et c’est très bien –, un texte qui, je pense, permettra de doter la France d’un dispositif à la fois riche et complet en matière de transparence, de lutte contre la corruption transnationale et de modernisation de la vie économique.
Ce texte contribuera à faire de notre pays une démocratie moderne, assise sur des valeurs solides, et non une démocratie du soupçon. Il contribuera à construire pour notre pays une économie au service de tous et à combattre une finance débridée au service de la corruption et de la spéculation.
Pour aboutir à la discussion qui s’ouvre aujourd’hui, nous avons étroitement travaillé, ces dernières semaines, avec les rapporteurs des trois commissions saisies, MM. Denaja, Colas et Potier. Je les remercie très chaleureusement, de même que la présidente et les présidents des commissions concernées, mais aussi les nombreux députés qui ont travaillé, pendant de longues heures, à l’amélioration du texte.
Ce projet de loi poursuit deux objectifs susceptibles, à mon sens, de vous rassembler tous dans cet hémicycle : d’une part, la transparence, afin de lutter contre le soupçon, je l’ai dit ; d’autre part, la lutte contre la finance qui prospère sur les abus, qui contourne, qui corrompt, et l’encouragement de celle qui, à l’opposé, permet de créer, de développer de l’activité, de l’emploi, d’innover pour redresser et renforcer notre économie.
Chacun le sent bien, et certains classements internationaux nous le rappellent régulièrement, notre pays a encore des progrès à accomplir dans le domaine de la transparence. Le temps est venu de poursuivre la modernisation de notre droit national pour le mettre au niveau des grandes démocraties qui nous entourent.
Je me permets d’insister sur la dimension internationale car il suffit de dialoguer avec certains de nos homologues étrangers pour se rendre compte d’une chose : si la France n’a pas hésité à proclamer en 1789, je cite, que « la Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration », notre pays et notre droit sont longtemps restés marqués par des constructions juridiques, remontant parfois à l’Ancien régime, qui, depuis des siècles, traduisent la volonté du législateur de protéger en toutes circonstances l’action des pouvoirs publics et de ceux qui lui sont liés, même lorsque aucun secret d’État n’est en jeu.
C’est contre cette tradition, qui fait trop souvent rimer pouvoir et secret, qui encadre et trop souvent entrave les contre-pouvoirs les plus naturels, que la République et les Lumières ont, depuis le premier jour, entendu se battre pour garantir les droits du citoyen, c’est-à-dire sa protection.
C’est contre cette tradition ancrée au coeur des ressorts les plus intimes et des habitudes les plus routinières de nos institutions que le législateur républicain s’est tant de fois mobilisé. Aujourd’hui, c’est avec cette volonté politique et cette aspiration profondément démocratique qu’il nous faut renouer pour permettre à la France de relever les défis de la révolution numérique, de la mondialisation de l’information et de l’économie.
C’est un choix que le Président de la République a fait depuis son élection : ancrer la transparence dans nos institutions et créer le cadre juridique et les mécanismes nécessaires pour rendre dorénavant inéluctables les progrès de cette transparence. L’objectif est évidemment de consolider la confiance de nos concitoyens dans les institutions publiques et ceux qui les dirigent. Chacun se souvient ici des débats sur la loi relative à la transparence de la vie publique qui ont animé ces bancs.
Mais l’objectif est aussi de consolider la confiance des acteurs économiques dans une économie ouverte et saine. C’est le deuxième pilier de ce projet de loi, qui porte sur la modernisation de l’économie et a pour finalité de développer la liberté du commerce et de l’industrie ainsi qu’un financement efficace et sûr de notre économie.
Il a aussi pour ambition de sanctionner plus sévèrement cette finance dévoyée qui menace notre modèle économique et social. La lutte contre la corruption et le combat pour la transparence sont des impératifs moraux mais aussi économiques car ce sont des facteurs de croissance. Toutes les études le montrent : là où la corruption recule, le commerce prospère. Le projet de loi que je vous présente aujourd’hui, j’en suis persuadé, aura un effet positif sur l’investissement et la croissance.
Ce texte s’appuie sur un ensemble de travaux menés par exemple, en France, par le groupe de réflexion conduit par M. Jean-Louis Nadal, président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, ou, sur le plan international, par l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE. Il répond à une série de préoccupations exprimées par des organisations non gouvernementales et fait suite à une série d’échanges avec une multiplicité d’acteurs.
Ce projet de loi touche à différents domaines de la vie publique et économique : les relations entre les pouvoirs publics et les représentants d’intérêts, la lutte contre la corruption, la protection des lanceurs d’alerte, la régulation financière, l’activité d’artisan, la vie des sociétés ou des questions strictement agricoles. La version initiale a été enrichie, notamment en ce qui concerne la protection des lanceurs d’alerte – le texte comportait une accroche, en attente de la conclusion des travaux menés par le Conseil d’État, que vous avez su utiliser pertinemment.
Première grande ambition du texte : une transparence assumée et revendiquée. Il comporte en effet une série de dispositions indispensables pour favoriser une plus grande transparence et aider à rétablir ce lien de confiance indispensable au bon fonctionnement de notre démocratie.
Il prévoit d’abord la création d’un répertoire numérique des représentants d’intérêts auprès du Gouvernement, à l’image des fichiers mis en place, il y a quelques années, par l’Assemblée nationale puis par le Sénat, pour inventorier les représentants d’intérêts s’adressant aux parlementaires – vous en connaissez fort bien le fonctionnement, et pour cause.
L’objectif du Gouvernement est bien d’encadrer l’activité des représentants d’intérêts et non de l’interdire ou de la stigmatiser. Les représentants d’intérêts, par leur action, contribuent à la réflexion collective. Ils constituent des relais d’opinion utiles et nécessaires, que le Gouvernement et le législateur doivent écouter. Leurs informations et leurs arguments doivent donc être pris en considération.
Mais, parce qu’ils possèdent un pouvoir d’influence sur les pouvoirs publics, il faut rendre transparents les rapports qu’ils entretiennent avec ces derniers et leur activité doit être encadrée.
Le texte du Gouvernement a été enrichi lors de l’examen en commission. Je suis favorable à toute mesure allant dans le sens de la transparence, dès lors – c’est la moindre des choses – qu’elle assure la capacité opérationnelle à mettre en oeuvre le futur dispositif d’ensemble et qu’elle est conforme à la Constitution.
Je suis notamment favorable à la création d’un registre unique, commun au Gouvernement, à l’Assemblée nationale et au Sénat, ainsi qu’à l’extension de l’obligation d’inscription dans ce répertoire aux représentants d’intérêts auprès des élus locaux.
Il s’agit aussi de protéger les lanceurs d’alerte. Les Panama Papers ou l’affaire Antoine Deltour, au Luxembourg, ont encore mis en lumière très récemment, s’il en était besoin, le rôle primordial des lanceurs d’alerte.