Intervention de Elisabeth Pochon

Séance en hémicycle du 30 janvier 2013 à 22h45
Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaElisabeth Pochon :

Chers collègues, avoir un enfant n'est pas un droit, nous répétez-vous à longueur d'interventions. Vous vous faites ainsi les seuls défenseurs des droits des enfants, en nous renvoyant, nous qui sommes favorables au mariage entre personnes du même sexe – et à ses conséquences sur la filiation et l'adoption –, au rôle d'irresponsables, d'égoïstes ou d'apprentis sorciers.

Est-ce à dire que nous, la gauche, aimerions moins les enfants que vous, au point de pouvoir nous imaginer dénués du souci de leur épanouissement ? Nous serions suspects de n'avoir en tête que la satisfaction d'une minorité homosexuelle, sans mesurer les conséquences de notre engagement à les faire accéder à l'égalité des droits en matière de mariage et d'adoption.

Mais de quels enfants parlons-nous ?

Parlons de ceux qui sont déjà nés, enfants biologiques ou adoptés, qui vivent déjà au sein d'un couple homosexuel et qui reconnaissent comme parents ceux qui s'occupent d'eux et qui les aiment au quotidien, mais dont l'un d'entre eux au moins n'a aucun droit reconnu sur lui, notamment en cas de séparation ou de décès du parent officiel.

Au nom de quel principe pourrait-on refuser l'adoption de cet enfant chéri par ce parent-là ? Le parent officiel n'aurait donc pas le droit de souhaiter pour son enfant l'adoption par le conjoint qu'il a choisi ?

Le premier des droits de l'enfant auxquels vous êtes, j'en suis sûre, autant attachés que nous, c'est le droit de ne pas être séparé de ceux qui l'ont élevé. Le voilà, indiscutablement, l'intérêt de l'enfant !

Nos tribunaux prononcent à juste titre, chaque jour, l'adoption des enfants par leur famille d'accueil après des années de soin et d'amour, alors que cela serait refusé à un conjoint sous le seul prétexte qu'il est du même sexe que son compagnon ou sa compagne ?

Nous valons tous mieux – et nous voulons tous mieux – que cette discrimination avérée, pour ne pas l'appeler un ostracisme, que nous légitimerions en refusant cette faculté d'adoption-là. J'emploie à dessein ce terme d'ostracisme, en vous rappelant sa définition – « hostilité d'une communauté qui rejette l'un de ses membres » – parce que, au-delà du droit à l'égalité, c'est la reconnaissance de cet autre qui est en jeu, la reconnaissance de la capacité d'un conjoint de même sexe à être le deuxième parent d'un enfant.

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