Intervention de Olivier Roussat

Réunion du 7 juin 2016 à 16h15
Commission des affaires économiques

Olivier Roussat, président-directeur général de Bouygues Telecom :

Nous opérons la moitié du CIC, et tous les MVNO ethniques. La Poste est opérée par SFR. Certains prétendent que Martin Bouygues ne voudrait personne « sur la pelouse du château », alors que nous accueillons sur notre réseau plus de MVNO qu'Orange ou SFR, tandis que Free n'en accueille pas. Nous sommes les premiers dans ce domaine, et nous menons une politique résolument ouverte en la matière.

Je veux dire un mot d'Objenious. Une malencontreuse erreur nous a fait oublier la Corse dans une carte illustrant la couverture d'Objenious, diffusée lors du congrès des maires. Bien entendu, la Corse recevra l'internet des objets comme le reste du territoire. L'intégralité du territoire sera couverte d'ici à la fin de l'année – nous dépasserons les 50 ou 60 % de couverture réseau dès le mois de juin. Au final, nous aurons le réseau d'internet des objets à la norme LoRa le plus étendu de France – pour être clair, plus étendu que celui d'Orange. Disons, que ce n'est pas mal pour un opérateur malade dont on ne sait pas ce qu'il va devenir !

Ayez à l'esprit que nous avons investi massivement dans l'internet des objets dès l'année dernière ! Nous croyons en effet que cette technologie va révolutionner la vie dans de très nombreux domaines : nous avons travaillé à la fabrication de puces qui seront implantées sous la peau du bétail et qui permettront de savoir comment le nourrir, mais aussi sur les parkings, sur les relevés de compteurs d'eau et d'électricité… Nous sommes devant une révolution qui va transformer profondément de très nombreux métiers, et qui changera radicalement de très nombreuses pratiques, par exemple dans la logistique. Ce changement important pour certains, j'allais dire un peu brutal, ouvrira aussi énormément de potentialités et d'opportunités.

Je rappelle que nous utilisons la norme LoRa, créée par une start-up grenobloise, Cycleo, malheureusement rachetée par une société américaine. Cycleo reste basée à Grenoble où elle continue à faire évoluer la norme. Certains font croire qu'il existe un seul opérateur toulousain qui propose des normes françaises ; or, nous utilisons aussi une norme fabriquée par une entreprise française basée à Grenoble.

Objenious est une toute petite structure qui réalise la couverture du réseau. Nous avons souhaité qu'elle reste indépendante de Bouygues Telecom dont la taille peut constituer un handicap. Nous avons choisi un format de start-up pour inventer des métiers de demain. Nous pensons que ce sont les start-up qui créeront des niches, et que c'est par elles que les nouveautés arriveront. Nous souhaitons d'ailleurs les mettre en valeur : en 2007, nous avons créé un fonds, Bouygues Telecom Initiatives (BTinitiatives), qui en assiste un certain nombre tout au long de l'année.

Nous avons fait le choix d'avoir un réseau de boutiques, sur lequel vous nous avez interrogés. Avec l'arrivée du quatrième opérateur, certains ont cru un moment que tout allait se passer sur le net. Ce n'était pas notre analyse, et ce n'est pas ce que nous avons constaté. Avant l'arrivée de Free, deux types de boutiques cohabitaient : les indépendantes, et celles des marques propriétaires. Aujourd'hui, les boutiques indépendantes ont disparu. The Phone House ou Tél and com, gros réseaux indépendants des opérateurs, ont fait faillite.

Le réseau de notre marque comporte aujourd'hui 540 boutiques. Il vit sa vie de réseau : nous pouvons être amenés à fermer une boutique pour en agrandir une autre afin d'augmenter notre surface de vente, de diminuer le temps d'attente des clients, et leur présenter les dernières évolutions technologiques. Nous faisons actuellement un énorme travail de modernisation des boutiques : nous avons investi massivement pour les équiper progressivement et les transformer – nouvelle charte graphique, nouvelles couleurs, nouveau logo… Nous y consacrons 30 à 35 millions d'euros par an sur trois ans. Nous n'avons pas de restructuration particulière à conduire, les fermetures de boutiques sont liées à l'ajustement de notre business.

Dans les faits, il n'y a pas quatre opérateurs aux États-Unis. Lorsque nous voulons assurer la couverture du territoire américain, nous avons besoin de soixante à soixante-dix accords de roaming. Sous les très grands opérateurs, il existe donc une multitude de petits acteurs.

L'internationalisation présente un intérêt pour nous à double titre. Elle permet, d'une part, de développer l'entreprise et de faire croître son chiffre d'affaires ; elle facilite, d'autre part, la répartition des risques. Mais le fait d'être un opérateur national puissant permet-il mécaniquement d'être un gros opérateur à l'étranger ? Orange, très gros opérateur – il doit se classer au dixième ou au onzième rang mondial – a dû quitter la Grande-Bretagne où il ne parvenait pas à obtenir la position qu'il souhaitait. Chaque développement dans un pays est une histoire différente qui dépend des règles propres à ce pays. L'harmonisation de la régulation n'est pas une réalité absolue, la distribution est différente… Lorsque vous arrivez dans un pays au troisième rang, vous le restez. L'histoire démontre que lorsque Vodafone, qui est l'un des plus gros opérateurs de téléphonie mobile au monde, arrive en tant que numéro 2, il le reste, sauf à procéder par rachat. En conséquence, l'internationalisation ne donne pas un poids supplémentaire dans la discussion avec les fournisseurs visant à faire baisser le prix des infrastructures. L'expérience montre que les tarifs qu'obtiennent les petits opérateurs sont assez voisins de ceux que paient les plus gros. L'internationalisation n'a pas non plus d'intérêt particulier au regard des mobiles. Nous avons gagné notre action en justice contre Apple qui souhaitait signer un contrat d'exclusivité avec Orange. Il n'y a donc aucun gain spécifique sur le territoire national qui soit lié à la taille et à l'internationalisation. Évidemment, cette dernière favorise le développement de l'entreprise. L'annonce ce matin même, par Orange, de l'arrivée en France d'Orange money s'appuie sur le développement de l'entreprise en Afrique. On ne peut pas contester que ce soit une belle opération.

Sur le territoire national, je le répète, l'internationalisation n'a pas d'intérêt direct. Il est en revanche essentiel d'être capable de générer un cash suffisant pour couvrir les investissements et les impôts. Si cette condition est remplie, l'entreprise se développe, et il est possible d'assurer le devenir de l'entreprise. C'est précisément ce que nous faisons.

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