Monsieur le ministre des affaires étrangères et du développement international, nous sommes heureux de vous recevoir pour une nouvelle audition fermée à la presse. Les sujets sont nombreux, d'autant que, depuis la précédente, le 1er mars dernier, votre agenda chargé a dû vous conduire à faire le tour du monde !
Commençons par les relations franco-allemandes. Le dix-huitième conseil des ministres franco-allemand s'est tenu le 7 avril dernier à Metz. Vous avez d'ailleurs remis à cette occasion le rapport sur l'intégration des sociétés française et allemande qui vous avait été commandé avant votre retour au Gouvernement. En réalité, tous les sujets d'actualité sont des sujets franco-allemands, mais l'accord avec la Turquie sur les migrations, qui comporte de nombreux volets, occupe plus particulièrement les esprits, et M. Erdoğan hausse le ton. Il rappelle ainsi à Mme Merkel qu'une libéralisation des visas avant la fin du mois de juin lui a été promise. Comment voyez-vous cela ?
Au Conseil européen du mois de juin prochain Mme Mogherini devrait enfin, après plusieurs reports, présenter la nouvelle stratégie globale de sécurité. Quelles en seront, selon vous, les orientations ?
Comment voyez-vous l'avenir du processus de Genève ? Les négociations de Genève sont interrompues – l'opposition syrienne a suspendu sa participation – et nous assistons, sur le terrain, à une escalade de la violence. La situation humanitaire est vraiment catastrophique. Quelles initiatives vous paraissent possibles ?
Le 16 avril dernier, vous étiez en Libye, avec Frank-Walter Steinmeier. Quelles sont les chances du gouvernement d'union nationale ? Le Conseil présidentiel vous paraît-il susceptible de reprendre en main la situation ?
Vous avez également convoqué une réunion préparatoire, le 30 mai, à Paris, en vue de la conférence internationale sur le conflit israélo-palestinien. Quels sont vos objectifs ?
Hier, je me suis rendue pour la deuxième fois à Kiev avec mes homologues allemands et polonais. Nous sommes dans une impasse. Tout d'abord, la situation sécuritaire et humanitaire dans le Donbass est très inquiétante, principalement du fait des séparatistes –évidemment appuyés par les Russes –, dont le moins qu'on puisse dire est qu'ils ne respectent pas toujours le cessez-le-feu. Par ailleurs, les observateurs de l'OSCE ne sont pas libres de procéder aux inspections nécessaires ni de se rendre aux endroits sensibles. Ce sont là autant de problèmes auxquels il pourrait être demandé aux Russes de remédier. Côté ukrainien, aucun progrès n'est enregistré en ce qui concerne l'adoption en deuxième lecture, par le Parlement ukrainien, de la loi constitutionnelle sur le statut spécial du Donbass. Les Accords de Minsk ne sont donc, pour l'instant, pas respectés. Un nouveau Premier ministre, proche de M. Porochenko, a été nommé, mais il ne semble pas pouvoir réunir, à court terme, la majorité qualifiée requise pour la révision constitutionnelle. Les responsables ukrainiens semblent en revanche être plus ouverts à l'élaboration d'une loi électorale pour le Donbass ; c'est un point positif. Par ailleurs, ce gouvernement semble vraiment déterminé à lutter efficacement – enfin ! – contre la corruption. La télé-déclaration des revenus et des patrimoines des élus et agents publics est en vigueur. Une réforme de la Justice est annoncée.
Quel regard portez-vous sur la situation, vous qui étiez à Moscou le 19 avril ? Comment voyez-vous le rôle de la Russie ? La position russe peut-elle évoluer ? Le président russe est-il prêt à exercer une plus forte pression sur les séparatistes pour que ceux-ci fassent les gestes attendus côté ukrainien ? Et quelle pression supplémentaire exercer sur les Ukrainiens pour qu'ils fassent eux aussi les gestes attendus ?
Le 22 avril, ce sont 175 pays qui ont signé l'Accord de Paris sur le climat. Je me réjouis personnellement que le Gouvernement ait décidé de soutenir la candidature de Laurence Tubiana à la succession de Mme Christiana Figueres au poste de secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Avant la suspension des travaux parlementaires, nous avions auditionné Mme Tubiana et nous avions été quelques-uns à regretter que sa candidature ne soit pas encore soutenue officiellement par le Gouvernement, mais elle l'est désormais, tant mieux. Nous espérons qu'elle pourra maintenant mener une campagne positive. Quelles sont, selon vous, ses chances ? Peut-être la question est-elle prématurée à ce stade.