Intervention de Marie-Jo Zimmermann

Séance en hémicycle du 30 janvier 2013 à 22h45
Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Jo Zimmermann :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, ministre de la justice, madame la ministre déléguée chargée de la famille, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, le mariage pour tous serait donc le fruit normal de l'évolution des moeurs, un accroissement des libertés, l'occasion pour la France de rejoindre un standard européen. C'est sur de tels arguments que vous vous êtes appuyés depuis des mois pour soutenir une réforme que la majorité des pays européens n'a pas adoptée et dont la majorité des Français est inquiète.

Pour vous, la France est en retard par rapport à ses voisins européens. Vous savez bien que ces affirmations sont loin de correspondre à la réalité européenne. Cette réalité, la voici : moins d'un quart des vingt-sept pays de l'Union ont autorisé le mariage et l'adoption par des personnes de même sexe, et encore, selon des règles beaucoup plus restrictives que celles que vous nous présentez. Il en va de même pour la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui.

En revanche, ce sont seize pays – ce qui représente la majorité des pays européens – qui ont introduit l'union civile pour les personnes de même sexe. C'est donc cette voie qui est privilégiée en Europe. C'est cette voie-là que nous vous proposons de suivre depuis des mois ; et, puisque vous êtes soucieux de l'harmonie européenne, c'est cette voie que vous auriez choisie si vous aviez fait preuve de cohérence.

Nous aurions pu facilement améliorer le PACS dans un esprit consensuel qui n'aurait pas suscité le clivage que crée le présent projet de loi au sein de la société française. Nous aurions pu faire de l'union civile un véritable cadre protecteur, tant pour le couple que pour les enfants. Au lieu de cela, vous allez ouvrir une véritable boîte de Pandore.

Puisque vous choisissez de construire le couple homoparental sur la base de l'adoption, pouvez-vous vraiment nier que ce texte ouvrira logiquement la possibilité de la PMA puis de la GPA ? D'ailleurs, si les députés de votre majorité ont renoncé à déposer un amendement en faveur de la PMA, c'est uniquement contre l'assurance de débattre de ce sujet lors du projet de loi sur la famille que vous nous présenterez dans deux mois.

Et que dire de la circulaire que vous venez de prendre, madame la garde des sceaux ? Certes, vous avez voulu sécuriser la situation des enfants concernés ; cependant, cette décision suscite chez nous beaucoup d'interrogations quant à ce qui se passera par la suite, et j'aurais souhaité obtenir une réponse à ce sujet.

Vous qui êtes très respectueuse du droit des femmes – je sais, madame la garde des sceaux, que vous avez été très combative sur le sujet –, la marchandisation du corps de la femme, de l'utilisation de sa vie même, ne vous pose-t-elle pas problème ? Quelles femmes peuvent accepter de porter un enfant pour le confier à un autre après l'avoir mis au monde, sinon des femmes en grande détresse matérielle et sociale ?

Au travers de ce projet de loi de mariage pour tous, vous remettez totalement en cause les lois de la filiation.

Encore une fois, il ne s'agit pas de la capacité d'un couple homosexuel à élever ou à aimer un enfant ; je respecte l'amour que les uns et les autres peuvent donner à un enfant.

La vie prive parfois un enfant de père ou de mère par accident, mais la loi ne doit pas organiser une telle privation.

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