Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Séance en hémicycle du 18 mai 2016 à 21h30
Statut des magistrats et conseil supérieur de la magistrature - modernisation de la justice du xxie siècle — Article 14

Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice :

Là encore, je crains que les arguments aient été largement développés, dans les deux camps, par chacune des deux sensibilité politique.

Le Gouvernement est évidemment défavorable à la suppression de l’article 14 sexies, qui abroge les tribunaux correctionnels pour mineurs. J’essaierai de m’exprimer avec des mots un tout petit peu différents de ceux utilisés par Jean-Yves Le Bouillonnec, même si nous sommes mus par des convictions parfaitement identiques.

Si nous voulons être fidèles, par cohérence, à l’esprit de ceux qui ont souhaité la création des tribunaux correctionnels pour mineurs – peu importe son fondement, que j’ai contesté à l’époque et que je conteste toujours –, reconnaissons ensemble que la décision du Conseil constitutionnel du 4 août 2011 a immédiatement privé ces instances de l’une de leurs qualités attendues : la rapidité. Vous avez complexifié l’organisation de juridictions qui ont déjà beaucoup de travail et dont les capacités sont limitées, puisque vous avez mobilisé des magistrats non spécialisés, non avertis de la matière, et le délai de traitement des affaires s’en est trouvé allongé – il fallait en effet parvenir à dégager du temps organisationnel.

Par parallélisme des formes, la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs libérera des effectifs, puisque ceux qui y étaient mobilisés pourront vaquer à des missions pour lesquelles leur compétence est reconnue et leur rapidité attendue.

Et tout cela pour un volume de contentieux ridiculement faible : 0,78 % des affaires en 2013 ; 0,87 % en 2014. Au total, de 2011 à 2014 – ce sont les derniers chiffres dont nous disposons –, 1 016 décisions ont été prises par les tribunaux correctionnels pour mineurs. Tant de temps passé à l’Assemblée nationale au sujet de 1 016 décisions, alors, pour me référer à la philosophie même de ceux qui défendaient la création de ces instances, qu’elles ne s’avèrent même pas plus sévères que celles des tribunaux pour enfants, tellement honnis par la majorité de l’époque !

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