Merci de ce tableau assez complet. Alors que nous arrivons presque au terme des auditions de cette mission d'information, nous partageons votre constat : les organismes gérés par les partenaires sociaux n'ont pas à rougir, comparés à d'autres standards. Mais on sent aussi beaucoup de conservatisme à l'égard du système : il évolue souvent sous le coup de la loi, mais assez peu de lui-même.
Prenons l'exemple de la formation professionnelle. Au fond, l'idée est largement partagée parmi les politiques et les responsables syndicaux et patronaux que les parcours professionnels seront beaucoup plus diversifiés, voire hachés, qu'ils ne l'ont été par le passé, et cela impose de faire évoluer le système. Pour la formation professionnelle, un outil a été créé, le CPF. Intellectuellement, il est très simple, mais sur le terrain, la façon dont les opérateurs de la formation professionnelle montent les formations qualifiantes est encore une usine à gaz : on fait appel à l'OPCA, puis si ça ne suffit pas, au Fongécif, auquel on ajoute un bout de congé individuel de formation, puis l'on va piocher dans le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. Cet exemple montre que la gouvernance du système – qu'il s'agisse de dispositifs étatiques, paritaires ou mixtes – ne suit pas le rythme des évolutions intellectuelles. Nous comptons parmi nous un expert en la matière, Jean-Patrick Gille, auteur d'un rapport sur les premiers pas du CPF, et nous pensons qu'il faudrait réfléchir à un système d'assurance-formation comparable à l'assurance-chômage. Cela permettrait d'avoir un opérateur interprofessionnel décisionnel, pourquoi pas paritaire, car j'estime comme vous que les mécanismes pleinement paritaires fonctionnent mieux que les systèmes tripartites ou quadripartites.
Selon vous, pour quelles raisons ce système évolue-t-il très peu de lui-même ? Avez-vous identifié des éléments qui sont actuellement gérés paritairement et qui ne devraient plus l'être, et d'autres qui pourraient revenir en gestion paritaire ?
Par ailleurs, vous dites qu'il vous semble plus efficace que chacun soit pleinement responsable. Pour autant, vous ne niez pas que le législateur ou le Gouvernement puisse intervenir. Y a-t-il un système qui vous semble plus pertinent qu'un autre ? Par exemple, le régime d'assurance-chômage passe par des négociations, qui font l'objet d'un agrément ex post, système qui a ma faveur. Pensez-vous préférable qu'il n'y ait aucune intervention une fois que l'accord a été signé ? Quel est votre avis sur les systèmes dans lesquels un commissaire du Gouvernement est présent au sein du conseil d'administration, sans droit de vote mais avec un droit de veto lorsque les décisions ont un impact budgétaire ?
Enfin, la France a pris des engagements de maîtrise des comptes publics qui incluent tous les comptes sociaux, en particulier ceux des régimes de retraite complémentaire ou l'Unédic. Comment envisager un mécanisme permettant d'être responsable globalement et d'éviter que l'État vous impose de réaliser 2 milliards d'euros d'économies, ce que certains ont dénoncé comme une ingérence ? Comment imaginer un système qui vous laisse votre autonomie et votre pleine responsabilité tout en permettant à l'État, responsable vis-à-vis de l'Union européenne, de tenir ses engagements de maîtrise des finances publiques ?