelé, afin qu’ils deviennent véritablement opérationnels.
Permettez-moi de vous parler avec la même liberté que les personnes que nous avons auditionnées : dans certaines autorités administratives indépendantes se pose la question de l’équilibre entre les services administratifs de l’autorité et le collège. Il peut être intéressant d’avoir des élus, au collège, qui « tiennent la route » et qui soient capables de contester des arguments administratifs.
Il me semble donc que la solution équilibrée que nous vous proposons, celle d’un renouvellement, mais pour une fois seulement, est la bonne. Le fait que tous les ministères desquels dépendent des autorités administratives veuillent défendre leur ancien statut n’est pas cohérent. Je défends ici la position du Sénat, qui a voulu créer un statut : il faut que l’on s’y tienne. Certes, cela changera le fonctionnement de certaines autorités, mais c’est à nous, législateurs, d’arbitrer dans le sens de ce qui nous semble être l’intérêt général.
C’est la raison pour laquelle, monsieur le secrétaire d’État, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
J’ai demandé la parole, car je n’ai absolument pas été convaincu par les arguments du rapporteur. Je souhaite vivement appeler votre attention, au nom de la commission que je préside, et qui est directement concernée en l’espèce, sur l’enjeu majeur que constitue l’indépendance des médias. M. le secrétaire d’État a en effet évoqué le CSA, régulateur des médias, ainsi que l’ARCEP.
Le CSA a un statut particulier, qu’il faut impérativement maintenir et qui prévoit précisément le non-renouvellement du mandat de ses membres, qui est d’une durée de six ans. Nous avons d’ailleurs récemment réformé, dans la loi du 15 novembre 2013, le mode de nomination des membres du Conseil, pour les rendre encore plus indépendants. Désormais, lorsqu’un candidat au collège du CSA est proposé par le président de l’Assemblée nationale ou du Sénat, sa candidature doit être adoptée aux trois cinquièmes des commissions permanentes de ces deux assemblées. Cela signifie que sa nomination ne peut résulter que d’un accord entre la majorité et l’opposition dans chacune des assemblées.
De ce fait, l’amendement du Gouvernement est tout à fait capital. Il faut à tout prix maintenir des exceptions : c’est essentiel pour le CSA, pour l’ARCEP et, j’imagine, pour la Commission consultative du secret de la défense nationale.
L’amendement no 56 n’est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 40 .
L’amendement no 40 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 8 concerne le renouvellement des membres des autorités administratives indépendantes et son alinéa 2 porte, plus précisément, sur la question de la vacance des sièges.
L’article prévoit, en l’état, qu’il est « procédé à la désignation, dans le délai de deux mois, d’un nouveau membre pour la durée du mandat restant à courir », étant entendu que cette nomination dépend de l’autorité administrative indépendante elle-même.
Étant donné que certains sièges restent parfois vacants pendant très longtemps, il semblerait judicieux, dans le cas où cette nomination ne serait pas intervenue dans un délai de deux mois, que le collège de l’autorité en question, convoqué à l’initiative de son président, propose, par délibération, un candidat à l’autorité de nomination. Cela permettrait de s’assurer que le siège soit pourvu dans un délai raisonnable.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir le sous-amendement no 82 .
J’approuve totalement la démarche de notre collègue. Je souhaiterais simplement, si elle en est d’accord, fixer le délai à trente jours.
J’aurais préféré que le délai soit fixé à soixante jours mais, dans un esprit de conciliation et d’ouverture, je donne un avis favorable à l’amendement et au sous-amendement.
Le règlement ne me permettait pas de reprendre la parole tout à l’heure, après mon intervention sur l’amendement no 56 . Permettez-moi donc d’y revenir ici.
Très sincèrement, chers collègues, comment peut-on légiférer dans ces conditions ? Aucune des commissions compétentes de l’Assemblée nationale concernées par ces textes n’a pu être consultée ni débattre ni donner son avis !
On vient de décider inopinément, par le rejet de l’amendement no 56 du Gouvernement, que maintenant les mandats de membre du CSA, de l’ARCEP et de la Commission consultative du secret de la défense nationale pourraient être renouvelés, alors qu’ils n’étaient pas renouvelables par principe.
Je me permets, dans le respect de ceux qui ont travaillé sur ces textes, de nous alerter collectivement sur les conditions dans lesquelles nous légiférons, en prenant des décisions en totale contradiction avec ce que l’Assemblée a pu adopter il y a quelques années. Nous y reviendrons un peu plus tard, au sujet d’une autre autorité.
Le sous-amendement no 82 est adopté.
L’amendement no 15 , sous-amendé, est adopté.
L’article 8, amendé, est adopté.
La commission a fait le choix d’autoriser le cumul entre plusieurs autorités administratives indépendantes tout en limitant ce cumul à deux mandats, quand le Sénat voulait interdire tout cumul.
Cet amendement prévoit qu’a minima, le président d’une AAI ou API ne pourra pas être membre d’une autre autorité. Du fait de l’importance de la fonction de président, un tel cumul, qui pourrait être source de confusion, ne paraît pas souhaitable.
Nous avons décidé, et je crois que le Gouvernement est sur la même ligne, de limiter les cumuls. Actuellement, nous avons trois personnes membres de trois autorités : c’est trop. Nous avons décidé de limiter le cumul à deux mandats, parce qu’il peut y avoir des complémentarités et que beaucoup de mandats ne sont pas à plein temps : il peut être intéressant qu’un membre d’une autorité siège dans une autre pour assurer la cohérence des jurisprudences. C’est pourquoi, à mon grand regret, si vous décidiez de maintenir cet amendement, je serais obligé de donner un avis défavorable.
Je maintiens cet amendement. Nous avons dit en commission que la présidence d’une autorité administrative indépendante était souvent un travail à temps plein. J’estime que tout le monde a des limites biologiques : pour faire son travail correctement, on peut se contenter d’être président d’une autorité administrative indépendante, ce qui éviterait de susciter des conflits d’intérêts.
Nous avons par ailleurs décidé en commission qu’une autorité pourrait en saisir une autre pour faire une étude complémentaire ou pour travailler en commun. Je ne vois donc pas pourquoi on ne voterait pas mon amendement : cette complémentarité que vous évoquiez, monsieur le rapporteur, est maintenant possible.
L’amendement no 3 n’est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 57 .
L’article 9, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 100 rectifié .
Comme vous le savez, à la suite de l’ordonnance no 2015-948 du 31 juillet 2015 relative à l’égal accès des femmes et des hommes au sein des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, la représentation équilibrée entre les hommes et les femmes est prévue pour dix-neuf autorités.
Il a été nécessaire de recourir à une ordonnance afin de tenir compte de la spécificité de la composition de chaque autorité. Il est proposé de procéder selon la même méthode, qui s’est révélée efficace, pour les autorités ne relevant pas de l’ordonnance du 31 juillet 2015 mais recensées dans l’annexe de la présente proposition de loi. Les autorités principalement concernées seront l’Autorité de régulation de la distribution de la presse, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, la Commission de régulation de l’énergie et le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur.
La commission n’a pas examiné cet amendement, mais il me semble de bonne gouvernance. À titre personnel, avis favorable.
L’amendement no 100 rectifié est adopté et l’article 9 bis A est ainsi rédigé.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 4 tendant à insérer un article additionnel après l’article 9 bis A.
Cet amendement vise à instaurer une limite d’âge pour les présidents des autorités administratives indépendantes, à l’exception du Défenseur des droits. Cette limite d’âge serait fixée à 75 ans.
Certaines autorités prévoient déjà des limitations d’âge pour leurs membres. Tel est le cas pour les membres du CSA, de l’ARCEP, de l’ACNUSA – Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires – et de la CRE, qui ne peuvent être nommés au-delà de l’âge de 65 ans.
Je précise que cette disposition ne s’appliquerait qu’aux présidents nommés ou élus après la promulgation de la présente loi.
L’amendement no 4 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 10 est adopté.
Dans le prolongement des incompatibilités prévues par cet article 11, cet amendement vise à rendre le mandat de membre d’une AAI ou API incompatible avec un mandat au Conseil économique, social et environnemental. Un mandat au CESE est par ailleurs déjà incompatible avec un mandat parlementaire ou une fonction de magistrat.
La commission considère que votre objectif est déjà atteint, madame Attard, grâce à l’article 3 de la proposition de loi organique. Je vous suggère donc de bien vouloir retirer votre amendement. Dans le cas contraire, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement no 5 est retiré.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 27 .
L’amendement no 27 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 11, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 58 .
Il vise à supprimer cet article qui tend à généraliser une pratique existant au sein de certaines autorités administratives indépendantes, dans lesquelles chaque membre du collège peut prendre connaissance des déclarations d’intérêts des autres membres.
Le contrôle actuel des déclarations est largement suffisant. L’article 11 de la loi du 11 octobre 2013 prévoit non seulement qu’elles doivent être transmises au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, mais également au président de l’autorité dont on est membre.
Il ne paraît pas nécessaire que chaque membre appose son visa sur les déclarations des collègues : j’imagine d’ailleurs la bonne ambiance que cela créerait… Ce dispositif, qui s’appliquerait à des personnes exerçant des responsabilités administratives et non politiques, porterait atteinte au droit au respect de la vie privée. Nous pourrions avoir un débat constitutionnel soutenu sur le sujet. Je vous appelle vivement à voter cet amendement important.
Je vais exposer le problème tel qu’il se présente et chacun votera en son âme et conscience.
Que prévoit le droit positif aujourd’hui ? Que chaque président a communication des déclarations d’intérêts et de patrimoine des membres de l’autorité. Or, lors des auditions, j’ai été très surpris quand un président m’a confié, alors que je ne posais pas la question : « J’ai les déclarations, elles sont dans des enveloppes fermées, je ne les ai pas ouvertes. » Après cette surprise, j’ai posé la question dans les autres auditions. À deux ou trois reprises, des présidents m’ont dit que leur secrétariat avait les déclarations, mais qu’ils ne les avaient pas regardées.
Lorsque j’ai interrogé le vice-président du Conseil d’État, celui-ci m’a dit qu’il lui semblait de bonne gestion que le président d’une haute autorité soit au courant de ce que contiennent ces déclarations, qui ne visent pas à sanctionner mais à prévenir. Si le président a connaissance des déclarations et qu’il y a un risque de conflit d’intérêts, il va demander en toute discrétion au membre concerné de venir dans son bureau avant la réunion pour lui demander s’il est sûr de pouvoir siéger ou s’il faut faire un déport.
Bref, voilà la situation actuelle, qui est me semble-t-il assez contraire à ce que le Parlement avait voulu. Dans l’article qu’il nous propose, le Sénat considère que le président d’une autorité ne peut être le seul garant de l’absence de conflits d’intérêts et qu’il faudrait que tous les membres le soient. Cela peut se défendre. Mais le système qu’il propose revient à ce que chaque membre puisse lever le doigt en réclamant de consulter les déclarations. Humainement, c’est ingérable ! Imaginez-vous, mes chers collègues, faire cette demande, après avoir été nommé dans une de ces autorités ?
Vous avez donc deux solutions : celle que le Gouvernement vous propose, qui est de supprimer cette disposition, ou celle que je vous soumets humblement, qui consiste à faire viser les déclarations quand on arrive, comme on le fait pour les déclarations administratives. Il suffirait d’écrire « Vu », de dater et de signer.
Le poison, c’est le doute. Dans ce système, chacun serait informé. Si un jour l’autorité doit aborder un dossier concernant EDF et que vous croyez vous souvenir qu’un des membres est lié à cette entreprise, vous allez voir votre président, vous fermez la porte du bureau et lui demandez de bien vouloir évoquer le problème avec votre collègue.
En tout cas, le dispositif qui vient du Sénat me semble impossible à mettre en oeuvre. S’il faut un dispositif de prévention des conflits d’intérêts qui implique chaque membre, il faut imposer l’obligation d’apposer son visa. J’ajoute que cela résoudrait le problème actuel : que des présidents de hautes autorités n’ouvrent pas les enveloppes ne me semble conforme à l’objectif du législateur !
La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Pour exprimer une opinion personnelle, il me semble que la pratique consistant à ce que le président soit destinataire des déclarations d’intérêts emporte l’obligation de les lire ; il faudrait aussi qu’il les transmette à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Cette solution-là ne nous est pas proposée. Je vais donc, personnellement, voter l’amendement du Gouvernement, en souhaitant qu’au Sénat le texte soit modifié afin que le président ait l’obligation de regarder et de contrôler les déclarations d’intérêts, de façon qu’aucun membre ne siège si ses intérêts sont en cause dans la délibération à laquelle il est appelé à participer.
Ce sujet ne m’a pas l’air anodin, c’est pourquoi je me permets de poser une question à notre rapporteur.
Le Gouvernement propose de supprimer la disposition adoptée par le Sénat. Si nous ne votons pas son amendement, cela signifie que les dispositions votées par le Sénat deviennent définitives : il n’y aura plus de navette sur ce point.
Or, il nous est dit que la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Je suis donc perplexe sur ce qu’il convient de faire. Qu’est-ce qui serait le moins mauvais ? Le rapporteur nous demande de nous prononcer en notre âme et conscience. Nous avons une âme, nous avons une conscience et nous souhaitons nous prononcer en étant éclairés davantage pour ne pas commettre d’erreur.
Je sens que l’objectif du rapporteur et celui du Gouvernement sont proches, mais je n’ai pas l’impression que l’un et l’autre parviennent aux mêmes conclusions sur ce qu’il faut faire.
Je suis heureux de cette discussion, monsieur le député. En effet, Jean-Luc Warsmann et moi-même sommes d’accord sur la finalité : lutter au maximum contre les conflits d’intérêts et les prévenir. Mais, très sincèrement, le dispositif adopté par le Sénat est très négatif. J’en imagine mal la portée, dans une haute autorité comptant huit à dix membres : chacun va suspecter l’autre ! On sait comment cela se passe…
Que le président puisse juger de lui-même paraît préférable. Évidemment, s’il n’ouvre pas les plis, je ne peux rien y faire… Mais le patron de la Haute Autorité et le président de l’AAI concernée disposent des documents et cela me semble très largement suffire. Pour le reste, comme M. le rapporteur, je laisse les uns et les autres adopter la position qu’ils considèrent comme la plus juste.
Chacun est suffisamment éclairé quant à la pratique en vigueur – je pense que nombre d’entre vous l’ignorait. Je m’en remets entièrement à votre sagesse mais il était de mon devoir de rapporteur de pointer du doigt ce qui constitue aujourd’hui un dysfonctionnement eu égard à la volonté du Parlement.
Je mets aux voix l’amendement du Gouvernement, l’avis du rapporteur étant… nuancé.
Les articles 13 et 14 sont successivement adoptés.
L’article 15 de la proposition de loi prévoit que les règlements intérieurs des autorités administratives indépendantes contiendront des dispositions sur la déontologie du personnel. Toutefois, l’article 16 ne prévoit que des règles d’organisation et de fonctionnement.
Il semble important que ces règlements contiennent par ailleurs des dispositions propres sur la déontologie des membres. En effet, chaque AAI évoluant dans un contexte différent, des règles spécifiques peuvent être nécessaires.
Par son mode d’élaboration et sa publicité, le règlement intérieur est le cadre adapté pour fixer les règles de déontologie.
Cet amendement a été rejeté par la commission, moins pour des raisons de fond que de forme. Il peut être en effet parfois excessif de vouloir tout « monter » par la loi. N’ayant aucune hostilité sur le fond, avis de sagesse.
L’amendement no 6 est adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 17 .
Par équivalence de forme avec l’article 14 et dans le même esprit que ce qu’a dit Mme Attard, il me semble pertinent d’ajouter qu’il s’agit des règles d’organisation, de fonctionnement et de déontologie « au sein de l’instance délibérative ». Dans le cas contraire, ce serait comme si le personnel, les collaborateurs et experts mentionnés à l’article 14 n’existaient pas. Il me semble que tout serait beaucoup plus simple avec cette précision.
Cet amendement a été rejeté par la commission. S’il n’est pas retiré, avis défavorable car il alourdit le texte – il est en effet déjà satisfait.
L’amendement no 17 n’est pas adopté.
L’article 16, amendé, est adopté.
Article 16
L’article 16 bis est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 59 .
Nous en revenons, si j’ose dire, au débat général. Le présent amendement vise en effet à préserver les différents modèles d’organisation des autorités administratives indépendantes. Il convient de conserver les spécificités existantes tout en respectant le principe d’impartialité.
Nous proposons de modifier l’alinéa 1 à la suite de l’entrée en vigueur de la loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires. En effet, l’article 32 de la loi du 20 avril 2016 précitée consacre dans le statut général de la fonction publique de l’État la possibilité pour les fonctionnaires de l’État d’être affecté en « position normale d’activité » au sein des autorités administratives indépendantes.
Alors qu’un tel élargissement du champ d’affectation vient d’être consacré par le législateur, il n’est pas cohérent de le remettre en cause en prévoyant que les fonctionnaires de l’État ne puissent être que mis à disposition ou détachés. D’évidence, il y a là une contradiction manifeste.
La commission n’a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, je vais être amené à émettre un avis défavorable, pour la même raison que celle évoquée tout à l’heure.
Nous élaborons un statut général. Chaque fois qu’un ministère veut « revenir par la fenêtre » et demande à préciser « sauf dispositions spécifiques », je ne peux être d’accord – même si je ne suis pas à l’origine de ce statut général, élaboré au Sénat.
J’ajoute que, dans le cadre de la navette, le souci légitime du Gouvernement pourrait être satisfait à travers une discussion spécifique dans un texte visant l’autorité concernée.
Par cohérence avec ce que nous sommes en train de construire, je suggère à mes collègues de ne pas voter ce soir un tel amendement. Je suis en revanche tout à fait ouvert à ce que, d’ici la fin de la navette, le problème soulevé par le Gouvernement soit satisfait via une disposition spécifique dans la loi et non via une dérogation au statut général.
L’amendement no 59 n’est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 64 .
Cet amendement soulève le même débat. Je gage que le même sort lui sera réservé.
L’amendement no 64 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 19 .
À l’alinéa 2, où il est question de la mise à disposition ou du détachement de « fonctionnaires civils », cet amendement vise à insérer les mots « , qui peuvent être issus des trois fonctions publiques nationale, territoriale, hospitalière, ».
Si je suis rassurée sur ce point, je le retirerai mais je ne voudrais pas que des fonctionnaires de très haut niveau des hôpitaux et des administrations des collectivités territoriales soient de facto exclus des AAI.
En l’état, le texte mentionne les fonctionnaires civils, ce qui garantit à notre collègue qu’ils peuvent être issus des trois fonctions publiques, nationale, territoriale et hospitalière.
L’alinéa 2 de l’article 17 dispose en effet : « Selon les modalités fixées par décret en Conseil d’État, toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante peut bénéficier de la mise à disposition ou du détachement de fonctionnaires civils et militaires… ». Il me semble donc que votre démarche, justifiée, est tout à fait satisfaite.
L’amendement no 19 est retiré.
Vous gardez la parole, madame Le Dain, pour soutenir l’amendement no 18 .
Puisque nous parlons de déontologie, question évoquée tout à l’heure par Mme Attard, il me semble qu’il serait bon de compléter l’alinéa 2 par une phrase simple disposant que les règles de déontologie s’appliquant aux fonctionnaires – grâce notamment au magnifique texte récemment voté – s’appliquent aux agents contractuels. Il est inutile que les contractuels qui ne sont pas fonctionnaires soient soumis à une déontologie spécifique.
Autant j’étais favorable à la dernière préoccupation de Mme Le Dain, qui était d’ailleurs satisfaite, autant je suis réservé ici : on ne peut pas prévoir que l’ensemble des règles déontologiques qui s’appliquent aux fonctionnaires s’applique aux contractuels, lesquels peuvent relever du droit public mais aussi du droit privé.
L’un des intérêts des AAI et API, c’est que le droit privé comme le droit public peuvent s’appliquer. L’amendement de Mme Le Dain irait vers un rapprochement trop important avec le statut de la fonction publique, ce qui ne me semble pas positif. Avis défavorable.
J’ai déposé puis retiré un amendement voisin en commission des lois.
Les AAI recrutent à la fois des fonctionnaires et des contractuels, qui relèvent du droit privé et du droit public. Mais ils ne bénéficient pas des mêmes droits. Certaines AAI, en effet, ne disposent pas de structures de concertation. En outre, si ces agents souhaitaient devenir des lanceurs d’alerte, de quel statut protecteur pourraient-ils bénéficier ?
J’ai retiré mon amendement pour des raisons de forme mais je pense que nous devons nous saisir de ce vrai problème pendant la navette. Nous devons essayer de réfléchir au fait que certains personnels, en effet, sont en dehors de tout. Il faut y travailler.
Je maintiens mon amendement, madame la présidente, car une vraie question se pose. Des personnes relevant du droit privé sont de plus en plus présentes au sein des institutions publiques. Il ne faudrait pas que, d’un côté, certains soient extrêmement protégés, y compris en termes de déontologie, et que de l’autre certains ne le soient pas, pour lesquels il faudrait inventer une autre déontologie dans le règlement intérieur. De facto, des gens qui exercent le même métier ne se verraient pas appliquer les mêmes règles déontologiques.
L’amendement no 18 n’est pas adopté.
L’article 17 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 60 .
Toujours dans la même veine, je propose d’ajouter au début de cet article concernant la nomination du secrétaire général ou du directeur général « Sauf disposition particulière prévue par la loi ». Il convient en effet de tenir compte des différents modèles d’organisation. Je ne vois d’ailleurs pas comment l’unification absolue des procédures de nomination serait possible. Je pourrais citer de nombreux exemples de pratiques distinctes correspondant aux besoins de fonctionnement des AAI. Cet important amendement me paraît plus proche de la nature des AAI que ne le serait l’uniformisation projetée.
Nous avons à plusieurs reprises débattu de cette question en commission. En l’occurrence, il s’agit donc de la nomination des secrétaires généraux ou des directeurs généraux. La commission considère que c’est le président du collège qui doit proposer cette nomination, mais après un vote du collège. Certes, le secrétaire général et le directeur général doivent être en affinité avec le président mais celle-ci doit être partagée par la majorité du collège, parce qu’il ne s’agit pas d’un pouvoir personnel et, pardonnez la tautologie… parce que cela doit être partagé.
Vous comprendrez que je ne sois pas favorable à l’adoption de cet amendement du Gouvernement pour la raison précédemment invoquée : nous sommes en train d’élaborer un statut général, il n’est pas possible d’exciper de dispositions particulières à chaque article !
L’exposé des motifs de cet amendement fait état de deux institutions où les modalités de nomination diffèrent. Oui, elles diffèrent aujourd’hui, oui, nous souhaitons un statut général, oui, me semble-t-il, le bon équilibre veut que le secrétaire général et le directeur général soient proposés par le président mais admis par le collège.
Si exception il y a, qu’elle relève d’un dispositif spécifique. Mais ne portons pas atteinte au statut général ! À mon grand regret, mes chers collègues, je vous invite donc à rejeter cet amendement du Gouvernement. D’ici la fin de la navette, si un ou deux aménagements sont nécessaires, faisons-les mais gardons ce principe de bon équilibre !
L’amendement no 60 n’est pas adopté.
L’article 18 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 61 .
L’amendement no 61 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 20 .
Il faudrait ajouter à la fin de l’alinéa 1 quelques mots relativement simples. Puisque le président de l’autorité administrative indépendante ou de l’autorité publique indépendante est ordonnateur des recettes et des dépenses, il serait pertinent d’écrire que – c’est loin d’être le cas aujourd’hui – ces recettes et ces dépenses doivent s’équilibrer, les recettes affectées ne pouvant être utilisées que pour les dépenses dédiées correspondantes. L’important, c’est que recettes et dépenses doivent s’équilibrer.
Notre collègue sait combien je partage son souci : je proposerai donc tout à l’heure des schémas de mutualisation et d’optimisation dans cet objectif. Toutefois, la rédaction proposée – « dépenses dédiées correspondantes » – ne me paraît pas sûre sur un plan juridique. Pour cette simple raison de forme, l’avis est donc défavorable.
Je propose volontiers au rapporteur de supprimer la deuxième partie de la phrase pour ne conserver que les mots « qui doivent s’équilibrer » – il s’agit des recettes et des dépenses.
La commission accepte-t-elle la rectification proposée par Mme Le Dain ?
Je préférerais que cela soit examiné au cours de la navette, car procéder ainsi me semble un peu rapide.
L’amendement no 20 n’est pas adopté.
L’article 19, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 21 .
Il faudrait compléter la première phrase : « Toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante adresse chaque année, avant le 1er juin, au Gouvernement et au Parlement un rapport d’activité rendant compte de l’exercice de ses missions et de ses moyens. » Il pourrait être important de préciser en quoi consistent les moyens.
Je propose donc d’ajouter « en termes immobilier, mobilier, de fonctionnement et d’investissement, selon les règles de la comptabilité publique », de manière à ce que les choses soient claires, sinon le rapport risque d’être un peu vague. Il s’agit de la bonne gestion de l’argent public.
Je comprends la volonté de précision de notre collègue. Avis favorable.
L’amendement no 21 est adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 23 .
Il est dans le même esprit. La deuxième phrase de cet article, qui est tout de même très long, commence ainsi : « Il comporte un schéma pluriannuel de mutualisation des services entre les services de l’autorité »… Si l’on comprend bien l’intérêt de la mutualisation, qui est de faire en sorte que cela coûte moins cher, il m’apparaîtrait toutefois pertinent d’insérer les mots suivants : « dans la mesure du possible et en évitant les éventuels conflits d’intérêts institutionnels ou personnels ».
Cela est un peu délicat d’un point de vue juridique, j’en conviens. Mais je souhaite appeler l’attention de l’Assemblée sur un point : les efforts de mutualisation au sein d’un même bâtiment aboutissent inévitablement, dans un délai dont je ne suis pas sûre qu’il soit très long, à la constitution d’une entité dotée d’une autorité morale incontestable à l’échelle nationale. En effet, des gens de très haut niveau réunis dans un même bâtiment finissent par acquérir une forme d’indépendance et d’autorité.
Deuxième point : ayant exercé des responsabilités exécutives, j’ai assisté à de nombreuses mutualisations qui se terminaient trois ou quatre ans plus tard par des démutualisations. Il est tellement plus simple d’avoir la photocopieuse à son étage plutôt que de descendre au rez-de-chaussée ! Inévitablement, à un moment donné, les contraintes sont vues différemment…
J’invite donc à une relative prudence dans l’effort de mutualisation. Même si le fait de réunir tout le monde dans un même endroit s’inscrit dans la tendance actuelle à la rationalisation, cela risque d’entraîner la constitution d’une nouvelle instance, d’une nouvelle force institutionnelle française, comme je l’évoquais dans mon intervention préliminaire. Son indépendance serait telle qu’elle en deviendrait « hors sol » par rapport au politique, que nous tentons de conforter dans les présents textes.
C’est un sujet très substantiel. C’est notre commission des lois qui a ajouté l’obligation pour chaque autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante de prévoir un schéma pluriannuel de mutualisation. Mes chers collègues, c’est ce que nous imposons à nos collectivités locales actuellement ! Nous imposons aux intercommunalités et aux communes de réfléchir à ce qu’ils peuvent mutualiser dans leur fonctionnement. Il me semble logique d’imposer la même chose à des opérateurs de l’État.
Il y a eu plusieurs moments saisissants dans les auditions auxquelles j’ai procédé. J’ai auditionné plusieurs hauts fonctionnaires de l’État, de ceux qui font aimer notre pays. Ces personnes, qui consacrent toute leur énergie à notre pays, ont eu à négocier avec des autorités administratives indépendantes. Plusieurs m’ont dit : « Lorsqu’on est nommé président, c’est parce qu’on a de l’entregent et, parfois, on ne l’utilise pas à bon escient »…
Alors que l’on impose à tous les services de l’État, en raison de la pénurie d’argent public, un certain pourcentage d’économies, l’on ne peut pas admettre le discours d’une autorité administrative indépendante qui prétend ne pas être concernée.
On m’a aussi expliqué – nombre d’entre vous en sont d’ailleurs conscients – que si de nombreux services de l’État en sont actuellement à compter les trombones, on constate en revanche, à mesure que l’on s’éloigne de l’administration centrale, que certains opérateurs n’ont pas encore tout compris à la situation !
J’ai également trouvé saisissant que nombre d’autorités réclament plus de postes au motif que, au cours de la législature, diverses lois ont été adoptées qui leur donnent plus de travail. Je veux dire très clairement dans cet hémicycle que la réalité du pays n’est pas celle-là ! Dans toutes les entreprises de notre pays, grâce à la numérisation, il est demandé à tous les salariés de faire des efforts pour mieux s’organiser. On ne peut pas admettre le discours autosatisfait de certaines autorités administratives qui disent que leur budget est spécifique, qu’il doit augmenter, et peu importe ce qui se passe autour !
J’ai promis à Mme Le Dain de dire dans l’hémicycle que cette disposition sur la mutualisation ne vise pas à rassembler tout le monde dans le même immeuble, même si cela peut parfois être la solution. Pour autant, on ne peut pas admettre qu’un responsable d’autorité administrative indépendante refuse de mutualiser son service reprographie parce que quelqu’un d’autre risque de lire ce qu’il imprime ! On ne peut pas admettre qu’un président d’autorité administrative refuse de mutualiser ses marchés publics parce qu’il est indépendant !
La mutualisation, cela signifie que nous demandons aux autorités de proposer : nous n’imposons rien. Lorsqu’elles rendent compte au Parlement de leur activité, elles doivent faire part de leur réflexion sur la mutualisation, dire ce qu’elles envisagent de faire et avec qui. Elles doivent indiquer ce qu’elles pensent faire en optimisation, comment elles pensent améliorer le rapport qualité-prix du service public rendu à nos concitoyens. Cela me semble très important.
J’espère vous avoir rassurée, ma chère collègue, sur le fait que je ne veux pas regrouper tout le monde dans un même immeuble… Mais je ne peux pas vous suivre avec ce « dans la mesure du possible ». Je ne fais pas partie de la majorité, mais je suis là pour donner des moyens au gouvernement actuel et à ceux qui suivront pour faire face aux négociations avec les autorités. Cela me semble être l’intérêt général de notre pays.
Je souhaite revenir sur les mots « dans la mesure du possible ». Nous sommes législateurs, nous faisons la loi. Imaginez que le code de la route dispose qu’en agglomération, la vitesse est limitée à cinquante kilomètres par heure « dans la mesure du possible » ! Non, justement, ce n’est pas possible : une loi, c’est fait pour interdire ou pour autoriser, mais sûrement pas pour disposer « dans la mesure du possible ». Dans une directive ou dans une circulaire du ministre, pourquoi pas, mais pas dans la loi !
Non, madame la présidente, je ne le maintiens pas. J’ai mes réponses ! Je voulais juste appeler l’attention sur le fait que le principe d’une mutualisation n’aboutit pas forcément à des économies et surtout qu’il peut entraîner la création d’une sorte de privilège de caste pour des autorités différentes hébergées ensemble. C’est mon avis, mais je retire bien volontiers mon amendement.
L’amendement no 23 est retiré.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 49 .
L’amendement no 49 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 22, amendé, est adopté.
Cet amendement vise à garantir la publicité des avis des autorités administratives indépendantes sur les projets de loi.
Au moment où la France prend la présidence du Partenariat pour un gouvernement ouvert, et alors que le futur projet de loi relatif à la transparence vise à permettre une meilleure connaissance de l’empreinte législative, maintenir secret l’avis d’autorités indépendantes sur des textes législatifs n’est pas acceptable.
Un tel recul n’est pas compréhensible, d’autant que le projet de loi pour une République numérique a prévu de telles dispositions pour certaines autorités administratives indépendantes. Je ne souhaite pas qu’en légiférant aujourd’hui, nous rentrions en conflit ou du moins en désaccord flagrant avec les textes préalablement votés par cette majorité.
L’expertise des AAI et API sur les projets de loi est précieuse pour la bonne information des parlementaires. Il est de plus illogique de limiter la diffusion des avis sur des textes législatifs au seul Gouvernement, alors même que le vote de la loi relève du Parlement et que les AAI sont indépendantes.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 24 .
J’approuve le premier alinéa de l’amendement de Mme Attard, mais pas le second. Il faut effectivement rétablir l’article 23 sur un point : les autorités indépendantes doivent rendre compte annuellement de leur activité devant les commissions compétentes de l’Assemblée et du Sénat.
Je ne trouve pas pertinent que cet avis soit rendu public, notamment sur des projets de loi en cours, parce que ce serait clairement anticiper la décision et la liberté des parlementaires. Mais je défends mon amendement car je pense qu’il est important que les autorités indépendantes viennent rendre compte : elles sont créées par la loi, il faut qu’elles viennent rendre compte aux représentants de la loi.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Je m’en tiens à ce qui a été voté en commission. Avis défavorable sur l’amendement no 7 . Sur l’amendement no 24 , j’émets une très légère réserve. Soyons clairs : chaque autorité administrative indépendante ne peut pas rendre compte annuellement, physiquement, de son activité devant les commissions, en raison de l’encombrement desdites commissions ! Mais si cette obligation de compte rendu annuel s’entend comme pouvant revêtir toute forme, alors l’avis est favorable sur l’amendement no 24 .
Même argumentation. Mme Attard a fait référence au Partenariat pour un gouvernement ouvert : j’y suis très sensible, étant le représentant du Gouvernement au sein de ce Partenariat que je vais avoir l’honneur de présider à partir de septembre. L’idée est d’ouvrir au maximum les données publiques pour agir de la façon la plus co-élaborative possible dans les prises de décisions, les évaluations, les comptes rendus. J’y suis donc particulièrement sensible.
En revanche, le fait que l’avis « sur tout projet de loi est rendu public » dans votre amendement me paraît un peu fort : cela pourrait être facultatif, ou à la demande.
En ce sens, je préfère l’amendement de Mme Le Dain. Même si je ne suis pas sûr, en réalité, que le principe de l’annualité puisse être respecté, il me semble que cette mesure est plus souple et ouvre plutôt à une possibilité de réalisation opérationnelle. De ce fait, à l’instar du rapporteur, je peux donc émettre un avis favorable sur votre amendement, madame Le Dain.
Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour cette réponse. Cependant, vous êtes aux premières loges pour l’open data et pour l’open gouv : c’est vous qui serez en charge de la publication des textes concernant les données publiques. Nous avons travaillé tous ensemble il y a peu, dans cet hémicycle, sur le projet de loi pour une République numérique, dans le but de rendre les textes administratifs disponibles le plus largement possible.
La France est particulièrement en retard, dans le domaine de la transparence, par rapport aux autres pays européens, ce que je regrette vivement. Je ne comprends pas qu’on puisse aller à contresens : alors que des membres du présent gouvernement, et un Premier ministre, et un ministre de l’économie poussent vers cette transparence, on revient, petit à petit, avec des amendements ou au détour de textes, sur cette modernité que représente la transparence des avis des autorités indépendantes.
En tant que parlementaire, j’apprécie énormément avoir accès aux avis du CESE et j’estime que c’est son rôle. Quand des autorités indépendantes sont financées par de l’argent public pour élaborer des avis sur des projets de loi – plusieurs centaines de millions d’euros par an sont en jeu – le public qui les a financées aimerait pouvoir en disposer. C’est un minimum.
L’amendement no 7 n’est pas adopté.
L’amendement no 24 est adopté et l’article 23 est ainsi rédigé.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 1 tendant à insérer un article additionnel après l’article 23.
Cet amendement procède d’une logique très différente du précédent puisqu’il ne porte pas sur la transparence mais sur la capacité d’expertise à disposition du Parlement. Il vise à permettre aux présidents des deux assemblées de consulter les AAI sur les propositions de loi, et non sur les projets de loi, comme nous en discutions précédemment. Une disposition semblable a été votée pour la CNIL dans le cadre du projet de loi pour une République numérique, à l’initiative du Gouvernement. Il s’agit de généraliser cette possibilité à toutes les AAI, sur le même modèle. La totalité des autorités indépendantes fournissent des avis sur les projets de loi qui relèvent de leur champ de compétences. Certaines le font même sur les propositions de loi, comme c’est le cas pour le Défenseur des droits. Élargir cette possibilité ne ferait que renforcer l’expertise nécessaire à la rédaction des propositions de loi.
En commission, certains ont objecté que l’adoption d’un tel amendement conduirait à la création d’un quatrième pouvoir. Ce n’est absolument pas le cas. Le CESE, par exemple, ne peut pas être considéré comme un quatrième pouvoir. Les avis des autorités indépendantes sont des avis d’experts, dont nous avons grand besoin. J’espère qu’elles continueront à nous les donner, y compris sur les propositions de loi.
Je suis au grand regret de donner un avis défavorable. Les autorités administratives indépendantes dépendent de l’exécutif : il ne me semble pas pertinent de leur demander de répondre au Parlement dans un délai de quatre semaines. J’ajoute qu’elles constituent une exception à l’article 20 de la Constitution, qui prévoit que le Gouvernement, contrôlé par le Parlement, décide et conduit la politique de la nation et dispose de l’administration pour ce faire. Je ne suis pas sûr qu’il soit opportun que le Parlement demande des avis à ces démembrements de l’exécutif. Sur le plan constitutionnel, en termes d’équilibre des pouvoirs, cette proposition ne me convainc ni en droit ni en opportunité.
L’amendement no 1 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 22 .
Mon amendement porte sur l’alinéa 12, que je trouve remarquable. De manière générale, l’article 24 est tout à fait pertinent car il prévoit que le gouvernement rende compte de manière très précise, au premier euro, en annexe générale au projet de loi de finances, de l’activité de chacune des autorités indépendantes. Mais cela rend le gouvernement d’une certaine manière responsable du rapport de ces autorités qui, comme cela vient d’être dit, sont en quelque sorte dans son orbite. Il me semble pertinent de compléter l’alinéa 12 en précisant que cette présentation stratégique, pour chacune de ces autorités, devra être attachée au rapport d’activité défini à l’article 22 de la présente loi. Cela clarifiera les choses et nous évitera de chercher en vain des informations qui seront disponibles mais difficiles d’accès.
Pour être très franc, le Gouvernement n’est pas certain que cet amendement permette d’atteindre l’objectif de lisibilité recherché. Il s’en remet à la sagesse de votre assemblée.
L’amendement no 22 est retiré.
L’article 24 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 62 .
L’article 25, dans sa rédaction issue du Sénat, tend à supprimer la qualité d’AAI à une série d’instances, tout en leur donnant des garanties quant à l’indépendance de leur fonctionnement. Cette suppression peut susciter des débats et paraître même injustifiée pour plusieurs autorités : au regard de leur rôle, de leurs missions et de leur champ de compétences, il importe de garantir non seulement les modalités pratiques d’indépendance des travaux de ces autorités, mais aussi leur statut même d’autorité indépendante.
L’amendement no 62 comporte deux dispositions. Le I concerne l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ACPR. Cet alinéa aurait été cohérent si cette dernière avait été réintroduite par amendement dans la liste des autorités administratives. Cela n’a pas été le cas. Je me permets donc de suggérer humblement à M. le secrétaire d’État de rectifier l’amendement du Gouvernement en supprimant le I. Quant au II, il vise à maintenir le statut d’autorité indépendante du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé – CCNE. J’ai déjà dit plus tôt que la commission, comme le secrétaire d’État, souhaite voir le Comité qualifié d’institution indépendante. Nous nous rallions donc sans problème à cette proposition. Sous réserve que le Gouvernement rectifie son amendement en supprimant le I, avis favorable de la commission.
Monsieur le secrétaire d’État, acceptez-vous cette proposition de rectification ?
L’amendement no 62 est donc rectifié et se lit ainsi : « Supprimer les alinéas 6 à 11. »
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 30 .
L’amendement no 30 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 32 .
L’amendement no 32 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 72 .
L’amendement no 72 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 74 .
L’amendement no 74 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 25, amendé, est adopté.
L’article 26 est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 11 rectifié .
Il n’était pas possible que le Parlement commence à travailler sur les autorités administratives indépendantes sans se poser la question de leur nombre et de leur périmètre. Le rapport établit la liste des seize autorités dont l’existence est liée soit à un engagement européen de la France, pour treize d’entre elles, soit à un engagement international comme la lutte contre le dopage, pour trois d’entre elles. La quasi-totalité de ces engagements n’imposent pas de créer une autorité dédiée, mais une structure indépendante. Depuis 1978, souvent avec de bonnes raisons, parfois avec de moins bonnes, des raisons émotionnelles par exemple, nous n’avons cessé de créer des autorités. Dans sa rédaction issue du Sénat, le texte visait à fermer le robinet en réservant au législateur la possibilité de créer une AAI. Nous avons pensé qu’il fallait à cette occasion reposer la question du nombre et du périmètre de ces autorités.
Pour vous donner une idée du travail réalisé, j’ai commencé par me tourner vers la commission des finances, où l’on m’a fait observer que, au vu de la jurisprudence, proposer une fusion des autorités indépendantes serait jugé irrecevable au titre de l’article 40. C’est très étonnant, car une fusion permet de faire des économies ! J’ai donc le plaisir de vous indiquer que le président de la commission des finances a accepté de faire évoluer la jurisprudence. Pour ceux de nos collègues qui continueront de travailler sur le sujet, j’indique que la fusion d’autorités de même niveau ne sera désormais plus jugée irrecevable au titre de l’article 40.
Ensuite, je me suis demandé s’il existait des autorités dont les services pouvaient être soit transférés vers une administration centrale, soit fusionnés. J’ai commencé par en proposer huit au Gouvernement. Après le premier échange, il en restait quatre. Après le deuxième échange, trois. Après le troisième, deux. Ce soir, il en reste une...
L’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires n’est pas celle-là mais, à mon sens, ses compétences pourraient être transférées soit vers les services de l’État, soit vers une autre autorité. Mon amendement prévoit donc de mettre fin aux activités de l’ACNUSA à la fin du mandat en cours du dernier de ses membres nommés, le 7 octobre 2021. D’ici là, charge au Parlement de voter de nouvelles dispositions pour que ses compétences soient rendues aux ministères ou aux autorités. Même si je crains de ne pas avoir le soutien du Gouvernement, je demande bravement le soutien de l’Assemblée pour que l’ACNUSA soit une des deux seules autorités qui fassent l’objet d’une rationalisation.
Monsieur le rapporteur, je ne regrette pas de vous avoir demandé de présenter votre amendement car nous avons appris beaucoup de choses, notamment concernant la nouvelle application de l’article 40. J’espère que ces nouvelles pratiques se généraliseront à l’ensemble des députés et que vous ne serez pas le seul à y échapper !
Sourires.
Le Gouvernement rappelle qu’en créant l’ACNUSA, l’objectif était de disposer d’une institution véritablement indépendante pour favoriser la concertation sur les aéroports, notamment afin de lutter contre les nuisances sonores. Vous imaginez comme je suis attentif à ce sujet ! Même si les projets aéroportuaires aériens ont pu évoluer, il est important de préserver cette indépendance. L’ACNUSA dispose d’un pouvoir de sanctions. Auparavant, les décisions de sanction étaient prises sur proposition de la Commission nationale de prévention des nuisances, dont les membres étaient nommés par le ministre chargé de l’aviation civile. Le transfert intégral de la procédure, hors constatation des manquements et instructions techniques, par les agents de l’État a également permis de sécuriser sur le plan juridique les décisions de sanctions. Avis défavorable.
Ces débats traduisent une nouvelle fois l’incohérence du travail législatif que nous effectuons. M. le rapporteur nous indique qu’il a commencé par proposer la suppression de quatre autorités, puis de trois, puis de deux, et enfin d’une seule. Et ça tombe sur l’ACNUSA !
Le plaidoyer de M. le secrétaire d’État pour l’ACNUSA a convaincu sans grande difficulté la représentation nationale, ou tout au moins ceux qui sont présents dans cet hémicycle. Les nuisances aéroportuaires sont encore une réalité pour nombre de nos concitoyens et l’existence de cette autorité est plus que jamais nécessaire. Je tiens à exprimer mon profond trouble sur les travaux que nous menons et mon souhait de voir l’avis du ministre suivi.
Manifestement, mes explications n’ont pas été suffisamment claires. Proposer de modifier un périmètre ne revient pas à proposer de supprimer les obligations.
L’État a songé à la création de certaines autorités parce qu’il considérait qu’il n’était plus légitime pour exécuter certaines missions. Il est donc normal que le législateur se demande régulièrement si, vraiment, un ministère n’est toujours pas légitime pour exécuter ces missions et si, en conséquence, il est toujours légitime d’en confier l’exécution à une autorité.
En outre, s’agissant des autorités dédiées, il est tout aussi légitime pour le législateur de se demander quelques années après leur création si leur existence est toujours justifiée ou s’il n’est pas possible de les regrouper. Je prendrai l’exemple de la concurrence. L’Autorité de la concurrence mérite tout notre respect : elle rapporte 1 milliard d’euros à l’État pour quelque 20 millions d’euros par an de frais de fonctionnement. Or, parallèlement, un grand nombre d’autorités sectorielles ont été créées lors de l’ouverture de différents marchés à la concurrence. Il me semble légitime que le Parlement se demande, quelques années après leur création, si l’existence de telle ou telle autorité sectorielle est toujours justifiée ou si l’Autorité de la concurrence, qui a la compétence générale, ne pourrait pas en reprendre les missions.
Ce débat ne vise donc pas à conclure à l’illégitimité de la mission de l’ ACNUSA mais à se demander si la manière dont le législateur pense que cette mission peut être remplie peut évoluer. J’ai toutefois compris que le Gouvernement n’était pas favorable ce soir à cette évolution.
Monsieur le rapporteur, votre plaidoyer va à l’encontre de l’amendement que vous défendez : vous arguez en effet que certaines autorités n’ont plus de raison d’exister, notamment celles qui ont été créées pour accompagner l’ouverture de certains secteurs à la concurrence. Or l’objectif de l’ACNUSA n’a pas été d’organiser l’ouverture à la concurrence de secteurs tels que les transports publics ou la poste, comme il a fallu le faire ces dernières décennies ! Cette autorité doit demeurer indépendante, parce qu’elle a pour mission de lutter contre les nuisances sonores aéroportuaires. Pour avoir bien connu son premier président, M. Roger Léron, je peux témoigner du rôle essentiel que cette autorité a joué et doit continuer de jouer.
J’ai simplement cité l’exemple de la régulation. Si nous avons créé l’ACNUSA, c’est parce qu’à un moment donné l’État ne s’est plus senti légitime ni suffisamment fort pour répondre à tous ceux qui manifestaient contre les bruits engendrés par les aéroports. Il a considéré qu’une autorité indépendante serait plus légitime à porter la parole publique. Ce n’est qu’un exemple. Il n’est pas illégitime de se demander si les raisons qui ont présidé, à un moment donné, à cette création n’ont pas évolué. Mais il est inutile de prolonger les débats puisque, je le crains, leur issue est déjà connue.
L’amendement no 11 rectifié n’est pas adopté.
L’article 27, amendé, est adopté.
Article 27
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 50 .
L’amendement no 50 est adopté.
L’Autorité de régulation de la distribution de la presse – ARDP – et le Conseil supérieur des messageries de presse – CSMP – sont aujourd’hui engagés dans plusieurs chantiers importants tels que l’homologation des barèmes des sociétés coopératives de messageries de presse et le déploiement du système d’information commun aux deux messageries, enjeu majeur de mutualisation des coûts qui a déjà fait l’objet de plusieurs décisions de leur part. Ces chantiers, qui sont structurants pour l’ensemble de la filière, nous invitent à exclure toute fragilisation du schéma de régulation de la distribution de la presse, tel qu’issu de la récente loi du 17 avril 2015. L’amendement no 79 vise donc à supprimer les dispositions prévoyant la mise en extinction de l’ARDP et le transfert de ses missions au CSMP.
La commission des lois avait considéré que l’ARDP devait s’éteindre à la fin de son mandat, c’est-à-dire le 9 novembre 2019, ce qui lui laissait le temps de s’organiser. J’ai toutefois compris que le Gouvernement a sur ce point la même position que pour l’ACNUSA.
Je me permets toutefois d’appeler une nouvelle fois votre attention, madame la présidente, sur l’intérêt de l’amendement no 26 , qui illustre le fait que la commission des finances autorise bien, comme je l’ai déjà indiqué, la fusion d’organismes de même nature. Certes, j’ai bien compris que cette première fusion n’aurait pas une vie très longue, mais je souhaite beaucoup de succès à ses petites soeurs qui verront le jour dans les mois ou années à venir, en vue de fusionner des organismes et de rationaliser l’action administrative dans notre pays.
Avis défavorable à l’amendement no 79 .
Je voudrais vraiment que la représentation nationale fasse preuve, sur ce sujet, de lucidité. Je soutiens l’amendement du Gouvernement. L’amendement no 26 nous propose de supprimer une autorité indépendante qui a été créée il y a près de cinq ans par l’ancienne majorité, dans la loi de juillet 2011 relative à la régulation du système de distribution de la presse. Nous avons jugé que cette autorité indépendante avait réalisé un si bon travail que nous avons décidé unanimement, dans une loi adoptée en avril 2015, il y a donc à peine un an, de renforcer ses pouvoirs. Et voilà qu’on nous propose en avril 2016 de la supprimer ! L’incohérence est totale. Il ne s’agit pas d’une question politique puisque cette autorité indépendante a été créée, je le répète, par la majorité à laquelle vous apparteniez, monsieur Geoffroy – je vous vois particulièrement attentif – M. Warsmann étant alors président de la commission des lois.
De fait, cette volonté de suppression de l’ARDP repose sur une confusion que je voudrais lever. Le CSMP est un organe de régulation de la profession. L’ARDP est une autorité administrative indépendante. Suggérer, comme le fait le rapporteur, de transférer à compter de 2019 les missions de l’ARDP à l’Autorité de la concurrence est d’autant plus absurde que c’est l’Autorité de la concurrence elle-même, via le rapport de son président, M. Lasserre, qui, en 2009, a demandé la création de l’ARDP !
Il faut savoir que celle-ci a réalisé un remarquable travail de régulation dans ce secteur très fragilisé qu’est la distribution de la presse, contribuant notamment, par une de ses actions les plus méritantes, à revaloriser la rémunération des diffuseurs de presse et des kiosquiers. Je serais bien étonné qu’aucun député n’ait dans sa circonscription des diffuseurs de presse ou des kiosquiers !
L’article 27 bis, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 65 .
L’amendement no 65 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 90 rectifié .
L’amendement no 90 rectifié , accepté par la commission, est adopté.
L’article 28, amendé, est adopté.
L’article 29 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 66 .
L’Assemblée a déjà refusé qu’on fasse exception au caractère renouvelable une fois du mandat des membres d’une autorité indépendante. Nous avons maintenant affaire à des amendements de conséquence qui veulent réintroduire, autorité par autorité, ce caractère renouvelable rejeté par l’Assemblée. Avis défavorable.
Monsieur le secrétaire d’État, voudriez-vous présenter votre amendement de manière moins succincte ?
Le rapporteur a bien rappelé l’historique de la discussion. Ce qu’il m’intéresserait de savoir, c’est si l’amendement du Gouvernement tombe, ce que je ne crois pas. M. le rapporteur ne m’en voudra donc pas de ne pas le retirer. Je démontrerai ainsi la détermination du Gouvernement à maintenir le caractère non renouvelable du mandat des membres de l’ARCEP prévu par son statut actuel – je ne reviendrai pas sur le débat relatif aux dispositions particulières.
L’amendement no 66 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 85 .
Cet amendement obéit à la même logique que le précédent.
Madame la présidente, je ne comprends pas. Cet amendement supprime l’alinéa qui stipule : « Les membres de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes exercent leurs fonctions à temps plein. » Pourquoi le Gouvernement veut-il supprimer le fait, pour les membres de cette autorité, d’exercer à temps plein leurs fonctions ?
Cet amendement répond à la même philosophie que le précédent sur le caractère non renouvelable du mandat. Il faut par ailleurs savoir qu’une obligation de départ uniforme de trois ans serait excessive car elle empêcherait en pratique de nommer des professionnels du secteur comme membres du collège, en raison de la concentration de ce secteur, qui est très spécifique. Cette obligation priverait l’ARCEP du bénéfice de l’expérience et des compétences des membres issus du secteur qu’elle régule, dont la connaissance particulière du secteur est pourtant indispensable. D’où la réflexion que nous avons menée sur la question des incompatibilités.
Je concède que le sujet n’est simple ni à expliquer ni à théoriser.
Monsieur le rapporteur, avez-vous compris les explications du ministre et vous sentez-vous capable d’émettre un avis sur cet amendement ?
Mes capacités ne m’ont pas permis, madame la présidente, de suivre le Gouvernement. Je crains même que l’amendement ne vise pas le bon alinéa. Donc, avis défavorable.
L’amendement no 85 est adopté.
L’article 30, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 67 .
L’amendement no 67 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 80 .
L’amendement no 80 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 31, amendé, est adopté.
Article 31
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 51 rectifié .
L’amendement no 51 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 31 bis, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 95 .
L’amendement no 95 , repoussé par la commission, est adopté.
L’article 32, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 69 .
L’amendement no 69 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 96 .
L’amendement no 96 , repoussé par la commission, est adopté.
L’article 33, amendé, est adopté.
Les articles 34, 34 bis et 34 ter sont successivement adoptés.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 70 .
Mais on ne sait même pas de quoi on parle ! Personne ne comprend rien. Je suis désolée, monsieur le secrétaire d’État, mais je vous demande de présenter votre amendement.
Bien sûr, madame la présidente. Il s’agit de rétablir les dispositions des dixième et onzième alinéas de l’article L. 132-2 du code de l’énergie, qui réglementent les conflits d’intérêts des membres de la Commission de régulation de l’énergie. C’est effectivement un sujet important.
Cet article L. 132-2 prévoit que les membres du collège sont nommés en fonction de leurs qualifications dans le domaine de l’énergie, dans des domaines très spécifiques. Les dispositions envisagées conduiraient à limiter le vivier des membres à des personnes ayant acquis leur expertise dans l’administration ou dans un cadre académique. Ainsi, les dispositions de l’article 13 de la proposition de loi rendraient difficile la nomination de membres du collège issus du secteur de l’énergie, même en fin de carrière ou ayant détenu des actions juste avant leur nomination, en leur interdisant de délibérer sur les affaires concernant ces entreprises ou des entreprises du même groupe pendant au moins trois ans, compte tenu de la concentration actuelle du marché de l’énergie.
Nous avons déjà eu un débat similaire tout à l’heure à propos de l’ARCEP : c’est probablement pour cela, madame la présidente, que nous sommes allés trop vite, omettant d’éclairer la représentation nationale.
L’amendement no 70 est adopté.
L’article 35, amendé, est adopté.
L’article 36 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 71 .
L’amendement no 71 , accepté par la commission, est adopté et l’article 37 est ainsi rédigé.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 101 .
L’amendement no 101 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement no 55 .
Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 12, qui prévoit l’abrogation de l’article 26 bis de la loi no 90-55 du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques. Pour ma part, je propose de rétablir cet article 26 bis, qui dispose : « La commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques établit chaque année un rapport sur son activité qui contient des éléments sur l’application des lois et règlements applicables au financement de la vie politique. Ce rapport est adressé au Gouvernement et aux bureaux des assemblées parlementaires et est rendu public. »
Je ne comprendrais pas que, dans un texte relatif aux autorités administratives, on supprime de facto une disposition aussi importante relative à une fonction de la Commission nationale des comptes de campagne ! L’alinéa 12 supprimerait ni plus ni moins que l’obligation pour cette commission de rendre compte de son activité au Gouvernement et au Parlement. Je suis un peu surprise ! Pour la bonne transparence de la vie politique et des coûts associés, il me semble qu’il faut rétablir cet article 26 bis et donc supprimer l’alinéa 12 du présent article.
L’amendement no 55 est adopté.
L’article 38, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 73 .
L’objectif de cet amendement est extrêmement simple : il s’agit de repréciser la durée du mandat des membres du CSA, à savoir six ans non renouvelables. Nous poursuivons ainsi la discussion que nous avons déjà eue, avec des arguments incontestablement clivés.
Comme l’a dit le président Bloche, le CSA est un organisme émetteur de positions particulièrement fortes, ce qui justifie notre souci de transparence et d’éthique. Le caractère non renouvelable du mandat de ses membres constitue incontestablement un gage d’indépendance.
Cet amendement vise aussi à supprimer d’autres dispositions, afin de renforcer le régime d’incompatibilités. Nous rétablissons notamment l’interdiction faite aux membres du CSA de détenir un mandat électif. Compte tenu des missions assignées au Conseil en matière de pluralisme politique, il n’est sans doute pas de bonne politique que ses membres puissent exercer par ailleurs un mandat électif, quelles que soient la qualité de ce mandat et l’indépendance avec laquelle ils peuvent l’exercer.
Je me suis déjà exprimé longuement au cours de nos débats. Avis défavorable par cohérence.
Je souhaite l’adoption de l’amendement no 73 du Gouvernement. Je remercie M. le secrétaire d’État d’avoir pris le temps de le présenter et d’avoir dit à quel point il était important, pour l’indépendance des médias et donc pour la démocratie dans notre pays, que l’autorité de régulation de l’audiovisuel qu’est le CSA ne voie pas ses membres renouvelés au terme des six années de leur mandat.
L’amendement no 73 est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 43 .
L’amendement no 43 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 86 .
Comme l’amendement no 73 , il concerne le mandat des membres du CSA.
L’amendement no 86 , repoussé par la commission, est adopté.
L’article 39, amendé, est adopté.
L’article 40 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 75 .
L’amendement no 75 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 41, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 76 .
L’amendement no 76 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 42, amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 44 .
L’amendement no 44 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 43, amendé, est adopté.
Article 43
Comme le proposait le rapporteur en commission, cet amendement inscrit dans la loi la fin de vie de la HADOPI à compter de l’expiration du mandat en cours du dernier de ses membres nommés, c’est-à-dire le 4 février 2022.
Il est nécessaire de remettre en question l’existence et les missions de la HADOPI, comme le promettait le Président de la République durant la campagne présidentielle. L’échec de la HADOPI dans ses missions, malgré son budget très supérieur à celui de nombreuses AAI ou API, a été souligné par la commission d’enquête du Sénat et doit interpeller le législateur. Cette remise en question doit se faire dans le cadre d’un débat parlementaire dédié, comme le propose cet amendement qui inscrit dans la loi la date de la disparition de la HADOPI, fixée à 2022.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 10 .
Vous comprendrez que le Gouvernement y soit défavorable. Bien sûr, il est tout à fait légitime de débattre et de réfléchir aux contours de la régulation exercée par la HADOPI en termes culturels, numériques, entrepreneuriaux et économiques. Néanmoins, le Gouvernement souhaite mener une large réflexion sur ce sujet. Malgré la grande qualité des personnes ici présentes, je ne pense pas que décider de la disparition de la HADOPI dans ces conditions soit compatible avec l’image que nous voulons donner du Parlement français. Même si je comprends cette discussion, il me semble que prendre une telle décision nuitamment,…
…alors qu’il y aura une deuxième lecture au Sénat, ne rendrait pas service à votre belle assemblée. Avis défavorable.
J’ai un peu de mal à comprendre certains comportements schizophrènes. Pendant des années, j’ai entendu un candidat et des personnes appartenant actuellement au Gouvernement réclamer la fin de la HADOPI, que désormais ils maintiennent à tout prix sous perfusion. Je dis bien « sous perfusion » car, lorsqu’on diminue les moyens d’une haute autorité, soit on désire qu’elle meure à petit feu, soit on désire qu’elle n’exerce que la moitié des missions qui lui ont été confiées initialement.
En tout cas, d’un point de vue humain et même de simple management, il est tout simplement inacceptable de s’y prendre ainsi. Notre pays a besoin de décisions claires, dans un sens ou dans un autre. À partir d’un certain moment, il faut choisir. On ne peut pas prononcer, pendant des années, des déclarations tonitruantes selon lesquelles la HADOPI ne sert à rien et, des années plus tard, maintenir sous perfusion – je maintiens ces termes – une haute autorité dont on peut s’interroger sur l’utilité, les missions et les coûts en termes de personnel. Il faut qu’une décision soit prise ! Nous devons avoir un vrai débat parlementaire. Puisqu’il y a eu un vrai débat parlementaire lors de sa création, je souhaiterais, au nom de mon groupe, que soit organisé un vrai débat pour décider du maintien ou non de ce type de haute autorité dans notre paysage.
L’amendement no 10 est retiré.
La séance, suspendue à vingt et une heures quinze, est reprise à vingt et une heures vingt-cinq.
La séance est reprise.
Je mets aux voix l’amendement no 8 de Mme Attard.
L’amendement no 8 est adopté.
L’article 43 bis, amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 28 .
L’amendement no 28 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 54 .
Les avis de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique concernant le pantouflage ne sont actuellement pas rendus publics. Cela constitue une source importante de difficultés, notamment quand un avis est assorti de réserves, dont on ne peut savoir si elles seront bien suivies. La Haute autorité n’a en effet pas les moyens de s’assurer elle-même du respect de ces réserves.
L’amendement, suivant une préconisation formulée par la Haute autorité dans son rapport d’activité pour 2015, propose que les avis d’incompatibilité ou de compatibilité sous réserve puissent être rendus publics. Cette diffusion permettrait aussi de diffuser plus largement les règles déontologiques.
L’amendement no 54 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 44, amendé, est adopté.
L’article 45 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 77 .
Le présent amendement vise à faire obstacle à ce que les déclarations d’intérêts et les déclarations de patrimoine des membres de la Haute autorité pour la transparence et de la vie publique soient rendues publiques. Bien que cette Autorité soit en charge d’une mission spécifique, cette disposition soulève une difficulté constitutionnelle dans la mesure où ses membres ne sont pas en charge de fonctions politiques – considérant 22 de la décision 2013-676 DC du 9 octobre 2013.
Il s’agit d’une disposition votée par le Sénat – cela n’émane pas de l’Assemblée nationale. Les membres de la Haute Autorité ont, semble-t-il, demandé aux sénateurs à être soumis à une déclaration d’intérêts et une déclaration de situation patrimoniale dans la mesure où ils sont chargés de contrôler les déclarations des autres.
Tel est l’objet de l’alinéa 8. L’amendement du Gouvernement qui vise à le supprimer n’a pas été examiné en commission. Je ne suis donc pas en mesure de donner un avis. À chacun de se faire une opinion.
L’amendement no 77 est adopté.
L’article 46, amendé, est adopté.
L’article 47 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 81 , portant article additionnel après l’article 47.
Pour reprendre les mots employés tout à l’heure par M. le secrétaire d’État : avis très favorable. Il s’agit d’un amendement exemplaire, par lequel le Gouvernement demande au Parlement le pouvoir de prendre par ordonnances toutes mesures en vue de faire évoluer le statut de l’Autorité de régulation des jeux en ligne en procédant par fusion avec d’autres entités ou par transfert de ses compétences et en distinguant le cas échéant entre les compétences qui doivent être exercées par une autorité indépendante et celles qui peuvent l’être par une administration.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous félicite d’avoir présenté cet amendement et je souhaite qu’il y ait, dans les mois et années à venir, d’autres amendements permettant de faire évoluer notre législation dans un sens favorable.
L’amendement no 81 est adopté.
L’article 48 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 106 .
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 46 .
L’amendement no 46 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement introduit un dispositif dérogatoire pour la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, en vue d’exclure le renouvellement intégral de cette commission au 30 avril 2020, date fixée par l’ordonnance du 31 juillet 2015 pour toutes les AAI. Nous souhaitons en effet que l’expérience et la mémoire des membres de la Commission nationale puissent être conservées. Son renouvellement intégral la déséquilibrerait complètement, à une période marquée par de nombreuses échéances électorales et où il serait difficile de se passer de l’expertise nourrie par l’expérience des précédentes échéances.
Le sous-amendement no 102 vise à éviter un renouvellement intégral de la commission en 2020.
Dans la même ligne, le sous-amendement no 104 prévoit que le mandat des membres de cette commission nommés postérieurement à la publication de la future loi issue de cette proposition de loi sera de cinq ans, et non pas limité à 2020, ce qui me semble être la volonté des auteurs de l’amendement no 53 .
Le sous-amendement no 105 se situe lui aussi sur la même ligne.
Quant au sous-amendement no 107 , il garantit que, de la même manière, le mandat des membres de la commission sera de cinq ans, et ne sera pas limité au 30 avril 2020.
Sous réserve de l’adoption de des sous-amendements, avis favorable à l’amendement no 53 . Il me semble du reste que M. François Logerot, président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, a souligné hier qu’il y avait utilité à agir en la matière. Je remercie donc les auteurs de cet amendement d’avoir profité de cette proposition de loi pour résoudre cette difficulté.
Avis favorable aux sous-amendements présentés par le rapporteur et à l’excellent amendement no 53 de M. Romain Colas, excellent député de l’Essonne.
L’amendement no 53 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour soutenir l’amendement no 48 rectifié .
L’amendement no 48 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 49, amendé, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 78 .
Même s’il est arrivé tardivement, cet amendement devrait plaire au rapporteur. Il tend en effet à réformer la Commission de sécurité des consommateurs, dont le Conseil d’État a estimé, dans son étude de 2001, qu’elle était une autorité administrative indépendante, afin d’en permettre le transfert au sein du Conseil national de la consommation. Je ne développerai pas davantage les arguments en faveur de ce transfert, qui me semble très souhaitable.
Vous avez pressenti, monsieur le secrétaire d’État, que vous auriez le plein soutien du rapporteur.
Sourires.
L’amendement no 78 est adopté.
L’article 50 est adopté.
La proposition de loi est adoptée.
Prochaine séance, mardi 3 mai, à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt et une heures trente-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly