Intervention de Pierre Vimont

Réunion du 4 mai 2016 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Pierre Vimont, envoyé spécial du ministre des Affaires étrangères pour la préparation de la conférence internationale de relance du processus de paix au Proche-Orient :

Il faut bien comprendre notre démarche : personne, et certainement pas les autorités françaises dans le cadre de leur initiative, ne remet en cause le principe et la nécessité d'une négociation directe entre les deux parties, pour la bonne raison que les deux parties elles-mêmes souhaitent mener une telle négociation, y compris les Palestiniens. Ceux-ci sont les premiers à dire qu'il faut une discussion directe avec les Israéliens sur toute une série de sujets, en particulier sur les échanges de territoires, point sur lequel des progrès considérables avaient d'ailleurs été enregistrés grâce au dialogue entre le premier ministre Ehud Olmert et le président Mahmoud Abbas entre 2006 et 2009.

Ce que nous essayons de faire, c'est de créer un cadre politique assez précis avec des termes de référence, à l'intérieur duquel ces négociations bilatérales pourraient se tenir. C'est aussi ce qu'avaient essayé de faire les Américains, mais à titre individuel. Pour notre part, nous cherchons à obtenir l'engagement d'un nombre aussi important que possible de partenaires au sein de la communauté internationale autour de ce cadre. Ce n'est pas une nouveauté : telle est la méthode qui avait été suivie à Madrid, plutôt avec succès. Nous la reprenons afin d'amener les deux parties à travailler ensemble.

Il y a en effet aujourd'hui des contacts entre Israël et certains pays arabes. Les Israéliens s'en prévalent, et nos partenaires arabes ne le cachent pas. Ces contacts tiennent en particulier à l'inquiétude que suscite, chez beaucoup de pays arabes, l'émergence de l'Iran comme nouvel acteur dans la région. Certains d'entre eux nous l'ont dit. Cependant, on note une différence d'appréciation entre les autorités palestiniennes et nos partenaires arabes : si les premières accordent une grande importance à ces contacts avec Israël, les seconds tendent à minimiser leur portée.

Vous avez tout à fait raison, monsieur Destot, de soulever la question de la viabilité économique du futur État palestinien. Dans le paquet de mesures et dans l'accord que nous souhaiterions obtenir, nous voudrions pousser aussi loin que possible le volet relatif à l'assistance économique. Notre idée est notamment de proposer une relation nouvelle et privilégiée de l'Union européenne tant avec Israël qu'avec les Palestiniens, à travers, entre autres, des accords commerciaux, une assistance économique et un partenariat en matière de recherche et d'innovation. Nous réfléchissons aussi à d'éventuels prêts de la Banque européenne d'investissement (BEI) pour aider à la mise en place d'infrastructures entre Gaza et la Cisjordanie, afin de rendre le futur État palestinien aussi viable que possible, ainsi qu'à une aide permettant de créer ce qu'on appelle les « capacités » d'un État de droit, etc. Les Japonais, qui sont déjà actifs en la matière, sont très désireux de nous aider. La Norvège réfléchit à un plan d'aide économique à l'Autorité palestinienne sur deux ans.

Soyons honnêtes : tout cela est possible – nous le faisons avec d'autres pays, certes de taille plus réduite que le futur État palestinien –, mais, pour que cela marche, il faut un accord de paix. Car on aura beau créer des débuts d'infrastructures, des entités économiques et des entreprises nouvelles, s'il y a, tous les quatre ou cinq ans, un nouveau conflit ouvert qui détruit tout, tel que celui qui vient d'avoir lieu à Gaza, on ne s'en sortira jamais : notre oeuvre sera une sorte de toile de Pénélope, perpétuellement recommencée et jamais achevée. Il faut donc un contexte et un environnement propices au développement d'un État viable. Deux éléments sont indispensables à cet égard : la paix et un engagement de la communauté internationale.

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