Intervention de Arnaud Richard

Séance en hémicycle du 24 mai 2016 à 9h30
Questions orales sans débat — Projet de fret ferroviaire serqueux-gisors

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Richard :

Monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, il ne vous surprendra pas que, comme député de la vallée de la Seine, je vous interpelle sur le projet dit « Serqueux-Gisors », dont le nom est à l’image de la situation.

Lancé en 2009 par l’État, la SNCF et la région Haute-Normandie, le projet s’est bizarrement fait très discret jusqu’en mars 2013. Mais reprenons les faits depuis le début.

Il est estimé que la desserte ferroviaire Le Havre-Rouen-Paris sera saturée d’ici à 2018, ce dont chacun peut convenir.

Dans la perspective d’accompagner la croissance des activités du port du Havre et de faire face à la concurrence des grands ports d’Europe du Nord, une solution reste à trouver pour établir une connexion ferroviaire robuste et sécurisée entre le grand port maritime du Havre et l’Île-de France.

Nous en sommes à la phase de concertation. L’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique vient de se terminer et elle a été vécue, monsieur le secrétaire d’État, comme un passage en force.

Au premier abord, la nécessité d’un tel projet est compréhensible et la concertation – importante dans notre pays – aurait dû faire son oeuvre, pour que tout le monde prenne en compte la situation des populations.

Néanmoins – et c’est là que le bât blesse, monsieur le secrétaire d’État –, le projet a fait l’objet d’un véritable saucissonnage, en violation des textes et de la jurisprudence constante du Conseil d’État. Des territoires concernés par le projet n’ont pas été inclus dans l’étude d’impact, alors qu’ils le sont dans l’enquête publique.

Enfin, l’étude d’impact relève de graves insuffisances, s’agissant des nuisances sonores, et reste muette sur les conséquences de ce projet pour l’Île-de-France alors qu’il affecte potentiellement des dizaines de milliers de Franciliens.

Monsieur le secrétaire d’État, vous le savez, je suis élu d’un territoire où les règles de droit de l’enquête publique, comme la jurisprudence du Conseil d’État, sont bien connues. Et, croyez-moi, je crains que ce projet soit très mal « emmanché ». C’est un exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Sans vouloir jouer les oiseaux de mauvais augure, je crains – et je vous prédis – une véritable guerre procédurale dont on ne sortira pas.

Tout cela n’est pas très sérieux. Un collectif d’élus locaux – qui est interdépartemental et même interrégional, vous voyez que ce n’est pas le syndrome NIMBY, not in my backyard –, incluant la ville de Conflans-Sainte-Honorine, est mobilisé pour dénoncer un projet qui, en plus de briller par son opacité, ne prend pas en compte les externalités négatives qui lui sont liées. Je pense aux nuisances sonores, aux vibrations, à la fragilité des sous-sols, au transport de matières dangereuses, à la cohabitation du fret et du trafic de voyageurs, ainsi évidemment qu’à la dépréciation corrélative de la valeur du bâti.

Je n’entrerai pas dans le détail, mais la situation est inquiétante, monsieur le secrétaire d’État : inquiétante pour le projet, mais aussi pour le port du Havre – et je comprends nos amis normands qui veulent qu’une solution soit trouvée.

Monsieur le secrétaire d’État, dans les conditions présentes, compte tenu de l’enquête publique présentée aux acteurs concernés, il serait temps de trouver une solution alternative à ce projet ou peut-être de réfléchir à un meilleur usage de la voie d’eau dans notre pays. Vous savez que deux convois fluviaux représentent 5 000 tonnes de marchandises. Peut-être faudrait-il réfléchir d’une autre manière sur ce projet.

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