Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la fragmentation bien connue du paysage communal français, même si le seuil symbolique des 36 000 communes a été franchi à la baisse, constitue à la fois une richesse et une difficulté, une richesse parce que les communes demeurent des lieux privilégiés de démocratie concrète en raison de la proximité des intervenants, une difficulté parce que cette organisation a aussi un coût incontestable, celui de la dispersion des moyens et de la redondance des équipements, qui ne sont pas toujours à la hauteur des services attendus de la collectivité.
Afin de compenser les insuffisances de l’émiettement communal français, voire d’y remédier, de nombreuses réponses, ont été proposées depuis déjà longtemps, au-delà même des diverses formes de l’intercommunalité, qui sont bien entendu au premier rang des réponses aux besoins d’aujourd’hui.
Parmi ces dernières, la loi du 16 juillet 1971, dite loi Marcellin, a voulu organiser la fusion de communes. Son impact, reconnaissons-le, fut très limité, et la loi du 16 décembre 2010 lui a substitué une procédure rénovée de regroupement : autre tentative, couronnée, hélas, du même insuccès puisque, en quatre ans, seules treize communes nouvelles, regroupant au total trente-cinq communes, ont vu le jour.
Ce régime a donc été récemment assoupli par la loi du 16 mars 2015 visant à améliorer le régime de la commune nouvelle, afin de répondre à un certain nombre de situations fort différentes, et le résultat a été manifestement plus convaincant.
Cependant, aucune disposition spécifique précisant le devenir des communes associées en cas de création d’une commune nouvelle n’a été prévue. Il existe donc des incertitudes sur le devenir de ces communes encore régies par la loi Marcellin, incertitudes qui ont donné lieu à diverses interprétations.
Comme l’a indiqué l’auteur de la proposition de loi du Sénat, M. Sido, une telle situation « contribue à dissuader les communes issues du régime de fusion-association de la loi Marcellin de s’engager dans un projet de commune nouvelle, alors qu’elles sont les plus coutumières des démarches de fusion, et souvent désireuses de bénéficier d’un cadre juridique rénové ».
L’Association des maires de France a considéré à juste titre qu’il était possible de les transformer en communes déléguées, par délibération expresse du conseil municipal, afin qu’elles puissent se maintenir dans la future commune nouvelle. À l’inverse, la Direction générale des collectivités territoriales a estimé que la création d’une commune nouvelle entraînait, de plein droit, la disparition des communes associées, sans qu’il soit nécessaire de prononcer leur dissolution. Si tel était le cas, les communes associées se retrouveraient, après passage en commune nouvelle, effacées. La présente proposition de loi veut donc combler un vide juridique et mettre fin aux ambiguïtés, voire aux oppositions.
L’article 1er maintient d’abord les communes associées sous forme de communes déléguées en cas de création d’une commune nouvelle. Les maires délégués seraient en place jusqu’au renouvellement du conseil municipal. Il en irait de même pour les maires des anciennes communes associées. Je ne saurais trop insister sur la nécessité de respecter les transitions. Le tout ou rien, c’est quelque chose qui fonctionne rarement bien. Aménager des transitions me paraît ici particulièrement important.
L’examen de cette proposition au Sénat puis en commission à l’Assemblée nationale a permis de compléter le texte. A notamment été évoqué le problème lié à la détermination du collège électoral sénatorial.
Une autre incertitude devait être levée sur la détermination du nombre de grands électeurs pour les périodes transitoires qui suivent la mise en place d’une commune nouvelle. C’est l’objet de l’article 2, qui modifie les règles de détermination du nombre de délégués des conseils municipaux pour les élections sénatoriales durant les phases transitoires de création d’une commune nouvelle.
Vous comprendrez, mes chers collègues que le groupe UDI soutienne ce texte, qui vient combler utilement un vide juridique et répond aux interrogations venues de nombreux départements.
Nous n’oublions pas pour autant le contexte actuel et les réformes engagées, qui interrogent pour le moins de très nombreuses communes. Le maillage territorial au niveau communal conditionne, en effet, la réussite de toute réforme territoriale. Intégrer la réflexion sur l’avenir des communes à celle sur la décentralisation reste un chantier largement ouvert.
Si, en dépit des incertitudes actuelles, le groupe UDI se prononce en faveur de cette proposition de loi visant à offrir aux communes associées la faculté d’être maintenues en tant que communes déléguées dans le cadre d’une commune nouvelle, c’est d’abord dans cette perspective.