C'est ce que vous avez dit. En tout cas, c'est vraiment ce qu'il ne faut pas faire, si vous voulez mon sentiment. Comme M. Lamblin, je pense que l'on ne peut pas tout visionner et que les images peuvent, à la limite, permettre d'effectuer des contrôles ponctuels. Mais, elles ne doivent en aucune manière servir à vérifier si le personnel respecte la cadence – cela a été rappelé, nous sommes dans un univers marqué par le stress et les impératifs de production et de rentabilité.
Nous parlons du bien-être animal, mais il ne faut pas oublier celui des hommes, qui travaillent dans des conditions très éprouvantes. M. Touzet a évoqué la pénibilité des métiers de l'abattoir. Nos collègues qui ont visité hier celui de Feignies, dans le département du Nord, territoire durement touché par le chômage, nous ont rapporté que le directeur était prêt à prendre vingt personnes en formation, s'il les trouvait !
Ces métiers sont très difficiles. Les salariés sont soumis au stress alors qu'ils peuvent par ailleurs rencontrer des problèmes « personnels », familiaux ou autres. L'abattoir du Vigan, dans lequel certaines des images diffusées ont été filmées, se trouve dans ma circonscription. Le jeune que l'on voit jeter des moutons a complètement pété les plombs – vous-même avez employé l'expression, monsieur Touzet. Mais j'ai parlé avec les gens : ce jeune, il n'était pas comme ça. Peut-être que l'on flanche lorsque l'on est pris dans un engrenage, vous l'avez dit aussi.
Hier, le ministre nous a indiqué que des problèmes ont été détectés dans un tiers des 259 abattoirs inspectés au mois d'avril : 99 rappels à la règle ont été émis. Ces chiffres sont tout de même relativement élevés. Vous nous avez fourni certaines explications, comme le fait que vous ne pouvez pas en même temps, occuper un poste d'inspection qui exige une présence permanente, et vérifier ce qui se passe ailleurs dans la chaîne. Vous êtes aussi parfois considérés comme des « empêcheurs de tourner en rond », ce qui ne rend pas votre travail aisé : vous vous retrouvez entre le marteau et l'enclume. Faire remonter les choses devient de plus en plus difficile. On sait bien que c'est la direction de l'abattoir qui a la responsabilité des cadences, de la production, de la rentabilité ; je me doute que le dialogue ne doit pas être toujours évident.
La formation des abatteurs n'est peut-être pas suffisante – on nous a parlé d'une durée limitée à quarante-huit heures. Pensez-vous qu'il faudrait davantage de formation initiale et de formation continue ? M. Touzet a parlé des rotations entre les postes ; or certains exigent une plus grande technicité que d'autres.
Il peut aussi y avoir des difficultés liées au matériel. Alors que les plus gros abattoirs sont spécialisés par espèce, les plus petits font tout – celui de Vigan produit 300 tonnes par an. Il faut avoir le matériel adapté. Quand les bêtes ont toutes le même calibre, à peu de choses près, c'est plus facile.
La baisse de 20 % des effectifs a sans doute contribué à ce que, parmi les trois missions que vous nous avez décrites, monsieur Lasne, la protection animale en abattoir ait bénéficié de moins d'attention que le sanitaire et la santé publique : après les crises de la vache folle et autres, il n'est pas surprenant que la priorité leur ait été réservée aux dépens de ce qui posait le moins de problèmes. Quel est votre point de vue sur ce sujet ?
Dans ma circonscription, 50 % de la production de l'abattoir d'Alès est traitée selon le rituel halal. Quelle est la formation exacte des sacrificateurs ? Il paraît que des organismes religieux organisent des formations. Certaines mosquées seraient d'accord pour pratiquer un étourdissement, les autres le refusent. Quel est votre point de vue sur ces sujets ?
D'après ce que l'on nous a dit hier de votre ancien collègue qui a donné une interview à Libération, il semblerait que ce monsieur ne soit allé que trois fois dans un abattoir en douze ans… Votre parole ayant un autre poids que la sienne, il serait intéressant que vous puissiez vous exprimer clairement sur ses propos, d'autant que votre audition est ouverte à la presse : elle verra ainsi ce qu'il lui arrive de rapporter sans se soucier de respecter la déontologie ou de vérifier ses sources…