Mesdames, nous avons souhaité vous entendre car le cabinet de conseil Eurogroup participe au processus d'évaluation des hauts potentiels du vivier interministériel de l'État pour la mission cadres dirigeants. Nous souhaiterions que vous nous fassiez par de cette expérience et des modalités du processus que mis en place. Il serait également intéressant d'avoir l'analyse de ce qui, selon vous, distingue – ou pas – ce processus de celui suivi par les autres institutions ou entreprises pour lesquelles le cabinet Eurogroup travaille. Madame Méaux souhaite peut-être intervenir au préalable pour nous expliquer dans quelles conditions la mission cadres dirigeants fait appel à ce prestataire.
Eurogroup est un prestataire qui a été choisi sur la base d'un appel d'offres dans le cadre d'un marché public et sélectionné au détriment de ses concurrents. Dès lors, je ne trouvais pas forcément adéquat que les concurrents d'Eurogroup puissent avoir accès à certaines informations et j'ai souhaité que cette audition se tienne à huis clos.
On ne va pas parler ici des conditions de financement mais plutôt de l'organisation des prestations.
Certes, mais la manière dont Eurogroup travaille avec nous relève du secret professionnel entre un prestataire et la personne publique.
Je vous rappelle qu'il s'agit d'un marché public financé avec les deniers du contribuable ?
Oui, tout à fait. Mais si le marché est public, en revanche, le savoir-faire d'Eurogroup ne l'est pas.
D'autre part, il s'agit d'évoquer un sujet extrêmement sensible qui est celui de l'évaluation des futurs cadres de l'État.
Il faut d'abord expliquer les conditions dans lesquelles nous avons fait appel à Eurogroup.
Le vivier des cadres dirigeants de l'État a été mis en place au début des années 2010, dans le cadre de la démarche de professionnalisation de la gestion des cadres dirigeants voulue par le Premier ministre et ses successeurs, qui ont tour à tour poursuivi cette démarche. Il a été décidé, dans le cadre de ce qu'on a appelé des « revues de cadres », de demander à toutes les administrations publiques d'adresser – en l'occurrence d'adresser à mon prédécesseur – au secrétariat général du Gouvernement des listes de cadres dits à « haut potentiel ». Ces revues de cadres se sont tenues en 2012, 2013 et 2014, de façon formelle, pour aboutir à la constitution d'un vivier d'environ 650 personnes.
J'ai été nommée déléguée pour la rénovation de l'encadrement dirigeant de l'État à l'été 2014 et je me suis rendue compte que ce vivier avait été constitué de manière un peu globale, que certaines personnes qui étaient à l'intérieur ne le savaient pas, que d'autres personnes dans ce vivier ne souhaitaient pas en faire partie et enfin, que certaines personnes ne me paraissaient pas détenir toutes les qualités pour devenir un cadre dirigeant de l'État – et pour cause, il n'y avait pas réellement de méthode déterminant l'entrée dans le vivier. Les ministères adressaient au secrétariat général des curriculum vitae (CV) qui étaient ensuite compilés dans un système d'information. Nous disposions ainsi des coordonnées des personnes concernées de manière extrêmement formelle ; ces personnes n'étaient pas forcément reçues par la mission cadres dirigeants. Arrivée depuis peu et devant effectuer des recherches de profils de cadres, je me suis trouvée confrontée à des personnes qui n'avaient pas forcément le profil, ni le désir de devenir cadre dirigeant. Après un échange avec le Secrétaire général du Gouvernement et beaucoup de benchmark, avec nos homologues européens – britanniques notamment –, avec des sociétés du secteur privé et avec la Caisse des dépôts et consignations qui présente l'intérêt d'être une société mixte employant des fonctionnaires et des salariés de droit privé, j'ai proposé que nous objectivions davantage l'entrée dans le vivier des futurs cadres dirigeants.
Il s'agissait d'abord d'objectiver le processus interne car les personnes qui nous étaient adressées ne faisaient pas l'objet d'une évaluation particulière. Puis, nous avons souhaité introduire un regard externe, par le recours à un cabinet extérieur, venant apporter un avis complémentaire. J'ai pris mon temps pour mettre en place ce dispositif car il m'a été expliqué qu'il y avait de grandes réticences internes devant le recours à une telle pratique, perçue comme une forme de disqualification de l'avis que la hiérarchie pouvait porter sur ses cadres. J'ai donc rencontré tous les secrétaires généraux, tous les directeurs de cabinet, le secrétaire général de la Cour des comptes, la secrétaire générale du Conseil d'État, la cheffe de l'Inspection générale des finances, le chef de l'Inspection générale de l'administration, le chef de l'Inspection générale des affaires sociales et le contrôle général économique et financier pour comprendre ce qui était intéressant dans l'apport d'un regard extérieur mais également ce qui pouvait être perturbateur.
Finalement, j'ai trouvé beaucoup moins d'oppositions que ce qu'il m'avait été rapporté et ces oppositions, en prenant le temps de les comprendre, ont pu être levées. En fait, les personnes qui craignaient de nous voir adjoindre la compétence d'un cabinet extérieur, redoutaient que son évaluation ne prime sur le regard interne. Je leur ai assuré qu'il n'en serait pas question et qu'il s'agissait plutôt de croiser les regards ; il ne s'agissait en aucun cas de faire intervenir un prestataire extérieur pour nous défausser sur lui de ce qui relève de notre mission pleine et entière, à savoir identifier les personnes qui peuvent devenir des cadres dirigeants.
Nous avons utilisé un référentiel de compétences managériales élaboré par mes prédécesseurs – quinze compétences initiales ramenées aujourd'hui à dix –qui est le référentiel sur lequel sont évalués les cadres dirigeants de l'État et les futurs cadres dirigeants de l'État.
Pour la revue des cadres 2015, après avoir lancé un appel d'offres qui nous a conduits à sélectionner le cabinet de conseil Eurogroup, nous avons donc profondément modifié les conditions d'entrée dans le vivier interministériel. En 2014, 265 personnes étaient entrées dans ce vivier de manière systématique, sans une véritable évaluation professionnelle préalable. Nous avons élaboré une fiche individuelle dans laquelle le cadre est présenté ainsi que ses réalisations principales, son autoévaluation sur la grille de compétences managériales, l'évaluation de sa hiérarchie, la présentation de ses motivations à devenir cadre dirigeant et celles des fonctions de cadre dirigeant qui l'intéressent. En effet, quand vous êtes membre du vivier et qu'on vous demande ce que vous aimeriez faire : directeur des ressources humaines des ministères sociaux, directeur des systèmes d'information du ministère de l'intérieur, directeur du trésor, directeur du budget…, souvent la personne ne sait pas quoi répondre. Au bout d'une heure d'entretien, on peut s'apercevoir que la personne n'a pas forcément envie d'exercer ces métiers-là et qu'elle aimerait soit continuer à faire ce qu'elle fait, soit diriger autre chose mais pas forcément devenir un cadre dirigeant de l'État. Donc il s'agit d'une feuille extrêmement précise qui nous révèle l'évaluation interne et la motivation de la personne.
En 2015, au lieu d'intégrer 265 personnes, nous en avons pris 100. Mes collaborateurs ont rencontré toutes ces personnes pour procéder à un assessment. Madame Manoury-Bette va vous expliquer comment les choses se sont déroulées. Nous avons recueilli tous les avis d'Eurogroup sur l'aptitude que ces personnes auraient à devenir cadres dirigeants. Mais, ainsi que je m'y étais engagée, même ceux qui n'avaient pas recueilli un avis franchement positif sont entrées dans le vivier en 2015. Au moment où nous parlons, l'avis d'Eurogroup n'a jamais été discriminant pour l'entrée dans le vivier. Ce n'est que cette année, sur la base de l'expérience prototype de l'année dernière, qu'il a été décidé, en comité des secrétaires généraux, que lorsqu'un avis porté par Eurogroup ne serait pas favorable, il donnerait lieu à une discussion. Et c'est ainsi qu'à la mi-juin, au comité des secrétaires généraux – il y en a un par mois – nous aurons les résultats de la promotion 2016 et nous saurons si toutes les personnes identifiées entreront ou non dans le vivier. Si l'avis d'Eurogroup est favorable, ce point sera vite traité car les secrétaires généraux ont déjà donné un avis positif sur ces personnes puisqu'ils les ont présentées à l'entrée du vivier. S'il existe une difficulté, cela donnera lieu à une discussion. J'aurai, au préalable, saisi les secrétaires généraux des quelques cas pour lesquels nous pensons que ces personnes ne sont pas prêtes à devenir cadre dirigeant et il y aura une discussion en comité des secrétaires généraux, un arbitrage collectif et une décision du Secrétaire général du gouvernement qui est celui qui in fine valide l'entrée dans le vivier interministériel.
Nous espérons avec Madame Manoury-Bette que nous n'aurons pas à conduire ce débat puisque cette nous visons une cinquantaine de personnes proposées. Nous avons invité les administrations à être encore plus exigeantes, à mener encore plus d'entretiens avec ces futurs dirigeants pour être certaines de leurs profils. Mes collaborateurs sont en train d'examiner les curriculum vitae de ces membres que je vais présenter au secrétaire général du gouvernement et, dans les semaines à venir, les équipes de Madame Manoury-Bette les rencontreront. Lorsque nous avons un doute, que nous avons l'impression que la personne n'a pas les états de service, nous discutons. Le secrétaire général aura les CV et peut-être qu'il me demandera, par exemple, pourquoi deux personnes qui n'ont été sous-directeur qu'une seule fois sont présentées à l'entrée du vivier. C'est la raison pour laquelle nous effectuons des contrôles de cohérence – nous sommes cinq collaborateurs actuellement à plein temps sur ce sujet. Puis, nous passerons la main à Eurogroup qui va nous renvoyer son éclairage, celui de son savoir-faire et de sa longue expérience en la matière, qui va nous aider à trancher sur l'entrée dans le vivier. Les personnes qui n'entreraient pas dans le vivier en 2016 pourraient y entrer en 2017 ou 2018.
Veuillez m'excuser pour cette longue introduction que je jugeais nécessaire pour replacer ce processus dans sa dimension historique.
On passe de cent à cinquante personnes admises au sein du vivier. Pourquoi réduire cet effectif par deux ?
Tous les ans, chaque administration alimente le vivier. La première année après sa création, 400 fonctionnaires ont été proposés ; les deuxième et troisième années, les effectifs ont porté sur 300 puis sur 275 personnes ; la quatrième année, 100 fonctionnaires. Il n'est pas souhaitable que le vivier compte 650 membres pour seulement 200 postes de niveau correspondant, au risque de susciter d'importantes frustrations et de laisser sous-entendre que le dispositif compte un certain nombre de fonctionnaires ne possédant pas le profil adéquat. L'année dernière, lorsque 100 fonctionnaires nous ont été présentés, il nous est apparu que cet effectif était sans doute excessif et que certaines personnes n'avaient pas les caractéristiques pour intégrer le vivier. Nous avons donc souhaité que les administrations proposent moins de fonctionnaires mais des fonctionnaires mieux préparés.
Ils doivent en sortir après 4 à 5 ans s'ils n'ont pas été nommés. Il n'est pas anormal que tout le monde ne soit pas nommé, même si l'on fait partie du vivier. 50 % des fonctionnaires nommés en Conseil des ministres étaient déjà cadres dirigeants. Il s'agit pour eux d'un second ou troisième poste de directeur, ce qui n'est pas anormal. Dans 25 % des cas, ce sont des membres du vivier interministériel. Dans 25 %, c'est quelqu'un d'autre qui n'est ni un cadre dirigeant ni un membre du vivier. Il y a quatre ans, les membres du vivier représentaient moins de 20 % des nominations – ce qui n'est pas étonnant, le vivier étant alors plus petit et moins cohérent. Notre objectif à l'avenir consiste à réduire la part des 25 % nommés hors vivier. Et c'est effectivement déjà le cas chaque année : nous gagnons des points. Il s'agit de rendre ce dispositif utile car il coûte de l'argent et mobilise des énergies : les personnes membres du vivier suivent désormais, de manière systématique, une formation de très haut niveau, une petite « École de guerre du management » qui s'appelle le Cycle interministériel de management de l'État (CIME). Il y a tellement de gens mobilisés pour entretenir ce vivier que je souhaite qu'il soit véritablement utile et offre un outil performant.
Chaque année, nous demandons des sorties du vivier. L'année dernière, 92 personnes sont sorties du vivier et 100 l'ont intégré. Ces dernières suivent actuellement le Cycle interministériel de management de l'État. Il n'est pas facile de dire à un collaborateur qu'il avait été identifié en tant que futur cadre dirigeant de l'État mais qu'il n'est plus aujourd'hui considéré comme tel. Des administrations ont eu ce courage, soit parce que les fonctionnaires concernés ont vieilli, soit parce que leur projet professionnel a changé.
Le vivier est donc quelque chose de vivant. Nous nous sommes donnés pour principe de le revoir tous les quatre ans. Nous avons demandé aux administrations de se focaliser sur l'exercice 2012 et d'établir pour les fonctionnaires entrés dans le vivier cette année-là, la même fiche que pour les personnes nouvellement admises. En effet, il n'y avait pas d'objectivisation de l'accès à cette époque. Nous avons ainsi demandé que les administrations confirment leurs places au sein du vivier. Les sorties concerneront cette année les fonctionnaires qui y ont été admis en 2012.
La Mission des cadres dirigeants de l'État s'occupe pleinement des membres du vivier. Après leur entrée, ils bénéficient d'un assessment ; ils suivent le CIME ; ils ont accès à un catalogue de formations dont ils peuvent suivre les modules (par exemple des formations en leadership, à la prise de parole en public, en négociation, pour apprendre à parler de soi, pour savoir valoriser son parcours). Les membres du vivier peuvent appeler mes collaborateurs pour être reçus en entretien et recevoir des conseils – ce qui est rare dans la fonction publique. Nous assurons un service humainement lourd, à forte valeur ajoutée. Je veux respecter son « objet social », c'est-à-dire préparer des cadres dirigeants de l'État. Ce vivier doit être vivant, c'est-à-dire formé de vrais potentiels pour devenir des cadres dirigeants.
Une question pour être sûr d'avoir bien compris : aujourd'hui, combien y a-t-il de personnes dans le vivier ?
Le Cabinet Eurogroup Consulting est un cabinet de conseil en organisation, en stratégie et en ressources humaines. Nous sommes 350 consultants. C'est un cabinet entièrement français. Je dirige un département très spécifique qui s'occupe de développement personnel et d'évaluation. C'est dans ce cadre que nous intervenons pour la Mission des cadres dirigeants. Je pense que nous avons été choisis entre autres pour nos références : nous travaillons depuis de nombreuses années pour le ministère de la Défense, notamment pour l'évaluation des capitaines de vaisseau, avec la direction des ressources humaines de la Marine, mais également avec le DRH de l'Armée de Terre et de l'Armée de l'Air, dans le cadre de la sélection des futurs amiraux et généraux et apporter un éclairage sur la responsabilité. Nous travaillons également pour le ministère de l'Intérieur pour l'évaluation des sous-préfets issus d'autres corps que le corps préfectoral, pour lesquels un regard extérieur est souhaité. Nous travaillons pour la Caisse des Dépôts (à la fois pour le vivier des cadres dirigeants et celui des jeunes potentiels), ainsi que pour des groupes privés comme le groupe Banque populaire Caisses d'Épargne (BPCE), sur le vivier des futurs cadres dirigeants et les jeunes talents.
Par rapport à des cabinets de conseil classique, nous employons une équipe singulière : elle est formée de consultants très confirmés possédant, des formations et expériences assez différentes, et qui ont la capacité de modéliser les comportements. Pour nous, l'évaluation ne constitue pas seulement un instrument de mesure : il s'agit également d'un vecteur d'action et de progrès. Dans ce cadre, nous établissons certes une mesure du potentiel, mais à l'issue de toutes les évaluations, nous procédons à une restitution « à chaud » des points forts et des points de progrès des personnes. Il y a un échange. Nous modélisons le comportement, ce qui permet à la personne ensuite d'agir pour progresser car elle connaît les ressorts qui la conduisent à accomplir des actes qui se révèlent contre-productifs au regard des objectifs qu'elle poursuit.
Souhaitez-vous que nous parlions des méthodes ? J'ai moi-même assisté aux assessment.
Deux secrétaires généraux de ministères y ont également assisté.
Le principe est d'arriver à être suffisamment objectif pour établir le profil d'une personnalité, ses points forts et ses points de développement, et donner des conseils pour progresser. Le potentiel, c'est à la fois un savoir-faire, une personnalité et de la motivation. A l'extrême une personne très brillante dans un domaine ne sera pas performante si elle ne possède pas la motivation nécessaire.
Nous avons élaboré une méthode qui permet une évaluation à 360 degrés dans des environnements différents. Il y a toujours deux consultants qui observent, sachant que la difficulté de l'observation réside dans la maîtrise de la subjectivité. Travailler avec deux consultants, permet de limiter ce risque. Nous réalisons des mises en situation professionnelles hors du cadre professionnel de la personne évaluée. Ces exercices sont construits à partir du référentiel des compétences conçus par la Mission des cadres dirigeants. Ils portent sur des situations hors du cadre professionnel habituel afin de nous permettre d'évaluer les ressources des individus et non leur savoir-faire. C'est là que réside le potentiel. La question est de savoir quelles seront les ressources que la personne évaluée va pouvoir utiliser dans une situation qu'elle ne maîtrise pas forcément mais qui se rapprochent des circonstances que les futurs dirigeants vont rencontrer. Dans le secteur public comme dans le secteur privé, un dirigeant des années 2010 ne se trouve pas dans la situation d'un dirigeant des années 1970 où les évènements pouvaient être assez largement anticipés. Aujourd'hui, nous vivons dans l'incertain, dans l'inconfort personnel. Les évaluations sont faites pour observer les personnes dans cette situation d'inconfort.
Nous faisons ensuite passer un test de personnalité. Nous demandons un écrit afin d'apprécier la façon dont les personnes expriment quelque chose de personnel, sur un sujet d'actualité qui les intéresse et sur les raisons de ce choix. Les personnes se livrent ensuite à une autoévaluation « à chaud » sur la manière dont elles se sont senties et ont perçu dans cette démarche. Enfin, nous procédons à une restitution individuelle et personnelle, d'une demi-heure à trois quarts d'heure, qui permet un échange sur les points forts et les points de progression, ainsi que des conseils pour la suite.
Face à une démarche nouvelle dans le secteur public, les personnes arrivent souvent à reculons, en exprimant des réticences. Cependant dans presque 100 % des cas, elles repartent satisfaites parce qu'il s'agit vraiment d'une démarche personnalisée qui leur permet de progresser, de développer une réflexion sur elles-mêmes et sur leur mode de fonctionnement. Il est assez rare de bénéficier d'un tel moment d'évaluation spécifique.
Je peux confirmer la très grande satisfaction des personnes parce qu'elles ont toutes été reçues par la Mission des cadres dirigeants. L'année dernière, sur 100 personnes, il y a en peut-être eu une insatisfaite. La profondeur de l'exercice que Madame Manoury Bette vient de décrire permet de présenter aux cadres un profil qui leur ressemble.
J'ai personnellement fait l'expérience de l'assessment. Je me suis reconnue. Certes, c'est un miroir grossissant, en particulier de ses défauts et ce n'est pas nécessairement agréable de les voir ainsi décryptés. Mais nous avons affaire à des cadres qui ont du recul sur eux-mêmes et qui sont capables de remises en question. Dans les rapports que notre prestataire établit pour nous et pour les personnes évaluées, on trouve des recommandations en termes de développement personnel et de développement professionnel : le candidat n'est jamais laissé seul face à ses qualités et points de progrès ; il repart avec des préconisations destinées à lui permettre de mener à bien sa transformation professionnelle.
Est-ce que vous faites une distinction entre la rémunération au mérite et la constitution des viviers de haut potentiel ?
Dans cette forme d'identification et de recrutement, quelle place reste-il à l'avancement par concours ? Vous avez parlé l'une et l'autre à plusieurs reprises d'« objectivisation » ou d'« objectivité ». Est-ce que ces termes s'appliquent bien pour l'identification des qualités professionnelles pour les jeunes potentiels ?
Vous avez utilisé le terme de « promotion » en évoquant cet ensemble que forment les personnes intégrant le vivier au cours d'une même année. Ces personnes éprouvent-elles le sentiment d'appartenir à une promotion ? Est-ce qu'ils se voient ?
Avez-vous mesuré l'éventuel risque de démobilisation deceux qui ne rentrent pas dans le vivier ou de ceux qui en sortent ? Une dernière question : avez-vous déterminé si le passage par des cabinets ministériels constituait un facteur d'accélération pour le passage dans le vivier ?
Pour répondre à la dernière question, il me semble qu'un quart des nominations au Conseil des ministres, au fil du temps, concerne des membres des cabinets ministériels.
Vous avez indiqué que 50 % des fonctionnaires nommés en Conseil des ministres étaient déjà cadres dirigeants, que 25 % des fonctionnaires nommés provenaient du vivier et que 25 % étaient issus d'ailleurs. Ce dernier quart correspond aux personnes sortant de cabinets ministériels ?
Oui, sachant qu'il peut y avoir des membres des cabinets ministériels qui sont entrés dans le vivier il y a quelques années. Ce chiffre de 25 % de nomination en dehors du vivier provient d'une estimation effectuée sur une dizaine d'années, avec des fluctuations liées à l'effet des fins de mandature ; c'est une approximation qui a pu être reconstituée à partir des systèmes d'information de l'État existants.
Nous avons en tout cas une règle d'or – que le Secrétaire général du Gouvernement a rappelé à plusieurs reprises –, nous ne sollicitons pas les membres de cabinet en exercice pour des postes de directeurs.
J'ai bien compris que l'on n'en faisait pas rentrer dans le vivier les fonctionnaires travaillant en cabinet. Mais est-ce que ce passage en cabinet ministériel constitue ensuite un motif d'accélération du passage dans le vivier ?
Ce ne sera jamais un motif objectif puisque nous avons tout fait pour rendre objective l'intégration au vivier.
L'assessment que nous réalisons s'affranchit totalement d'une logique de reproduction des élites. Nous travaillons sur les ressources de la personne – le ministère de l'Intérieur nous avait justement demandé de travailler sur ce point –, ce qui nous permet de détecter des personnes issues entre autres de la diversité ou d'identifier des personnes qui ne posséderaient pas le profil « habituel » de « l'homme blanc de trente-cinq ans, énarque », etc.. C'est ce qui fonde notamment l'intérêt de ce type de démarche.
Comme vous le savez, il est interdit de procéder à ce genre de décompte. En théorie, il est possible de donner accès au vivier à des personnes moins conformes au profil ordinaire au sein de la haute fonction publique. Instinctivement, je vous dirais que ce pourcentage est faible mais c'est là le reflet de la manière dont la fonction publique recrute ses cadres dans les écoles. Je vous renvoie à l'étude scientifique réalisée à l'occasion des 70 ans de l'ENA à propos de la diversité des origines au sein des promotions. Le vivier est le reflet du code génétique de la haute fonction publique. Les énarques représentent 40 % des cadres A+ ; ils sont 40 % dans le vivier.
Cela étant, je vous rappelle qu'aujourd'hui, le caractère discriminant de l'avis d'Eurogroupe est pour l'instant sans effet dans la composition du vivier puisqu'il n'existait pas de barrière à l'entrée.
En ce qui concerne le lien entre rémunération au mérite et vivier des hauts potentiels, il faut être très prudent car ces deux notions sont étrangères l'une à l'autre. L'intégration au vivier des cadres dirigeants n'entre pas dans la procédure statutaire de constitution d'un dossier pour un agent. Un chef de service peut se montrer brillant, atteindre le niveau maximal des primes auxquels il peut prétendre et, pour autant, ne pas faire partie du vivier interministériel des futurs cadres dirigeants de l'État pour différentes raisons – par exemple, parce que sa hiérarchie ne l'a pas proposé. Il peut aussi avoir été proposé et avoir subi un assessment qui a révélé des qualités et des défauts. Ce document appartient à la personne évaluée et figure dans les dossiers de la Mission.
Nous envoyons à la Mission cadres dirigeants le document que nous remettons aux personnes que nous évaluons. Seules la Mission et les personnes évaluées ont le dossier que nous établissons à l'issue de l'assessment.
L'année dernière, lorsque j'indiquais en comité des secrétaires généraux que, parmi les cent fonctionnaires évalués par Eurogroup, certains présentaient un profil d'un plus haut niveau que d'autres, il m'a été demandé de communiquer leurs dossiers d'évaluation à la hiérarchie. J'ai refusé : nous ne sommes pas chargés d'instruire la carrière d'un individu. Nous sommes là pour identifier des profils que nous pouvons proposer aux autorités quand des nominations doivent être effectuées.
Les personnes détectées éprouvent-elles un sentiment d'appartenance ? Elles ont sans doute un petit sentiment d'appartenance à une promotion puisqu'en ce moment, elles sont en train de suivre le CIME. Pendant sept mois, elles se retrouvent une fois par mois pour travailler en ateliers sur des sujets relatifs au leadership et au management. Elles prennent des petits-déjeuners et déjeunent ensemble. Nous avons par ailleurs crée un groupe sur Linkedin pour ceux qui veulent se retrouver et échanger avec nous sur un certain nombre de sujets.
De même que la rémunération au mérite, l'avancement par concours est sans rapport avec notre démarche. Tous les cadres membres du vivier ont passé des concours, ont atteint le niveau A+ pour la plupart et le vivier contient des fonctionnaires issus de cinquante corps différents. Nous ne nous plaçons pas au-dessus de cette règle intangible de la fonction publique du recrutement par concours ; en revanche, nous pensons que l'évaluation de personnes conduites à exercer des fonctions éminentes dont vont dépendre le bien-être et la performance de dizaine de milliers de collaborateurs relève de notre responsabilité. On ne peut pas aujourd'hui mettre des milliers de personnes dans des mains sans s'assurer qu'elles sont les plus expertes possibles. Ce serait prendre des risques redoutables pour le fonctionnement de toute une organisation. On vit dans un monde où la responsabilité du dirigeant vis-à-vis des hommes qu'il doit diriger est fondamentale. Mme Manoury a raison de souligner que l'assessment a pour but, notamment, de vérifier que la personnalité des cadres est en accord avec l'exercice de telles fonctions. C'est ce que nous recherchons.
Le concours a attesté des aptitudes intellectuelles, de la capacité à mobiliser des connaissances et à rédiger des notes. L'expertise technique dans la fonction publique ne fait pas de doute. Les gens sont presque trop experts ! Ils ont du mal à déléguer, parce qu'ils ont besoin de se sentir plus experts que leurs collaborateurs. Mon métier consiste aussi à leur expliquer que l'on peut être un peu moins expert dès lors que l'on est un manager d'excellence, capable de faire fonctionner une organisation collective.
Nous travaillons beaucoup sur le fondement de la théorie des intelligences multiples. Le concours fait surtout appel à des capacités d'intelligence logico-mathématique ou d'intelligence verbo-linguistique. Nous travaillons sur ces deux mêmes types d'intelligence, mais aussi sur les intelligences intrapersonnelles et interpersonnelles. On voit bien que la faculté du dirigeant à mobiliser ces différents types d'intelligence lui permet d'être adaptable et de mener des projets de transformation. Notre spécialité est de savoir comment fonctionne le dirigeant dans ces moments de transformation.
Précisons que la moyenne d'âge du vivier est de quarante-neuf ans. Ce sont des jeunes prometteurs qui ne sont donc pas si jeunes que cela. D'ailleurs, au vu des premiers retours d'expérience de ces évaluations, nous nous sommes rendu compte, avec le directeur général de l'administration et de la fonction publique, qu'il faudrait envisager de procéder à ces évaluations à un stade antérieur de la carrière. C'est le sens de la circulaire du Premier ministre qui préconise de mettre en place des évaluations plus tôt. Dans le cadre de nos travaux, nous rencontrons des cadres qui, s'ils avaient été conseillés plus jeunes, auraient sans doute fait d'autres choix. Nous voyons également des cadres regretter de ne pas avoir reçu plus tôt certains conseils qui leur auraient permis de progresser plus rapidement.
Ce système est vraiment nouveau. La fonction publique, à l'instar d'autres grandes organisations, n'y est pas familière. Il est toutefois amené à se développer, tant ses apports sont importants.
Enfin, vous m'avez interrogée sur la question d'une éventuelle démobilisation des personnes qui n'entrent pas dans le vivier ou de celles qui en sortent. Ceux qui sortent du vivier représentent une minorité. En général, ceci se fait d'un commun accord avec leur employeur, pour des raisons tenant notamment à l'âge et à la motivation. Quant à une éventuelle démobilisation de ceux qui n'entrent pas dans le vivier, je ne l'ai pas observée à ce jour. Le vivier n'est pas devenu un tel objet de convoitises qu'il susciterait le dépit de ceux qui n'en font pas partie. Il est d'ailleurs possible d'être nommé cadre dirigeant sans faire partie du vivier ; c'est le cas de 25 % des nominations aujourd'hui.
Quel intérêt y aurait-il à permettre aux personnes évoluant dans la fonction publique de faire une partie de leur carrière dans le privé ? Réciproquement, serait-il souhaitable que le secteur public attire des talents du secteur privé ?
C'est un sujet important et délicat. 10 % des cadres du vivier ont une expérience dans le secteur privé. Ce n'est pas négligeable. Il y a un très grand intérêt tant pour la fonction publique que pour le secteur privé, à mélanger les cultures. Avec le directeur général de l'administration et de la fonction publique, nous avons organisé des réunions avec l'ANDRH (Association nationale des DRH), comme je vous l'ai indiqué lors de notre précédente audition. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue que les conditions d'exercice des hauts fonctionnaires ne favorisent pas ces allers-retours. En effet, la position de disponibilité pour dix années arrête la progression de grade. De nombreux cadres dirigeants émettent le souhait d'avoir une expérience dans le secteur privé, pour revenir ensuite dans la fonction publique. Aujourd'hui, c'est quasiment impossible. Un départ dans le privé implique une suspension de l'avancement. Le haut fonctionnaire qui part dans le privé exige des conditions de rémunération favorables, puisqu'il fait un sacrifice. L'écart de rémunération avec la fonction publique est alors impossible à combler et il est difficile pour la personne en question de revenir. Néanmoins, à titre personnel, je trouve qu'il est important de favoriser ces allers-retours.
Comme l'a dit Florence Méaux, le brassage des cultures est source d'enrichissement mutuel. Il est certain qu'il serait intéressant de pouvoir structurer les parcours alors qu'aujourd'hui on reste dans une logique d'opportunités. On recherche des compétences et, en même temps, une expertise très pointue dans un domaine peut justement interdire une mobilité compte tenu des règles en vigueur. Il serait bénéfique pour les uns et les autres de prévoir, dans les parcours des hauts potentiels, une expérience de deux ans, par exemple, qui serait sensiblement différente de leurs expériences antérieures. Le dialogue entre les entreprises et l'administration en serait d'ailleurs facilité. Sur le plan personnel également, un tel dispositif constituerait un enrichissement.
Comment s'effectue l'évaluation des capacités managériales ? Ce concept est plutôt issu du secteur privé. Quelle est votre méthode pour identifier ces capacités s'agissant des hauts fonctionnaires ? Concernant le cycle interministériel de management de l'État (CIME) qui définit le contenu des programmes ?
Pour répondre à la première question, les capacités de management sont essentiellement fondées sur des qualités relationnelles, intrapersonnelles et interpersonnelles. On détaille, dans une évaluation, à travers l'ensemble des exercices proposés et à partir du référentiel de compétences, la capacité d'écoute active du haut fonctionnaire, sa capacité à communiquer, à déléguer, à contrôler. Toutes ces qualités structurent la capacité d'un dirigeant à manager et c'est dans cette optique que nous formalisons des préconisations. Par exemple, on peut détecter qu'une personne dispose d'une compétence certaine pour diriger des équipes, mais qu'elle peut se révéler très directive. Elle devra donc travailler sur certains aspects de sa personnalité et à cet effet, nous lui proposons des techniques de management. Elle devra aussi avoir un parcours en phase avec ses motivations. Elle pourrait par exemple, avant d'être en charge de plusieurs milliers de personnes, occuper des postes moins exposés sur le plan du management, mais qui lui permettront de progresser. On pourrait la placer dans un environnement dans lequel elle sera obligée de pratiquer le dialogue social ou de mettre en oeuvre un projet de transformation.
Nous vous avons transmis le référentiel des compétences managériales. Dans ces compétences, on retrouve les compétences liées à l'intelligence de situation, celles liées à l'action et celles liées à la relation, c'est-à-dire la mise en sens, la mise en scène et la mise en « zen » si l'on veut utiliser un jeu de mots mnémotechnique.
L'intelligence des situations (mise en sens) fait appel aux capacités du dirigeant à comprendre le sens des situations, mais également de le co-construire avec son équipe, afin de dégager une vision pour l'organisation. Celle-ci doit être pertinente et partagée par tous. Elle fait appel à trois qualités : l'aptitude à développer une vision stratégique, l'ouverture d'esprit et l'innovation. Celles-ci doivent être exercées avec les autres et non pas individuellement.
L'intelligence liée à l'action (mise en scène) fait appel aux capacités de pilotage d'une organisation pour qu'elle atteigne ses objectifs.
L'intelligence liée à la relation (mise en « zen ») fait appel à des capacités de comportement, propres à favoriser un environnement de travail plaisant et efficace dans lequel l'équipe est fière des résultats atteints.
L'élaboration d'un référentiel de compétences managériales pertinent est un sujet important pour toutes les grandes organisations. Il n'est de bon référentiel qu'un référentiel adapté aux circonstances. Par exemple, l'État a grand besoin d'innovation, d'écoute, de pilotage. On a donc insisté sur ces compétences essentielles. Les mises en situation proposées par Eurogroup sont faites pour les tester chez les cadres. Elles mettent les personnes « en danger », dans des scénarios qui permettent de se rendre compte si elles sont à l'écoute, si elles sont capables de s'éloigner du cadre. Les consultants du cabinet jouent des rôles dans ces mises en situation. Ils sont d'autant plus exigeants que la personne est à l'aise, afin de lui permettre de montrer l'étendue de ses qualités.
Cette méthode n'est pas scientifique, mais elle est très technique. Pour l'élaboration du référentiel, c'est le secrétariat général du Gouvernement qui a tenu la plume, mais l'ensemble des partenaires ministériels et la DGAFP ont été associés à sa préparation, dès 2010, à l'origine de la démarche.
Un référentiel de compétences managériales est le reflet d'une culture. Il n'est donc pas exhaustif. L'accent est mis sur certaines compétences centrales. Il est intéressant que les dirigeants s'appliquent à eux-mêmes ce référentiel, car cela instaure une forme d'exemplarité. Un dirigeant ne peut pas demander à ses équipes de se transformer si son discours n'est pas congruent avec son attitude.
S'agissant des cadres dirigeants nommés en Conseil des ministres, peu d'entre eux ont été soumis à l'assessment aujourd'hui. Mais nous ne les oublions pas. J'insiste, et, en général, ils en sont d'accord, pour qu'ils bénéficient d'un accompagnement à la prise de fonctions, avec un coach certifié. Trois séances d'accompagnement sont programmées. Au début de ces séances, les dirigeants se confrontent à un outil du même genre que le diagnostic initial de l'assessment qui permet de dresser leur profil managérial. On les aide à mieux se connaître et à prendre conscience des points sur lesquels ils doivent progresser.
S'agissant des programmes du CIME, ils donnent lieu à un appel d'offres. Pendant trois ans, l'ESSEC MA a été notre prestataire. Il l'était encore lorsque je suis arrivée en fonction. Une fois le contrat parvenu à échéance, l'année dernière, le secrétariat général du Gouvernement a relancé l'appel d'offres. Nous avons choisi un nouveau partenaire : Turning point.
Comme pour le référentiel et l'assessment, c'est la mission cadres dirigeants qui a dimensionné le CIME, en lien avec tous les partenaires RH de l'ensemble des ministères, l'ENA étant le maître d'ouvrage du dispositif. Nous avons rédigé un cahier des charges que nous avons soumis à ces partenaires pour prendre en compte leurs observations. Il en résulté une formation sur sept jours qui prend en charge cinquante personnes collectivement et en ateliers de petits groupes. Interviennent successivement des consultants spécialisés, des sachants du secteur du management et du leadership, des grands témoins. Par exemple, dans un mois, la secrétaire générale pour la modernisation de l'action publique interviendra au sujet des grands projets de transformation. Des études de cas sont réalisées en petits groupes. Le cahier des charges est très exigeant et nous avons le sentiment que la formation dispensée aujourd'hui dans le CIME est ce qui se fait de mieux en matière d'apprentissage des techniques managériales. Un bilan sera établi à l'issue de la période de trois ans qui vient de démarrer pour relancer l'appel d'offres.
Nous sommes satisfaits de notre collaboration avec Eurogroup et des retours des cadres sur les assessments. De la même manière, Turning Point, qui voit les personnes en groupe, nous informent de la manière dont ils perçoivent les particpants. À certains moments, la parole est plus libre et les cadres expliquent ce qu'ils vivent au quotidien dans leurs administrations, ce qui nous permet d'ajuster nos interventions auprès d'eux.