Intervention de François Rochebloine

Séance en hémicycle du 28 avril 2016 à 15h00
Lutte contre le hooliganisme — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les événements sportifs sont des moments de convivialité, de loisir et de partage où les débordements violents et racistes n’ont pas leur place.

Pourtant, en dépit de la législation existante, la violence de certaines personnes qui se disent supporters est encore présente dans les enceintes sportives et à leurs abords. Ces derniers mois, au moins trois matchs ont été ternis par de violents affrontements entre supporters, ce qui est profondément regrettable. Contraires à l’éthique même du sport, ces débordements doivent être sanctionnés avec la plus grande fermeté.

Aussi, comme mon collègue et ami Michel Zumkeller – orateur sur ce texte en première lecture – je salue le dépôt de cette proposition de loi à quelques semaines maintenant de l’Euro 2016, événement qui – nous le savons tous – constitue un enjeu majeur en termes de sécurité.

Au-delà de la perspective de l’Euro 2016, l’examen de ce texte est motivé par la volonté de renforcer un arsenal législatif que la France a mis tardivement en place par rapport à d’autres pays européens. M. le rapporteur l’a dit tout à l’heure, il a fallu attendre les années 2000 pour que s’esquissent des mesures probantes en matière de lutte contre le hooliganisme.

L’interdiction administrative de stade, décidée par le préfet, a été instaurée en 2006 de même que la procédure de dissolution administrative des groupements de supporters racistes ou violents.

La lutte contre le hooliganisme a commencé à se structurer à partir de 2009 avec la mise en place d’une Division nationale de lutte contre le hooliganisme – la DNLH – chargée de gérer les débordements, de coordonner les renseignements et d’appuyer le maintien de l’ordre des événements sportifs.

Puis, une accélération s’est produite à partir de 2010. La procédure de dissolution administrative des groupements de supporters racistes ou violents a été complétée par une procédure de suspension d’activité de ces groupements pour une durée maximale de douze mois.

Ensuite, le cadre juridique relatif aux interdictions de stade a été renforcé. La loi du 14 mars 2011 oblige notamment les préfets à communiquer aux fédérations et groupements sportifs l’identité des interdits de stade et leur en a ouvert la faculté s’agissant des associations de supporters.

La durée maximale de l’interdiction administrative de stade a par ailleurs été portée à six mois en 2010, puis à douze mois en 2011 – on a ainsi observé entre 2011 et 2014 une pacification des stades et de leurs abords.

Néanmoins, les violences persistent et la saison footballistique 2014-2015 a été marquée par une hausse de près de 20 % des interpellations au cours des championnats de Ligue 1 et de Ligue 2 – n’est-ce pas, monsieur le secrétaire d’État ?

Cette proposition de loi est donc nécessaire si nous voulons disposer d’un arsenal législatif qui favorise le dialogue avec les supporters et nous permette de mieux lutter contre le hooliganisme.

Le premier apport de ce texte est de clarifier les conditions de refus d’accès et de délivrance par les organisateurs de titres d’accès à une manifestation sportive. Le texte autorise en outre ces derniers à mettre en oeuvre des traitements automatisés de données à caractère personnel.

L’utilisation des fichiers a suscité des interrogations ces dernières années. En juin 2015, la CNIL avait mis en demeure le PSG de respecter le cadre des autorisations relatives aux interdictions et exclusions de stade qu’elle a délivrées.

En septembre dernier, c’est un arrêté signé par le ministre de l’intérieur permettant la création d’un fichier « Stade » qui avait été annulé par le Conseil d’État. Ce dernier avait ainsi estimé que le fichier ne respectait pas les exigences de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique et aux libertés, notamment en collectant des données qui n’étaient pas « adéquates et pertinentes » avec le but recherché.

L’article 1er, coeur du dispositif de ce texte, permet de préciser ce point. Nous sommes favorables à sa rédaction telle que modifiée par l’Assemblée nationale et le Sénat, laquelle permet de mieux encadrer cette disposition. Cette dernière version retient comme motif de refus d’accès et de délivrance des titres d’accès le non-respect des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatif à la sécurité.

En conséquence, les traitements automatisés que les organisateurs sont autorisés à mettre en place devront porter sur ces manquements. L’article 1er prévoit en outre de placer la CNIL et le Conseil d’État au coeur de ce dispositif, ce dont nous nous félicitons.

L’utilisation de ces fichiers doit également reposer sur la coopération entre les clubs, les associations de supporters, la justice, les fédérations et, évidemment, la Division nationale de lutte contre le hooliganisme.

Tel est d’ailleurs l’objectif de l’article 3, qui prévoit la possibilité de communiquer l’identité des personnes faisant l’objet d’une interdiction judiciaire ou administrative de stade aux organismes sportifs internationaux. Il s’agit d’une disposition importante dans la perspective de l’Euro 2016.

Par ailleurs, nous sommes favorables à l’allongement de la durée d’interdiction des stades. Nos voisins d’outre-Manche ont mené cette politique pour combattre les années noires de l’hooliganisme dans le foot anglais au cours des années 1970-1980. Le durcissement des peines d’interdiction de stade a un effet dissuasif très important, notamment lorsqu’il s’accompagne – comme dans les stades anglais – d’une sanction bien souvent plus lourde de la part des clubs. Repousser l’interdiction de stade d’une à deux années, voire à trois ans en cas de récidive, est une mesure qui saura dissuader certains perturbateurs ne respectant pas l’éthique sportive.

Assurer la sécurité dans les stades impose également d’être vigilant lors de la vente des titres d’accès aux événements. Pour lutter contre les perturbateurs qui tenteraient d’accéder au stade, il est évidemment nécessaire d’encadrer la vente des abonnements annuels, comme le prévoit l’article 4 introduit par notre assemblée.

Toutefois, la répression ne peut être l’unique chemin pour lutter contre le hooliganisme. La prévention, le travail de terrain et la pédagogie doivent être également au coeur de notre stratégie.

Les clubs de supporters, les centres de formation des jeunes, les associations antiracistes, les clubs de foot, la Division nationale de lutte contre le hooliganisme, la Ligue de football professionnel et la Fédération française de football doivent poursuivre, ensemble, cet objectif.

Nous saluons donc l’adoption de deux amendements – que j’avais cosignés – visant à créer un organisme national représentatif des supporters et à instaurer au sein de chaque club professionnel un ou plusieurs référents chargés d’assurer des échanges réguliers avec les supporters du club.

Face aux comportements déviants dans les stades, nous devons tendre la main aux interlocuteurs que sont les groupes de supporters afin d’instaurer un dialogue et de mettre en place des solutions concrètes pour lutter contre la violence dans les stades. Les clubs de supporters ont un rôle incontournable dans la régulation des comportements à risque.

Pour l’ensemble de ces raisons, vous l’aurez compris, le groupe UDI votera ce texte – comme cela fut le cas en première lecture – et nous ne pouvons que nous féliciter.

Je terminerai en rappelant que l’on demande aux clubs d’agir de plus en plus en matière de sécurité – ce n’est pas M. le secrétaire d’État, qui connaît parfaitement la situation, qui me dira le contraire. C’est très bien de demander que la sécurité soit toujours plus grande dans les stades et que les stadiers soient de plus en plus nombreux, mais qui paie ? Les clubs ! Aujourd’hui, ils sont confrontés à des dépenses supplémentaires et cela soulève un réel problème dont il faut tenir compte.

Cela étant dit, encore une fois, je ne peux que me réjouir de cette proposition de loi qui, j’en suis persuadé, sera adoptée à l’unanimité. Je le dis souvent : la politique divise et le sport rassemble ! Aujourd’hui, nous nous rassemblons même autour de trois textes, en l’occurrence proposés par le groupe Les Républicains, ce dont je me réjouis. Malheureusement, je ne pourrai pas participer au vote car, à cause de la grève à la SNCF, je dois regagner ma circonscription.

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