Je suis totalement favorable à la rémunération au mérite. Elle est essentielle pour impliquer davantage les fonctionnaires. Un fonctionnaire n'est pas un travailleur comme un autre, il s'engage dans la fonction publique, il est au service des citoyens, de la France et de la République. Cet engagement, qui est souvent à l'origine de l'entrée dans la fonction publique, peut s'étioler avec le temps ou perdre de son sens. Nous devons discuter du sens de l'engagement dans la fonction publique, qui a besoin d'être rappelé ou réactivé au fil du temps. Il nous faut ménager au cours de la carrière des temps pour souffler et pour redonner du sens à son action et retrouver la motivation d'origine.
Le mérite doit être récompensé à travers les avancements et les promotions. Le RIFSEEP le permet. La part variable, qui représente 20 % du régime indemnitaire, doit être davantage utilisée selon le mérite.
Pour la première fois en février dernier, la DGAFP a publié un document sur la rémunération de l'encadrement supérieur et dirigeant des trois versants de la fonction publique, soit environ 21 600 fonctionnaires. Je suis partisane d'une transparence totale. Le tableau, qui est accessible sur internet, fait apparaître que le salaire moyen d'un préfet s'élève à 10 328 euros nets et celui d'un recteur à 9 193 euros, à comparer avec les cadres du secteur privé dont les salaires moyens s'établissent autour de 18 500 euros.
Je ne suis pas sûre qu'on s'engage dans la fonction publique pour des raisons financières. Je le redis, celle-ci doit permettre les allers-retours entre le public et le privé pour lever l'un des freins à la mobilité que j'ai soulignés. Je prends un exemple : à mes questions sur l'absence de progression d'un agent de l'Éducation nationale en poste dans un autre ministère, on m'a répondu que lorsqu'on fait le choix de s'éloigner de l'éducation nationale, il ne faut pas s'étonner d'être oublié. Finalement, quand on prend des risques et qu'on ose changer, on est oublié. Rien dans notre système n'est fait pour valoriser la mobilité entre ministères, entre fonctions publiques ou entre privé et public. À aucun moment, il n'est possible de valoriser les compétences acquises lors d'expériences dans le privé. C'est la raison pour laquelle des évaluations sont nécessaires. Il faut trouver le dispositif qui permette de valoriser l'ensemble de ces expériences.
L'évaluation des fonctionnaires a connu d'importants progrès ces dernières années, même s'il est selon moi souhaitable d'aller plus loin encore. Les modalités d'évaluation des administrateurs civils et des titulaires d'emplois fonctionnels ont été revues en 2015 ; l'entretien professionnel est désormais systématique ; les lettres de mission ont également été systématisées ; une période d'essai d'un an a été mise en place pour les emplois fonctionnels depuis juillet 2015 ; s'y ajoute la part modulable du régime indemnitaire et la circulaire du Premier ministre de 2015 évoque les évaluations à 180 ou à 130 degrés pour les cadres supérieurs. Ces dispositifs existent mais il faut savoir tirer les conséquences d'évaluations négatives – en sanctionnant ou en changeant le parcours de l'intéressé – et valoriser les évaluations positives. Une DRH de l'État unique, qui assurerait aussi la gestion des ressources humaines, me paraît plus à même de faciliter les réformes en ce sens.