Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, chers collègues, nous sommes saisis d’une proposition de loi d’origine sénatoriale abordant le sujet du devenir des communes associées, en cas de création d’une commune nouvelle.
Comme plusieurs d’entre vous l’ont déjà exprimé, à l’initiative de plusieurs de nos collègues, dont Christine Pires Beaune et Jacques Pélissard, nous avons profondément rénové le régime de la commune nouvelle par le biais de la loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes. Cette initiative faisait suite au constat de l’échec de la loi dite « Marcellin » de 1971 et de l’absence de dynamique engendrée par le cadre, pourtant renouvelé, de la loi de 2010. L’incitation nettement plus forte créée l’année dernière semble rencontrer un écho certain dans nos territoires.
Il s’agit donc de conforter ce mouvement qui nous permet de corriger cette anomalie française du grand nombre de communes. Si le développement de l’intercommunalité a permis ces dernières années de pallier l’émiettement communal en termes d’organisation et de moyens, notamment via la mutualisation, cette solution seule ne suffit pas et il nous faut organiser la réforme des structures institutionnelles mêmes. C’est la solution de la fusion.
En créant un cadre incitatif et non contraignant, la loi de 2015 a fait le pari des intelligences locales dans le respect du principe de libre administration des collectivités territoriales. Il est payant puisqu’une nouvelle dynamique de fusion de communes est lancée. Plusieurs d’entre vous ont rappelé les chiffres, qui ont permis au pays de passer sous le seuil symbolique des 36 000 communes. Cette loi n’a cependant pas tout réglé. La question des communes associées, dépendant du cadre normatif, aujourd’hui supprimé, de la loi Marcellin, n’est pas couverte par la loi de 2015.
Nous sommes généralement partisans, à la commission des lois, d’une certaine sobriété législative. Chacun partage l’idée, aujourd’hui, qu’il n’est pas bon que la loi soit trop bavarde. La loi ne pouvant pas tout prévoir, son silence ouvre aussi la voie de l’innovation et de l’imagination locales. C’est souvent des territoires que nous viennent les meilleures pratiques et les idées les plus intéressantes.
En l’occurrence, le silence des textes semble avoir été source de complications, en autorisant deux interprétations concurrentes à émerger sur la question du devenir des communes associées en cas de création d’une commune nouvelle. La proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui a donc vocation à lever le doute qui est ainsi apparu. Il s’agit de répondre à la question : la création d’une commune nouvelle implique-t-elle la disparition des communes associées ou peuvent-elles évoluer en communes déléguées ?
Le caractère incertain de la réponse à cette question a pu être un frein à l’engagement de certaines communes dans de nouveaux processus de fusion : il y avait donc lieu de lever l’incertitude. La proposition de loi choisit clairement de permettre aux communes associées de pouvoir se maintenir comme communes déléguées au sein de la commune nouvelle.
Je tiens particulièrement à saluer les dispositions contenues dans l’article 1er de la proposition de loi qui relèvent du même esprit que la loi de 2015, à savoir laisser le maximum de choix aux élus locaux pour transformer leur organisation territoriale. Chaque territoire est différent. Il nous faut pouvoir articuler une logique d’ensemble, une logique nationale, compatible avec le principe de libre administration des collectivités territoriales et la diversité territoriale de notre pays. Les collectivités auront ainsi le choix de se transformer soit en une collectivité unique, dès l’origine ou par la suite, soit en commune nouvelle dotée de communes déléguées qui correspondront aux anciennes communes associées.
Je ne reviendrai pas sur les autres dispositions contenues dans la proposition de loi ni sur l’articulation, en deux temps, induite par l’article 1er, puisque Mme la rapporteure a été très claire sur ces aspects. Je veux simplement saluer, parmi les amendements présentés par la rapporteure en commission des lois, que nous avons adoptés, celui relatif au maintien des taux, pour chaque ancienne commune associée, de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères et ce, pour une durée maximale de cinq ans.
Alors que les réformes institutionnelles visent à produire plus d’efficacité dans l’action publique et des économies d’échelle, il serait difficilement compréhensible que leur premier effet soit un alourdissement de la feuille des impôts locaux. Par ce type d’amendement, nous laissons aux territoires le temps de s’organiser administrativement et d’acquérir une meilleure visibilité sur le plan budgétaire avant d’être amenés à prendre toute décision d’ordre fiscal.
Une fois la proposition de loi ainsi amendée et adoptée par notre assemblée, nous aurons véritablement un cadre global et exhaustif en matière de création de communes nouvelles. Mais il ne s’agit pas pour autant que notre réflexion en matière de rationalisation territoriale s’arrête. Au-delà des prochaines échéances électorales, qui verront probablement plusieurs propositions dans ce domaine, la représentation nationale doit poursuivre sa réflexion et faire éventuellement des propositions. Je sais que, parmi nos collègues, Christine Pires Beaune et Olivier Dussopt seront aux avant-postes de ces réflexions prospectives.
En cette période de congrès des maires, nous envoyons, par l’intermédiaire de cette proposition de loi, un message de confiance aux élus locaux. Il leur appartient de se saisir des outils que la législation leur offre déjà et que, grâce à cette nouvelle proposition, elle offrira demain aux communes associées. Je voterai naturellement cette proposition de loi et j’encourage chacun à en faire autant, dans la droite ligne du travail accompli en commission, qui a fait l’unanimité.