Intervention de Marthe Corpet

Réunion du 25 mai 2016 à 10h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi Égalité et citoyenneté

Marthe Corpet, vice-présidente de l'Union nationale des étudiants de France, UNEF :

Ce projet de loi était très attendu. Les notions d'engagement, d'autonomie, d'accès aux droits, font écho aux espoirs des jeunes, qui souhaitent être mieux reconnus dans cette société. Malheureusement, ce texte est en décalage par rapport à nos attentes – certaines dispositions nous inquiètent même.

D'abord, si la question de l'engagement et de l'égalité doit être envisagée dans un rapport de coconstruction avec les jeunes, elle ne doit pas renvoyer à une vision autoritaire de la République. Sur le service civique, par exemple, nous partageons l'ensemble des objectifs soulignés par les intervenants précédents : protéger l'engagement, mieux l'encadrer, le valoriser, en faire un outil pour de nouvelles missions, reconnaître l'engagement des jeunes. Par contre, nous sommes contre sa généralisation, car elle serait problématique en termes d'encadrement, mais surtout, elle aboutirait à une nouvelle trappe de précarité en instaurant une confusion entre engagement et travail. Dans un contexte de chômage massif, cette généralisation du service civique – avec les articles qui prévoient les outils d'intermédiation ou l'élargissement aux entreprises locales publiques et aux structures HLM – nous semble donc particulièrement inquiétante. Nous saluons néanmoins l'ouverture du service civique à toutes les nationalités.

Ensuite, l'élargissement du dispositif « meilleurs bacheliers » nous semble également très inquiétant. Nous sommes bien sûr conscients des difficultés de l'université à répondre à l'augmentation des bacheliers. Mais si l'université devait choisir les bacheliers qui vont intégrer ses rangs, au lieu de tous les accueillir, il s'ensuivrait une inégalité sociale extrêmement forte, ce qui risquerait d'aboutir à une université à plusieurs vitesses entre filières sélectives et filières non sélectives. Pour nous, ce serait une régression extrêmement grave.

Enfin, les mesures de simplification, notamment concernant l'APL, nous inquiètent également. Ces dernières années, le gouvernement a proposé de simplifier les critères d'attribution de l'APL, voire de réduire le nombre d'étudiants bénéficiaires en supprimant l'APL pour les étudiants non-boursiers. Quand le gouvernement légiférera par ordonnances sur ce sujet, le débat démocratique ne pourra pas se faire.

À côté de ces inquiétudes, certaines dispositions du projet de loi sont positives, mais nous semblent manquer d'ambition.

La lutte contre les discriminations est extrêmement importante. Mais nous aurions voulu voir dans ce projet de loi l'ouverture à des droits nouveaux, comme la mise en place d'un récépissé de contrôle d'identité ou encore l'obligation du curriculum vitae anonyme.

La question de l'autonomie est également très importante, mais le projet de loi ne va pas assez loin sur le logement étudiant. L'accès à un logement autonome pour les jeunes est loin d'être une généralité. Nous souhaitons, par exemple, une fusion des dispositifs de garantie locative, car il existe actuellement un grand nombre de dispositifs assortis de critères.

Dans le domaine de la santé, si nous approuvons la disposition sur l'information des jeunes, nous souhaitons que le projet aille plus loin. Des amendements sur l'interface numérique sont proposés sur le Pass contraception, de nouveaux droits à la santé pour les jeunes : ils nous paraissent très importants au regard d'un public qui renonce souvent à se soigner.

Nous saluons la volonté de valoriser l'engagement dans le cadre universitaire. Des amendements sont proposés, nous les soutiendrons.

Enfin, s'agissant de l'accès au droit commun, un grand nombre d'amendements sont portés par le Forum français de la jeunesse, notamment sur l'accès au RSA pour les moins de vingt-cinq ans ou encore l'accès à la « prime de précarité » pour les jeunes. Ce sont pour nous des dispositions essentielles pour que ce projet de loi constitue une réelle avancée.

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