L'année dernière, lorsque j'indiquais en comité des secrétaires généraux que, parmi les cent fonctionnaires évalués par Eurogroup, certains présentaient un profil d'un plus haut niveau que d'autres, il m'a été demandé de communiquer leurs dossiers d'évaluation à la hiérarchie. J'ai refusé : nous ne sommes pas chargés d'instruire la carrière d'un individu. Nous sommes là pour identifier des profils que nous pouvons proposer aux autorités quand des nominations doivent être effectuées.
Les personnes détectées éprouvent-elles un sentiment d'appartenance ? Elles ont sans doute un petit sentiment d'appartenance à une promotion puisqu'en ce moment, elles sont en train de suivre le CIME. Pendant sept mois, elles se retrouvent une fois par mois pour travailler en ateliers sur des sujets relatifs au leadership et au management. Elles prennent des petits-déjeuners et déjeunent ensemble. Nous avons par ailleurs crée un groupe sur Linkedin pour ceux qui veulent se retrouver et échanger avec nous sur un certain nombre de sujets.
De même que la rémunération au mérite, l'avancement par concours est sans rapport avec notre démarche. Tous les cadres membres du vivier ont passé des concours, ont atteint le niveau A+ pour la plupart et le vivier contient des fonctionnaires issus de cinquante corps différents. Nous ne nous plaçons pas au-dessus de cette règle intangible de la fonction publique du recrutement par concours ; en revanche, nous pensons que l'évaluation de personnes conduites à exercer des fonctions éminentes dont vont dépendre le bien-être et la performance de dizaine de milliers de collaborateurs relève de notre responsabilité. On ne peut pas aujourd'hui mettre des milliers de personnes dans des mains sans s'assurer qu'elles sont les plus expertes possibles. Ce serait prendre des risques redoutables pour le fonctionnement de toute une organisation. On vit dans un monde où la responsabilité du dirigeant vis-à-vis des hommes qu'il doit diriger est fondamentale. Mme Manoury a raison de souligner que l'assessment a pour but, notamment, de vérifier que la personnalité des cadres est en accord avec l'exercice de telles fonctions. C'est ce que nous recherchons.
Le concours a attesté des aptitudes intellectuelles, de la capacité à mobiliser des connaissances et à rédiger des notes. L'expertise technique dans la fonction publique ne fait pas de doute. Les gens sont presque trop experts ! Ils ont du mal à déléguer, parce qu'ils ont besoin de se sentir plus experts que leurs collaborateurs. Mon métier consiste aussi à leur expliquer que l'on peut être un peu moins expert dès lors que l'on est un manager d'excellence, capable de faire fonctionner une organisation collective.