Madame la députée, je vous remercie de cette question. Vous l’avez fort bien dit, la prévention spécialisée connaît aujourd’hui une situation paradoxale. Alors que nous avons plus que jamais besoin de professionnels qualifiés pour accompagner notre jeunesse, en particulier dans les quartiers populaires, nombre d’associations de prévention spécialisée connaissent des baisses importantes de financement par les conseils départementaux. La prévention spécialisée apparaît dans certains départements comme le parent pauvre de la protection de l’enfance. Elle est parfois considérée comme une variable d’ajustement, ce que le Gouvernement déplore.
Dans ce contexte, que peut faire l’État ? Avec les ministres Patrick Kanner et Laurence Rossignol, nous avons rencontré les grands réseaux de la prévention spécialisée. Nous avons élaboré avec eux une convention de partenariat national visant à renforcer les moyens et les modalités d’intervention de la prévention spécialisée. Nous veillons à mettre en lumière son utilité sociale et à reconnaître davantage les pratiques éducatives qui sont développées dans les territoires, les éducateurs de la prévention spécialisée étant les acteurs au contact le plus proche des jeunes à la dérive, en errance ou en difficulté. Cette convention sera signée dans les prochaines semaines. Elle a bien sûr été précédée d’échanges avec les grands réseaux d’élus, notamment l’Association des départements de France.
La loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant, qui a été défendue par ma collègue Laurence Rossignol, a conforté la place de la prévention spécialisée dans le champ de la protection de l’enfance et a confié son pilotage au Conseil national de la protection de l’enfance. Par ailleurs, au cours de ces dernières années, les associations de prévention spécialisée, dont je tiens une nouvelle fois à saluer le travail et l’implication, ont investi les champs de la prévention de la délinquance et de la radicalisation. Les acteurs de la prévention spécialisée ont ainsi accepté de participer pleinement à la stratégie nationale de prévention de la délinquance adoptée en juillet 2013, parce que celle-ci faisait de l’accompagnement individualisé des jeunes les plus exposés à la délinquance sa priorité. Depuis 2014, les associations se sont également mobilisées aux côtés des préfets sur le sujet de la réponse publique en matière de prévention de la radicalisation. Avec le nouveau plan d’action contre la radicalisation et le terrorisme présenté par le Gouvernement le 9 mai dernier, leur implication va être renforcée, afin de prendre en charge individuellement davantage de jeunes inscrits dans un processus de radicalisation.
S’agissant des moyens, compte tenu des orientations gouvernementales, le soutien financier de l’État aux associations de prévention spécialisée sera accru en 2016 à la fois au titre des crédits de la politique de la ville et au titre des crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance. Par ailleurs, s’agissant de votre préoccupation sur la couverture territoriale, il est prévu, dans la convention que j’ai évoquée, de réaliser un état des lieux exhaustif des financements de la prévention spécialisée par département et par contrat de ville au cours de l’année 2016, afin de veiller à renforcer les interventions dans les territoires prioritaires. Le groupe de travail national mis en place par le ministère des familles, de l’enfance et des droits des femmes permettra notamment d’aborder cette question et publiera au cours de cette année un guide sur la prévention spécialisée.
Ainsi, comme vous pouvez le constater, nous accordons une grande attention à la situation de la prévention spécialisée et nous entendons consolider ses moyens et ses modalités d’intervention dans une logique partenariale, tant il nous semble évident qu’elle a un rôle important.