Intervention de Harlem Désir

Séance en hémicycle du 28 avril 2016 à 9h30
Levée des sanctions imposées à la russie — Discussion générale

Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes :

Nous n’avons pas de désaccord sur ce point. La Russie est un partenaire avec lequel il est dans notre intérêt commun d’avoir une coopération aussi large que possible, dans de très nombreux domaines, mais une coopération fondée sur des principes clairs au premier rang desquels figure le respect du droit international.

La France fonde sa diplomatie sur le droit international et sur son respect en toutes circonstances : nous pensons en effet que c’est la condition de la sécurité comme de la paix.

Les sanctions, vous le dites avec raison, ont des conséquences négatives pour l’économie russe – c’est leur principe même – et, dans une certaine mesure, pour l’économie européenne. Mais ce serait une erreur de considérer ces sanctions comme une fin en soi, ou de les présenter comme telles, ou de penser que l’objectif serait ou devrait être de les maintenir indéfiniment. Ces mesures constituent des réactions à des violations graves du droit international et leur adoption vise en premier lieu à conduire la Russie à se mettre en conformité avec ses obligations et à créer les conditions qui nous permettront de les lever.

Chaque type de mesure restrictive adopté par l’Union européenne l’a été pour des raisons très précises. Des sanctions ciblées ont été adoptées dès le 17 mars 2014 à l’encontre d’individus ou d’entités russes et séparatistes ayant tiré profit de l’annexion illégale de la Crimée ou y ayant directement joué un rôle.

Le prétendu référendum du 16 mars 2014 s’est déroulé en présence de forces armées russes, comme l’a reconnu le président Poutine lui-même, et en l’absence de tout observateur international. Je rappelle que c’est toute la communauté internationale qui a condamné l’annexion de la Crimée comme le référendum qui y a été organisé, au travers des résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies. Ces sanctions ont été par la suite étendues à une liste d’individus et d’entités dont l’action entrave la bonne mise en oeuvre des Accords de Minsk.

Au-delà de ces mesures individuelles, l’Union européenne a également adopté des sanctions économiques dites sectorielles, en juillet 2015, du fait des actions de déstabilisation menées par la Russie en Ukraine, en particulier après le crash du vol MH17 provoqué par un tir de missile dans l’est du pays, qui a fait 298 morts civils.

Ces sanctions ont été renforcées le 12 septembre 2014 en raison de l’aggravation du conflit dans l’est de l’Ukraine, qui a fait plus de 9 000 morts et 21 000 blessés au cours des deux dernières années et dans lequel la Russie apporte un soutien direct aux séparatistes.

Ces sanctions sectorielles, comme vous le savez, ne pourront être levées qu’en fonction de la mise en oeuvre des accords de Minsk. Il a en effet été décidé lors du conseil européen du 14 mars 2015 de lier la levée des sanctions à la mise en oeuvre intégrale de ces accords, négociés dans le cadre du format de négociation « Normandie » à l’initiative du Président de la République lors des commémorations du soixante-dixième anniversaire du débarquement. C’est la première fois qu’était rétabli un dialogue direct entre le Président Poutine et le Président Porochenko, sous l’égide du Président de la République et de la Chancelière Angela Merkel.

Face à cette agression armée contre un État souverain, l’Union européenne a répondu par des instruments permettant d’encourager le règlement pacifique de la crise en évitant le risque d’une escalade plus importante encore sur le terrain. Elle a répondu par des instruments qui respectent intégralement le droit international et les personnes visées par ces mesures restrictives disposent sans exception d’une voie de recours au niveau de l’Union européenne.

En effet, toute personne visée par des sanctions peut saisir la Cour de justice de l’Union européenne pour en contester le bien-fondé, et le juge n’a pas hésité à procéder à des annulations lorsque cela s’est révélé justifié. À l’inverse, la Russie n’assure pas de réciprocité en la matière : les personnalités européennes interdites de séjour en Russie, parmi lesquelles certains de vos collègues parlementaires, n’ont aucune voie de recours pour obtenir la levée des restrictions dont ils font l’objet.

Je souhaiterais également apporter certaines précisions concernant l’effet négatif des sanctions sur l’économie et les entreprises européennes, que déplore la proposition de résolution. C’est en effet un sujet grave et important.

D’abord, les entreprises présentes en Russie avant 2014 sont toutes restées sur ce marché. Un grand nombre d’entre elles ont certes réduit leur présence mais pas une ne s’est retirée. Certaines sont mêmes entrées sur le marché russe depuis deux ans.

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