Intervention de Laurent Perrin

Réunion du 2 juin 2016 à 10h00
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Laurent Perrin, administrateur de la Fédération des syndicats vétérinaires de France, FSVF et secrétaire général du Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral, SNVEL :

Le référent bien-être animal n'offre pas de garantie totale, en particulier parce que cette personne est salariée de l'abattoir.

Je ne suis pas sûr que l'on fera beaucoup avancer les choses en installant des vidéos qui fonctionneront vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Autant mettre directement une personne au poste d'abattage qui pourra éventuellement agir en cas de problèmes. Votre commission a évoqué la possibilité d'une vidéosurveillance qui pourrait être déclenchée par le salarié et qui reviendrait sur les quinze ou trente dernières minutes. C'est une bonne idée. Cela permettrait, en cas d'inspection inopinée au poste de saignée, de voir si le problème s'est posé précisément au moment de l'arrivée de l'inspecteur, ou si cela fait déjà dix ou quinze minutes que quelque chose ne va pas. Je ne parle pas des réserves qui s'imposent en termes de protection du personnel vis-à-vis de la direction.

Je suis favorable à la mise en place d'un comité d'éthique, mais sur le modèle des comités locaux d'information et de surveillance. Il ne doit pas s'agir d'un comité de super-experts : ils sont déjà présents dans les abattoirs via les inspecteurs de la santé publique vétérinaire (ISPV), ils peuvent être représentés par des vétérinaires libéraux. Il faut pouvoir y faire entrer des usagers des abattoirs – bouchers, éleveurs –, des associations de protection animale, des représentants de la société civile. Cela étant, comme l'a indiqué M. Baussier, il faut se rappeler qu'un abattoir ne sera jamais un spectacle agréable, même quand tout se passe bien. Entrer dans un abattoir reste un choc pour qui n'est pas prévenu ni formé. Sans parler des cadences : pour ma part, j'ai la chance de travailler dans un abattoir où tout se passe bien, et où les cadences ne sont pas élevées. Mais dans un établissement où les cadences sont fortes, avec des tueries très rapprochées, c'est encore plus impressionnant.

Vous nous interrogez sur les compétences des opérateurs en termes de bien-être animal. Dans des abattoirs de faible volume où les rapports entre services d'inspection et personnels sont proches en raison du nombre peu élevé de salariés – pour ma part, je travaille dans un abattoir qui emploie cinq personnes qui abattent – il est assez simple de faire monter les gens en compétence. Cela se fait par la confiance, la présence des vétérinaires. Effectivement, il faudra progresser dans les abattoirs de grande taille.

Au poste de saignée, il ne doit pas y avoir de rotation – même si cela signifie que les opérateurs risquent de développer des troubles musculosquelettiques. Il faut des spécialistes de l'étourdissement et de la saignée, et particulièrement bien formés, car ce n'est pas un travail facile. Quant aux matériels mis à leur disposition, ils doivent être très bien adaptés au volume des animaux traités, particulièrement dans les outils multi-espèces où les cages ne sont pas toujours parfaitement adaptées à tous les volumes d'animaux. Mais ce problème de matériel sera compensé si l'opérateur est très expérimenté.

J'ai déjà répondu tout à l'heure à la question du nombre de vétérinaires en parlant du référent bien-être animal.

Les vétérinaires qui interviennent en abattoir sont rémunérés par la Direction départementale de la protection des populations (DDPP), autrement dit par l'État. Ils ne dépendent absolument pas de l'abattoir. Mais le système peut trouver ses limites quand un vétérinaire qui fait de grosses missions dans un abattoir de grande taille en dépend pour 50 ou 60 % de son revenu. Pour ma part, si j'exerce un droit de retrait demain, cela ne mettra pas en péril mon revenu : pour parler franchement, la part de l'abattoir est anecdotique – c'est presque du service. Ce sera plus compliqué pour un vétérinaire qui tirera une grande part de son revenu.

Ainsi que l'a dit Michel Baussier, la mission initiale de protection des animaux à l'abattoir ne doit pas dériver vers l'interdiction de la consommation de viande.

Un inspecteur de l'OABA est venu une fois dans l'abattoir où je travaille. Nous l'avons reçu. Cela ne me pose aucun problème dès lors que la mission qui nous est présentée est celle de la protection animale en abattoir.

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