Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 11 mai 2016 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, présidente :

Je suis également heureuse de vous accueillir, monsieur le secrétaire d'État, comme nous le faisons régulièrement. Cette audition se tient juste avant le Conseil des affaires étrangères qui se réunira, au format commerce, le vendredi 13 mai. Je parlerai moins du traité de libre-échange transatlantique (TAFTA, pour Transatlantic Free Trade Area) – d'autant que la commission des affaires européennes a reçu ce matin le rapporteur du Conseil économique, social et environnemental (CESE).

Au Secrétariat général des affaires européennes, nous n'avons pu consulter que des synthèses en anglais, mais cela ne nous a pas empêchés de voir que, sur certains points, les négociations sont au point mort et que les États-Unis ont surtout à l'esprit le résultat auquel ils sont parvenus avec le traité transpacifique. Cependant, vous vous étiez engagé sur l'open data, monsieur le secrétaire d'État, et nous avons bien noté que nous pouvions à présent disposer des textes consolidés, si possible avec une traduction française, comme nous l'a indiqué récemment le SGAE.

Les suites de l'accord intervenu à Nairobi en décembre dernier sont le premier point inscrit à l'ordre du jour, très chargé, du Conseil de vendredi. Les membres de l'OMC se sont accordés sur un « paquet » de décisions portant sur l'agriculture, le coton et certaines questions relatives aux pays les moins avancés. Aussi partiel soit-il, cet accord marque une avancée. Ces négociations, qui durent depuis 2001, sont-elles sur la bonne voie ?

Le second point à l'ordre du jour est le TAFTA ou partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (PTCI, ou TTIP, pour Transatlantic Trade and Investment Partnership). Quid de la transparence ? Elle nous permettrait déjà des discussions nettement plus précises. En tout cas, de nombreuses questions restent pendantes et nous préoccupent : la question agricole, les indications géographiques, le modèle social européen… Tout à l'heure, le rapporteur du CESE, M. Christophe Quarez, en présence du député européen Franck Proust ; M. Quarez a proposé notamment un tableau de bord récapitulant, chapitre par chapitre, les conséquences que pourraient avoir des accords sur tel ou tel pays membre de l'Union européenne et même sur les pays tiers – du sud, notamment.

En outre, il n'y a toujours rien sur l'articulation avec la COP21, et les États-Unis ne reconnaissent que très partiellement les conventions de l'Organisation internationale du travail. La transparence nous aidera-t-elle à les interpeller sur ces sujets ? Vous-mêmes avez tenu des propos très fermes la semaine dernière, et le Président de la République a aussi déclaré : « Jamais nous n'accepterons la mise en cause de principes essentiels pour notre agriculture, notre culture, pour la réciprocité, pour l'accès aux marchés publics. » Entre réticences américaines, prises de position des candidats à l'élection présidentielle aux États-Unis, opposition de la société civile et interrogations des pays membres de l'Union européenne – même aux Pays-Bas, où se profile un référendum –, le TTIP est-il encore vraiment d'actualité ?

Le troisième point à l'ordre du jour est la crise du secteur de l'acier. La Commission doit faire des propositions en vue de la modernisation des instruments de défense commerciale. Cette crise est notamment la conséquence de la concurrence chinoise, ce qui pose la question du statut de la Chine. Si le statut d'économie de marché était accordé à celle-ci, quelles représailles l'Union pourrait-elle envisager face à des pratiques déloyales ?

Le quatrième point est l'accord économique et commercial global (AECG, ou CETA, pour Comprehensive Economic and Trade Agreement) avec le Canada. Vous avez été très rassurant, monsieur le Ministre, et le ralliement du Canada à la proposition européenne d'un tribunal pour le règlement des différends est un premier pas positif. De même 42 appellations d'origine protégée (AOP) françaises sont reconnues. Le hic est que la seule liste des fromages français compte bien plus de 42 AOP ! Cet accord est-il donc à ce point extraordinaire ? Sans doute illustre-t-il au moins le fait que les choses puissent bouger. En l'occurrence, le Premier ministre Trudeau a permis de transformer l'ISDS (Investor-state dispute settlement). Monsieur le Ministre, cet accord sera-t-il traité comme mixte ? Sur quoi les parlementaires devront-ils se prononcer ? Et qu'en est-il des choix faits dans le cadre de la COP21 si nous importons plus de gaz de schiste ? Je songe au drame que connaît aujourd'hui l'Alberta à cause de l'exploitation des sables bitumineux.

Le dernier sujet inscrit à l'ordre du jour de ce Conseil des affaires étrangères me tient particulièrement à coeur. Il s'agit des « minerais de conflit ». Le Parlement européen a considérablement renforcé la proposition de règlement en rendant obligatoire la certification des importateurs d'or, de tantale, de tungstène et d'étain et en l'étendant à l'ensemble de la chaîne de production, c'est-à-dire aux fabricants de produits contenant ces minerais. Le trilogue est engagé depuis plusieurs mois. Quelles perspectives offre-t-il ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion