Intervention de Sylviane Bulteau

Réunion du 4 mai 2016 à 10h45
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylviane Bulteau :

Je m'exprimerai au nom du groupe Socialiste, républicain et citoyen.

La fibromyalgie est une affection qui touche près de 2 millions de Français, essentiellement – à 75 % – des femmes, selon des formes et des degrés divers. Elle est la cause de grandes souffrances chez ceux de nos concitoyens qui en sont atteints et se révèle parfois très handicapante dans la vie quotidienne, voire invalidante, jusqu'à empêcher la poursuite de toute activité professionnelle.

Même si l'existence d'états douloureux chroniques est attestée depuis le XIXe siècle, la fibromyalgie a été considérée jusqu'à la fin des années 1970 comme un trouble psychosomatique. Elle reste aujourd'hui méconnue et mal considérée, bien que l'OMS la reconnaisse depuis 1992. Le nom lui-même n'a été définitivement arrêté qu'en 1977, par deux chercheurs canadiens. Cette absence de reconnaissance suscite des difficultés supplémentaires pour les personnes atteintes, qui supportent mal d'être perçues au mieux comme des hypocondriaques, au pire comme des affabulateurs. L'ampleur de ce phénomène complexe, dont la prévalence serait tout de même de 1,4 à 2,2 % dans la population générale, ne laisse pourtant que peu de place au doute.

En proposant d'aborder cet enjeu de santé publique, nos collègues poursuivent donc un but louable. Saluons également le très important travail de sensibilisation effectué par les membres des associations locales qui se sont progressivement constituées depuis une quinzaine d'années et que la majorité d'entre nous a rencontrées en circonscription. J'ai aujourd'hui une pensée particulière pour les adhérents de l'association « Fibromyalgie Vendée », qui ont appelé mon attention sur le caractère très invalidant de cette affection, caractérisée par une fatigue chronique et par des douleurs généralisées, diffuses mais aiguës, situées au niveau du tronc et des membres supérieurs et inférieurs, le tout associé à des troubles du sommeil : bref, les personnes touchées considèrent qu'elles ont mal partout et tout le temps. Tous ont contribué à une prise de conscience bienvenue s'agissant d'un syndrome que l'on pourrait qualifier de maladie en devenir, diagnostiqué en moyenne au bout de sept ans.

On comprend que l'insuffisante prise en considération des douleurs, associée à des périodes d'épuisement durable, ait un grand retentissement sur la vie professionnelle et familiale, ainsi que sur la vie sociale par l'isolement des malades. L'absence de traitement contribue en outre au grand désarroi des fibromyalgiques.

Depuis quelques années, les progrès sont lents, mais sensibles. Un rapport de l'Académie nationale de médecine publié en janvier 2007, à la demande du ministre de la santé de l'époque, a pour la première fois reconnu la réalité du syndrome fibromyalgique. La Haute Autorité de santé a rendu en 2010 un rapport d'orientation sur le syndrome fibromyalgique de l'adulte qui faisait le point de manière précise et documentée sur l'état des connaissances. Par ailleurs, le plan d'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques pour la période 2007-2011 a tenu compte des besoins exprimés par les associations de malades de la fibromyalgie. Plus récemment, Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, a demandé à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) de procéder à une expertise collective sur le sujet. Tout cela témoigne d'une volonté politique de progresser qui doit être saluée comme elle le mérite.

Notre Assemblée ne peut rester à l'écart de cette évolution. Des recherches supplémentaires et approfondies doivent encore être engagées afin de comprendre l'origine des douleurs, afin d'améliorer le dépistage, la prévention et, surtout, de permettre une prise en charge spécifique, inexistante à ce jour. Le moment semble donc opportun pour que l'Assemblée nationale se saisisse du sujet, lequel a déjà suscité de très nombreuses questions parlementaires au Gouvernement. Une mission parlementaire est donc sans doute nécessaire.

Si je ne suis pas certaine que la commission d'enquête soit le format le plus adapté lorsqu'il s'agit d'émettre des propositions – une mission d'information serait sans doute plus appropriée –, il va de soi qu'aucun obstacle de principe n'empêche que nous nous emparions de la question et en fassions l'objet d'un travail parlementaire approfondi. Les députés du groupe Socialiste, républicain et citoyen y sont prêts.

Notre réponse collective sera évidemment politique : il n'est naturellement pas question que les députés se substituent aux scientifiques, qui doivent poursuivre leurs investigations. Nous devrons pour notre part nous intéresser aux conditions de prise en charge de ce problème de santé publique : il faut trouver les moyens d'une harmonisation, pour que les malades puissent accéder à un traitement approprié. Cela implique que les instances médicales bénéficient des moyens financiers, humains et administratifs nécessaires – je songe notamment à la médecine du travail et à la médecine de prévention –, et ce sur l'ensemble du territoire national, où un large degré d'appréciation est pour l'instant laissé aux caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) ou aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). C'est donc un cadre que nous aurons à définir et à proposer. Je ne doute pas que nous saurons avancer résolument et efficacement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion