Je suis pour ma part favorable à l’amendement que défendra dans un instant M. Larrivé, car la liberté syndicale ne se découpe pas en tranches : soit on l’octroie, soit on ne l’octroie pas, mais on ne peut dire à des Français qui souhaitent se regrouper pour défendre leur liberté que cette liberté s’exercera de manière limitée.
Le problème qui se pose dans le cas de la magistrature est que les syndicats de magistrats peuvent, comme le font d’autres syndicats dans la sphère marchande, prendre des positions politiques. Ce qui, pour un grand syndicat ouvrier qui, par exemple, prendrait parti dans une élection présidentielle ou exprimerait des vues partisanes dans le débat public, est politiquement critiquable, mais tout à fait légal, est plus problématique dès lors que sont concernés des fonctionnaires astreints à un devoir de réserve plus particulier et à une indépendance telle que leur positionnement ne doit pas être entaché d’arrière-pensées partisanes.
Puisqu’il est impossible de créer dans la magistrature des syndicats limités dans leur positionnement en inscrivant dans la loi des dispositions leur interdisant de prendre certaines positions, la seule solution juridique est de s’inspirer de la pratique de la Cour des comptes – dont, je le rappelle, le juge de cassation est le Conseil d’État – et des chambres régionales des comptes, qui n’ont pas de syndicats, mais une association professionnelle des magistrats. Ce système fonctionne très bien et permet la défense d’intérêts corporatistes – ou, du moins, des intérêts de la corporation des magistrats – sans tomber dans certains travers du syndicalisme qu’a rappelés mon collègue.
Je soutiens donc cet amendement, qui permettra d’éviter ce que nous avons connu avec le fameux « Mur », qui a perturbé le fonctionnement de l’institution judiciaire.