Intervention de Christian Kert

Séance en hémicycle du 13 juin 2016 à 16h00
Conditions d'octroi de l'autorisation d'émettre de la chaîne numéro 23 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Kert :

Nous voici en effet à l’ultime étape de la création d’une commission d’enquête, dont l’initiative revient à notre rapporteur, un peu dans l’excès de ses jugements, et soutenue avec modération nous a-t-il semblé par le groupe socialiste, écologiste et républicain, sur les conditions d’octroi par le CSA d’une autorisation d’émettre à la chaîne Numéro 23 et de sa vente.

Comme vous le savez, le groupe Les Républicains, l’ensemble de ses membres ne sont pas pleinement convaincus du choix de la méthode : nous considérons la création de cette commission d’enquête comme une arme lourde et disproportionnée par rapport à l’enjeu réel de ce dossier, tout comme son intitulé qui ne correspond pas à la réalité puisque le titulaire de l’autorisation est toujours en place et conserve le contrôle de la chaîne, même si NextRadioTV, le groupe d’Alain Weill, est devenu actionnaire minoritaire à hauteur de 39 %.

Notre questionnement est donc multiple. À quoi au juste cette commission doit-elle aboutir ? Que ou qui cherche-t-on à dénoncer ? Le moment n’est-il pas législativement trop tardif ?

Sans vouloir refaire l’historique de ce dossier, c’est avec un exposé des motifs très à charge que Marcel Rogemont dénonce « un cas d’école qui a contribué à jeter le discrédit sur l’ensemble de la politique audiovisuelle ». C’est là que, selon nous, vous êtes excessif, monsieur le rapporteur, car il ne s’agit en aucune façon d’une affaire d’État, même si, comme vous, nous nous étions émus, en son temps, du projet de revente de la fréquence de Numéro 23.

De même, le rapporteur part du principe que la décision du Conseil d’État ne suffit pas à mettre fin à toute suspicion concernant cette affaire. Il semble estimer que la chaîne 23 s’est servie de la diversité comme d’un prétexte pour obtenir une fréquence gratuite, dont l’opération de cession financière aurait été planifiée depuis le départ.

Cette position s’appuie en partie sur l’arrivée de l’actionnaire russe au capital de Numéro 23 dès 2013, auquel il est supposé que la chaîne aurait promis une revente rapide. Elle s’appuie aussi sur le fait que Numéro 23 n’aurait pas brillé par la créativité de ses programmes. Or, ces deux arguments n’ont pas été retenus par le Conseil d’État qui considère que la fraude n’était pas établie au moment de l’attribution et annule ainsi la décision du CSA retirant son autorisation d’émettre à la société exploitante. Pourquoi ne pas considérer que cette décision suffit à mettre fin à la suspicion ?

Par ailleurs, est-ce bien à l’Assemblée nationale, par le biais d’une commission d’enquête, de venir chercher à rattraper, en quelque sorte, ce que le Conseil d’État n’a pas voulu suivre ? Cette création ne revient-elle pas à contester sa décision ? La question reste posée.

De même, si le rapporteur jette un doute sur les intentions du dirigeant de Numéro 23, il en jette également un, par ricochet, sur la diligence du CSA et sa capacité à remplir ses missions. Le rapporteur estime que seul le Parlement peut recueillir des informations, tant sur les actions de la société Diversité TV que sur une supposée négligence du CSA. Si l’on peut partager l’idée que c’est au Parlement d’exercer un contrôle démocratique de l’action des autorités administratives indépendantes en général et du CSA en particulier, se pose toutefois la question de la pertinence de la création de cette commission d’enquête après la décision du Conseil d’État.

Enfin, la teneur de la notification que n’a pas manqué d’effectuer le garde des sceaux sur la création de cette commission d’enquête, en vertu de l’article 139 de notre règlement, démontre aussi une certaine réserve, puisqu’il laisse, à vous seul, le soin d’apprécier si l’existence d’une procédure en cours est de nature à faire obstacle à la création de la commission envisagée. Vous m’accorderez, monsieur le rapporteur, qu’en guise d’enthousiasme, on a vu mieux !

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