La séance est ouverte à dix heures quinze.
Mes chers collègues, nous avons le plaisir de recevoir ce matin M. Michel Baussier, président du Conseil national de l'Ordre des vétérinaires de France (CNOV), et M. Laurent Perrin, administrateur de la Fédération des syndicats vétérinaires de France (FSVF) et secrétaire général du Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL).
L'Ordre national des vétérinaires est l'organisme qui représente tous les vétérinaires sur le sol français. Il est administré par vingt conseils régionaux et par un conseil national. Monsieur Baussier, vous êtes médecin vétérinaire depuis 1975 – autrement dit, vous avez une grande expérience – et président de l'Ordre national des vétérinaires depuis 2010.
Le 24 novembre 2015, lors d'un colloque organisé au Sénat, l'Ordre s'est engagé en faveur du bien-être animal en appelant les vétérinaires « à réfléchir et à débattre sur le rôle du vétérinaire en tant qu'expert du bien-être animal ». C'est une dimension importante dans le cadre de notre audition de ce matin. En conclusion du colloque, le CNOV s'est déclaré favorable à la perte de conscience systématique de tous les animaux de rente avant leur mise à mort, ainsi qu'à un strict respect des dérogations à l'étourdissement préalable avec un étiquetage informatif clair pour identifier les animaux abattus sans étourdissement. Nous reviendrons sur cette position extrêmement précise.
Le Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral que vous représentez, Monsieur Perrin, a été créé en 1993. Cette organisation professionnelle a pour but de promouvoir les intérêts des vétérinaires libéraux. Je crois pouvoir dire que vous défendez grosso modo les mêmes positions que le CNOV concernant l'abattage et l'étiquetage des animaux.
Je vous rappelle, messieurs, que nos auditions sont ouvertes à la presse et diffusées en direct sur le portail vidéo de l'Assemblée nationale.
Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative aux commissions d'enquête, je vais vous demander de prêter le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité.
(M. Michel Baussier et M. Laurent Perrin prêtent successivement serment.)
Mesdames, messieurs les députés, je vous remercie de m'accueillir en tant que président du Conseil national de l'Ordre des vétérinaires de France.
L'Ordre représente les 18 000 vétérinaires du secteur privé et libéral. Autrement dit, il ne représente pas l'ensemble des vétérinaires, et notamment pas les vétérinaires du secteur public.
Sur ces 18 000 vétérinaires, on compte 16 000 praticiens, c'est-à-dire ceux qui exercent la médecine et la chirurgie des animaux et que le public connaît comme étant les médecins de l'animal. Ces vétérinaires ont un objectif de santé animale : l'objectif premier du vétérinaire est de prévenir et guérir la maladie, mais aussi de protéger l'animal, ce qui justifie sûrement notre audition devant votre commission aujourd'hui.
Historiquement, le fait de confier la santé animale aux vétérinaires répond d'abord à un objectif de sécurité alimentaire – on n'y pense plus beaucoup dans nos pays européens où l'on ne meurt pas de faim. Il s'agissait de soigner les animaux, pas forcément pour eux-mêmes mais surtout pour permettre à l'homme de se nourrir. Aujourd'hui, cet objectif de sécurité alimentaire demeure extrêmement important pour les vétérinaires dans le monde, mais sûrement pas en Occident.
On leur a confié aussi une mission de santé publique : il n'y a pas de mission de santé animale et de protection animale sans préoccupation majeure de santé publique. Ils veillent à la sécurité sanitaire des aliments – cela rejoint l'une des missions des vétérinaires dans les abattoirs –, à la santé environnementale et luttent contre les zoonoses, c'est-à-dire les maladies animales transmissibles à l'homme.
En quoi l'Ordre est-il concerné par vos travaux puisqu'il ne comprend pas les vétérinaires inspecteurs qui interviennent dans les abattoirs dans le cadre de la fonction publique ? Certes, un certain nombre des vétérinaires qui inspectent les animaux sont en réalité des vacataires : ils appartiennent au secteur privé et interviennent dans le cadre d'une mission qui leur est dévolue par l'État. Mais, dans le cadre de cette mission précisément, ils ne relèvent pas directement de l'autorité de l'Ordre. Cela étant, ces praticiens, qui sont peut-être au nombre de 500 en France et qui sont par ailleurs généralement inscrits au tableau de l'Ordre, n'en sont pas moins tenus au respect d'un code de déontologie. L'Ordre est concerné parce que ces vétérinaires ont une mission de protection animale – la protection de l'animal est devenue la motivation première des jeunes qui veulent devenir vétérinaires. Mais surtout, les vétérinaires que je représente sont tenus au respect d'un code de déontologie vétérinaire qui est pris sous forme d'un décret en Conseil d'État, imposé par la République française à l'ensemble des vétérinaires qui relèvent de l'Ordre. Ce code de déontologie impose aux vétérinaires de respecter l'animal et d'avoir parmi leurs objectifs d'atténuer ou de supprimer la souffrance, chaque fois que cela est nécessaire.
Au demeurant, même si nous n'avons pas été directement concernés en tant qu'ordre par les scandales qui nous amènent à nous réunir aujourd'hui, l'idée que la société se fait du rôle des vétérinaires et de l'Ordre des vétérinaires est telle que de toute façon nous sommes interpellés par les médias ou les citoyens sur ce qui s'est produit dans les abattoirs, même si, je le répète, cela ne relève pas de l'autorité de l'Ordre.
L'article L. 242-1 du code rural et de la pêche maritime qui institue notre ordre a été légèrement modifié au mois d'août dernier. Cet article précise que : « L'Ordre des vétérinaires peut participer à toute action dont l'objet est d'améliorer la santé publique vétérinaire, y compris le bien-être animal. » En fait, nous avions un peu anticipé cette évolution : si mes prédécesseurs considéraient que l'Ordre n'avait pas de légitimité particulière à prendre position sur toutes les questions de société qui touchaient à la relation entre l'homme et l'animal, au bien-être animal, nous avons considéré sous ma présidence que cette situation ne pouvait perdurer, l'Ordre étant régulièrement interpellé par la société. Il m'est arrivé, sur certains sujets, de recevoir des milliers de pétitions reprochant à l'Ordre de rester silencieux et à la profession de ne pas s'exprimer sur ces questions de société dans le cadre de la relation entre l'homme et l'animal. Aussi avons-nous décidé d'instituer au sein du Conseil national de l'Ordre un pôle de réflexion sur la relation entre l'homme et l'animal, et de désigner au sein de nos vingt conseils régionaux des référents éthiques de la relation entre l'homme et l'animal. Des débats ont eu lieu, qui ont conduit nos 200 représentants à considérer que nous devions nous emparer d'un certain nombre de sujets : les conditions d'élevage des animaux dans les élevages industriels, la corrida, etc. La mission qui m'avait été confiée par ces référents à la suite de débats concernait précisément la manière dont les animaux étaient traités en abattoir et la question de leur étourdissement. Vous avez rappelé, monsieur le président, l'engagement de l'Ordre lors du colloque organisé au Palais du Luxembourg, au mois de novembre dernier, sur le thème du vétérinaire expert du bien-être animal ; autrement dit, il ne s'agit pas d'un point de vue personnel, mais bien d'une position de l'Ordre prise à la suite des débats organisés au sein de ses conseils régionaux.
L'abattoir reste un abattoir, l'image d'un abattoir ne pourra jamais être celle du paradis terrestre. Il ne faut pas avoir peur des mots : on y égorge des animaux, il y a forcément du sang. Il est facile de jouer, comme le font certaines associations, avec ces images spectaculaires. L'abattage n'a rien d'un spectacle idyllique. Mais celui d'une intervention chirurgicale dans une salle d'opération ne l'est pas davantage…
Ce que nous exigeons, c'est que l'animal y soit respecté en tant que tel, qu'il ne souffre pas et que toute souffrance évitable soit évitée, et ce dans toutes les phases jusqu'à la mort – transport, amenée à l'abattoir. Même si la souffrance ne dure que trente secondes ou une minute, on ne doit pas l'accepter, pour les animaux eux-mêmes, mais également pour la dignité de l'homme. L'homme doit pouvoir se regarder dans la glace et se considérer en tant qu'homme dans sa relation vis-à-vis des animaux. C'est également très important pour les éleveurs et la filière élevage : moi qui suis fils et frère de paysans, je peux dire qu'aujourd'hui les éleveurs de France prennent grand soin, et de plus en plus, de leurs animaux, même si, bien sûr, il y a toujours des exceptions. Il est intolérable que les efforts des éleveurs et de la filière élevage soient gâchés dans la dernière minute de vie de l'animal à l'abattoir. Ne serait-ce que pour cette raison, on doit être intransigeant sur la manière dont les animaux sont traités à l'abattoir.
À mon tour, je tiens à vous remercier de nous avoir invités à participer à vos travaux.
La Fédération des syndicats vétérinaires de France regroupe la plupart des vétérinaires libéraux, soit d'exercice classique – les vétérinaires praticiens en cabinet –, les vétérinaires conseils davantage impliqués dans les filières organisées porcs et volailles, les vétérinaires salariés d'entreprises dans le secteur des coopératives agricoles, mais aussi les vétérinaires spécialistes canins titulaires des collèges européens, les vétérinaires retraités, les enseignants des écoles nationales vétérinaires françaises et les inspecteurs de santé publique vétérinaire que vous avez déjà auditionnés.
Mon rôle de secrétaire général du Syndicat fera que je parlerai aussi au nom des praticiens d'exercice libéral. Comme l'a indiqué Michel Baussier, de par leur choix de carrière, leur formation et leur investissement en élevage, ces praticiens sont parfaitement conscients de la nécessité de gérer le bien-être animal. Ils le font en permanence, soit lorsqu'ils soignent les animaux malades, soit dans leur action de conseil en élevage, y compris en structures de bâtiments ou d'alimentation, de façon à obtenir des animaux bien entretenus en élevage. Ce partenariat avec nos éleveurs se poursuit jusqu'à l'abattoir. Les images qui ont été diffusées par l'association L214 ont choqué fortement les vétérinaires qui les condamnent, car elles sont abominables, même s'il ne faut pas en faire une généralité dans les abattoirs. Elles ont aussi fortement choqué les éleveurs qui prennent soin de leurs animaux et qui entendent que cela reste le cas jusqu'au bout de la chaîne.
Plus de 500 vétérinaires libéraux interviennent dans les abattoirs à temps partiel en tant que vacataires. Pour ma part, j'assure l'inspection dans un tout petit abattoir local multi-espèces, qui traite environ 400 tonnes par an. Je suis amené à intervenir en abattoir tous les jours, et je partage mon poste avec un collègue avec lequel je suis associé. Il est évident que notre présence en élevage et en abattoir fait que nous sommes également très impliqués dans l'amélioration des conditions d'abattage. Même si je suis installé depuis un peu moins longtemps que Michel Baussier, cela fait tout de même trente-deux ans que je suis inspecteur dans l'abattoir de la commune où je réside.
Selon vous, quelles sont les priorités pour améliorer le bien-être animal à l'abattoir ? Que pensez-vous du référent bien-être animal ? Êtes-vous favorables à l'installation de caméras de vidéosurveillance ? Que pensez-vous de la mise en place d'un comité d'éthique dans chaque abattoir ?
Comment évaluez-vous les compétences des opérateurs en abattoir en termes de bien-être animal ? Considérez-vous que les effectifs de contrôle sont suffisants ? Une augmentation du nombre de vétérinaires au poste d'abattage serait-elle souhaitable ?
Pouvez-vous nous expliquer comment le vétérinaire est rémunéré par l'abattoir qui l'emploie ? Quels sont les rapports entre les vétérinaires et les abattoirs ? Quelles sont vos relations avec les associations de protection animale – particulièrement l'Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA) ?
Vous nous demandez ce que nous pensons du référent protection animale ; cette solution nous paraît aller dans le bon sens. Toutefois, on a pu voir dans les exemples récents que tel ou tel référent était particulièrement impliqué, ce qui montre les limites de l'exercice.
Pour ce qui est de la vidéosurveillance, je dirai spontanément que nous y serions plutôt favorables, sous réserve des règles que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) est susceptible d'édicter.
Nous n'y serions pas opposés, effectivement. Certes, c'est une pression exercée sur les ouvriers, une contrainte, mais je pense que cela va plutôt dans le bon sens.
Personnellement, je suis favorable à la mise en place d'un comité d'éthique. J'établirai un parallèle avec les comités d'éthique dans le domaine de l'expérimentation animale qui ont permis de réaliser de nombreux progrès en la matière. Je suis spontanément tenté de penser que le parallèle devrait pouvoir jouer, même si cette question n'a pas fait l'objet de débat avec mes fameux référents dont je vous parlais tout à l'heure.
Je suis en revanche très réservé s'agissant de la compétence des opérateurs en bien-être animal. Je pense que l'État doit continuer à disposer de ses missions régaliennes, en matière de sécurité sanitaire des aliments, mais aussi en ce qui concerne le bien-être animal. Il faut donner la possibilité à des inspecteurs de santé publique vétérinaire d'être présents dans les divers postes de l'abattoir et de pouvoir effectuer leur mission. Notre société, qui a les yeux braqués sur cet aspect, comprendra facilement que les contrôles font partie des missions régaliennes de l'État.
Je laisserai M. Perrin s'exprimer sur la rémunération des vétérinaires dans les abattoirs.
Vous nous demandez quelles sont nos relations avec les associations de protection animale. L'Ordre, qui représente l'ensemble des vétérinaires du secteur privé de France, a vocation à entretenir des relations avec les diverses organisations qui ont un lien direct avec l'animal, qu'il s'agisse des organisations professionnelles agricoles ou des associations de protection animale. En tant que vétérinaire praticien, j'avais spontanément adhéré à l'Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs, bien avant de me voir confier des missions ordinales et bien avant que cette association soit présidée par un vétérinaire. Le vétérinaire praticien rural que je suis, qui a exercé son activité au coeur du Charolais, avait pris conscience que les éleveurs eux-mêmes étaient très attachés à la protection animale.
Rappelons toutefois que la mission des vétérinaires répond historiquement à un objectif de sécurité alimentaire : il ne s'agit donc pas de remettre en cause le fait de consommer de la viande. La position de l'Ordre des vétérinaires est celle du respect de l'animal ; on doit lui éviter toute souffrance. Cela étant, nous sommes loin de la position des antispécistes. Il ne faut pas se tromper sur le sens de ces « reportages », de ces captures d'images faites de façon cachée à l'insu des personnes, et dont l'objectif est d'amener la population à renoncer à la consommation de viande animale. Nous ne sommes pas du tout sur cette ligne. Il s'agit pour nous de respecter l'animal, ce qui est une façon de se respecter en tant qu'homme.
Le référent bien-être animal n'offre pas de garantie totale, en particulier parce que cette personne est salariée de l'abattoir.
Je ne suis pas sûr que l'on fera beaucoup avancer les choses en installant des vidéos qui fonctionneront vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Autant mettre directement une personne au poste d'abattage qui pourra éventuellement agir en cas de problèmes. Votre commission a évoqué la possibilité d'une vidéosurveillance qui pourrait être déclenchée par le salarié et qui reviendrait sur les quinze ou trente dernières minutes. C'est une bonne idée. Cela permettrait, en cas d'inspection inopinée au poste de saignée, de voir si le problème s'est posé précisément au moment de l'arrivée de l'inspecteur, ou si cela fait déjà dix ou quinze minutes que quelque chose ne va pas. Je ne parle pas des réserves qui s'imposent en termes de protection du personnel vis-à-vis de la direction.
Je suis favorable à la mise en place d'un comité d'éthique, mais sur le modèle des comités locaux d'information et de surveillance. Il ne doit pas s'agir d'un comité de super-experts : ils sont déjà présents dans les abattoirs via les inspecteurs de la santé publique vétérinaire (ISPV), ils peuvent être représentés par des vétérinaires libéraux. Il faut pouvoir y faire entrer des usagers des abattoirs – bouchers, éleveurs –, des associations de protection animale, des représentants de la société civile. Cela étant, comme l'a indiqué M. Baussier, il faut se rappeler qu'un abattoir ne sera jamais un spectacle agréable, même quand tout se passe bien. Entrer dans un abattoir reste un choc pour qui n'est pas prévenu ni formé. Sans parler des cadences : pour ma part, j'ai la chance de travailler dans un abattoir où tout se passe bien, et où les cadences ne sont pas élevées. Mais dans un établissement où les cadences sont fortes, avec des tueries très rapprochées, c'est encore plus impressionnant.
Vous nous interrogez sur les compétences des opérateurs en termes de bien-être animal. Dans des abattoirs de faible volume où les rapports entre services d'inspection et personnels sont proches en raison du nombre peu élevé de salariés – pour ma part, je travaille dans un abattoir qui emploie cinq personnes qui abattent – il est assez simple de faire monter les gens en compétence. Cela se fait par la confiance, la présence des vétérinaires. Effectivement, il faudra progresser dans les abattoirs de grande taille.
Au poste de saignée, il ne doit pas y avoir de rotation – même si cela signifie que les opérateurs risquent de développer des troubles musculosquelettiques. Il faut des spécialistes de l'étourdissement et de la saignée, et particulièrement bien formés, car ce n'est pas un travail facile. Quant aux matériels mis à leur disposition, ils doivent être très bien adaptés au volume des animaux traités, particulièrement dans les outils multi-espèces où les cages ne sont pas toujours parfaitement adaptées à tous les volumes d'animaux. Mais ce problème de matériel sera compensé si l'opérateur est très expérimenté.
J'ai déjà répondu tout à l'heure à la question du nombre de vétérinaires en parlant du référent bien-être animal.
Les vétérinaires qui interviennent en abattoir sont rémunérés par la Direction départementale de la protection des populations (DDPP), autrement dit par l'État. Ils ne dépendent absolument pas de l'abattoir. Mais le système peut trouver ses limites quand un vétérinaire qui fait de grosses missions dans un abattoir de grande taille en dépend pour 50 ou 60 % de son revenu. Pour ma part, si j'exerce un droit de retrait demain, cela ne mettra pas en péril mon revenu : pour parler franchement, la part de l'abattoir est anecdotique – c'est presque du service. Ce sera plus compliqué pour un vétérinaire qui tirera une grande part de son revenu.
Ainsi que l'a dit Michel Baussier, la mission initiale de protection des animaux à l'abattoir ne doit pas dériver vers l'interdiction de la consommation de viande.
Un inspecteur de l'OABA est venu une fois dans l'abattoir où je travaille. Nous l'avons reçu. Cela ne me pose aucun problème dès lors que la mission qui nous est présentée est celle de la protection animale en abattoir.
Notre commission d'enquête a reçu hier trois universitaires spécialistes de l'abattage rituel, dont une spécialiste de la religion juive et un spécialiste de la religion musulmane. Ils ont parlé de la notion même de la mort. M. Benhkeira s'est demandé, en substance, si le fait d'étourdir n'était déjà pas la mort. Je suis de ceux qui pensent que mourir peut prendre du temps, mais le fait d'être mort est un moment instantané. Je ne partage pas tout à fait le sens de son interrogation.
Mme Brisebarre a fait état d'avis plutôt contrastés sur l'étourdissement lui-même, rappelant que certains experts pouvaient considérer que l'étourdissement n'empêchait pas la conscience et que, dès lors qu'il y avait conscience, il pouvait y avoir souffrance.
Monsieur Baussier, vous avez rappelé – et cela m'a bien plu – que même si la souffrance ne dure que trente secondes ou une minute, on ne doit pas l'accepter. Vous qui êtes, si j'ai bien compris, des spécialistes depuis un peu de temps (sourires), considérez-vous que dès lors qu'il y a étourdissement la bête est sans conscience, quelle que soit la méthode employée pour l'étourdir, matador ou CO2, et que dès lors qu'elle est sans conscience, elle ne souffre pas ?
De moins en moins de vétérinaires travaillent sur la production agricole en tant que telle. Bon nombre préfèrent s'orienter vers les animaux familiers et sont plus au fait de l'euthanasie que du sujet qui nous occupe aujourd'hui. Et sans doute, dans leur subconscient, vos clients font-ils plus facilement la liaison entre la mort d'un animal familier par euthanasie et la mort des animaux en abattoir. Il est évident que cela ne peut pas être la même chose, cela ne peut pas se pratiquer de la même façon.
Monsieur Perrin, vous travaillez dans un petit abattoir qui traite 400 tonnes par an et qui emploie cinq personnes – nous en connaissons qui fonctionnent avec trois ou quatre employés seulement. Vous nous avez dit que l'abattage et la saignée devaient toujours être pratiqués par les mêmes personnes. Mais nous avons du mal à remplacer de manière inopinée un agent qui tombe malade ou qui se blesse – j'ai vécu cela dans un petit abattoir. C'est un vrai problème pour les responsables d'abattoirs. Ne pourrait-on pas mettre en place une sorte de service de remplacement, un système de personnel mobile ?
Lorsque vous officiez en tant que vétérinaire inspecteur, vous n'êtes pas en permanence toute la journée dans l'abattoir. Comment exercez-vous les contrôles ? Est-ce vous qui vous chargez du contrôle ante mortem ? Que faites-vous vraiment dans un abattoir au regard de ce qui concerne le bien-être animal ?
Monsieur Perrin, vous intervenez dans un abattoir très similaire à celui du Vigan, situé dans ma région, où l'association L214 a enregistré des vidéos. Vérifiez-vous les conditions de transport, de stockage des animaux avant qu'ils arrivent sur la chaîne d'abattage ? Ces petits abattoirs sont multi-espèces : on y abat aussi bien des agneaux, des bovins que des cochons. C'est sûrement là que l'on peut rencontrer les plus gros problèmes. Parfois, le matériel n'est pas adapté. Les abattoirs standardisés qui n'abattent qu'une seule espèce ont certainement moins de problèmes avec le matériel que dans les petites unités. Qu'en pensez-vous ?
Vous avez dit que le poste de saignée nécessitait que les gens soient bien formés. Qu'entendez-vous par là ?
L'abattoir qui est implanté dans ma circonscription pratique beaucoup l'abattage rituel – cela représente environ 50 % de son activité. Que pensez-vous des compétences des sacrificateurs ? Certaines mosquées acceptent que l'animal soit étourdi avant l'abattage, tandis que d'autres ne le veulent pas.
Enfin, que pensez-vous des abattoirs mobiles ?
Bien évidemment, le bien-être animal nous préoccupe tous. Mais le personnel aussi se trouve certainement parfois dans des situations assez difficiles. Vous trouviez que les images étaient difficiles à supporter pour les spectateurs, mais je n'ose imaginer dans quel état d'esprit sont les opérateurs à la fin de la journée, quand ils rentrent à la maison. J'espère qu'ils ne continuent pas à y penser chez eux… Cela suppose assurément une grande résistance psychologique de leur part.
Nous nous sommes aperçus, au cours de nos auditions, que leur formation était vraiment très restreinte. Intervenez-vous dans cette formation ? Est-elle seulement théorique ? N'y a-t-il pas de formation technique ? Se forment-ils sur le tas ? Il ne faut pas louper son coup, il faut être sûr de ce que l'on fait. En même temps, c'est plutôt rassurant de bien maîtriser ses gestes et de bien savoir ce qu'il faut faire pour que l'animal ne souffre pas.
Beaucoup de mes interrogations ont déjà été levées grâce à vos réponses.
Quand l'alerte a été donnée, dans les conditions que vous savez, le ministère a déclenché une inspection systématique dans les abattoirs d'animaux de boucherie sur ce thème du bien-être animal et de la souffrance au moment de l'abattage. Cette enquête a révélé un certain nombre d'anomalies. Cela prouve que le contrôle d'habitude n'était pas suffisamment précis. Vous le savez, l'habitude est une seconde nature : dès lors que l'opérateur est toujours le même, le directeur est toujours le même, la manière de faire est toujours la même, le contrôleur est toujours le même, ne faudrait-il pas aérer le système, avec une mise en réseau, un échange de constats ? On voit bien que des améliorations sont possibles dès lors que l'on apporte un regard extérieur. Nous nous sommes rendus dans l'abattoir d'Autun où le déplacement de deux mètres d'une manette avait fait gagner dix secondes entre l'étourdissement et la saignée. Cela aurait dû être vu ; or cela n'a été vu que par quelqu'un qui venait de l'extérieur. Les vétérinaires qui participent au contrôle n'auraient-ils pas intérêt à se parler entre eux, à échanger, à se retrouver sur des plateformes d'échanges, voire à échanger parfois leurs rôles ? C'est la même chose pour les opérateurs. Comment peut-on gérer cette acquisition de compétences croisées ?
Je vais intervenir sur les deux ou trois premières questions, laissant à M. Perrin le soin de répondre aux questions plus techniques qu'il connaît mieux car il a l'expérience du travail en abattoir. Pour ma part, j'ai une expérience de praticien, mais je n'ai jamais eu de mission en abattoir, contrairement à certains de mes collègues associés qui y participent régulièrement.
Non, l'étourdissement n'est pas déjà la mort. Du reste, il est question d'étourdissement réversible. Nous sommes de formation scientifique. Notre réflexion se fonde sur les recherches qui ont été menées, notamment par l'Institut national de la recherche agronomique, (INRA). Ce qui compte, pour nous vétérinaires, c'est la perte de conscience. Nous connaissons nous-mêmes l'expérience de la perte de conscience à chaque fois que nous subissons une anesthésie…
Je veux insister fortement sur le fait que nous avons pris position sur la nécessité d'une perte de conscience. Mais je veux y insister : jamais l'Ordre des vétérinaires, institution de la République qui respecte parfaitement la laïcité, n'a remis en cause les rites et les abattages rituels. Je n'ai jamais prononcé ce terme de remise en cause de l'abattage rituel. Du reste, les rites ont évolué au cours de l'histoire : la religion juive, par exemple, est l'une des trois religions du Livre qui s'est le plus préoccupée, dès l'origine, de la protection de l'animal. Il s'agissait de faire en sorte d'atténuer au mieux la douleur. Ensuite, l'évolution des connaissances, de la science est telle que le rite peut évoluer dans ses modalités, sans que pour autant les fondements mêmes de la religion soient remis en cause. C'est en cela que nous sommes intervenus.
S'agissant de l'islam, nous constatons que les modalités sont extrêmement variables dans le monde. Je connaissais bien l'un des vétérinaires inspecteurs de l'abattoir d'Autun : le sacrificateur exigeait l'étourdissement préalable… Ce n'est pas forcément ce que l'on entend dire en haut lieu. Mais, sur le terrain en tout cas, le sacrificateur exigeait, pour des raisons qui lui sont propres, que l'animal soit étourdi.
Non, l'étourdissement, ce n'est pas la mort. Mais, je le répète, l'Ordre des vétérinaires, qui est une institution républicaine laïque, n'a jamais remis en cause l'exercice des cultes. Je le revendique très fortement.
Il n'y a pas très longtemps, à l'occasion d'un déjeuner-débat sur les questions d'éthique autour de l'expérimentation animale, je me suis retrouvé assis en face d'une journaliste très impliquée dans la protection animale. Elle parlait d'euthanasie préalable à l'abattoir… Cela montre bien la grande confusion qui peut exister dans l'esprit du public. On n'injecte pas une substance à un animal que l'on va immédiatement consommer !
Je n'ai pas compris, monsieur Pellois, votre allusion aux vétérinaires canins…
Si j'ai fait ce lien, c'est pour dire que sur les 16 000 vétérinaires que compte notre pays, un petit nombre seulement s'occupe des animaux d'élevage. Pensez-vous que le consommateur puisse faire dans sa tête la relation entre la mort de son animal familier et la mort de l'animal qu'il mange ? Avez-vous ce genre de discussions avec vos clients ?
Les vétérinaires mixtes que nous sommes tous les deux ont souvent affaire à des clients qui sont tout à la fois propriétaires d'animaux de rente et d'animaux de compagnie. L'urbanisation de nos sociétés a conduit à une sorte de rupture du lien entre l'homme et la terre, et du coup avec la mort : à la campagne, on vit la naissance, la vie, la mort, c'est quelque chose de beaucoup plus naturel.
Effectivement, nous avons ce genre d'échanges. En cela, le vétérinaire participe à cette interface entre le citadin, qui n'a plus cette culture de la vie et de la mort, et l'homme de la terre. Au cours de vos auditions, il a été question d'une « boîte noire ». On identifie parfois la vache et le petit veau à un animal de compagnie : cela vient de cette rupture entre le citadin et l'homme de la terre.
Vous nous interrogez sur les remplacements dans les abattoirs. Dans l'abattoir où j'exerce, nous avons formé trois opérateurs à l'étourdissement. Mais nous essayons de faire tourner le plus rodé sur le même poste. C'est seulement en interne que l'on pourra prévoir un service de remplacement, en formant toutes les personnes présentes. Il n'est pas possible de mettre en place un service de remplacement entre les abattoirs.
La formation doit être dispensée à suffisamment de personnes pour que le poste puisse être occupé. Ensuite, c'est la dextérité qui sera privilégiée en faisant travailler en particulier un des opérateurs.
J'en viens à la présence vétérinaire dans les petits abattoirs. Dans l'abattoir où je travaille, il s'agit d'un quart de poste. Nous sommes rémunérés pour dix-neuf heures de présence vétérinaire chacun, mes deux collègues et moi-même, soit trente-neuf heures par mois. La tuerie se fait sur trois à quatre jours – la plupart du temps sur trois jours. Nous sommes présents à l'arrivée des animaux. Nous contrôlons environ 80 % des animaux qui sont abattus. Le reste sera vu par la technicienne vétérinaire qui sera là toute la journée. Je suis présent à l'abattoir entre une demi-heure et une heure et demie. Très souvent, j'assiste à la tuerie des gros bovins – c'est eux que l'on tue en premier. J'assiste aussi à une partie de la tuerie des porcs. Je ne peux pas contrôler la totalité des abattages, mais le relais est pris par la technicienne vétérinaire, même si elle est occupée. Nous sommes dans un petit outil ; le poste d'abattage des bovins est visible de partout. On le voit même lorsque l'on est en train d'inspecter les carcasses. Par contre, le poste d'abattage des porcs et des petits ruminants est à l'autre bout de l'abattoir. Il faut être sur place pour le voir.
Je me rends donc le matin à l'abattoir. Ensuite, comme je travaille sur la même commune, je peux être appelé toute la journée en cas de problème lors de l'arrivée d'un animal. Enfin, je repasse en fin de tuerie pour valider les saisies et sorties de consigne des animaux qui auront été triés par la technicienne qui aura été présente toute la journée à l'abattoir.
Le fait d'être présent sur une grosse partie de la tuerie me permet de penser que le bien-être est aussi respecté lorsque je ne suis pas là. Qui plus est, notre technicienne vétérinaire est femme d'éleveur : elle est donc très sensibilisée à la question du bien-être animal. Enfin, j'ai eu la chance, même lorsque notre structure était très archaïque – c'était le cas lorsque je me suis installé – de travailler avec des opérateurs d'abattoirs qui étaient très soucieux du bien-être animal, mais également du bien-être du personnel. Car mal travailler autour d'animaux mal contenus peut être extrêmement dangereux.
Nous ne pratiquons pratiquement plus d'abattage sur des animaux accidentés. J'ai toujours exigé, sans que cela ait jamais posé de problème à l'abatteur, l'étourdissement des animaux dans les camions de transport. Autrement dit, nous n'avons jamais déchargé d'animaux blessés conscients. La question reste de savoir si cela est toujours possible.
Tout à l'heure, il a été question des problèmes dans les abattoirs traitant de petits volumes. Je ne suis pas sûr que ce soit dans les tout petits abattoirs que les problèmes se posent, mais plutôt dans les abattoirs de moyen volume. Les très gros abattoirs sont très bien équipés en personnel ; mais les petits abattoirs sont un peu comme des structures familiales, si je puis dire, bien que le terme soit mal choisi. Tout le monde se connaît, on se voit beaucoup. Nous sommes écoutés en tant qu'experts et professionnels vétérinaires, mais nous ne sommes pas ressentis comme une pression de contrôle. Nous essayons de conseiller. Cela fait trois mois qu'un salarié est arrivé dans l'abattoir. Il a fallu l'aider, même sur des procédures concernant l'hygiène. Il ne s'agit pas de prendre un carnet et de procéder toutes les cinq minutes à une notification de non-conformité. Il faut lui expliquer qu'à tel endroit il s'y prend mal. Grâce à l'aide de ses collègues et de nous-mêmes, nous arrivons à le faire progresser très rapidement.
Quand je suis présent lors du déchargement, je peux éventuellement faire des remarques sur les conditions de transport. En général, ce sont les éleveurs ou les marchands de bestiaux qui nous amènent les animaux. Mais comme il s'agit de petits volumes, nous ne rencontrons pas de problèmes de transport.
En revanche, au poste de stockage il peut nous arriver de devoir gérer des afflux d'animaux importants : c'est le cas par exemple à Pâques avec les agneaux. Nous arrivons à gérer en étalant les arrivées sur toute la journée. Mon collègue ou moi-même nous rendons à l'abattoir plusieurs fois dans la journée pour vérifier l'ante mortem si c'est nécessaire. Sinon, les techniciens sont sur place.
Comme notre abattoir est multi-espèces, nous pouvons effectivement avoir des problèmes de matériel. Nous avons remis notre outil à niveau ; cela nécessite des investissements monstrueux. Comme je ne fais pas partie du conseil municipal qui gère l'abattoir, je n'ai pas les chiffres ; je sais cependant que cela représente des sommes considérables pour une commune. Notre abattoir ne fait que de la tuerie à façon : il n'y a pas de cheville à l'aval. Les animaux sont abattus au profit des bouchers, des particuliers, ou d'éleveurs du secteur, et les animaux repartent vers des boucheries du secteur. Nous sommes prestataires de services.
Si un jour je devais exercer mon droit de retrait, ce qui me poserait problème, ce ne sera pas la diminution de mon revenu, mais le risque que je ferais peser sur les circuits courts et la consommation locale. Heureusement, je n'ai jamais eu ce genre de souci. Cela m'est arrivé une fois avec un appareil à électronarcose qui ne marchait pas, nous avons fait remonter l'information. La première fois, personne n'a bougé ; la deuxième fois, je suis allé expliquer que la situation ne pouvait plus durer et que si nous ne venions plus à l'abattoir, la tuerie allait devoir s'arrêter ; nous avons été rééquipés très rapidement d'un outil qui fonctionnait.
Si le bien-être animal est important, le bien-être du personnel l'est tout autant. Je ne pourrai pas me prononcer sur les gros abattoirs. Récemment a été rediffusée une émission sur la Société vitréenne d'abattage. On y voyait que la contrainte psychologique et physique était monstrueuse sur ces postes. Dans l'abattoir où je travaille, les opérateurs font presque tout ; nous sommes donc moins confrontés à ces problèmes. C'est vrai, abattre des animaux, ce n'est pas comme travailler dans une maternité… Mais travailler dans une maternité impose aussi de devoir gérer les naissances difficiles ou la mort de nouveau-nés : ce ne doit pas être facile non plus. Ce qui compte après, c'est la répétition du geste et de l'acte.
Le vétérinaire n'intervient pas du tout dans la formation des opérateurs dont la formation est technique. Visiblement, dans les gros abattoirs, ils sont formés sur poste, autrement dit sur le tas.
Je ne me prononcerai pas sur la technicité des sacrificateurs au poste de saignée car nous ne pratiquons pas d'abattage rituel. Deux abattoirs de l'Indre s'en chargent.
Monsieur le rapporteur, effectivement l'habitude est l'un des risques. Mais il est déjà pris en compte puisque nous sommes amenés à faire des réunions régionales avec des référents régionaux des abattoirs qui se déroulent dans un abattoir ou un autre. Nous organisons aussi des réunions départementales entre les personnels des trois abattoirs des services vétérinaires d'inspection, vétérinaires et techniciens, des échanges de pratiques. Comme mon collègue était référent pour le département, il faisait le tour des abattoirs en plus de ses missions dans notre abattoir. Enfin, nous rencontrons les techniciens des autres abattoirs lorsqu'ils effectuent des missions de remplacement. Récemment, les personnels d'un abattoir sont venus voir comment fonctionnait notre système de contention pour les petits ruminants, car ils devaient s'équiper.
Notre abattoir a fait l'objet d'une inspection, dans le cadre des inspections demandées par le ministre de l'agriculture. Des remarques ont été faites sur le déchargement des animaux sur quelque chose auquel on s'était habitué. Mais c'était un détail.
Enfin, vous nous avez interrogés sur la mise en place d'abattoirs mobiles…
Nous avons évoqué, lors de nos auditions, des expériences qui ont eu lieu en Suède. Un certain nombre d'associations de protection animale y font référence. Quant au ministre, il est beaucoup plus réservé sur le sujet.
Autant une sorte de consensus se dégage sur le principe des caméras de vidéosurveillance, autant les avis sont très tranchés et très catégoriques en ce qui concerne les abattoirs mobiles.
Il y a actuellement un manque de cohérence, pour ne pas dire une incohérence entre deux réglementations : celle qui concerne la protection animale pendant le transport des animaux accidentés, et celle qui concerne la possibilité que ces animaux passent dans la chaîne alimentaire humaine. Autrement dit, on a le droit d'abattre des animaux pour les consommer, mais on n'a pas le droit de les transporter jusqu'à l'abattoir ! Cela donne lieu à des abattages à la ferme qui posent deux problèmes. D'abord du point de vue sanitaire : comme ces animaux sont souvent abattus loin de l'abattoir, il faut les transporter sous couvert du froid, ce qui n'est pas toujours pratique. Ensuite, il faut trouver des abattoirs qui acceptent de recevoir des animaux morts, ce qui n'est pas toujours le cas. De surcroît, le vétérinaire doit se déplacer car l'examen ante mortem doit être fait à la ferme. Une structure mobile faciliterait techniquement un abattage dans de bonnes conditions pour que l'animal puisse ensuite aller dans un abattoir. Restera le problème de la technicité de celui qui abattra en ferme. Quand de tels cas se sont présentés, je suis allé chercher un matador à l'abattoir. Puis je me suis rendu chez le client où j'ai procédé à l'abattage, à la saignée et au début de l'éviscération de l'animal. Ensuite, je me suis organisé, soit avec des bouchers, soit avec des transporteurs, pour transporter la carcasse, dans un bref délai, jusqu'à l'abattoir.
Je ne sais pas si l'abattoir mobile pourrait constituer une réponse tout à fait satisfaisante. Il faudrait aussi prévoir du personnel aguerri capable de travailler dans une structure qui ne serait pas nécessairement très opérationnelle.
La séance est levée à onze heures quinze.