Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission du développement durable, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame et monsieur les rapporteurs, les débats – les combats même – autour de la déontologie, de l'expertise et de la notion d'alerte ne sont pas nouveaux.
Pour mieux appréhender les mécanismes qui ont parfois conduit à de véritables scandales sanitaires et environnementaux, il faut nous arrêter quelques instants sur les notions d'incertitude et de controverse en science, sur la notion d'expertise, sur la naissance et le traitement de l'information, étant entendu que tous ces éléments se conjuguent évidemment en temps réel.
L'incertitude scientifique ne pose pas problème. Elle implique et justifie davantage de recherche, afin de la réduire. Il en va différemment de la controverse, qui atteste, elle, d'éléments contradictoires que la science ne semble pas pouvoir résoudre à un instant donné.
Nous savons que certains experts peuvent être réticents à l'idée d'exprimer des avis contradictoires qui pourraient les marginaliser dans leur discipline. En effet, chaque discipline est régie par un cadre théorique ou des écoles de pensée ; elle a ses codes et ses propres relations aux autres acteurs. On court toujours le risque d'une pensée formatée, celui d'une forme de consanguinité disciplinaire.
L'information, elle, autorise, à notre corps défendant, toutes les dérives et toutes les manipulations ; à l'inverse, elle permet l'accès en temps réel à des masses de documents qu'il faut encore savoir trier et décrypter.
Certains considèrent que la controverse scientifique ne devrait jamais être exposée publiquement. D'autres, au contraire, plaident pour l'exposition, afin qu'apparaissent tous les enjeux : enjeux scientifiques certes, mais aussi économiques, sociaux, politiques ou symboliques.
L'absence d'information quand un problème surgit peut être perçue comme de la dissimulation. Au contraire, la communication de crise, exercice complexe, a pour objet de rétablir la confiance, ce qui passe par la délivrance d'une véritable information responsable plutôt que par des éléments de pure communication.
L'alerte et les lanceurs d'alerte sont un chaînon essentiel si l'on veut que des faits potentiellement menaçants pour l'environnement et la santé puissent faire l'objet de signalements, puis d'expertises. Et ce d'autant que la capacité de certains groupes à peser pour retarder l'établissement de preuves scientifiques, notamment par l'information – ou la désinformation devrais-je dire –, n'est plus à démontrer.
Des exemples récents illustrent la nécessité d'une telle loi, et je veux m'arrêter un instant sur l'étude du professeur Séralini, évoquée par le président Chanteguet et largement caricaturée par le président Accoyer. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe UMP.) Avec son lot de souris boursouflées de tumeurs exposées face caméra, cette étude a eu l'effet attendu par son auteur, celui d'une bombe qui fit la une des médias pendant quelques jours.
Si la scénarisation était discutable et si l'étude elle-même a été largement critiquée sur le plan méthodologique, elle a eu l'immense mérite de pointer l'absence d'études suffisantes sur le maïs génétiquement modifié, notamment sur l'inconsistance des études produites par la firme Monsanto. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)