Si vous me le permettez, monsieur le président, je vais non seulement donner mon avis sur cet amendement mais aussi faire une intervention liminaire afin de planter le décor.
Le rapprochement des contentieux dans de nouveaux pôles sociaux des TGI obéit tout d’abord à un besoin de lisibilité de la justice pour nos concitoyens. La situation actuelle a été dénoncée par Pierre Joxe dans son livre Soif de justice, qui montrait que nos concitoyens ne s’y retrouvent pas dans le maquis des différentes juridictions – je ne parle même pas de leur localisation, varie suivant les cas. C’est sur cette complexité qu’il faut agir, et c’est précisément la volonté du Gouvernement.
Le transfert qui est proposé doit aussi mettre fin au caractère hybride de ces juridictions qui sont présidées par des magistrats judiciaires et relèvent du ministère de la justice, mais dont le secrétariat est assuré par des agents issus des caisses de sécurité sociale ou du ministère des affaires sociales – voire, ici ou là, de la mutualité sociale agricole.
Si ces juridictions fonctionnaient bien, nous ne nous poserions pas de questions. Je voudrais, à mon tour, citer quelques chiffres. On observe en particulier une hausse du stock d’affaires qui, même si elles ne concernent pas essentiellement les TASS, est préoccupante. En effet, le nombre d’affaires en cours est passé, dans ces juridictions, de 119 000 en 2010 à 160 000 en 2014, soit une hausse de plus de 39 % pour un stock qui nécessite deux ans d’activité pour être résorbé.
Cet accroissement, paradoxalement, ne s’explique pas par une hausse du nombre de nouvelles affaires puisque celui-ci apparaît relativement stable – autour de 150 000 dossiers par an pour les TASS et les TCI. On voit bien qu’à stock constant on perd du temps : les délais s’allongent de plus en plus. Cela veut dire que quelque chose ne va pas.
Qu’est-ce qui ne va pas, justement ? Il existe plusieurs difficultés, qui sont d’ailleurs variables selon les juridictions, comme nous avons pu le constater au cours des auditions auxquelles nous avons procédé. Tout d’abord, une absence de pilotage. Ensuite, les difficultés de gestion du régime social des indépendants – le problème du RSI a beaucoup perturbé les juridictions ces derniers temps.