Ce projet de loi équilibré apportera une amélioration substantielle en permettant de mieux encadrer les risques de marché, tout en respectant le modèle de banque universelle. Il a en effet fait ses preuves, surtout si on le compare aux banques anglo-saxonnes spécialisées, les unes, comme Lehman Brothers, dans l'investissement, les autres, comme Northern Rock, dans le service aux particuliers. Le meilleur critère à considérer pour séparer les activités est leur utilité pour l'économie.
Les banques doivent continuer à exercer en toute liberté les activités nécessaires à leur financement : couverture des risques, gestion de la liquidité des banques et tenue de marché. Elles doivent, pour ce faire, disposer d'un volume d'actifs liquides suffisant pour se refinancer sur le marché comme auprès de la banque centrale, afin de répondre aux obligations des ratios de liquidité et de procéder à des opérations d'investissement, par exemple en obligations d'entreprise, en complément de leurs opérations de crédit. En revanche, on doit sinon décourager, du moins cantonner les gros volumes d'activités de marché coupées du client et de l'économie réelle, pour éviter qu'on ne revoie les excès liés à l'empilement d'activités à risque, observés avant 2007. La loi sera un succès si elle y parvient.
Le projet renforce aussi les pouvoirs de l'ACP en matière de prévention et de gestion des crises. Un projet de directive est en cours sur le formatage des activités de résolution, c'est-à-dire la gestion ordonnée des crises et, en cas de besoin, la cessation ordonnée des activités des banques. La France, qui a attendu pendant des années un texte européen, doit anticiper les dispositions de l'Union – récemment, l'absence de règles législatives nous a empêchés de traiter un dossier –, d'autant que les assemblées seraient à nouveau saisies si le texte européen différait in fine de la loi française.
Le texte inscrit la prévention des crises dans les missions de l'ACPR. L'obligation faite au superviseur de veiller à ce que les banques aient prévu des plans de résolution se généralise sur le plan mondial, tout comme le droit de regard et la possibilité de communiquer avec les conseils d'administration. En cas de crise, quand les banques ne coopèrent pas avec l'autorité de contrôle, celle-ci doit pouvoir demander directement aux conseils d'administration d'exercer leurs responsabilités. Le cas échéant, elle doit pouvoir décider du transfert ou de la cession d'une branche, ce qu'elle peut faire aujourd'hui en matière d'assurance, mais non dans le domaine bancaire. Elle doit également pouvoir déprécier ou annuler le capital ou la dette subordonnée, et faire intervenir le fonds de garantie des dépôts ou de résolution.
À ces mesures, dont le but est de préserver les dépôts des épargnants comme les finances publiques, le texte ajoute un troisième volet, qui vise à protéger le consommateur. Il propose des simplifications bienvenues concernant le droit au compte et le traitement du surendettement. À cet égard, on pourrait supprimer la phase de réexamen, qui alourdit inutilement la procédure et pèse indirectement sur le budget de l'État, puisque celui-ci rembourse à la Banque de France les dépenses qu'elle a engagées.
Au total, sous réserve d'adaptations ponctuelles, le texte propose un bon équilibre entre la nécessité de protéger les épargnants, de financer l'économie et de promouvoir la croissance.